La mesure va causer des déceptions et soulever des interrogations
Suisse: Les évêques suisses abolissent la pratique de l’absolution collective
Fribourg, 14 janvier 2009 (Apic) Les évêques suisses ont décrété mercredi 14 janvier l’abolition de la pratique de l’absolution collective lors des cérémonies pénitentielles dans les diocèses qui connaissaient cette façon de faire depuis des décennies. Ils suivent en cela les directives contenues dans la lettre apostolique publiée le 7 avril 2002 par le pape Jean Paul II, intitulée «Misericordia Dei – sur certains aspects de la célébration du sacrement de pénitence» (*).`Des réactions ont été enregistrées peu avant Noël dans les paroisses de St-Pierre à Fribourg et à Villars-sur-Glâne, où plus de 200 personnes ont signé une «pétition» destinée à Mgr Genoud.
Le pape Jean Paul II rappelait alors que «la confession individuelle et intégrale avec l’absolution constitue l’unique mode ordinaire par lequel un fidèle conscient d’un péché grave est réconcilié avec Dieu et avec l’Eglise; seule une impossibilité physique ou morale excuse de cette confession, auquel cas la réconciliation peut être obtenue aussi selon d’autres modes».
Jean Paul II estimait que cette mesure «apparaît particulièrement nécessaire du fait que l’on observe dans certaines régions une tendance à l’abandon de la confession personnelle, ainsi qu’un recours abusif à l’absolution générale ou collective, en sorte que celle-ci n’apparaît pas comme un moyen extraordinaire dans des situations tout à fait exceptionnelles. En raison d’une extension arbitraire de l’obligation de grave nécessité, on perd de vue pratiquement la fidélité à l’aspect divin du sacrement, et concrètement la nécessité de la confession individuelle, ce qui entraîne de graves dommages pour la vie spirituelle des fidèles et pour la sainteté de l’Eglise’».
Dans le même sens, la Conférence des évêques suisses (CES), faisant suite à la sollicitation du «motu proprio» de Jean Paul II «Misericordia Dei», relève que les célébrations pénitentielles communes revêtent une signification particulière. Mais le lien établi entre les célébrations pénitentielles et l’absolution collective dans plusieurs diocèses de Suisse (la pratique était différente notamment dans les diocèses de Sion et de Lugano et sur le territoire de l’Abbaye de St-Maurice), «a parfois empêché à cette forme de célébration de s’épanouir dans sa configuration originaire».
Les évêques suisses rappellent dans leur «décret concernant le canon 961» du code de droit canonique le libellé de ce canon qui prescrit que l’absolution ne peut pas être donnée par mode général à plusieurs pénitents ensemble, sans confession individuelle préalable, sauf danger de mort ou s’il y a une grave nécessité. L’Eglise connaît deux formes ordinaires pour la réception du sacrement de réconciliation: la confession individuelle et la célébration communautaire avec aveu personnel et absolution individuelle.
La CES relève que la célébration pénitentielle avec absolution collective n’est pas une des formes ordinaires de la célébration de la réconciliation. «Bien plus, elle en est l’exception», écrit-elle en citant le canon 960. «Seul le danger de mort pourrait justifier à l’heure actuelle, dans les diocèses de Suisse, l’octroi de l’absolution collective», les autres «cas extraordinaires» évoqués jusqu’ici en Suisse pour l’octroi de l’absolution collective ont été explicitement écartés par la lettre apostolique de Jean Paul II «Misericordia Dei». Les évêques suisses rappellent donc que l’aveu personnel et complet et l’absolution sont le seul chemin ordinaire par lequel un fidèle conscient d’un péché grave se réconcilie avec Dieu et avec l’Eglise. Ils décrètent que dans les diocèses et abbayes territoriales de leur compétence, «la situation d’urgence justifiant l’octroi de l’absolution collective n’est pas donnée».
Dans une réflexion accompagnant le décret des évêques suisses, l’abbé François-Xavier Amherdt, professeur de théologie pastorale à l’Université de Fribourg, relève qu’il n’est pas question à cette occasion de supprimer les célébrations pénitentielles communautaires, telles qu’elles se vivent notamment aux temps forts de l’année liturgique comme dans les temps de l’Avent et du Carême ou à la Toussaint.
Le professeur confirme que de telles célébrations «ont une réelle valeur en elles-mêmes – quoique n’offrant pas le sacrement de pénitence en tant que tel. Il vaut ainsi la peine de les maintenir et de les développer, tout en donnant la possibilité de recevoir l’absolution individuelle avec aveu personnel des fautes». Il note que le décret des évêques suisses porte sur l’avenir et que par conséquent il ne remet pas en cause la validité des absolutions collectives précédemment octroyées. «Que les fidèles et les agents pastoraux soient donc parfaitement rassurés à ce propos !»
L’abbé Amherdt admet que la suppression de l’absolution collective «va sans doute causer des déceptions et soulever des interrogations», mais estime-t-il, «elle peut néanmoins susciter une créativité renouvelée pour vivre les différentes manières de nous ouvrir au trésor de la miséricorde divine». Notons d’ores et déjà qu’avant Noël, lors des célébrations pénitentielles avec absolutions collectives célébrées dans les paroisses de St-Pierre à Fribourg et à Villars-sur-Glâne, plus de 200 personnes ont signé une «pétition» destinée à l’évêque diocésain, Mgr Bernard Genoud, pour demander le maintien des célébrations pénitentielles avec absolution collective. Les auteurs de la pétition précisaient que «nos prêtres ne s’opposent pas à cette démarche». Des réactions dans les paroisses ne vont sans doute pas tarder. JB/Com
(*)Cf.www.vatican.va/holy_father/john_paul_ii/motu_proprio/documents/hf_jp-ii_motu-proprio_20020502_misericordia-dei_fr.html (apic/be)