Fribourg: Le Centre Œcuménique de Pastorale spécialisée (COEPS)

Une équipe dynamique au service des personnes avec handicap

Fribourg, le 13 avril 2010 (Apic) Le Centre œcuménique d’animation pastorale spécialisée (COEPS) est un service du vicariat épiscopal du canton de Fribourg qui vise à être auprès des personnes en situation de handicap mental, psychique, sensoriel, pour partager avec elles, dans un esprit œcuménique la Parole de Dieu. Le Coeps s’adresse aussi bien aux enfants, aux adolescents qu’aux adultes. Il concerne environ un millier de personnes handicapées. Rencontre avec les responsables : Nathalie Jaccoud, responsable, et le Père Jean-Claude Pariat, aumônier.

Le Centre œcuménique de pastorale spécialisée est né, dans les années 1960, sous l’égide du frère Blanchard, capucin, soucieux du sort des handicapés. Il a mis en route les communautés de l’Arche et de Foi et Lumière. Dicastère du vicariat épiscopal, il compte une vingtaine de personnes actives. La responsable, Nathalie Jaccoud, diplômée en pédagogie curative, décrit son service comme essentiellement destiné aux personnes nées avec un handicap mental. Il peut arriver que certaines personnes concernées par le centre soient polyhandicapées. Mais le Coeps est avant tout envoyé auprès de personnes vivant un trouble mental. S’il peut y avoir des troubles associés, le Coeps n’est pas présent pour des personnes souffrant d’une pathologie accidentelle, comme dépression ou devenues paraplégiques suite à un accident, par exemple.

Les activités du Coeps se répartissent en deux secteurs : la catéchèse dans les écoles spécialisées, où se rendent chaque semaine les catéchistes. Cette présence en institution implique aussi la préparation des enfants aux différents sacrements: baptême, première communion, confirmation. Lors des grands moments de l’année liturgique, les animateurs organisent des célébrations dans les écoles, pour pouvoir vivre quelque chose d’un peu différent de ce qui a lieu habituellement. D’autre part, une équipe travaille dans une dizaine d’institutions pour adultes du canton de Fribourg. Deux assistants pastoraux y sont présents, l’un catholique, l’autre réformé. Le Père Pariat y est présent pour les célébrations à Noël, Pâques et au mois de juin où a lieu une fête pour l’ensemble de l’institution.

La catéchèse des personnes handicapées

Pour les enfants, la catéchèse a lieu dans les institutions. Il n’y a pas de travail à domicile, sauf exception. Ainsi le Coeps est présent aux Buissonnets à Fribourg, à Romont, à Bulle. Pour Jean-Claude Pariat, l’important est de laisser aux catéchistes la place de l’évangile, de l’animation; il ne prend le relais que si elles le veulent. Les animations partent toujours d’un récit biblique où il y a une histoire, différents personnages, des lieux, ce qui permet aux personnes de comprendre à leur manière ce qui est en jeu.

Nathalie Jaccoud, citant la Charte du Coeps, affirme qu’en toute personne il y a une part de spiritualité. Pour elle, durant les animations, quelque chose se passe, «au-delà de ce que l’on peut dire ou faire, avec le matériel apporté et notre propre réflexion.» Elle précise que pour entrer en contact avec les personnes handicapées, elle utilise beaucoup les symboles, comme la bougie. Il s’agit de rendre concrets les récits en amenant des objets que les personnes peuvent voir, toucher, manger. Il s’agit de faire passer l’Evangile par les sens et de ne pas rester dans le domaine de la parole, qui n’est pas forcément leur canal de communication. L’exemple de la bougie est en ce sens révélateur: le fait de se la passer de l’un à l’autre, de la toucher, de regarder la flamme, d’en sentir la chaleur, fait que quelque chose se passe.

Avec les enfants, la symbolique biblique joue un très grand rôle: les catéchistes laissent la parole aux enfants, «en les prenant là où ils sont dans leur foi, sans vouloir les tirer en avant». L’important, pour Nathalie Jaccoud, c’est d’aller au rythme des enfants et de les accompagner dans leur chemin de foi.

Les célébrations organisées par le Coeps

Pour l’aumônier, les célébrations sont toujours à la fois vivantes et déconcertantes. Il cite le cas d’une personne qui, lors d’une cérémonie, ne cesse de chuchoter et de se promener dans la salle et qui, subitement, se remet à prier. Ou celui d’une autre personne qui reprend systématiquement le dernier mot dit par le prêtre et le dit trois fois plus fort. Il reconnaît avoir été déconcerté au début de son ministère et qu’il s’est posé la question de savoir ce qu’il faisait là. Puis il a compris que cette expression était la manière de prier des personnes qu’il rencontrait et qu’il fallait simplement écouter ces personnes. Il se dit aussi toujours aussi surpris de voir qu’au moment de la consécration, le silence intervient comme par enchantement. Mais il ajoute qu’il faut toujours rester très concret et se laisser dire des choses par ces personnes pleines de vie. Il ne s’agit pas, dit Nathalie, de les formater, mais de partager avec elles et avec Dieu un peu de son temps. La conviction qui anime les gens du Coeps est que toutes les personnes rencontrées sont aimées de Dieu.

Les célébrations avec les adultes sont de rares moments où les handicapés ont des activités en commun, précise Nathalie. Ces animations spirituelles sont aussi des temps où ils vivent quelque chose qui dépasse ce qu’ils vivent quotidiennement et qui leur permettent de s’exprimer librement. Cela déconcerte parfois les éducateurs et responsables d’institutions qui se demandent ce qui se passe et reconnaissent le travail effectué, même de la part de personnes qui ne sont pas proches de l’Eglise.

Animations spirituelles

Le Coeps suit le rythme des institutions pour les animations spirituelles: certaines en ont une par mois, d’autres tous les quinze jours, en plus des grandes célébrations lors des fêtes religieuses. Ce qui frappe Jean-Claude, c’est que lors de ces cérémonies, il n’y jamais entendu un handicapé dire à un autre «Tu me gênes.» Il règne au contraire une convivialité et de fraternité, qui se manifeste aussi lors du décès de l’un d’entre eux.

L’aumônier peut affirmer que «les institutions dans lesquelles nous allons sont de bons milieux de vie». C’est comme une vraie famille.

Service œcuménique

Jean-Claude tient à préciser que le service est œcuménique parce que les institutions n’ont rien à faire du fait que ce soit un prêtre ou un pasteur qui passe voir les personnes, mais surtout parce que les gens souffrant d’un handicap «n’ont pas à porter encore les disputes des Eglises historiques dans leur vie.» De plus, le service est souvent confronté à la question des funérailles. Dans ces cas, il y a deux familles, celle du sang et celle de l’institution, qui devient, en quelque sorte une «belle-famille».

Camp d’été

Jean-Claude tient à préciser que le Coeps organise chaque année, en collaboration avec la pastorale des jeunes catholiques et la pastorale des jeunes réformés, un camp d’été d’une semaine proposé à toutes les institutions où le Coeps est présent. Cela permet aux personnes de rencontrer des gens venus d’un autre horizon que le leur. Le camp est habituellement constitué à part égale de personnes handicapées et de jeunes de 15 à 17 ans venus des mouvements de jeunesse. Durant cette semaine, les jeunes accompagnent les personnes handicapées. Ce camp est à chaque fois lié à un thème biblique.

Présence à Festibible

Lors de la manifestation Festibible du mois de septembre à Fribourg, le Coeps aura une «tente dans le «village biblique», à la place Georges-Python. Il y proposera des jeux bibliques pour tout public. En parallèle, la communauté des sourds aura aussi sa tente «café-signe», où ce seront les malentendants et sourds qui feront le service. Il y aura également, dans un deuxième temps, l’essai d’un mini-cours sur le langage des signes, toujours en lien avec Festibible.

Un cours de catéchèse aux Buissonnets à Fribourg

Une catéchiste enthousiaste, 4 enfants handicapés, un observateur.

Durant une heure, dans une salle lumineuse, 4 enfants ont, non pas suivi un cours de caté, mais fait le caté. D’entrée de jeu, l’observateur est devenu partie prenante du dialogue, les enfants lui demandant «qui tu es?», mais tout de suite aussi il s’est pris à la «leçon de catéchèse». Avec un matériel concret, de nombreuses illustrations des scènes bibliques relatives au Dimanche des Rameaux, à la Semaine Sainte et à Pâques, la catéchiste a amené les enfants sur le sens du texte: chacun y est allé de son interprétation, de ses remarques, parfois déconcertantes, mais toujours pertinentes. Ils vivaient quelque chose et étaient heureux de le partager.

Ici, pas de discipline scolaire: chacun y va de son mot, du plus banal au plus compliqué. Mais chaque enfant se sent à l’aise et s’exprime en toute liberté. Les documents présentés leur permettent d’exprimer leurs questions, en toute simplicité, et ce qu’ils savent de leur foi. Il règne surtout un climat de fraternité.

Quand on écoute Nathalie et Jean-Claude parler des personnes qui leur sont confiées, on a l’impression qu’ils parlent d’elles comme de leurs enfants :

« Et ils ont aussi l’art de nous recentrer sur l’essentiel. Une personne handicapée avec des grosses lunettes est venue vers moi et m’a dit : « Dieu, il est dans mon cœur » Je lui ai dit oui ; elle a poursuivi : « il est aussi dans ton cœur ». Oui. Sa réponse : « Alors pourquoi tu es triste ? » Et elle est partie. C’était effectivement un jour où je n’étais pas en superforme. Quand on arrive dans une institution, on y vient avec tout ce qu’on est. Et cette personne a tout de suite vu que ce n’était pas comme d’habitude, qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas. »

Témoignage d’une catéchiste

Nous sommes une équipe qui animons les rencontres de catéchèse dans les classes d’enseignement spécialisé du canton de Fribourg, une fois par semaine. Le caté se déroule en classe ; la prière y est un moment essentiel.

De petits effectifs permettent de donner à chaque enfant sa place, d’être attentif à lui et d’accueillir toutes les richesses qu’il nous offre.

Etre à l’écoute de l’autre dans sa fragilité, c’est l’accueillir avec ma fragilité pour ensemble découvrir l’Amour de Dieu pour chacun de nous, vivre l’Alliance.

Notre catéchèse se centre sur la Parole de Dieu.

Dans une première étape, catéchètes et enfants engrangeons des récits bibliques dans nos mémoires et dans nos cahiers de caté. L’image biblique nous guidera dans notre découverte. Chaque étape peut durer plusieurs rencontres.

Puis nous donnons la parole à la Parole. Les enfants échangent sur le texte : ils découvrent des liens, des images déjà rencontrées dans d’autres récits bibliques, dans leur vie, dans la liturgie ou dans les sacrements. Les plus grands s’étonneront des bizarreries. Cette étape nous conduit à la prière, à la profession de foi.

Cette démarche permet de progresser au rythme du développement de l’enfant tout en étant guidée par la catéchète. Elle applique une pédagogie bien précise développée par Claude et Jacqueline Lagarde : La catéchèse biblique symbolique. Cette catéchèse a séduit les catéchètes du COEPS car elle aide l’enfant, l’adolescent ou l’adulte à passer d’une compréhension rationnelle et extérieure du récit biblique à la prière, c’est-à-dire à une vie en Alliance avec Dieu.

Ce cheminement prend du temps ! Mais au COEPS nous prenons le temps : temps de vivre ensemble, de découvrir la Parole, de la partager, de la prier, de la célébrer unis par un seul et même Esprit. Madeleine Portmann Coudray, catéchiste.

13 avril 2010 | 14:35
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture: env. 8 min.
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