Certaines religieuses travaillant au Vatican ne se sentent pas reconnues | © eltpics/Flickr/CC BY-NC 2.0)
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Vatican: trois femmes veulent «briser le mur de l’inégalité»

Dans son numéro de janvier sur «les femmes et François», le supplément féminin de L’Osservatore romano, le quotidien du Saint-Siège, appelle à «briser le mur de l’inégalité» entre hommes et femmes dans l’Eglise.

C’est une tribune qui a fait grand bruit en Italie et aux Etats-Unis et dont la publication est un signal fort. Trois femmes du Vatican publient une tribune à visage découvert pour dénoncer les inégalités dont ces dernières sont victimes à l’intérieur de l’Etat du Vatican. Elle y soulignent la rareté des femmes au plus haut niveau de la Curie, mais aussi leur difficulté à faire valoir leurs droits et leur spécificité.

Publiée ces jours-ci dans le supplément féminin Donne Chiesa Mondo, du journal officiel de l’Etat du Vatican, L’Osservatore Romano, le titre avait déjà fait parler de lui en publiant ces deux dernières années plusieurs enquêtes et tribunes sur les abus de pouvoir dont sont parfois victimes les religieuses. 

La tribune est signée par trois femmes, co-fondatrices de l’Association Femmes du Vatican (DVA), un collectif né en décembre 2016: Romilda Ferrauto, conseillère de la salle de presse du Saint-Siège, Adriana Masotti et Gudrun Sailer, toutes deux journalistes pour Vatican News.

Des relations de subordination

«Travailler en sachant que l’on contribue à l’activité d’un pape est un motif de satisfaction et de fierté inégalables», commencent par reconnaître les signataires. «Ce l’est aussi pour les nombreuses femmes, environ 950, qui travaillent au Vatican. Elles ne sont pas de passage, elles ne font pas de bénévolat. Dans les différents dicastères, dans les bureaux, dans les magazines… à niveau égal, leur salaire est le même que celui des collègues masculins».

À niveau égal, d’où la première question qu’elle se posent: «Combien y a-t-il parmi nous de femmes qui occupent des postes à responsabilité, qui réussissent à atteindre les échelons de la direction? Jusqu’à présent bien peu», déplorent-elles. Et d’expliquer que, si l’on excepte les prêtres, les évêques et les cardinaux, qui sont de fait des hommes, la situation n’est pas forcément meilleure parmi les laïcs, où les hommes sont là-aussi plus nombreux à décider, choisir et fixer les règles. «Au Vatican, comme dans tant de sociétés, les femmes sont parfois vues comme des personnes de plus faible valeur intellectuelle et professionnelle, toujours disponibles pour servir.»

Mais l’accès aux postes à responsabilité n’est pas leur seul point de préoccupation. Les relations de subordination et le manque de confiance en soi des femmes sont également montrées du doigt. «Il est triste de constater qu’il existe encore des femmes qui vivent avec inconfort leur vie professionnelle au Vatican, estiment Romilda Ferrauto, Adriana Masotti et Gudrun Sailer. Certaines d’entre elles ne trouvent pas le courage de défendre leurs propres droits, de parler ouvertement»

Dépasser les revendications idéologiques

Si elles voient des signes positifs sous le pontificat de François, comme de récentes nominations de femmes – le 24 mai 2019, le Pape a notamment nommé quatre femmes parmi les conseillers de la Secrétairerie générale du Synode des évêques -, elles l’affirment: «Cela ne suffit pas». Et de poursuivre: «Plutôt que d’occuper des espaces, il faut démarrer des processus, en dépassant les revendications idéologiques pour la parité des rôles, et la tentation de cléricaliser la condition féminine», estiment-elles, reprenant le vocabulaire du pape lui-même.

En clair: elles ne rêvent pas à des femmes prêtres. «Il n’est pas question d’ordination sacerdotale, soulignent-elles, mais de l’urgence de briser le mur de l’inégalité entre les femmes et les hommes dans l’Eglise. Il est urgent de susciter un profond changement de mentalité, mais encore davantage, comme le recommande le pape François, de développer le concept de réciprocité pour vaincre la subordination, promouvoir la coresponsabilité et cheminer ensemble.»

Le reste de ce numéro de janvier de Donna Chiesa Mondo consacré aux «femmes et François» se penche largement sur la nécessité d’une réflexion de fond sur la place des femmes dans l’Eglise, apportant de nombreux éléments théologiques et pastoraux sur le sujet. (cath.ch/Osservatore Romano/lacr/ns/cp)

Certaines religieuses travaillant au Vatican ne se sentent pas reconnues | © eltpics/Flickr/CC BY-NC 2.0)
12 janvier 2020 | 12:06
par Carole Pirker
Temps de lecture: env. 3 min.
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