Zimbabwe: Un ancien évêque anglican soutient la réforme agraire du régime Mugabe

«Nous ne pouvons abandonner notre souveraineté»

Harare, 20 août 2002 (APIC) De nombreuses voix d’Eglise s’élèvent au Zimbabwe pour protester contre l’expulsion de 2’900 fermiers blancs (sur 4’500) et l’arrestation de 193 d’entre eux qui avaient refusé de quitter leurs terres. Voix discordante dans ce concert de dénonciations, l’évêque Jonathan Siyachitema, ancien évêque anglican de Harare, soutient la réforme agraire du régime Mugabe.

L’évêque Jonathan Siyachitema estime que ces mesures sont «nécessaire pour assurer la redistribution des terres» à la majorité noire dépossédée par le régime colonial et l’apartheid, alors qu’une poignée de fermiers blancs contrôlent 70% des meilleures terres du pays.

L’ancien évêque anglican de Harare, Jonathan Siyachitema, soutient la politique du gouvernement zimbabwéen qui a ordonné aux fermiers blancs de quitter leurs fermes dans le but d’y installer des paysans noirs sans terre. Quelque 200 fermiers ont été arrêtés depuis jeudi 15 août pour avoir refusé d’obtempérer à l’ordre de quitter leurs terres le 8 août avant minuit. Près de quarante fermiers ont été libérés sous caution le week- end, rapporte «Justice for Agriculture», groupe de défense des fermiers, qui conteste l’ordre donné par le gouvernement aux fermiers de quitter leurs terres.

Répression contre les récalcitrants

Malgré les avertissements de ceux qui redoutent que le programme de réforme agraire ne mette en danger la vie de millions de Zimbabwéens, le président Robert Mugabe a décidé de poursuivre sa politique de redistribution des terres. Alors que des bandes de militants de l’Union nationale africaine du Zimbabwe – Front patriotique (ZANU-PF) au pouvoir chassent les fermiers censés avoir quitté leurs propriétés, l’évêque Jonathan Siyachitema a qualifié la réforme controversée de «nécessaire pour assurer la redistribution des terres».

«Nous ne pouvons abandonner notre souveraineté», a-t-il lancé lors de la commémoration de la Journée des héros. Invoquant la loi controversée sur la confiscation des terres, le gouvernement a ordonné il y a trois mois aux fermiers de liquider leurs affaires et de quitter leurs fermes avant le 8 août à minuit. Parmi les fermiers blancs arrêtés, on note la présence du président de la «Commercial Farmers’ Union» (Syndicat des fermiers), Collin Cloete, et du père du célèbre joueur de cricket, Heath Streak. Ils sont en état d’arrestation depuis le jeudi 15 août pour ne pas avoir obtempéré aux ordres d’évacuation du gouvernement.

«Expulsions illégales»

«Justice for Agriculture», qui a rompu avec la «Commercial Farmers’ Union», a annoncé son intention de traduire le gouvernement du président Mugabe devant les tribunaux internationaux pour «expulsions illégales». Le gouvernement affirme que les confiscations s’inscrivent dans le cadre de sa campagne pour libérer le pays du régime colonial, qui a laissé la plus grande partie des meilleures terres sous contrôle de la minorité blanche.

Selon les détracteurs du gouvernement, ces terres n’iraient pas aux travailleurs qui labourent la terre ni aux paysans sans terre, mais aux partisans de Robert Mugabe. La politique de confiscation des terres risque également d’avoir des effets très dévastateurs sur la production agricole, alors que près de six millions de Zimbabwéens – près de la moitié de la population – risque la famine.

Personnalités ecclésiales visées, sanctions américaines contre l’évêque Kunonga

Des pressions ont par ailleurs été exercées par le gouvernement de Harare, contre certains collaborateurs d’Eglise. L’interrogatoire par la police du Père Tim Neill, ancien vicaire général de l’Eglise anglicane de Harare, et engagé auprès des travailleurs agricoles déplacés, illustre la politique de harcèlement des autorités. Tim Neill a démissionné de l’Eglise anglicane l’an dernier après l’élection de Nolbert Kunonga en tant qu’évêque de Harare.

Tim Neill, qui reprochait à Nolbert Kunonga d’être un fervent supporter de Robert Mugabe et de la politique de son parti, était aussi candidat au poste d’évêque de la capitale zimbabwéenne, rapporte l’agence oecuménique ENI. Depuis lors, il travaille pour le «Farm Community Development Trust», une organisation d’aide aux fermiers blancs et aux travailleurs agricoles touchés par la réforme agraire controversée au Zimbabwe.

Washington, dans le but de contrer le président Mugabe et de mener la vie dure à ses proches collaborateurs et supporters, a ajouté l’évêque anglican de Harare sur la liste des personnes interdites de voyager aux Etats-Unis et dont les biens ont été gelés. (apic/eni/be)

20 août 2002 | 00:00
par webmaster@kath.ch
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