«Une pastorale sans mission canonique serait une rupture dans le système dual»
Luis Varandas, vicaire général pour Zurich-Glaris (diocèse de Coire), estime que le nouveau règlement d’engagement de l’Église cantonale zurichoise constitue une «solution équitable». Il salue le fait que les agents pastoraux n’aient plus à craindre que leur vie relationnelle ait une incidence sur leur emploi.
Regula Pfeifer, kath.ch / traduction et adaptation: Raphaël Zbinden
L’Église catholique dans le canton de Zurich a décidé que la vie privée des agents pastoraux ne devait plus être prise en compte pour leur embauche ou leur licenciement. Êtes-vous d’accord avec ce principe?
Luis Varandas: C’est ce qu’a décidé le parlement de l’Église concernant l’emploi des collaborateurs ecclésiastiques dans le service de la proclamation. Je trouve cela juste que ceux-ci n’aient plus à craindre pour leur vie relationnelle ou leur poste.
Soutenez-vous l’idée que les collaborateurs qui, selon le droit canonique, vivent dans une situation dite irrégulière – par exemple dans un couple homosexuel – puissent être normalement employés dans l’Église catholique?
L’objectif de la motion et de sa mise en œuvre dans le règlement sur l’emploi est de protéger les collaborateurs. Ils ne doivent pas être automatiquement licenciés en raison d’un retrait de missio canonica. Lors d’un tel retrait, la crainte était jusqu’à présent que cela soit lié à la situation personnelle.
Les évêques suisses se sont récemment exprimés sur la vie relationnelle des agents pastoraux. Ils estiment que cela ne relève pas de la sphère privée. Selon eux, la crédibilité de l’Église reposerait sur la crédibilité de ses pasteurs, qui reposerait elle-même sur un «mode de vie conforme à l’Évangile». Ce qui touche notamment à «la gestion des relations» et à «l’approche de la sexualité».
Les évêques examinent la situation en tant que responsables de la mission des agents pastoraux. La corporation ecclésiastique, en revanche, s’occupe des engagements. Un collaborateur ou une collaboratrice qui travaille dans le service de la proclamation a besoin des deux.
«Un licenciement a toujours eu lieu d’un commun accord, car les parties concernées ont compris que cela ne fonctionnait plus entre elles»
En tant que vicaire général, appliqueriez-vous donc les critères formulés par les évêques pour l’octroi de la missio canonica…?
Je ne peux pas attribuer personnellement une mission, je ne peux le faire qu’en concertation avec l’évêque. Bien sûr, je ne peux pas attribuer une mission qui serait en contradiction avec la volonté de l’évêque. Avec les nouvelles dispositions en matière d’emploi, la corporation a construit le meilleur pont possible entre les deux systèmes, comme cela a également été dit lors du synode. Nous fonctionnons selon un système dual. Nous devons toujours garder à l’esprit les exigences de chaque partie et trouver un terrain d’entente. C’est ce qu’a tenté de faire le groupe de travail mixte qui a élaboré la révision du règlement d’engagement. Et je pense qu’il y est plutôt bien parvenu.
Désormais, l’autorité de nomination n’est plus tenue de licencier automatiquement un employé lorsque l’évêque lui a retiré la missio. L’Église canonique, c’est-à-dire l’évêque, ne perd-elle pas ainsi de son influence?
Le spectre du retrait de la missio revient sans cesse sur le tapis. Je ne saurais citer de cas où un retrait unilatéral de la missio aurait eu lieu de facto, c’est-à-dire que l’Église canonique aurait retiré la missio à quelqu’un et exigé son licenciement de la part de l’employeur. Le licenciement a toujours eu lieu d’un commun accord, car les parties concernées ont compris que cela ne fonctionnait plus entre elles.
«Un agent pastoral exercera toujours son activité sur mandat de l’évêque»
L’évêque a toujours la possibilité de dire: cette personne ne reçoit plus de mission de ma part, ou même de retirer activement la mission. Bien sûr, cela n’est possible que pour des motifs sérieux.
Il existe désormais un nouveau système avec des justifications, des décisions et la possibilité de déposer un recours. Trouvez-vous ce système équilibré?
Comme je l’ai dit, c’est la meilleure solution possible. Le processus est clairement réglementé, et tout le monde sait qu’il doit s’y conformer. Je trouve que c’est une solution équitable.
Ne pourrait-il pas arriver que vous, en tant que vicaire général, ou l’évêque, soyez écartés de la décision visant à déterminer si une personne est apte à exercer une fonction pastorale?
Si l’on étudie le texte du règlement révisé sur les engagements, cela n’est pas possible. L’évêque – ou son représentant – reste toujours compétent pour la mission du service de la proclamation. Avec le nouveau règlement, la paroisse n’est certes pas tenue de licencier sans autre clarification. Mais elle est censée de facto trouver un nouvel emploi à la collaboratrice ou au collaborateur qui se retrouverait sans mission de la part de l’évêque.
Il n’y aura donc pas d’agents pastoraux qui exerceront leur activité sans avoir reçu de missio?
Non. Cela constituerait une rupture totale avec le système dual. Aucune corporation ne peut approuver cela. Un agent pastoral exercera toujours son activité sur mandat de l’évêque.
Cependant, le nouveau règlement sur les engagements stipule uniquement qu’en cas de retrait de la missio, l’autorité compétente n’est plus tenue de résilier automatiquement le contrat de travail. Il ne précise pas que la personne concernée ne peut plus exercer la fonction d’agent pastoral et doit donc assumer une nouvelle tâche.
La responsabilité de la proclamation reste du ressort de l’évêque ou, comme le précise le texte de loi, de l’instance ecclésiastique. L’engagement se fait d’un commun accord; si cet accord n’existe plus, l’engagement dans le service de la proclamation ne peut être maintenu. (cath.ch/kath/rp/arch/rz)
La question du mode de vie des agents pastoraux agite l’Église en Suisse en ce moment. La Conférence des évêques suisses (CES), qui représente la composante canonique dans le système dual, a récemment publié une prise de position rappelant que le mode de vie des agents pastoraux devait être en adéquation avec les principes prônés par l’Église, tout en suggérant un discernement spirituel au cas par cas.
La Conférence centrale catholique romaine de Suisse (RKZ), qui représente l’Église de droit ecclésiastique, estime de son côté que le mode de vie des employés de l’institution ne doit pas interférer avec leur engagement. Une approche désormais également adoptée par l’Église catholique dans le canton de Zurich (droit ecclésiastique).
En Suisse, les agents pastoraux sont généralement employés par une paroisse, une communauté ecclésiastique ou une organisation cantonale, qui relèvent du droit public cantonal ou du droit associatif. Cela signifie que le contrat de travail n’est pas signé avec le diocèse. Les structures de droit public peuvent, en principe, engager du personnel sans dépendre directement du droit canonique. Cependant, pour exercer une responsabilité pastorale, l’agent a besoin de la missio canonica qui garantit qu’il représente l’Église dans la communion avec l’évêque. L’agent pastoral en Suisse se trouve donc à l’intersection de deux légitimités. RZ





