Les mouvements de jeunesse dénoncent

Rwanda: enrôlement forcé d’enfants par les bandes armées d’Ouganda (151190)

Bruxelles, 15novembre(APIC) «La Convention relative aux droits de l’enfant à peine ratifiée, la voici violée!»: c’est la protestation que font

entendre 17 mouvements de jeunesse et la Commission épiscopale pour la pastorale des jeunes du Rwanda. Dans une déclaration parvenue à Bruxelles et

qui porte la date du 31 octobre, les mouvements de jeunesse signataires dénoncent «l’agression perpétrée par des bandes armées issues de l’armée régulière de l’Ouganda qui, pendant un mois, a voulu détruire l’équilibre familial et social» au Rwanda.

Parmi les mouvements signataires, en majorité chrétiens, figurent les

scouts et les guides, les jeunesses ouvrières (JOC/JOCF), étudiante (JEC)

et agricole chrétienne, le Mouvement Xaveri, les Amis de Dominique Savio,

les sections «Jeunes» de la Croix-Rouge et de l’UNESCO.

Les mouvements condamnent en particulier l’enrôlement forcé et l’utilisation directe d’enfants par «ces bandes armées venues de l’Ouganda». Ils

livrent le témoignage de cinq d’entre eux, interceptés sur le champ de bataille par les forces armées du Rwanda.

Simwe a 14 ans. Berger originaire de Kagera, il raconte: «Je gardais les

vaches et j’ai été assailli par un groupe de soldats. Ils m’ont demandé de

leur servir de guide. Une fois que nous eûmes traversé la frontière, les

soldats m’ont forcé à continuer la route avec eux. Pendant trois jours,

nous avons appris à utiliser les armes. Je me suis rendu à l’armée rwandaise après la mort de cinq compagnons».

Pierre Budeyi, 15 ans, élève en sixième primaire à Kabare, était resté

en classe avec le moniteur quand les soldats y ont fait irruption pour les

emmener de force à bord d’un camion, les conduire en brousse et leur apprendre le maniement des armes. Il y a encore les témoignages d’Ignacio Mugabo, 18 ans, «élève et soldat», qui a repris du service après avoir été

enrôlé dans l’armée ougandaise en 1988; de Francis Bizimungu, 13 ans, enrôlé dans l’armée ougandaise à l’âge de 8 ans comme «éclaireur» et qui avait

regagné l’école il y a trois ans; le récit de John Binguyeneza, 16 ans:

«J’ai pris contact avec les soldats qui conduisaient des camions remorques

et qui déclaraient ramasser tous les réfugiés rwandais désireux de rentrer

chez eux. Il y avait peut-être 2’000 personnes… Les enfants étaient au

moins la moitié. Nous sommes restés deux semaines à apprendre à manier les

armes. Nous n’avions pas le choix. Il fallait savoir se battre, parce qu’on

n’avait pas le droit de reculer. A celui qui se retournait, on pointait le

fusil. C’est seulement à ce moment-là que j’ai su que j’étais en guerre».

Pas de pécule, mais de la drogue

«Dites aux autres enfants qui sont restés chez nous de fuir à l’arrivée

d’un camion militaire venant les recruter. La guerre est terrible»: c’est

le message unanime de ces cinq enfants, qui reprochent aux adultes qui les

ont recrutés de les avoir trahis et d’avoir abusé de leur innocence. En

leur faisant apprendre le maniement des armes que des gouvernements, en Europe, en Amérique ou ailleurs ont fourni. Une précision encore: tous ces

enfants le disent: ils n’ont reçu aucun pécule; par contre, on a utilisé de

la drogue et du chanvre indien pour remonter leur moral sur le champ de bataille. (apic/cip/pr)

15 novembre 1990 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 2  min.
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