Pie XII avait préparé un texte dénonçant le nazisme, il y a renoncé au dernier moment

APIC-Dossier

La «Civilta Cattolica» défend la mémoire de Pie XII

Rome, 3 avril 1998 (APIC) Pie XII s’apprêtait à dénoncer l’horreur nazie en 1942, dans un texte de quatre pages «rédigé de sa main» et destiné à «L’Osservatore Romano». Trois raisons le dissuadèrent de le publier et il l’a finalement «brûlé» : c’est ce que révèle la revue jésuite italienne «La Civiltà Cattolica», considérée comme proche de la Secrétairerie d’Etat du Vatican.

La revue publie dans sa dernière livraison un éditorial de onze pages non signé intitulé : «Ouvrons, chrétiens et juifs, une période nouvelle de fraternité». Il répond aux trois critiques principales des milieux juifs contre le texte «Nous nous souvenons: une réflexion sur la Shoah», publié par le Vatican le 16 mars dernier, à savoir, et dans l’ordre indiqué par l’éditorial : la responsabilité catholique dans la Shoah ; le non-accès aux archives du Vatican pour la période concernéée; et le silence de Pie XII.

Le témoignage de Soeur Pascalina

La nouveauté porte sur la révélation, par cette revue qui fait autorité, de l’existence d’un texte de dénonciation du nazisme, rédigé par Pie XII en 1942, destiné à être publié dans «L’Osservatore Romano», mais qu’il aurait finalement brûlé, reculant devant les conséquences négatives «pour les chrétiens et les juifs» d’une telle publication.

Interrogé par le correspondant d’APIC sur ce point, le Père Pierre Blet, jésuite, dernier survivant de la commission de quatre historiens chargés par Paul VI de travailler sur les archives du Vatican concernant la période de la guerre, explique que cette révélation est issue des mémoires publiées en 1982 par Soeur Pascalina, religieuse d’origine allemande qui fut l’assistante de Mgr Eugenio Pacelli, le futur pape Pie XII, à l’époque où il était nonce en Allemagne, puis qui le suivit à Rome.

«C’est elle qui rapporte l’existence de ce texte», témoigne le Père Blet. «Elle me l’a confirmé mis je ne l’ai jamais utilisé dans mes écrits, car on ne peut pas documenter cette lettre qui a, de fait, disparu.» Le jésuite français ajoute : «Intrigué, j’ai personnellement interrogé Soeur Pascalina, qui était douée d’une excellente mémoire et qui n’avait aucune raison d’inventer une telle histoire, sur les circonstances de la destruction de cette lettre. Elle m’a dit que le pape Pie XII était venu brûler cette lettre sous ses yeux, dans la cuisine des appartements pontificaux.»

Interventions juives auprès de Pie XII

La première raison de cette renonciation de Pie XII invoquée par «La Civiltà Cattolica» est le durcissement de la persécution contre les juifs constatée après la lecture dans les paroisses allemandes de l’encyclique de Pie XI «Mit brennender Sorge», qui «mit Hitler en colère» et entraîné la confiscation des imprimeries qui avaient permis la diffusion clandestine de ce texte en Allemagne. Une seconde raison, «décisive», de la renonciation de Pie XII fut la protestation publique de l’Eglise de Hollande, en 1942, contre la déportation des juifs, qui eut pour conséquence immédiate une arrestation systématique de tous les juifs, mais aussi des juifs convertis au catholicisme, comme la carmélite Edith Stein.

Troisième raison : «Beaucoup de juifs déconseillèrent à Pie XII de prononcer une dénonciation publique, et parmi eux des centaines de fugitifs, venus de Berlin et des autres cités allemandes.»

Un cruel dilemme

La revue jésuite ajoute un témoignage, qui remonte au 21 mars dernier (et publié dans ce même article), du cardinal Paolo Dezza, alors recteur de la Grégorienne, l’Université pontificale jésuite à Rome. Ce dernier rapporte une conversation privée qu’il eut avec Pie XII : «Le pape souffrait parce qu’il était prêt à intervenir publiquement pour condamner solennellement la façon d’agir d’Hitler. Il m’a fait lire une lettre des évêques et cardinaux allemands qui le priaient de ne pas parler, parce que si le pape parlait publiquement contre Hitler, il aurait traité avec encore plus de violences tant les catholiques que les juifs. […] Je le voyais souffrir et il me dit : si je me tais, on se lamente parce que le Pape se tait et ne montre pas la force et la fermeté qu’imposent de telles circonstances. Si je parle, Hitler va se venger en ordonnant des persécutions encore plus graves contre les catholiques et les juifs.»

Une voix juive dénonce «Le Vicaire»

A la défense de Pie XII, l’article ajoute la remarque du jésuite P. Gumpel, historien spécialiste de Pie XII, qui constate : «Aucune accusation n’a été proférée contre Pie XII de son vivant. Au contraire, un grand nombre de juifs – et parmi eux beaucoup de rabbins et des représentants de diverses organisations juives – ont loué le pape pour ce qu’il a fait pendant son pontificat […], alors que beaucoup de ceux qui accusent Pie XII aujourd’hui étaient très jeunes à l’époque ou n’étaient pas encore nés. Le changement est intervenu en 1963 avec la pièce de théâtre «Le Vicaire» de R. Hochhuth.» Cette pièce à peine publiée, poursuit le texte, «l’historien très connu E. Pinchas Lapide adressa une protestation […] et, dans un livre, il écrit que Pie XII, le Saint-Siège, les nonces du Vatican et toute l’Eglise catholique avaient sauvé entre 700.000 et 850.000 juifs d’une mort certaine pendant la période nazie […] et que c’est un devoir de conscience et de reconnaissance que de contredire les écrits faux de Hochhuth»

Anti-judaïsme chrétien…

Abordant la question du poids de la responsabilité chrétienne dans la Shoah, le texte la récuse comme «historiquement infondée», car, estime-t-il, cette analyse oublie le caractère particulier du national-socialisme. Le texte précise : «Il est hors de doute que, pendant quasiment deux millénaires, les relations entre chrétiens et juifs ont été, particulièrement en Europe, marquées par un fort anti-judaïsme, qui a provoqué, pour les juifs, des conditions de vie assez difficiles. Ils ont été accusés d’être un peuple maudit et rejeté par Dieu pour le fait d’avoir récusé, et récusé obstinément, la croyance en Jésus-Christ, de haïr les chrétiens, d’être un peuple déicide pour avoir mis à mort, par la main de Pilate, le Fils de Dieu, d’être un peuple condamné à être dispersé pour avoir rejeté Jésus, d’accomplir des sacrifices rituels avec des enfants chrétiens, de profaner des hosties consacrées, d’empoisonner les eaux (ces accusations populaires furent repoussées comme fausses par les papes) et, enfin, de pratiquer l’usure. Ces a priori pseudo-théologiques, qui prétendaient se fonder sur le Nouveau Testament, ont donné lieu à des législations anti-juives, à des conversions forcées au christianisme, à l’institution de ghettos, à la formation de persécutions religieuses, à des «pogroms» et à l’assassinat d’individus ou de groupes juifs plus ou moins nombreux à l’occasion de révoltes populaires.»

… et antichristianisme juif

Toutefois, poursuit le texte, «il ne faut pas oublier l’attitude des juifs vis-à-vis des chrétiens : leur prière quotidienne prévoyait une […] maléédiction contre les hérétiques et contre les chrétiens (les nozrim, disciples du Nazaréen), on priait pour qu’ils «disparaissent dans l’instant et qu’ils soient rayés du livre de la vie» […], on présentait aussi le Christ comme un sorcier […] poussant le peuple juif à l’apostasie. […] Un autre rumeur infamante courait sur le compte Jésus, affirmant qu’il était né d’un adultère et que son vrai père aurait été un soldat romain du nom de Pantera ou Pandera, ce qui explique que Jésus est nommé dans différents textes rabbiniques comme «ben Pandera», fils de Pandera.»

Le texte reconnaît cependant : «Il est vrai, dans tous les cas, qu’un antijudaïsme, persistant et âpre, a existé dans le monde chrétien, lequel a pénétré profondément la conscience populaire chrétienne. Mais il est également exact qu’en deux mille ans, et dans des situations les plus diverses – y compris là où une élimination systématique des juifs aurait été possible -, jamais aucune action comparable à la Shoah ne s’est produite.»

’antijudaïsme n’explique pas la Shoah

«Quel est donc le rapport entre l’antijudaïsme chrétien et la Shoah ?» se demande alors l’article. Réponse : «Ce n’est pas un rapport direct de cause à effet et il est absolument faux de dire que l’antijudaïsme a été la cause directe ou seulement indirecte de la Shoah qui se serait produite parce que l’antijudaïsme aurait créé un climat propice pour qu’elle soit possible. La responsabilité du monde chrétien dans la Shoah tient uniquement dans le fait que les préjugés antijuifs ont empêché certains chrétiens de faire leur possible pour éviter la capture et la déportation des juifs dans les camps de concentration. Nous disons «certains chrétiens» parce qu’il y a eu de nombreux chrétiens – prêtres, religieux, et laïcs – qui ont risqué leur propre vie et celle de leur famille pour cacher et sauver des personnes juives.»

Il y a eu des «fautes graves des chrétiens envers le peuple juif», ajoute le texte; «et de ces fautes graves, l’Eglise se repent devant Dieu et devant le peuple juif. Mais il faut aussi reconnaître honnêtement que telles fautes – y compris l’antijudaïsme – ont influencé, dans un faible mesure seulement, et de manière indirecte, sur la tragédie du peuple juif.» Par ailleurs, «dire que la Shoah s’est produite au coeur de la chrétienté ne tient pas compte du fait que l’Allemagne du IIIe Reich était un pays certes «chrétien», mais aux mains d’un régime totalitaire, férocement anti-chrétien, dont l’un des objectifs était de détruire le christianisme, parce qu’il était d’origine juive. Affirmer enfin que «les bourreaux étaient tous baptisés», c’est oublier que les chefs nazis et les SS avaient pour la plupart renié le baptême chrétien, pour le baptême aryen.»

Un antisémitisme aryen et antichrétien

Le texte conclut sur ce point : «La Shoah ne peut se comprendre qu’en tant qu’elle est le fruit, non de l’antijudaïsme en milieu chrétien, mais de l’antisémitisme aryen et donc païen et antichrétien. La Shoah se serait produite même si, par hypothèse, l’antijudaïsme chrétien n’avait pas existé. […] Pour le national-socialisme, la «solution finale», c’est-à-dire l’anéantissement total des juifs, était un but, non pas marginal et secondaire, mais essentiel, lié à son essence profonde, de telle manière que personne n’aurait pu l’empêcher.»

A ce titre, l’article rappelle que beaucoup de chefs nazis appartenaient à «l’Ordre Noir», une «organisation initiatique qui s’inspirait de l’Ordre des Chevaliers Teutoniques». Cet Ordre avait «ses rites païens, dont les plus importants étaient le baptême et le mariage, et son credo, qui était : «Nous croyons dans le Dieu de l’univers, nous croyons à la mission de notre sang, duquel jaillit pour toujours la jeunesse de notre terre allemande. Nous croyons dans le peuple, porteur de la race et dans le Führer que Dieu nous a envoyé. L’idéologie nazie dans le sang et dans la race était donc profondément païenne et antichrétienne […].»

Douze volumes d’archives qui ne cachent rien

Quant à la troisième critique, portant sur l’impossibilité d’accès des archives du Vatican de la période concernée, l’article répond que le travail de la commission des quatre historiens catholiques entre 1965 et 1981 (dont le résultat est contenu dans les douze volumes des «Actes et documents du Saint-Siège relatifs à la seconde guerre mondiale») ne peut pas être remis en cause en raison de la qualification des quatre jésuites, «historiens de profession, connus et universellement appréciés pour la rigueur scientifique de leurs travaux, […] sérieux et préparés». (apic/imed/cip/mp)

20 avril 2001 | 00:00
par webmaster@kath.ch
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60e voyage du pape Jean Paul II à l’étranger

APIC – Dossier

La Jamaïque et le Mexique

Rome, 9août(APIC) Le pape Jean Paul II a entrepris lundi son 60e voyage

hors d’Italie qui le conduira en Jamaïque, et au Mexique, pays qu’il avait

déjà prévu de visiter l’an dernier. Il en avait été empêché alors par une

opération des intestins. La troisième étape voyage sera les Etats-Unis où

le pape participera à la VIIIe Journée mondiale de la jeunesse à Denver.

La Jamaïque

L’île de la Jamaïque fait partie de l’archipel des Grandes Antilles et

s’étend sur une superficie de 11’000 km2. Sa nature enchanteresse n’a pas

empêché ses habitants de connaître de grandes souffrances. Le pays, indépendant depuis 1962, compte 2,5 millions d’habitants dont un quart se concentre dans la capitale Kingston. Membre du Commonweathl, la Jamaïque reste

sous l’allégeance de la reine d’Angleterre, représentée par un gouverneur

général, Edward Zacca.

A l’arrivée de Christophe Colomb en 1494, l’île portait le nom de Xamyaca et était peuplée d’Indiens arawaks. Cette population indigène ne résista

pas au travail forcé dans les plantations de cannes à sucre. Un siècle et

demi plus tard, il ne restait plus aucun indien arawak de race pure. A leur

place, les colons firent venir des esclaves d’Afrique. En 1655, les Espagnols furent remplacés par les Anglais qui intensifèrent le recours aux esclaves noirs, ainsi que plus tard à une main-d’eouvre chinoise et indienne.

Actuellement la population d’origine africaine est la souche la plus importante, mais il existe un grand métissage. Les différences raciales correspondent encore pour une bonne part à la stratification sociale: bourgeoisie blanche, classe moyenne métisse, prolétariat noir. Blancs et métis

se rattachent par ailleurs à la culture occidentale, tandis que les noirs

ont gardé de fortes attaches avec les traditions africaines.

L’accroissement de la population pousse un grand nombre de Jamaïcains à

émigrer. Le pays n’est pas le plus pauvre des Antilles, mais son économie

connaît actuellement de graves difficultés dues au chômage, à l’inflation

et à la dette extérieure. Quelques-unes de ses ressources principales: canne à sucre, bauxite et tourisme sont victimes d’un marché mondial morose.

Des chrétiens majoritaires, mais 7% de catholiques

Les chrétiens sont largement majoritaires dans l’ìle, ils constituent

90% de la population. A côté des Anglicans et des protestants, les catholiques forment 7% de la population. Mais ces chiffres sont quelque peu trompeurs, car la religiosité des habitants s’exprime souvent en dehors des canaux institutionnels. Outre le diocèse de Kingston, un second diocèse, celui de Montego Bay, a été créé en 1967. Les structures ecclésiastiques sont

encore celles d’un pays de mission puisque un quart des prêtres seulement

sont des autochtones.

Dans le même temps, la population noire exprime sa vitalité et sa résistance culturelle dans des formes religieuses inspirées à la fois de l’Afrique et du christianisme. Le «rastafarisme» par exemple a engendré de nombreuses communautés où les noirs relisent l’histoire de leur esclavage et

rêvent de leur retour en Afrique. La musique reggae, née en Jamaïque et

chantée par Bob Marley, est directement inspirée par le «rastafarisme». Il

y a là un grand défi pour l’Eglise catholique, peu sensible, semble-t-il, à

cette effervescence socio-religieuse qui traverse le monde des descendants

d’esclaves.

Le Mexique

Le pape se rend au Mexique pour la troisième fois. C’est par ce pays

qu’il avait commencé ses visites internationales, en 1979, à l’occasion de

la troisième Conférence générale de l’épiscopat latino-américain à Puebla.

Onze ans plus tard, il y séjourna une semaine et parcourut une dizaine

d’étapes. Cette année, sa visite sera brève et se limitera au Yucatan.

Le Mexique compte 88 millions d’habitants. L’Eglise y est actuellement

confrontée à une intense activité des sectes fondamentalistes, qui compteraient plus de six millions d’adeptes.

Depuis la dernière visite, un changement important est intervenu: le 21

septembre dernier, jour anniversaire de l’indépendance (1821), le Mexique

et le Saint-Siège ont établi des relations diplomatiques au plus haut niveau. Jusqu’ici, la République du Mexique n’avait échangé des relations

avec le Siège Apostolique que durant trois ans, de 1864 à 1867. Cette décision met un terme à une situation anachronique, puisque plus de 90% de la

population mexicaine est catholique.

L’Eglise jouissait pourtant d’une assise populaire et d’un crédit certains. Lors de la «Conquête» par le cruel Cortes, c’est alertée par les

missionnaires que la couronne d’Espagne mit en place une législation protégéant les Indiens, avant d’envoyer des fonctionnaires vérifier son application. Quand le premier diocèse fut fondé à Tlaxcala (1523), son premier

évêque en appela à son tour au pape Paul III. De cette période émergent des

grands noms, dont celui de Bartolomé de las Casas, évêque de Chiapas en

1548. L’indépendance fut également pour le peuple intimement liée à la foi

catholique, puisque ce sont deux prêtres qui en donnèrent le signal, tous

deux exécutés après avoir été désavoués par une hiérarchie du côté du pouvoir espagnol. Les épreuves subies par l’Eglise au lendemain de l’indépendance ont vérifié et consolidé son assise populaire de l’Eglise.

Une période d’intenses persécutions

Après l’indépendance, le gouvernement s’en prit en effet à l’Eglise, accusée d’avoir pris le parti de l’occupant, avec d’autant plus de virulence

qu’il se sentait frustré du droit de «patronat» accordé hier à la couronne

d’Espagne, qui en avait fait un instrument d’oppression. Au gré des législations – de la constitution de 1857, qui ne reconnaît plus le catholicisme

comme religion officielle, à celle de 1917, qui accentue encore les dispositions antérieures (confiscation des biens ecclésiastiques, expulsion des

religieux étrangers…), s’affirma un pouvoir nettement anticlérical. Le

calvaire des persécutions fut le plus pénible de 1926 à 1929, sous la présidence de Plutarco Elias Calles, fondateur du Parti Révolutionnaire Institutionnel (PRI), qui n’a depuis jamais perdu une seule élection et auquel

appartient l’actuel président Salinas. En novembre dernier, deux mois après

le rétablissement des relations diplomatiques, le pape a béatifié 25 martyrs mexicains, 22 prêtres et 3 laïcs dont la plupart trouvèrent la mort

entre 1926 et 1928, période marquée par le départ de tous les évêques et

l’interdiction pour les prêtres d’exercer leur ministère.

Nouveau statut juridique pour les Eglises

Le climat a changé grâce à deux hommes: Jean Paul II, qui mit Mexico au

programme de sa première visite apostolique, et le président Salinas. En

février 1990, tous deux avaient déjà décidé d’échanger des «envoyés personnels permanents». Le processus ouvert par le président mexicain n’a pas

fait l’unanimité au sein de son parti, où des voix ont dénoncé le projet de

loi révisant l’article 130 de la Constitution de 1917, en vue du rétablissement des relations diplomatiques avec le Saint-Siège. Le 23 janvier dernier, la Commission permanente du Congrès mexicain n’en a pas moins réformé

les articles 3, 5, 24, 27 et 130 de la Constitution, conférant un nouveau

statut juridique aux Eglises du Mexique.

La réforme a été permise par la victoire écrasante du PRI aux élections

d’août 1991, après une campagne d’intimidation du parti au pouvoir, marquée

aussi par l’absentéisme de l’épiscopat. En effet, le PRI dispose depuis de

la majorité des deux tiers qui lui permet de modifier la Constitution. Ce

retour à une domination écrasante du PRI, contraire à la volonté déclaré du

président Salinas lui-même à l’issue des élections générales de juillet

1988, inquiète jusqu’aux réformistes de sa formation.

Quant aux évêques, ils ont publié une déclaration sur le nouveau cadre

juridique devant permettre l’exercice du droit à la liberté religieuse:

«manifester sa religion n’est plus une action circonscrite juridiquement à

la sphère privée des individus, car la loi garantit son caractère associatif et public», expliquent les évêques, en se réjouissant de cette «avancée

notable». Les prélats regrettaient néanmoins les «limites et ambiguïtés» de

la nouvelle loi, notamment pour ce qui regarde le droit à la liberté religieuse dans le domaine éducatif, et «quelques mesures et expressions qui

témoignent d’une méfiance, et même d’un soupçon, comme si l’Eglise, et en

particulier la hiérarchie catholique, était à la recherche de richesses ou

de pouvoir politique, ou encore de prestige social».

Le souffle du néo-libéralisme

Au plan politico-économique, le pays s’est rallié au néolibéralisme. En

1992, l’Accord de libre-échange nord américain (ALENA) a été signé avec les

Etats-Unis et le Canada. Pourtant, selon J. Castaneda, le Mexique «possède

l’une des structures sociales les plus inégalitaires du monde. Tous les riches et les puissants sont blancs; et l’immense masse des pauvres et des

exclus, métis ou indiens».

C’est à ces derniers que le pape s’adressera lors de sa visite. En se

rendant à Merida (Uycatan), il répond en effet à une invitation des Indiens

des Amériques. Jean Paul II y rencontrera 3’000 déscendants des plus anciennes populations autochtones d’amérique, des Guaranis aux Mayas et des

Yanomanis aux Apaches. Le pape sera fêté par ses hôtes au sanctuaire marial

d’Izamal, patronne du Yucatan, région où vivent 5 millions d’Indiens.

(apic/cip/mp)

9 août 1993 | 00:00
par webmaster@kath.ch
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