LES JUIFS, PIE XII ET LA LÉGENDE NOIRE

APIC – Document

Déclaration de l’historien Pierre Blet

Le Père Blet a présenté vendredi à la presse à Rome son livre «Pie XII et la seconde guerre mondiale d’après les archives du Vatican», (en italien). L’agence de presse internationale «Zenit» publie dans son intégralité la présentation qu’en a lui-même faite l’historien jésuite.

En présentant aujourd’hui le livre «Pio XII e la Seconda Guerra Mondiale negli Archivi Vaticani», on ne prétend offrir aucune révélation tirée du plus profond des archives secrètes: toutes les affirmations reposent sur des textes publiés de 1965 à 1981 dans la collection «Actes et documents du Saint-Siège relatifs à la seconde guerre mondiale», accessible à chacun. On sait comment, quelques années après la mort de Pie XII, se déchaîna contre ce pape un campagne dont tous les ressorts sont encore loin d’être connus.

Pour opposer l’histoire à la légende, Paul VI, qui avait été l’un des plus proches collaborateurs de Pie XII, décida la publication des documents des Archives du Vatican relatifs à la guerre. Ce faisant, Paul VI rendait connus des documents qui restent inaccessibles. Précisons tout de suite qu’il ne s’agit pas de documents protégés par un secret particulier, mais seulement de documents qui ne sont pas encore accessibles à cause de leur caractère récent. Il y avait déjà en cours plusieurs collections de documents diplomatiques, dont de nombreux volumes dont les originaux ne sont que progressivement accessibles aux chercheurs, Documenti diplomatici italiani, Documents on British Foreign Policy 1919-1939, Foreign relations of the United States, Diplomatic papers, Akten zur deutschen auswärtigen Politik (1918-1945). Il convenait donc de permettre aux historiens d’étudier sur pièces l’activité du Saint-Siège durant la guerre. C’est dans cette perspective que fut entreprise au début de 1965 la publication des documents des Archives du Vatican relatifs à la guerre, et la collection fut achevée en 1981.

J’étais l’un des quatre jésuites chargés de cette édition et en 1981 je considérais ce travail achevé. Mais voyant au bout de 15 ans que nos douze volumes demeuraient inconnus même à bien des historiens, j’ai voulu en reprendre la substance en un volume de modestes dimensions, mais aussi dense que possible, «Pie XII et la seconde guerre mondiale d’après les archives du Vatican». En 1998 les éditions San Paolo signaient un contrat avec mon éditeur parisien, pour procéder à une édition italienne, au moment où la dottoressa Emilia Paola Pacelli offrait spontanément sa collaboration. Le résultat est maintenant sous vos yeux. Pour donner quelqu’idée du contenu du livre, je me bornerai ici à évoquer trois points de l’attitude et de l’activité de Pie XII pendant la guerre: 1. Efforts pour sauver la paix et limiter la guerre, 2. Attitude en face du pouvoir national-socialiste. 3. Action en faveur des victimes de la guerre.

1. Dès le lendemain de son élection le 2 mars 1939, face aux menaces d’une nouvelle guerre, qui surpasserait encore en horreurs et en destructions celles du conflit précédent, Pie XII mit en œuvre tous les moyens en son pouvoir pour détourner l’orage. D’abord il s’efforça, soit par son nonce à Berlin, ou à travers Mussolini, de dissuader Hitler d’attaquer la Pologne. Ensuite, après l’invasion de la Pologne, conjuguant sa diplomatie avec celle de Roosevelt, il essaya de maintenir l’Italie hors du conflit. Pour donner un exemple précis de ces derniers efforts, le 18 avril arrivait au Vatican un télégramme du délégué apostolique à Washington avertissant qu’une haute personnalité du gouvernement pensait que l’Italie allait entrer en guerre comme alliéée de l’Allemagne d’ici quelques jours.

Myron Taylor, le représentant personnel de Roosevelt auprès de Pie XII, fut convoqué d’urgence et il eut avec le cardinal secrétaire d’Etat Maglione une longue conversation, à la suite de laquelle il communiquait au président que Maglione estimait que la situation était très critique, et que le président Roosevelt devait écrire immédiatement à Mussolini pour le dissuader d’entrer en guerre. Taylor demanda si le pape était disposé à en faire autant. Maglione interrogea Pie XII et le lendemain 20 avril Myron Taylor télégraphiait à son gouvernement la réponse du pape aux deux questions: «Faut-il envoyer maintenant un message du président à Mussolini ? La réponse a été qu’un tel message devait être envoyé immédiatement. Est-ce qu’une tentative parallèle sera faite en ce moment par Sa Sainteté ? La réponse est oui».

2. C’est encore dans ses relations avec Roosevelt que l’on trouve un exemple très caractéristique de l’attitude de Pie XII en face du pouvoir nazi. On a reproché à Pie XII d’avoir fermé les yeux sur les crimes nazis par crainte d’affaiblir l’Allemagne, boulevard de la chrétienté contre le bolchevisme. Sans évoquer les relations entre le pape et les généraux allemands qui voulaient éliminer Hitler, ni l’avertissement qu’il donna aux Français et aux Anglais de l’offensive imminente de mai 1940, soulignons cet épisode moins sensationnel, mais tout aussi significatif.

Lorsque le Reich entra en guerre contre la Russie soviétique, Roosevelt, qui apportait à l’Angleterre en guerre l’aide du crédit et du matériel américain se posa la question d’aider aussi Staline contre Hitler. Une réponse affirmative était exposée à de sérieuses objections. La dictature politique et la persécution religieuse qui sévissaient en Russie constituaient aux yeux de nombre d’Américains un obstacle insurmontable à une collaboration quelconque avec l’U.R.S.S. Les catholiques condamnaient tout concours prêté à la Russie et appuyaient leur opposition sur l’encyclique de Pie XI publiée en 1937 contre le communisme athée, et particulièrement sur le passage suivant : «Le communisme est intrinsèquement pervers et personne qui veut sauver la civilisation chrétienne ne peut collaborer avec lui en quelque entreprise que ce soit».

Roosevelt renvoya à Rome Myron Taylor, son représentant personnel auprès du pape, pour demander une interprétation authentique de l’encyclique de Pie XI contre le communisme. Les conseillers ordinaires de Pie XII furent partagés: le cardinal Maglione se montra aussitôt d’accord pour faire savoir aux catholiques américains que la situation présente n’était pas celle que considérait Pie XI, Tardini était opposé à toute explication. Pie XII décida dans le sens de Maglione, et le délégué apostolique aux USA fut chargé de confier à un évêque américain le soin d’expliquer aux catholiques que l’encyclique de Pie XI n’interdisait pas de venir en aide à la Russie soviétique en guerre avec l’Allemagne.

3. Mais le grief le plus souvent repris contre Pie XII est d’être demeuré silencieux face aux persécutions raciales menées contre les Juifs, qu’une dénonciation publique de sa part aurait sauvés de l’extermination, «la solution finale», mise en œuvre par le régime nazi à partir de 1942.

La question d’une intervention publique s’était posée d’abord à propos des Polonais, victimes dès le début de la guerre d’une atroce politique d’extermination. Pie XII lui-même déclarait le 13 mai 1940 à l’ambassadeur d’Italie: «loro [gli italiani] sanno sicuramente e completamente le orribili cose che avvengono in Polonia. Noi dovremmo dire parole di fuoco contro simili cose, e solo Ci trattiene dal farlo il sapere che renderemmo la condizione di questi infelici, se parlassimo, ancora più dura». Plusieurs fois des évêques polonais réfugiés en Angleterre réclamèrent ces «paroles de feu». Leurs collègues demeurés sur le terrain étaient d’un autre avis, et le pape et ses conseillers choisirent la discrétion pour ne pas aggraver la persécution et procurer encore quelques secours aux Polonais.

Après l’offensive allemande contre la Russie, la persécution anti-juive se déchaîna dans les territoires soumis au Reich, et des organisations israélites et les gouvernements alliés se tournèrent vers le pape en réclamant des condamnations retentissantes. Des indications nombreuses, mais de valeur incertaines parvenaient au Vatican. Dans son message de Noël 1942, Pie XII évoqua les «centinaia di migliaia di persone le quali, senza veruna propria colpa talora solo per ragione di nazionalità o di stirpe, sono destinate alla morte o a un progressivo deperimento» et encore le 2 juin 1943, il évoqua ceux qui «a causa della loro nazionalità o della loro stirpe [erano] destinati talora anche senza propria colpa a costrizioni sterminatrici». Ces termes paraissent aujourd’hui bien mesurés.

Mais le Pape s’en expliquait dans le même discours: «Ogni parola da Noi rivolta …e ogni Nostro pubblico accenno dovevano essere da Noi seriamente ponderati e misurati nell’interesse dei sofferenti stessi per non rendere, pur senza volerlo, più grave e insopportabile la loro situazione».

Déjà la Croix-Rouge avait exprimé la même pensée en une formule lapidaire: «Tout d’abord les protestations ne servent de rien ; en outre elles peuvent rendre un très mauvais service à ceux auxquels on voudrait venir en aide». En tout cas après le discours consistorial du 2 juin 1943, non sans réflexion ni même perplexités, comme il l’avoue en plusieurs lettres aux évêques allemands, Pie XII choisit définitivement la voie de la discrétion. Un recenseur de mon livre a exprimé cette attitude de Pie XII en une formule heureuse: «On comprend ce qu’il redoutait: faire payer par le sang des autres quelques belles paroles qui ne lui auraient pas coûté grand chose».

Mais le silence publique couvrait une action secrète à travers les nonciatures et les épiscopats pour faire échec aux déportations. Dans les territoires directement soumis au gouvernement de Berlin, toute intervention en faveur des non-aryens était condamnée d’avance à l’échec. Mais adressées aux gouvernements de Roumanie, Slovaquie, Croatie, Hongrie, qui conservaient une certaine marge d’autonomie, les démarches réitérées à travers les nonces et les représentants diplomatiques de ces pays ont sauvé des milliers de Juifs. Les résultats en apparaissent dans les requêtes répétées de nouvelles interventions et dans les témoignages de gratitude adressés à Pie XII par des associations et les plus hautes personnalités juives au cours de la guerre et après la fin du conflit. Faut-il rappeler que c’est un historien israélite qui avance le chiffre de 850’000 juifs sauvés ? (apic/zenit/be)

10 octobre 1999 | 00:00
par webmaster@kath.ch
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Journée des Droits de l’Homme 1987 (301187)

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Fribourg, 30novembre(APIC) La libre circulation des idées, par la parole

ou par l’écrit, constitue l’une des conditions essentielles de la dignité

et de l’épanouissement de la personne humaine, tant dans la sphère privée

que sur les lieux de travail, dans l’enseignement et la recherche, les assemblées politiques, la littérature et les médias. Là ou cette liberté

n’est pas garantie, ou l’on ne peut ni parler, ni écrire librement, il y a

violation de droits fondamentaux de la personne humaine tels que la liberté

de conscience et d’opinion , la liberté de la presse et celle de l’enseignement et de la recherche.

Tous ces droits sont aujourd’hui garantis non seulement au niveau des

Etats, mais aussi par des conventions internationales relatives aux droits

de l’homme. Et pourtant, nombreux sont les lieux ou, quotidiennement et de

plusieurs manières, ils ne sont pas respectés et ou l’on voit la presse

censurée, des écrivains interdits de publication, la diffusion d’écrits religieux interdite, les échanges épistolaires controlés, l’expression de

convictions politiques ou religieuses poursuivie et sanctionnée.

Face à ces menaces et à ces violations massives de la libre expression

des opinions dans de nombreux pays, nous sommes reconnaissants au groupe

préparatoire d’avoir choisi cette année pour thème de l’action du 10

décembre, journée des Droits de l’homme, «La parole persécutée».

Il importe également de veiller constamment à la sauvegarde de la

liberté de parole dans notre pays, afin que la diversité des opinions

trouve à s’exprimer dans la presse, à la radio et à la télévision. Il faut

encourager non seulement la liberté de la presse et de l’information, mais

aussi une politique des médias soucieuse de promouvoir l’expression

d’opinions diverses et d’assurer la liberté des médias face aux pressions

commerciales et idéologiques.

Sans une véritable liberté de la parole, l’activité des Eglises et leur

mission, la proclamation de la Parole, seraient menacées. Mais ce n’est pas

la seule raison qu’ont les chrétiens et leurs Eglises de s’engager dans

cette tâche importante qu’est la lutte en faveur de la liberté de parole.

Notre motivation essentielle s’enracine dans la conviction que toute personne humaine est créée à l’image de Dieu. En raison de notre foi et à la

suite de Jésus, nous avons le devoir de nous engager pour que soit respecté

le droit de toutes les images de Dieu, c’est-à-dire de tous les êtres humains.

Le Président du Conseil Président de la Conférence

de la Fédération des Eglisesdes Evêques suisses

protestantes de la Suisse

+ Henri Schwery

Heinrich RusterholzEvêque de Sion

L’Evêque de l’Eglise catholique-chrétienne de Suisse

+ Hans Gerny

30 novembre 1987 | 00:00
par webmaster@kath.ch
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