Maria Brun depuis un an attachée de presse de la Conférence des évêques
Une voix féminine pour les évêques
Gabriele Brodrecht agence APIC
Lucerne, 9juillet(APIC) «C’est un exercice d’équilibriste, on se trouve
toujours sur le fil du rasoir pour savoir si on va être comprise ou pas. Et
on ne peut pas naturellement toujours donner raison à tous.» Malgré ce
bilan, Maria Brun redirait oui pour la tâche d’attachée de presse de la
Conférence des évêques suisses qu’elle a accepté il y a un an. Elle est la
première femme à ce poste. Pour elle, les aspects positifs de son travail
l’emportent largement. Son activité, surtout dans la situation actuelle de
l’Eglise en Suisse, est beaucoup plus qu’un simple travail.
Maria Brun a été nommée le 4 juin 1991 pour succéder à Hans-Peter Röthlin, appelé à Rome comme sous-secrétaire du Conseil pontifical pour les médias. C’est le 1er juillet que la nouvelle attachée de presse de la Conférence des évêques a pris officiellement ses fonctions. Elle exerce la lourde responsabilité de transmettre à tous, de manière fidèle et compréhensible, les communications et informations des évêques. Mais il faut aussi
savoir rendre justice aux deux côtés des choses. Pour Maria Brun, «supporter cette tension est un défi colossal pour une personne».
Et ce n’est pas tout. A ce poste, Maria Brun est obligée de parler dans
le sens de l’Eglise catholique. «Je ne pourrais pas présenter une chose
dans laquelle je ne me retrouve pas», déclare-t-elle. Elle ne serait naturellement pas devenue attachée de presse des évêques si elle n’était pas
fondamentalement d’accord avec les positions de l’Eglise catholique. «Si
mon opinion personnelle ne correspondait plus à cela, je devrais me poser
la question si je suis à la bonne place.» «Je ne suis crédible que si en
tant que femme je suis reliée à mes déclarations». Déclarations qu’elle
doit donc assumer elle-même en tant que personne. Maria Brun accepte l’enseignement de l’Eglise parce qu’il propose un idéal. «Nous ne sommes pas
des marionnettes, mais des êtres humains dans un contexte déterminé et nous
devons faire de notre mieux dans notre situation actuelle.»
Pas de censure
En aucun cas il n’y a de censure de la part des évêques. Maria Brun se
réserve le droit d’exprimer une opinion personnelle et de voir certaines
choses de façon nuancée. Elle a senti qu’elle ne pourrait pas faire totalement sienne une certaine façon «politique» de penser l’Eglise. Ce n’est
d’ailleurs pas une nécessité absolue. «L’Eglise en tant que communauté de
croyants, est plus importante pour moi que l’Eglise Institution.» Maria
Brun constate aussi la tendance conservatrice actuelle qui se manifeste
d’ailleurs pas seulement dans l’Eglise catholique. Dans l’oecunénisme, qui
tient très à coeur à Maria Brun, cette tendance a déjà des effets plutôt
négatifs.
Le problème ne concerne pas seulement le diocèse de Coire. Comment Maria
Brun réagit-elle par rapport cette crise? Elle connait bien sûr le côté officiel mais elle sait aussi «combien les évêques s’efforcent de comprendre
le peuple au sérieux» . «J’observe et j’essaie de comprendre», dit-elle.
Elle porte les tensions avec les gens de la base «qui sont presque brisés.»
La question: «Quelle est ma place?» se pose toujours plus intensément à
Maria Brun. Si la foi n’est pas un problème pour elle, l’appartenance à
l’Eglise est par contre un défi, comme pour tous ceux qui ont des problèmes
dans le diocèse de Coire. «L’Eglise peut-elle rester assez ouverte et large
pour accueillir les différences opinions? Ou bien devient-elle tellement
conservatrice et fermée qu’elle rejette les hommes?
Beaucoup de questions touchent personnellement l’attachée de presse des
évêques. Cela vaut aussi pour son travail. Elle voudrait ne pas être
seulement un paratonnerre mais apporter quelque chose de constructif qui
puisse aider les hommes autant que possible. C’est pourquoi elle consacre
beaucoup de temps à l’aspect pastoral de son travail. Si elle n’est pas
inondée de courrier, Maria Brun reçoit cependant passablement de lettres,
auxquelles elle répond chaque fois personnellement. A cela s’ajoutent
encore les téléphones.
Cela aussi parce qu’un certain nombre de gens ne font pas la différence
entre les déclarations officielles et personnelles même quand Maria Brun le
souligne clairement. Comme par exemple lors d’une émission télévisée sur le
thème de l’homosexualité. Maria Brun essaie toujours de se rapporter aux
situations concrètes de la vie et de monter l’autre côté des choses que
peut-être on ne voit pas. Elle tient beaucoup à être une partenaire de
discussion.
Le fait d’être une femme lui permet-il de réaliser cela plus facilement?
«Au début, cela m’a beaucoup aidé. Les gens avaient le sentiment qu’on
pouvait parler plus à l’aise avec moi qu’avec un homme». Bien sûr, les
médias ont largement diffusé la nouvelle que pour la première fois une
femme occupait ce poste et par la même occasion, ont fait connaitre
l’office d’information de la Conférence des évêques. «Beaucoup d’inconnus
m’ont écrit.»
Comment les évêques ont-ils accepté le fait que pour la première fois
une femme pourrait être leur attachée de presse? Quand elle s’est
présentée, les évêques tous ensemble s’étaient déjà décidés en sa faveur,
bien que seulement quatre ou cinq la connaissaient alors personnellement.
«C’est une marque de confiance mutuelle des évêques», estime Maria Brun.
Lorsqu’elle est entrée dans la pièce, tous se sont levés. Pour Maria Brun
cela signifiait: «Nous accordons notre confiance à cette femme».
Maria Brun n’est pas une femme alibi, cela a été tout à fait clair dès
le début. Les réations à la nomination d’une femme à ce poste ont été
toutes positives. Maria Brun elle-même vit consciemmment sa féminité. Elle
est élegante et plutôt charmante. Même si certaines personnes l’auraient
vue habillée de noir et avec une coiffure sévère. Dans un certain sens elle
est aussi un peu «l’avocate des femmes». Maria Brun ne sent cependant pas
investie d’une «mission» proprement dite. La manière dont elle rempli ces
fonctions en tant que première femme à ce poste influence beaucoup les
choses. Et elle en bien est consciente.
Son entrée en fonction a fait clairement d’elle une personnalité publique ce qui influence aussi sa vie privée. Sa maison de lucerne est pour
elle un refuge, de même que son jardin et la musique. Maria Brun est une
personnalité sérieuse et sensible, pour qui tout n’a pas toujours été facile dans la vie. Elle sait préserver les petites joies. Elle trouve la détente en jouant du piano et elle s’est mise récemment à des cours de chant
classique…
Lorsqu’elle en a le temps. Car ses tâches sont multiples et elle doit
toujours être disponible bien que son engagement soit à 70%. A côté du
travail d’information, Maria Brun prend part au séances de la Conférence
des évêques et rencontre régulièrement le président. Elle entretient des
rapports personnels et cordiaux avec les évêques, même si elle ne les voit
que relativement rarement. Par les activités oecuméniques, Maria Brun a
déjà été habituée aux relations avec les responsables d’Eglises. Une autre
partie de son travail consiste en séance de toutes sortes, conférences de
presse, assemblées générales, commissions. Elle passe deux jours par
semaine au secrétariat de la Conférence des évêques suisses à Fribourg. La
préparation régulière de dossiers de presse pour les évêques et les
rapports intensifs ave les médias restent son activité principale.
«Cela était nouveau pour moi», concède Maria Brun qui est d’abord une
théologienne et qui à côté donne encore des conférences et suit des cours.
Sa formation théologique a été d’ailleurs été une des conditions de son
engagement à ce poste. Dans le travail des médias, Maria Brun est encore
parfois à la merci de la bonne volonté des autres. «Il m’arrive encore de
faire des erreurs.» Jusqu’à présent, elle a cependant vécu pratiquement que
des expériences positives avec les médias catholiques ou non catholiques.
Dans tous les cas, la confiance est un élément essentiel dans le travail
des médias.
Concrètement, les médias, et en premier lieu la presse écrite, demandent
à Maria Brun en plus de l’information de base, des explications ou son
opinion personnelle. Par exemple, sur les thèmes de Coire, de l’Opus Dei,
de l’Europe ou encore de l’exorcisme. La variété des sujets est grande. Là
encore, l’attachée de presse s’efforce de donner un contexte plus large et
d’introduire les nuances nécessaires. «C’est très passionnant.»
Ce que Maria Brun souhaite pour l’Eglise. C’est qu’on parvienne à un
langage commun – les évêques s’en préocuppent aussi – un langage que tous
puissent comprendre. Maria Brun fait tout son possible pour atteindre ce
but. (apic/gbr/mp)