Jean-Jacques Friboulet

Colonisation de la Cisjordanie: le masque tombe

Le Conseil de Sécurité de l’ONU vient de voter une résolution demandant la fin de la colonisation de la Cisjordanie. A cette occasion, le gouvernement de M. Netanyahou a montré son vrai visage, fustigeant les pays ayant voté cette résolution et convoquant leurs ambassadeurs. Ce gouvernement veut en réalité établir le «Grand Israël» et éviter à tout prix l’avènement d’un Etat palestinien.

J’ai eu la chance de faire un pèlerinage dans ce pays il y a trois ans et de le sillonner en minibus. La Cisjordanie est un petit territoire, grand comme le quart de la Suisse et non viable aujourd’hui car ses ressources vitales (la terre, l’eau) sont pillées par l’Etat d’Israël. Son économie est basée sur une agriculture archaïque (faute d’investissements) et le tourisme. Elle contraste avec la haute technologie et la puissance industrielle développées par son puissant voisin. Son territoire est déjà mité par de grandes colonies qui encerclent littéralement certaines de ses villes comme Bethléem. La coexistence de deux Etats est donc impossible à mettre en œuvre dans les conditions actuelles. Mais cette impossibilité sert le gouvernement de M. Netanyahou qui la met en avant pour repousser indéfiniment une paix durable dans la région.

La colonisation apporte toujours des fruits vénéneux

Pour nous Chrétiens, l’enjeu est double. Israël et la Palestine sont la région que le Christ a parcourue durant toute sa vie terrestre et où il a prêché un Evangile de miséricorde et de paix. En sillonnant ce pays et plus particulièrement la Galilée et Jérusalem, on ne peut manquer de constater que les traces de son passage sont partout présentes. Et c’est cette terre, par définition œcuménique et où se côtoient tous les grands courants religieux, que les partisans de l’actuel gouvernement voudraient monopoliser au nom de leur tradition. Les Chrétiens savent par leur histoire que les vraies pierres vivantes de leurs églises ne sont pas les monuments ou la terre sur laquelle ils sont bâtis mais le cœur des croyants et ceux-ci ne sauraient être annexés ou appropriés. L’horizon du Grand Israël est un projet matérialiste et non spirituel. Les frontières doivent être au service des peuples et non l’inverse.

En second lieu, l’historien que je suis, sait par expérience que la colonisation apporte toujours des fruits vénéneux, et ce pour une raison bien simple. La colonisation nie toujours les droits des populations colonisées et finit par les considérer comme des sous-hommes. L’Ancien Testament abonde d’exemples. A l’époque moderne, l’Afrique du Sud ou l’Algérie en ont été de parfaites illustrations. La colonisation se traduit toujours par des discriminations et peut même finir en apartheid. On en voit les prémisses dans l’Etat israélien actuel où les droits fondamentaux des palestiniens sont bafoués. Cet Etat risque de perdre son caractère démocratique pourtant si précieux pour ses fondateurs.

Les dirigeants palestiniens ont certes commis de graves erreurs. La première d’entre elles fut de ne pas reconnaître les frontières historiques de 1947. La seconde fut le terrorisme contre des civils  israéliens. Mais au nom des erreurs de leurs pères, doit-on condamner tout un peuple à la désespérance? La réponse est évidemment non. Les membres du Conseil de Sécurité ont bien fait de stigmatiser le processus de colonisation. Il faut souhaiter que d’autres actes concrets suivent pour faire bouger les lignes dans cette région qui a vu naitre le Christ et qui est chère à notre cœur.

Jean-Jacques Friboulet | 29.12.2016

Colonisation israélienne à Hébron | © Rémi Noyon/CC BY 2.0
29 décembre 2016 | 09:55
par Jean-Jacques Friboulet
Temps de lecture: env. 2 min.
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