Egypte: Un papyrus copte du IVe siècle révèle un Evangile différent
APIC témoignage
Le désert égyptien livre une autre version de l’Evangile de Matthieu
Par Patrice Favre, «La Liberté»
Yverdon-les-Bains, 15 novembre 2000 (APIC) Un papyrus copte du IVe siècle – pas encore rendu public – révèle un Evangile différent du texte canonique. Un professeur suisse a pu lire le manuscrit. C’est la découverte du siècle! >>, lance le professeur Rodolphe Kasser dans sa villa d’Yverdon-les-Bains. Il a sous les yeux la copie d’un > copte du IVe siècle vendu discrètement par un antiquaire égyptien.
Ce manuscrit rédigé sur papyrus contient en effet une version sensiblement différente de l’Evangile de Matthieu. Ainsi, le célèbre épisode des changeurs dans le Temple de Jérusalem connaît un autre déroulement. Les quatre Evangiles racontent la grande colère du Christ, qui chasse les brasseurs de monnaie et renverse leurs tables avant de lancer: >
C’est la seule fois dans les Evangiles où le Christ se permet un geste violent, ce qui n’a pas manqué d’intriguer les théologiens et d’inspirer les artistes. Or, le codex copte mentionne uniquement l’entrée de Jésus dans le temple, où il trouve les changeurs autour de leurs tables, puis le texte rapporte la remontrance que leur fait le Christ. >
Que disait le Grec?
La découverte de ce papyrus a été annoncée à la communauté scientifique lors du dernier congrès de l’Association internationale d’études coptes, à Leyden (Pays-Bas), du 27 août au 3 septembre dernier. A cette occasion, d’ailleurs, Rodophe Kasser a été élu président d’honneur de l’association.
C’est un professeur de Berlin, Hans-Martin Schenke, un des spécialistes les plus éminents en coptologie, qui a présenté l’Evangile nouvellement découvert. Schenke prépare l’édition du manuscrit, dont il a confié une copie à son collègue d’Yverdon. Professeur à l’Université de Genève jusqu’en 1998, Rodolphe Kasser est en effet un spécialiste des dia-lectes coptes, qu’il a pu étudier dans les manuscrits de la Bibliothèque Bodmer de Genève, une des collections privées les plus importantes au monde.
>, juge R. Kasser.
Il ne pleut jamais
Comment expliquer l’apparition soudaine d’un document d’une telle importance? >, dit-il en rappelant la découverte des apo-cryphes de Nag Hammadi en 1947. Dans certaines régions, il ne pleut jamais et les objets enterrés avec les défunts se conservent indéfiniment. C’est le cas en particulier autour des anciens monastères coptes bâtis dans le désert, à la limite des zones fertiles. Faute d’engrais, les paysans vont aujourd’hui encore chercher dans les cimetières abandonnés la belle terre noire engraissée par les morts, lesquels étaient ensevelis parfois avec les objets qui leur étaient chers. C’est ainsi que des manuscrits voient le jour.
Un Evangile bricolé
> Si c’est vrai, la variante des changeurs chassés du Temple pourrait s’expliquer par les tensions toujours plus fortes entre les premières communautés chrétiennes et les juifs, qui refusaient de reconnaître le Christ. Un premier Evangile de Matthieu, moins polémique parce que rédigé au moment où le divorce n’était pas encore consommé, n’aurait pas mentionné le geste musclé du Christ.
Celui-ci aurait été ajouté ensuite, en s’appuyant peut-être sur une tradition orale. Cette hypothèse relance le débat qui agite régulièrement la communauté scientifique sur un > rédigé en araméen, la langue du Christ. Ce texte aurait servi de base aux deux Evangiles connus aujourd’hui (le texte standard de Matthieu et l’autre qu’entrevoit Schenke à travers les originalités de son texte copte).
Ces deux Evangiles ne seraient donc pas des originaux, mais des versions grecques successives de l’original araméen. C’est un certain Papias, évêque en Phrygie vers 130, qui a suscité cette hypothèse en affirmant catégoriquement que >.
Jamais retrouvé
Cet original araméen n’a jamais été retrouvé. Faut-il en voir une trace dans l’Evangile copte récemment découvert? Ou bien celui-ci n’est-il qu’une traduction libre?
Noël pour les prêtres: du stress du ministère à la joie du mystère
APIC – Témoignage
Marie-Claude Fragnière, pour l’Agence APIC (051295)
Fribourg, 5décembre(APIC) Ca y est, nos villes grandes et moyennes pétillent comme du champagne sous le scintillement des mille et une décorations
de Noël. L’ambiance est à l’effervescence. Toute l’année, on trotte à cent
à l’heure et voilà que le mois de décembre – le temps de l’Avent – apparaît
comme le marathon final. Ce n’est plus du trot mais du galop: de la banque
au magasin, des cartes de voeux au bureau de poste, du miroir aux boutiques
de mode, etc. Et dans la tête, c’est la balade du cheval fou, l’accélération en vue de la fête de Noël: prévoir tout et davantage. La tête, le
temps, le coeur, le corps: partout on affiche complet. Il n’y a plus le
moindre espace pour préparer Noël. Comprenons-nous bien, je voulais parler
de la venue de l’Emmanuel parmi les hommes. Mais si, rappelez-vous: ce bébé-Dieu couché dans la mangeoire de nos coeurs à la merci de nos oublis.
La fresque est caricaturale? Encore que…
Et au fait, pour un prêtre, comment ça se passe cette période du choc des
rencontres entre temporel et intemporel? Réponse à trois voix.
Luigi Griffa, vicaire à la paroisse du Christ-Roi à Fribourg
Noël pour vous, cette année. Cela représente-t-il un grand nombre d’heures
de ministère?
Cela commence avec les confessions du samedi après-midi, la messe du samedi soir, puis les trois messes du dimanche matin, l’après-midi c’est la
préparation de la messe de minuit elle-même, avec ensuite le verre de
l’amitié. Le lendemain, jour de Noël, il y a les messes du matin. Il faut
compter pratiquement deux jours et demi de ministère non-stop pour le weekend de Noël.
Avez-vous l’impression d’être débordé par cette tâche?
Personnellement, je suis au début de ma vie de prêtre, mais je pense
qu’avec les années et l’expérience, on peut par la planification à l’avance, alléger cette charge de ministère. Ce qui est exténuant, ce sont les
jours qui précèdent Noël avec les soupers, les visites que nous faisons
dans les hômes et les hôpitaux, les réunions de groupe, les rencontres personnelles. Sans compter les enterrements dont le rythme n’est évidemment
pas diminué parce que c’est Noël. Il est évident que la période de l’Avent,
est pour nous prêtres synonyme d’activité intense, de fatigue, voire de
stress.
La fatigue physique et le stress, ne sont pas incompatibles avec l’imprégnation du mystère de paix et de joie de Noël?
On a beau s’être tué à la tâche pendant les jours qui précèdent, la nuit
de Noël, il y a chaque fois un moment de grâce où l’on est vraiment porté,
et où l’aspect «poids lourd» du ministère disparaît. Je me souviens d’une
année récente où le 24 décembre même, dans l’après-midi, j’avais vécu une
rencontre très éprouvante qui m’avait boulversé. Mais la nuit même, pendant
la messe, la grâce de Noël était au rendez-vous.
Que signifie pour vous bien vivre Noël?
Se donner totalement pour les célébrations. La plus grande joie d’un
prêtre, c’est d’arriver à transmettre à ceux qui nous sont envoyés cette
intime conviction: Dieu s’est fait l’un des nôtres.
Vivre en plénitude une fête liturgique: cela se travaille ou cela se reçoit?
C’est quelque chose qui se reçoit, mais comme cela revient chaque année,
que c’est répétitif, on peut en le sachant à l’avance contribuer à se préparer à accueillir ce que l’on va recevoir. On peut par cet «avant» contribuer à une meilleure réceptivité de la grâce. Cependant, j’ai remarqué que
si l’on prépare une fête liturgique en mettant avec la meilleure intention
du monde toute sa concentration sur la préparation, on finit par oublier ce
que l’on prépare. On finit par croire que c’est de nous qui dépend complètement la grandeur et la beauté de la fête liturgique.
Qu’est qui vous ferait le plus plaisir à Noël?
Que le plus grand nombre de nos paroissiens sortent de la messe de minuit avec la certitude au coeur que Dieu est là…
Mauro Lepori, Abbé de l’Abbaye cistercienne d’’Hauterive, près de Fribourg
La fête de Noël représente un grand nombre d’heures de ministère?
Au monastère, le ministère c’est surtout la prière, la liturgie, les
messes, les répétitions des cérémonies et la préparation ds homélies. Il ya
aussi durant cette période une nette augmentation des confessions, une augmentation de l’activité d’accueil à l’hôtellerie. C’est également pour Noël
que nous envoyons notre chronique annuelle ainsi que nos voeux. C’est vrai
que le monastère devient un peu une fourmilière pendant la période de
l’Avent. Mais dans la clôture, le silence et le recueillement demeurent.
Avez-vous l’impression d’être débordé par cette tâche?
Cette année, j’ai demandé que la rédaction de la chronique se fasse
avant décembre pour atténuer un peu cette pression, pour éviter le mauvais
stress. J’appelle mauvais stress celui qui engendre de la nervosité intérieure et extérieure. Je dois vous dire qu’en entrant au monastère, j’étais
soulagé d’être détaché de l’aspect social des convenances à respecter, des
achats, des cadeaux à faire, etc. J’étais heureux d’être libéré de ce «surmoi social» un peu artificiel qui génère beaucoup d’agitation et de distraction. J’aspirais au silence pour goûter le mystère de Noël et j’étais
heureux de le trouver à Hauterive.
La fatigue physique et le stress, ne sont-ils pas incompatibles avec
l’imprégnation du mystère de paix et de joie de Noël?
Cette question, je peux me la poser chaque jour de l’année – liée à ma
fonction de Père Abbé -. Ne me fait-elle pas passer à côté de ma vocation
la plus profonde? Quelle est ma vocation la plus profone? Souvent, on a des
clichés sur la forme que doit prendre notre vocation. On se voit, on se
projette en train de réaliser sa vocation de telle manière. Mais Dieu est
là pour nous surprendre. Si j’ai conscience que ma vocation la plus profonde, c’est de vivre chaque instant par et pour le Seigneur, si c’est là ma
seule vraie valeur et que je veux la vivre en toute circonstance, alors au
coeur même du stress, la plénitude de ma vocation peut se réaliser, même si
ce n’est pas selon le climat serein, propice à la contemplation, que
j’avais souhaité. Je dirais même, surtout si ce n’est pas tel que je
l’avais souhaité, car je prouve là que mon essentiel n’est pas dans mes activités, mais dans mon coeur à coeur avec le Christ.
Que signifie, pour vous, bien vivre Noël?
C’est devenir un peu plus pauvre face au mystère. Je veux dire: avoir
moins d’encombrement entre moi et le Seigneur, c’est être pauvre face au
Christ pauvre. C’est également communier à la souffrance du monde. Noël est
un mystère de joie, non parce que nos souffrances seraient abolies mais
parce que nous sommes consolés par la présence de Jésus.
Vivre en plénitude une fête liturgique: cela se travaille ou cela se reçoit?
Une fête liturgique est toujours un événement de grâce. Quand il s’agit
de grâce, c’est l’ouverture du coeur qui est importante. Si je choisis
d’ouvrir mon coeur, alors je dois orienter ma liberté dans le sens de ce
choix, c’est-à-dire refuser d’être rempli par autre chose que par le Seigneur. C’est là ma part d’intervention, le reste est donné.
Qu’est ce qui vous ferait le plus plaisir à Noël?
Recevoir cette grâce: avoir davantage conscience que l’Amour du Christ
est tout et qu’Il suffit. Je le voudrais pour ma communauté et pour moi.
Abbé André Bise, curé de campagne à Vuadens en Gruyère
Concrètement, combien d’heures de ministère cela va représenter pour
vous, la fête de Noël de cette année?
C’est difficile à chiffrer. Il ne s’agit pas vraiment d’un nombre précis
d’heures de travail. Je parlerais plutôt d’une préoccupation constante depuis le début de l’Avent pour la mise en place de la fête de Noël. Cette
mise en place se fait à trois niveaux: la préparation de la liturgie:
chants, crêche, décoration, enfants de choeur; la préparation plus intérieure des paroissiens: confessions, homélies, recontres: et enfin la préparation ou du moins la présence aux rencontres communautaires – qui sont
toujours des occasions de contact que j’apprécie – avec les personnes âgées, les malades, les enfants, etc.
Avez-vous l’impression d’être débordé par cette tâche?
Non, pas du point de vue de la tâche concrète à accomplir. Cependant, je
pourrais dire que je connais cette impression de débordement face à la préparation spirituelle au mystère de Noël: il y aurait tant à faire!
Je crois qu’il y a en effet une certaine incompatibilité. J’ai toujours
eu l’impression que l’affairement autour des fêtes de Noël prenait le dessus sur la réalité de la foi. L’émerveillement face à cette chose étonnante. «Dieu vient demeurer parmi nous», est souvent étouffé par l’activisme
profane, sentimental, voire folklorique lié à la préparation de Noël.
Que signifie pour vous bien vivre Noël?
Voila la question importante. Je n’ai jamais été satisfait par la façon
de vivre les fêtes de Noël en paroisse. Bien sûr, je ne suis pas juge: il
peut se passer des merveilles dans les coeurs même si on ne vient à l’église que pour vibrer de souvenirs en entendant chanter «Il est né le divin
Enfant» ou que pour montrer la crêche aux enfants – en ce sens là, les enfants à Noël ont souvent auprès de leurs parents le rôle des anges auprès
des bergers: «Un Enfant nous est né, allons voir là-bas».
Mais je reste sur ma faim. J’aimerais que l’attente et la réception de
l’Enfant Jésus se fasse d’une manière plus intense, plus silencieuse, plus
vraie. Je ne parle pas uniquement pour les autres, moi aussi je me sens
pris parfois dans les filets de l’activisme, de la distraction, de la tension à la période de Noël. J’en souffre et je pense ne pas être le seul.
Quelquefois j’aspire à vivre l’Avent et préparer Noël avec un petit groupe
dans le silence et la simplicité. J’ai la chance d’avoir des paroissiens et
des paroissiennes fidèles aux messes de semaine et j’aime sentir cette ferveur simple et profonde qui se vit sobrement sans souci du décor. Je crois
que c’est dans la simplicité et ce silence que l’on peut vraiment s’intérioriser. Bien vivre Noël, c’est le vivre dans la foi.
Vivre en plénitude une fête liturgique: cela se travaille ou cela se reçoit?
Pour répondre à cette question, je vais vous raconter un paradoxe que
j’ai expérimenté il y a quelques années. Un groupe de jeunes avait dit
qu’il tenait à s’occuper de la préparation du vin chaud et des biscuits
après la messe de minuit. Ils avaient fait cela d’une manière remarquable,
les biscuits étaient excellents, tout était parfaitement bien préparé, mais
ce l’était tellement qu’ils n’avaient pas eu le temps de venir à la messe.
Le souci de bien faire avait totalement évacué l’essentiel de Noël. Cela
montre bien les limites de la préparation. Je crois que la liturgie est
très importante parce que très signifiante: il est important d’avoir une
belle crêche, de beaux chants avec des paroles pleines de sens. Il est important que l’on encense la crêche. Mais ces gestes prennent toute leur valeur s’ils nous aident à nous rapprocher du mystère de foi. Il ne faut pas
que l’essentiel du mystère se perde dans les soucis extérieurs de la liturgie mais que les gestes liturgiques ramènent au coeur du mystère.
Qu’est ce qui vous ferait le plus plaisir à Noël?
Deux choses: avoir le temps et le désir de vivre cette grande journée de
Noël dans la prière et rencontrer des parents et amis très chers. (apicmcf/ba)