Vatican: Forte présence fribourgeoise à la cérémonie d’assermentation de la Garde Suisse

Le président suisse Adolf Ogi «très impressionné» par Jean Paul II

De notre correspondante à Rome Blandine Bècheras

Rome, 7 mai 2000 (APIC) Le président de la Confédération suisse Adolf Ogi, qui a fait le déplacement de Rome samedi pour la traditionnelle cérémonie de prestation de serment de 35 nouveaux membres de la Garde Suisse pontificale, s’est dit «très impressionné» par le pape Jean Paul II qui l’a reçu en audience à cette occasion. Protestant pratiquant, A. Ogi a même ajouté que la rencontre avec le chef de l’Eglise catholique a été «le moment le plus important de ma vie politique».

Le président de la Confédération a également relevé, après l’entretien de près de 20 minutes qu’il a eu avec Jean Paul II, qu’il tenait à être présent à Rome pour soutenir la Garde Suisse, qu’il a qualifiée de «carte de visite de notre pays». La participation cette année – une première ! – du président de la Confédération et ministre de la défense suisse à l’occasion du Grand Jubilé, a attiré l’attention des médias sur la Garde Suisse, cette petite armée au service du pape qui est parvenue à compléter son effectif de 110 hommes. Le Corps des Gardes Suisses célèbre sa fête annuelle le 6 mai, jour anniversaire de la mort des 147 soldats helvétiques tués alors qu’ils défendaient le pape Clément VII lors du «sac de Rome» en 1527.

La Garde Suisse a redoré son blason

La Garde a ainsi réussi dans une bonne mesure à redorer son blason après le drame qui l’avait endeuillée deux ans plus tôt, avec la mort violente du Commandant Alois Estermann, de sa femme Gladys et du caporal Cédric Tornay. Pour ce faire, les responsables de la Garde Suisse ont fait un gros effort de communication ces deux dernières années, notamment pour sensibiliser les jeunes Suisses à cette possibilité d’effectuer un service armé qui sort de l’ordinaire.

«Loin de la patrie, votre engagement est aussi un engagement pour la patrie», a affirmé Adolf Ogi lors de la cérémonie haute en couleurs dans la Cour Saint-Damase du Vatican, où les nouvelle recrues ont juré fidélité au pape, au prix de leur vie s’il le faut. Dans son hommage aux Gardes Suisses, il a souligné que leur fidélité et leur dévouement ont valeur d’exemple, «un exemple qui rayonne sur notre pays». «Le pape compte sur vous», avait déclaré la veille Jean Paul II aux 35 nouvelles recrues au garde-à-vous dans l’une des somptueuses salles du palais apostolique. Recevant en audience les Gardes et leurs familles, il les a remerciés de leur service qui lui permet, leur a-t-il dit, «de se consacrer aux hommes librement et sans obstacle, pour leur annoncer l’Evangile».

Servir «près de la tombe de Pierre»

Jean Paul II a également remercié les familles des Gardes, qui «ont accepté volontiers que leur fils, leur frère ou leur ami les quitte pour un certain temps pour prêter service au centre même de l’Eglise universelle». Enfin, il a encouragé les Gardes à témoigner par leur attitude, auprès des visiteurs de la basilique Saint-Pierre et du Vatican ­ particulièrement nombreux cette année – de ce que signifie pour eux personnellement le fait «de servir près de la tombe de Pierre». «Je suis sûr que cette expérience dans le cœur de l’Eglise universelle laissera des traces profondes dans votre cœur, a-t-il ajouté. Vous serez ensuite en mesure de transmettre à vos familles et à vos amis en Suisse le trésor d’une foi mûrie à Rome, tandis que vous contribuerez à renforcer dans votre pays les liens avec le successeur de Pierre».

Les Fribourgeois en force

Samedi, à 17 heures précises, le son des trompettes de trois Gardes Suisses annonce que la cérémonie commence, en présence du président de la Confédération, de l’ambassadeur de Suisse près le Saint-Siège et d’un militaire suisse de haut rang.

Une forte délégation fribourgeoise est présente cette année, accompagnée du conseiller d’Etat Urs Schwaller: plus de 200 musiciens et grenadiers, du Contingent des Grenadiers de Fribourg, avec leur bicornes bleus à pompon rouge, et de deux fanfares, celle du Collège Saint-Michel et l’Union Instrumentale.

Côté Vatican: Mgr Giovanni Battista Ré, entouré de plusieurs cardinaux: le cardinal Monduzzi (ex-préfet de la Maison pontificale), le cardinal polonais Deskur dans son fauteuil, le cardinal italien Rossi, le belge Schotte ainsi que le cardinal suisse Henri Schwery, qui avait célébré une messe pour les nouvelles recrues et leur famille dans la salle de bénédiction le matin même. D’autres prélats du Vatican étaient présents comme le préfet de la maison pontificale James Harvey, Mgr Bertone, et l’archevêque fribourgeois Jean-Claude Périsset, actuellement nonce apostolique en Roumanie.

3’000 personnes dans la Cour Saint-Damase

La procession fait son entrée dans la Cour Saint-Damase: les 5 joueurs de tambours de la Garde Suisse, suivis du porte-drapeau – le sergent-major – , des 12 membres de l’orchestre de la Garde et enfin les 35 nouveaux hallebardiers dans l’habit aux couleurs chatoyantes attribué à Michel Ange, portant la cuirasse et coiffés de leur casque au cimier orné d’un plumet rouge.

Les rideaux bougent aux fenêtres des deuxième et troisième étage du palais apostolique donnant sur la cour, laissant entrevoir quelques prélats curieux. Dans la foule flottent plusieurs drapeaux, notamment le drapeau suisse, rouge à croix blanche, mais aussi le drapeau fribourgeois noir et blanc porté par les Grenadiers, juchés sur une corniche au-dessus de la cour, et dont les silhouettes se découpent sur un ciel bleu. Dans la foule de 3’000 personnes, quelques jeunes Lucernoises en costume traditionnel, avec leurs cheveux blonds tressés, châle blanc sur les épaules et tablier autour de la taille.

Prêts à donner leur vie pour le Saint-Père

Devant les haut dignitaires de Suisse et du Vatican, le commandant Pius Segmüller, en habit de velours rouge et avec son casque surmonté d’un plumet blanc, passe en revue les nouvelles recrues, rangées sur deux rangs, au garde-à-vous. Puis, il commence un discours en italien, français et suisse allemand. Il s’agit d’une «cérémonie historique» pour exalter «ce service unique et très particulier, ici au Vatican… Un service exigeant, en particulier pendant cette Année sainte».

Après le commandant, l’aumônier de la Garde Suisse fait également un court discours. S’adressant aux nouvelles recrues, il rappelle qu’ils sont «des témoins, car vous êtes prêts à donner votre vie pour le Saint-Père et ses successeurs». Il vous faut donc «vous concentrer sur l’essentiel». Ce n’est «pas seulement un travail, mais un service. Vous devez être des lumières ! Comme les lumières, il nous faut nous consumer, nous devons nous donner, servir. En cela, Jean Paul II est un modèle pour vous, il se consume jusqu’au bout pour son service… Nous avons un pape si grand».

Puis le chapelain de la Garde Suisse prête lui-même serment en trois langues. La formule en français étant la suivante: «Je jure de servir fidèlement, loyalement et de bonne foi, le Souverain Pontife régnant Jean Paul II et ses légitimes successeurs; de me dévouer pour eux de toutes mes forces; j’assume les mêmes devoirs vis-à-vis du Sacré collège des cardinaux durant la vacance du Siège apostolique. Je promets, en outre, au Commandant et aux autres supérieurs respect, fidélité et obéissance. Je jure d’observer tout ce que l’honneur exige de mon état.»

Après la prestation de serment du chapelain, à 17 h 25, la foule se lève pour écouter debout l’hymne du Vatican et l’hymne national suisse, joués par l’orchestres de la Garde pontificale. A 17 h 30 précises, la première nouvelle recrue entend son nom résonner sur la place. Donnant immédiatement son hallebarde au Garde placé à sa droite, il fait un pas en avant et vient se placer au centre de la place, où le sergent-major, tient le drapeau de la Garde Suisse à l’horizontale, à hauteur de la hanche. Le hallebardier pose ainsi sa main droite sur le drapeau, lève sa main gauche et prête serment. 20 d’entre eux le font en suisse allemand, 12 en français, 2 en italien et 1 en rhéto-romanche.

«Moi, hallebardier (…), dit-il d’une voix forte et cadencée, je jure d’observer loyalement et de bonne foi tout ce qui vient de m’être lu aussi vrai que Dieu et ses saints m’assistent». 20 minutes plus tard, la prestation des Gardes est terminée et l’orchestre de la Garde entame quelques airs suisses connus. Puis c’est au tour du président de la Confédération de prendre la parole. «Je suis heureux d’être avec vous en cette journée», dit-il en italien. Puis il continue en français «Vous avez prêté serment et faites maintenant partie du Corps de Garde, vous l’avez fait aux yeux de tous, au sein de la Garde, une communauté humaine, une communauté de valeur (…) Vous vous engagez pour le pape et pour la paix dans le monde. C’est un exemple qui rayonne sur votre pays. Nous sommes fiers de vous!»

D’autres airs joyeux sont ensuite joués par l’orchestre de la Garde Suisse. Le président Ogi ne peut s’empêcher de battre la mesure en frappant des mains avec la foule. La cérémonie se conclut par l’hymne national suisse; la procession quitte la place vers 18 h15. Devant la salle des audiences Paul VI, le Contingent des Grenadiers tire encore une salve d’honneur, au grand dam des pigeons de la place Saint-Pierre avoisinante, avant la prestation musicale des deux fanfares de Fribourg. (apic/imed/be)

7 mai 2000 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 6  min.
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