Bhoutan: Ouverture des deuxièmes élections parlementaires de l'histoire du pays
Sur fond de discriminations ethniques et religieuses
Thimbu, 9 mai 2013 (Apic) Les citoyens du Bhoutan élisent actuellement leurs représentants au Parlement bicaméral, pour la seconde fois de l’histoire de leur pays. Mais les membres des minorités ethniques et religieuses du petit royaume de l’Himalaya subissent des discriminations et ne peuvent que difficilement se rendre aux urnes, rapporte le 7 mai 2013 l’agence d’information des Missions Etrangères de Paris, Eglises d’Asie.
Le 25 avril, les électeurs bhoutanais ont choisi parmi 70 candidats sans appartenance partisane leurs représentants à la Chambre haute, soit 20 sièges sur 25 (le roi en désignant cinq). Les partis politiques entreront en lice pour les élections de la Chambre basse du Parlement, disputées en deux tours d’ici la fin juin.
Lors des premières élections législatives du Bhoutan, en 2008, seuls deux partis s’étaient présentés. Bien que trois nouvelles formations politiques aient surgi depuis, il fait peu de doute aux yeux des analystes que le «Druk Phuensum Tshogpa Party» (DPT), actuel parti au pouvoir, sera réélu.
Un simulacre de démocratie
Pour Mathew Joseph C., de l’»Academy of International Studies» à New Delhi, ces nouvelles élections n’ont pour but que de «duper la communauté internationale» et la conforter dans l’idée que le Bhoutan est une démocratie, alors que le pays est en réalité «complètement contrôlé par la monarchie et l’élite dirigeante de l’ethnie majoritaire bouddhiste des Ngalongs». La forte discrimination qui pèse sur les minorités, comme sur l’ethnie d’origine népalaise et majoritairement hindouiste des Lhotshampas, a empêché bon nombre des habitants du Bhoutan de se rendre aux urnes. Le cas des Lhotshampas est régulièrement montré du doigt par la communauté internationale. Elle reproche au Bhoutan de maintenir ces populations dans une situation de sous-citoyenneté. Les représentants de cette ethnie sont assimilés par l’administration à des immigrés clandestins ou des étrangers. Cela les prive de la plupart de leurs droits, dont celui de voter.
Les quelques communautés chrétiennes du Bhoutan étant généralement issues de cette ethnie, elles se retrouvent doublement stigmatisées, dans un pays où le bouddhisme vajrayana est religion d’Etat et le christianisme perçu comme particulièrement menaçant pour l’identité nationale.
Discrimination de la petite minorité chrétienne
Si la liberté de religion est inscrite dans la nouvelle Constitution bhoutanaise promulguée en 2008, le prosélytisme, la diffusion de bibles, la construction d’églises, d’écoles ou d’autres institutions chrétiennes sont prohibés. L’entrée des religieux sur le territoire est interdite et le culte chrétien doit être pratiqué au sein de la sphère privée. Les chrétiens n’ont pas le droit non plus d’avoir des cimetières pour inhumer leurs morts, ce qui conduit à des troubles interreligieux récurrents.
En dépit d’un discours officiel qui se veut rassurant, une loi anti-conversion a de plus été votée en 2010 par le Parlement, visant tout particulièrement la communauté chrétienne. Elle punit de trois ans de prison ferme «toute tentative de conversion par la force ou par quelque autre moyen que ce soit». Une définition dont le flou permet de sanctionner de simples actes d’assistance ou de charité en les assimilant à des tentatives de corruption ou de prosélytisme.
Selon les statistiques officielles, 75 % des 700’000 Bhoutanais sont bouddhistes, 22 % hindous – la plupart d’origine népalaise –, le reste de la population se partageant entre chrétiens et autres confessions. Des sources locales, essentiellement protestantes, annoncent un nombre de chrétiens oscillant entre 3’000 et 15’000, parmi lesquels se trouveraient quelques centaines de catholiques.(apic/eda/rz)