Zaïre : Le cardinal Malula, archevêque de Kinshasa, est mort (140689)
Décès du «père du rite zaïrois»
Louvain, 14juin(APIC/CIP) Le cardinal zaïrois Joseph Malula, archevêque
de Kinshasa, est décédé à Louvain en Belgique le 14 juin à l’âge de 71 ans.
Celui que d’aucuns appelaient «le père du rite zaïrois» se trouvait en Belgique depuis plusieurs semaines. Cet artisan du christianisme africain ne
s’était pas remis d’une délicate intervention chirurgicale, malgré l’implantation d’un régulateur cardiaque.
Enfant de Kinshasa, le cardinal Malula est né dans la capitale de ce qui
était alors le Congo belge, cinquième enfant d’une famille de huit, le 11
décembre 1917. Ordonné prêtre en 1946, il exercera désormais son ministère
à Kinshasa. En 1959, il est nommé curé à St-Pierre, la plus importante paroisse de la capitale avec 52’000 âmes. La même année, il est nommé évêque
auxiliaire de Mgr Scalais à Léopoldville (la future Kinshasa), où il reçoit
l’ordination épiscopale. Il succède à Mgr Scalais le 7 juillet 1964 et
l’archidiocèse prend le nom de Kinshasa le 30 mai 1966. Il est créé cardinal par Paul VI en 1969.
Mgr Malula a grandi avec sa ville, qui est passée en 70 ans de 15’000 à
4 millions d’habitants, dont près de la moitié sont catholiques. Nommé archevêque un an avant la clôture de Vatican II, Mgr Malula s’est consacré
sans répit à adapter les structures pastorales diocésaines aux besoins nouveaux, suivant les orientations du Concile. Dès 1970, il esquisse les grandes lignes d’action dans le document «Mission de l’Eglise à Kinshasa. Options fondamentales».
«Africaniser le christianisme» et faire confiance aux laïcs
Le premier pasteur zaïrois de la capitale entend faire passer les fidèles d’une religion un peu rituelle et consommatrice à un christianisme plus
engagé, plus communautaire, présent dans la vie quotidienne. Par souci
d’authenticité, c’est aussi un grand artisan de l’africanisation et de la
«zaïrisation» de l’Eglise. «On a christianisé l’Afrique, aimait-il à dire,
il faut à présent africaniser le christianisme». A partir des années 70
surgissent diverses réalisations d’avant-garde, dont il expose la portée
dans une nouvelle publication, «L’Eglise de Dieu qui est à Kinshasa». Il
faut d’abord à l’Eglise locale des animateurs laïcs responsables.
En 1971 débute à leur intention un cycle de formation de trois ans. S’y
inscrivent 95 hommes mariés; ils seront 1’300 douze ans plus tard… Suit
l’institution de ministres laïcs, les bakambi, qui se voient confier la direction de certaines paroisses. Le cardinal considérait cette expérience
comme «la plus révolutionnaire» de son épiscopat. Le mokambi (singulier de
bakambi) – en concertation avec le prêtre qui ne réside pas sur place – est
le premier responsable de la paroisse. A lui d’administrer la paroisse, de
diriger le conseil paroissial, de désigner les responsables des commissions, de veiller à leur formation. Le cardinal encourage aussi la multiplication des communautés chrétiennes de quartier, les «Communautés ecclésiales vivantes», qui sont aujourd’hui plus d’un millier à Kinshasa.
«Messe zaïroise» et conflit avec Mobutu
Mgr Malula était aussi un spécialiste de la liturgie et il a siégé dans
la Commission liturgique du Concile. Musicien, il compose plusieurs messes
et cantiques en langue lingala, sur des thèmes bantous. Et c’est sous son
impulsion que voit le jour, dans les années septante, la «messe zaïroise»,
reconnue par le Vatican en 1988 dans le «Missel romain à l’usage des diocèses du Zaïre». L’épiscopat du cardinal Malula a été assombri en 1972 par un
conflit ouvert avec le régime de Mobutu, notamment au sujet de diverses mesures prises par le Mouvement Populaire de la Révolution (MPR) dans le cadre du «retour à l’authenticité» : suppression des noms de baptême
chrétiens, transfert au dimanche des fêtes religieuses tombant en semaine,
installation de comités de jeunesse MPR dans les séminaires et les maisons
de formation religieuse.
On retiendra encore du cardinal Malula qu’il fut un grand apôtre de la
famille chrétienne : plusieurs de ses écrits ont été consacrés au mariage.
Sur le plan international, le cardinal Malula était considéré comme l’une
des grandes figures de l’épiscopat africain. Il fut de 1984 à 1987 le
président du Symposium des Conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar (SCEAM). Il s’était enfin montré très favorable depuis plusieurs années
à la convocation d’un «concile africain». (apic/bo/be)