Journée portes ouvertes au centre d'accueil des requérants d'asile à l'Africanum

Fribourg: «Point d’Ancrage» inquiet des derniers durcissements en matière d’asile

Fribourg, 12 juin 2013 (Apic) Avec l’acceptation à une écrasante majorité, le 9 juin 2013, des durcissements en matière d’asile, le peuple suisse a mis en route une «terrible artillerie». Et tout cela pour une infime minorité de requérants d’asile qui commettent des infractions, a lancé le 12 juin le Père Jean-Pierre Barbey, lors de la journée «portes ouvertes» du centre œcuménique d’aide aux migrants «Point d’Ancrage» à Fribourg.

«On aura beau renforcer les barrières aux frontières, dresser des forteresses, ceux qui souffrent dans leur pays parviendront toujours à traverser les frontières…» Dans son adresse à la quelque centaine de personnes présentes mercredi à midi à l’Africanum, le Père Barbey a souligné que les centres fédéraux pour les requérants d’asile déboutés que l’on prévoit «n’auront rien d’un ‘club Med’ avec de ‘gentils accompagnateurs’».

Et de déplorer qu’il n’y aura dans ces centres, qui ont pour but l’accélération des processus de renvoi, ni spécialistes en vue de l’intégration, ni aumônerie, ni groupes d’accompagnants issus de la population…

L’amorce de la société de demain

Le religieux voit dans la mise en place de ces centres fédéraux le risque de la progressive disparition des centres cantonaux: «Cette concentration va mettre un terme à une riche expérience dont témoigne «Point d’Ancrage»: être un lieu privilégié où l’on fait l’apprentissage de la rencontre, de la découverte, de l’échange entre nous qui sommes ici, avec notre culture et notre sensibilité, et ces hommes et ces femmes venus de leur pays avec leur propre culture, leur sensibilité et leur richesse».

Pour le Père Barbey, la société globalisée, celle des gens du commun, «pas celle des diplomates dans les salons dorés», est déjà notre réalité quotidienne: «Ici, des liens se créent, se tissent, qui sont l’amorce de la société de demain, d’une société multiculturelle dans laquelle chacun s’enrichit de la richesse de l’autre!» Avec ce nouveau tour de vis dans le domaine de l’asile, «on va perdre en humanité, on va perdre la découverte de l’autre, des frères et sœurs venus du monde entier…. On se retrouvera seuls, entre Suisses!»

Actuellement, «Point d’Ancrage» suit sur l’année une cinquantaine de dossiers de requérants d’asile, avec une dizaine d’entretiens chaque semaine. Les responsables notent qu’à la différence des débuts, ce ne sont plus seulement les Africains qui viennent au centre, mais des requérants en provenance du Tibet, du Népal, d’Afghanistan, du Pakistan, du Sri Lanka…

Durant la rencontre, des enfants ont fait voler des cerfs-volants, comme il est de tradition en Afghanistan. En Suisse «depuis un an et neuf mois», Kadem Ali, un Afghan de la région de Ghazni, explique la vie dans son pays. Hébergé à Plasselb, en Singine, il raconte les 30 ans d’une guerre qui n’en finit pas: «Les gens n’en peuvent plus! Ils ne supportent plus les explosions, les enlèvements, la peur constante». Mais, durant la traditionnelle fête des cerfs-volants, «on oublie tous nos problèmes. Ce jour est particulier pour les enfants, c’est un jour de paix!».

La journée portes ouvertes de «Point d’Ancrage» a lieu traditionnellement le mercredi avant la Journée nationale du réfugié (15 juin 2013), le Dimanche des réfugiés organisé par les Eglises (16 juin 2013) et la Journée mondiale des réfugiés (20 juin 2013).

Encadré

«Point d’Ancrage», une présence œcuménique auprès des requérants d’asile

«Point d’Ancrage» est une présence des Eglises fribourgeoises – tant catholique que réformée – auprès des requérants d’asile, à la Route de la Vignettaz 57, dans les locaux de l’Africanum à Fribourg. Il permet d’accueillir – pour des entretiens personnels, des conseils juridiques ou les repas du mercredi (3’500 en 2012!) – les requérants d’asile et les sans-papiers. Le Centre a été mis sur pied dès le début de l’année 2008, grâce notamment à l’engagement du Père Jean-Pierre Barbey, un religieux chartreux rattaché à La Valsainte, qui fut aumônier du Centre d’enregistrement des requérants d’asile à Vallorbe et médiateur Eglises-Réfugiés pour l’Eglise catholique dans le canton de Vaud.

Le Père Barbey rappelle que l’histoire de l’association «Point d’Ancrage» est liée à celle du groupe «Eglise migrants», constitué en 2001, lors de l’occupation de l’église Saint-Paul à Fribourg par des personnes vivant dans la clandestinité. L’idée de la création d’un tel centre avait été très bien reçue par les congrégations religieuses de Fribourg. Cette antenne, reconnue officiellement par les deux Eglises cantonales, reçoit notamment un soutien financier de la Corporation ecclésiastique catholique (CEC) du canton de Fribourg, des congrégations religieuses, de paroisses catholiques et protestantes, sans parler des dons. Son budget 2013 se monte à CHF 90’000.– Depuis avril dernier, l’association, qui travaille essentiellement avec des bénévoles, a engagé à un taux de 50% Patrick Vuille. Il est responsable des entretiens avec les requérants et du suivi de leur dossier. Ce spécialiste de la médiation, qui travaille à 40% à la Direction de la santé et des affaires sociales (DSAS) à Fribourg, remplace à ce poste le Père Barbey, qui reste responsable du groupe d’animation en tant que représentant des Eglises. (apic/be)

12 juin 2013 | 17:07
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture: env. 3 min.
Fribourg (590)
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