El Salvador: La victoire de l'ex-guérillero Sánchez Cerén confirmée par le Tribunal électoral
Une société divisée en deux camps difficilement réconciliables
San Salvador, 13 mars 2014 (Apic) L’ancien commandant guérillero Salvador Sánchez Cerén, actuel vice-président de la République du Salvador, a été désigné jeudi 13 mars par le Tribunal suprême électoral vainqueur de l’élection présidentielle du dimanche 9 mars 2014. Le nouveau président centroaméricain prendra ses fonctions le 1er juin prochain.
Le candidat du parti de gauche FMLN (Front Farabundo Martí de Libération Nationale, ancienne guérilla convertie en parti politique) l’a emporté par 50,11% des voix, sur près de 3 millions de suffrages exprimés. Norman Quijano, 67 ans, ex-maire de San Salvador, appartenant au parti de la droite dure ARENA (Alliance républicaine nationaliste), a recueilli 49,89% des voix.
Bénéficiant du soutien financier de l’Alliance bolivarienne pour les Amériques (ALBA), lancée par le défunt président vénézuélien Hugo Chavez, qui apporte, grâce à l’argent du pétrole, une aide non négligeable au FMLN, Sánchez Cerén, 69 ans, fait partie de la vieille garde marxiste du mouvement. Durant la guerre civile (de 1979 à 1992), il porte le nom de «Comandante Leonel Gonzales» et se bat dans la région montagneuse du département de Chalatenango, au nord-ouest de ce petit pays densément peuplé de 20’742 km2. L’ancien professeur fait partie, en 1992, des signataires des accords de paix de Chapultepec, au Mexique, qui ont mis fin à un conflit qui a fait près de 100’000 morts. Son vice-président, Oscar Ortiz, maire de Santa Tecla, est considéré comme un réformiste au sein du FMLN.
Le perdant dénonce une opération de «style chaviste»
Dimanche dernier à 19h00, après une journée d’élection déroulée dans le calme, Norman Quijano s’est empressé de se déclarer vainqueur, avec 50,32 % des voix contre 49,68 % pour le FMLN. Il a refusé d’attendre les premières déclarations d’Eugenio Chicas, président du Tribunal suprême électoral, annoncées pour 22h00, faisant ainsi monter la tension. Le parti avait mobilisé près de 100’000 de ses militants pour surveiller le bon déroulement de l’élection, qui se sont tenues en présence de nombreux observateurs internationaux, dont ceux qui avaient été envoyés par l’OEA, l’Organisation des Etats américains.
Quand il a vu sa «victoire» contredite par les données fournies par le Tribunal suprême électoral, le candidat de droite a repris ses accents de «guerre froide», en accusant cette institution de l’Etat de lui avoir volé la victoire. Il a dénoncé une opération de «style chaviste», en allusion au régime en place au Venezuela.
Devant des militants chauffés à blanc, Norman Quijano a parlé de vaste fraude électorale et en a même appelé à l’armée, ce qui n’a pas bien passé dans un pays qui se relève de décennies de coups d’Etat et de dictatures militaires sanglantes. Alors que la loi ne le prévoit pas, il a cependant exigé le recomptage «une à une» des voix, étant donné le faible avantage du FMLN, qui n’était que de 6’364 votes. Avant de prendre sa décision finale, le Tribunal suprême électoral a cependant vérifié l’ensemble des procès-verbaux émis par les locaux de vote.
Cerén appelle l’opposition au dialogue
Des milliers de militants d’ARENA, aux cris de «Patrie oui, communisme non… El Salvador sera la tombe des rouges» – repris de l’hymne de leur parti – ont tenté de s’approcher des bureaux du Tribunal électoral, logés à l’Hôtel Crow Plaza, pour faire pression sur les réviseurs.
Entonnant l’hymne national, portant des chapelets, ils récitaient le «notre père», entrecoupé de slogans hostiles au gouvernement. Au même moment, Norman Quijano demandait l’annulation pure et simple de l’élection, affirmant que «sa victoire légitime» lui avait été volée. Le représentant de la droite dure a cependant appelé ses partisans à manifester sans violence.
Un «agenda» pour gouverner le Salvador
Conscient de sa très faible majorité et de la dangereuse division de la société salvadorienne en deux blocs très antagoniques, Sánchez Cerén a d’ores et déjà appelé les responsables d’ARENA à dialoguer pour se mettre d’accord sur un «agenda» pour gouverner le Salvador. Ce pays à l’économie fragilisée vit en bonne partie des «remesas» des immigrés salvadoriens aux Etats-Unis, qui sont près de 2,5 millions (sur une population de 6,3 millions). Les envois d’argent aux familles restées au pays s’élevaient à près de 4 milliards de dollars pour un PIB (en 2012) de 23,86 milliards de dollars, avec un taux de pauvreté de 34,5%, selon les données de la Banque mondiale. (apic/be)