U.C.L. : hommage au professeur Roger Aubert pour ses 80 ans Amis et anciens

élèves saluent un historien «irremplaçable» =

Louvain-la-Neuve, 29 juin (CIP)

Des amis et anciens élèves de Roger Aubert, professeur émérite de l’U.C.L.,

lui ont offert, pour ses 80 ans, un livre d’hommage réunissant plusieurs

articles que ce maître de l’histoire de l’Eglise a consacrés au plus

célèbre des archevêques belges, le cardinal Mercier (1851- 1926). Le livre

a été remis au professeur Aubert le 25 juin, au cours d’une séance qui a

réuni à Louvain-la-Neuve près de 200 personnes, dont plusieurs

personnalités scientifiques.

De nombreux collègues du professeur Aubert, tant de la Faculté de

Philosophie et Lettres que de la Faculté de Théologie de l’U.C.L., se sont

associés à cet hommage. Les autorités de l’U.C.L. étaient représentées par

le prorecteur Jean Costermans. Plusieurs évêques étaient excusés.

La carrière universitaire de Roger Aubert est aussi longue que féconde. Le

professeur Costermans ne trouve pas exagéré de dire que le maître historien

a passé 65 ans à l’U.C.L., où il est entré à 17 ans, déjà nanti d’un

diplôme de candidature en philosophie et lettres, obtenu aux Facultés

St-Louis à Bruxelles. Né le 16 janvier 1914, cet ancien du Collège

St-Boniface à Ixelles avait terminé ses humanités à 15 ans.

R. Aubert n’a pas 20 ans lorsqúil obtient, en 1933, un doctorat en

philosophie et lettres à l’U.C.L. Il entre alors au Séminaire Léon XIII à

Louvain, puis rejoint le Grand Séminaire de Malines. Ordonné prêtre en

1938, il continue des études à l’U.C.L., où il présente en 1942 une

nouvelle thèse de doctorat, cette fois en théologie.

Commence alors une carrière de 40 années d’enseignement : de 1944 à 1952 au

Grand Séminaire et au Séminaire St-Joseph de Malines, puis de 1952 à 1983

comme professeur ordinaire à l’U.C.L.

En 1945, le jeune professeur soutient à Louvain une brillante thèse de

maîtrise en théologie sur «Le problème de l’acte de foi». Publiée avec le

sous-titre «Données traditionnelles et résultats des controverses

récentes», l’étude connaîtra quatre éditions. Roger Aubert, nommé dès 1951

chanoine honoraire à Malines, se fait davantage connaître par son étude de

1952 sur «Le Pontificat de Pie IX». Cette recherche apporte un sang neuf à

l’histoire de l’Eglise, alliant de solides connaissances théologiques à la

rigueur critique de l’historien.

A l’U.C.L., Roger Aubert prend bientôt la direction de la prestigieuse

«Revue d’histoire ecclésiastique» et poursuit l’édition du «Dictionnaire

d’histoire et de géographique ecclésiastiques». Il signera dans l’une 6500

notices et dans l’autre 4000 articles.

«Il n’y a pas deux sortes d’histoires»

Des historiens aux théologiens, l’éventail des hommages rendus au maître de

l’histoire ecclésiastique a visiblement ému celui qui a formé au moins

trois générations de spécialistes de l’une et l’autre disciplines.

Chez Roger Aubert, le doyen de la Faculté de Lettres, Georges Jacques

relève d’abord la rigueur d’appréciation et la rapidité d’exécution. Son

dynamisme et sa vigueur lui permettent même de porter à bout de bras la

collection de «Recueil de travaux d’histoire et de philologie».

Le Père Jean-Marie Sevrin, doyen de la Faculté de Théologie, exprime une

affectueuse gratitude envers le maître qui a si bien réussi et enseigné la

«symbiose» entre les disciplines théologique et historique, au point que

l’histoire peut être aussi reconnue comme «maîtresse» en théologie.

Soucieux du détail mais sans perdre de vue le panorama, théologien

catholique engagé mais partisan d’oecuménisme et promoteur de rapports plus

ouverts entre l’Eglise et le monde, Roger Aubert allie «la rigueur de la

foi et la rigueur de l’humanité». Le Père Sevrin salue donc en ce maître

octogénaire «un jeune prophète». «Vous êtes irremplaçable, lui dit-il. Mais

il faut que vous ayez des continuateurs.»

Le professeur Jean Pirotte, qui dirige l’Unité d’histoire contemporaine à

l’U.C.L., évoque l’énorme production scientifique de R. Aubert. En plus des

notices et articles signés dans la «Revue d’Histoire Ecclésiastique» et le

«Dictionnaire d’Histoire et de Géographie Ecclésiastiques», on lui doit 500

publications majeures, reflet d’une diversité de préoccupations et d’une

grande largeur de vues. Les étudiants dont il a dirigé plusieurs centaines

de mémoires et une cinquantaine de thèses de doctorat ont appris et

apprécié chez leur maître l’humilité du chercheur, sa soumission aux faits,

son avancée par petits pas, son éveil critique permanent, tout en laissant

chacun progresser dans sa liberté de recherche. De cet homme de travail

opiniâtre, d’ouverture, de fidélité lucide et de liberté, Jean Pirotte se

plaît à rappeler cette phrase : «Pas plus qúil n’y a deux sortes de

mathématiques, l’une qui serait chrétienne et l’autre pas, il ne peut pas

non plus y avoir deux sortes d’histoires de l’Eglise, l’une inspirée par la

théologie et l’autre pas.»

Roger Aubert est docteur honoris causa de quatre universités étrangères et

membre de plusieurs sociétés savantes. Professeur émérite de l’U.C.L.

depuis 1983, il continue la plupart de ses activités scientifiques.

«Un prélat d’avant-garde»

L’ouvrage remis en hommage au professeur Aubert s’intitule : «Le cardinal

Mercier (1851-1926. Un prélat d’avant-garde» (1). Il réunit 14 études

originales consacrées par l’éminent historien au plus fameux des évêques

wallons, haute figure de résistance lors de la première guerre mondiale et

pionnier du dialogue oecuménique, puisque le cardinal Mercier présida de

1919 à 1926 les célèbres «Conversations de Malines» qui renouèrent le

dialogue entre anglicans et catholiques.

Les articles de Roger Aubert éclairent la personne et l’action du cardinal

Mercier sous divers angles. Ils sont précédés d’un hommage à leur auteur.

L’ouvrage contient aussi des esquisses biographiques de R. Aubert et une

bibliographie de ses travaux.

Lors de la récente rencontre à Louvain-la-Neuve, le professeur Aubert a

consacré au cardinal Mercier une leçon magistrale, où il a retracé de façon

concise mais fine la personnalité du «prélat d’avant-garde». L’historien

qui s’était déjà montré fort touché par l’hommage qúon lui avait réservé,

n’a pas caché non plus son émotion en évoquant la mort du cardinal Mercier

qui, la veille, avait remis son anneau pastoral à Lord Halifax, son

partenaire privilégié du dialogue renoué avec l’Eglise anglicane.

———– (1) Ouvrage publié par Jean-Pierre Hendrickx, Jean Pirotte et

Luc Courtois, co-édition Academia/Presses Universitaires de Louvain, 640

p., 2900 FB.

n

30 juin 1994 | 00:00
par webmaster@kath.ch
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