Rome: Réactions du Saint-Siège suite à la présentation du film «Amen» à Berlin
Une fausse interprétation de l’histoire, selon le Père Gumpel
Rome, 15 février 2002 (APIC) Le Saint-Siège réagit durement contre le film «Amen» présenté au festival de Berlin le 13 février dernier. Deux semaines avant la sortie en France du film de Costa Gavras, les évêques de France se sont par ailleurs dit «gravement blessés» par l’affiche représentant, superposées, la croix gammée et la croix chrétienne.
Inspiré de la pièce «Le Vicaire» (1963), de l’auteur dramatique allemand Rolf Hocchuth, «Amen» reprend les accusations faites contre Pie XII, de ne pas être suffisamment intervenu contre les camps de concentration durant la seconde guerre mondiale.
«Comment est-il possible qu’au nom de la liberté artistique, on puisse diffuser de telles calomnies avec de faux arguments?», demande le Père Peter Gumpel, jésuite chargé de la cause de béatification de Pie XII, dans une interview au quotidien italien «Avvenire» publiée le 15 février 2002.
«Le film de Costa Gavras met ensemble les pires lieux communs émis ces dernières années contre l’Eglise et contre Pie XII en particulier», déclare le Père Gumpel. Il déplore l’absence d’une «sérieuse documentation historique» dans la réalisation du scénario.
«Il y a des centaines de témoignages de la part de juifs qui prouvent que Pie XII a fait tout son possible pour sauver ce peuple», explique le jésuite. «Il est faux par ailleurs d’affirmer que ce pape soit resté silencieux», continue-t-il faisant allusion à une déclaration de Costa Gavras allant dans ce sens. «Pie XII a accusé à de nombreuses reprises le régime nazi et a même utilisé son argent personnel pour assister et sauver des juifs. Il suffit de lire la presse nazie pour se rendre compte que ce pape était l’homme le plus haï d’Hitler, et la presse juive de l’époque pour constater combien les juifs furent reconnaissants envers les gestes de Pie XII».
Quant à l’accusation selon laquelle Pie XII «n’a jamais prononcé le mot ’juif’», le Père Gumpel renvoie à la première encyclique du pape, intitulée «Summi Pontificatus». «Pacelli y parle clairement des ’juifs’ comme faisant partie de la famille humaine», affirme-t-il. Cette encyclique fut notamment interdite en Allemagne.
Enfin, interrogé sur le contenu du film, le postulateur de la cause de Pie XII déplore une trop grande fiction. Par exemple, «le réalisateur met en scène un prêtre jésuite de la nonciature apostolique de Berlin qui, ne trouvant aucune solidarité dans l’Eglise, se fit juif pour mourir dans un camp». «Je ne peux rien dire sur ce personnage, parce que c’est une pure invention. Mais si Costa Gavras avait voulu raconter la vie de prêtres qui ont perdu la vie pour sauver des juifs, il n’aurait eu que l’embarras du choix», conclut-il.
Radio Vatican a pour sa part qualifié le film de simple «relecture idéologique d’une tragique page de l’histoire», dans son bulletin quotidien du 14 février. La radio parle en outre de film «médiocre», «sans valeur cinématographique». «On peut se demander jusqu’où ce forçage préjudiciel risque d’obtenir l’effet négatif de dégrader une page de l’histoire au niveau de querelle inutile», a commenté l’envoyé spécial au Festival de Berlin.
Les évêques de France avait réagi quant à eux à l’affiche du film, qui doit être placardée publiquement le 19 février, une semaine avant la sortie de «Amen» dans le pays, le 27 février prochain. Dans un communiqué publié le 13 février ils dénoncent un «manque de respect inacceptable», sans toutefois s’étendre sur le contenu du scénario du réalisateur français. L’affiche représente une croix gammée superposée à une croix chrétienne. Se disant «gravement blessés», ils affirment que «cette provocation ne peut qu’être dénoncée par tous ceux qui sont attachés à la dignité humaine, à la liberté religieuse et à la liberté des croyances». (apic/imed/pr)