Claude Ducarroz

Ah! ces belles vocations…

«J’ai l’impression qu’il/elle a la vocation». Quand j’entendais de tels commentaires, au temps de ma jeunesse, ça signifiait que la personne montrait des signes qui la prédestinaient à la vie presbytérale ou religieuse.

Heureusement, on a pris conscience –surtout depuis le concile Vatican II- que tout baptisé est un «appelé» à vivre de la vie du Christ comme témoin de l’Evangile, quelle que soit ensuite sa vocation plus précise, dans l’animation de la communauté chrétienne ou dans les innombrables insertions possibles au cœur de la société.

Certaines vocations sont d’ailleurs particulièrement mises en évidence puisqu’elles sont consacrées par un sacrement, comme par exemple le mariage et plusieurs ministères. Il suffit de relire le Nouveau Testament: que de richesses dans la variété des charismes, services et fonctions suscités par la liberté de l’Esprit qui souffle où il veut.

Mais l’honnêteté oblige à ajouter quelque chose: notre Eglise, à tort ou à raison, a aussi institué des interdictions de vocations.

Le mariage: une si belle vocation, que l’apôtre Paul –pourtant célibataire- présentait comme «un grand mystère» signifiant la relation d’amour entre le Christ et l’Eglise. Dans notre Eglise de rite latin, les prêtres sont interdits de mariage, puisque tous doivent être célibataires.

Les ministères ordonnés: que de belles vocations quand elles sont vécues comme des engagements à plein cœur et à plein temps «à cause de Jésus et de l’Evangile». Mais les femmes sont interdites de ministères consacrés.

«Et ce peuple de Dieu, est-ce qu’on l’écoute, est-ce qu’on l’entend?»

On peut trouver de bonnes raisons à ces interdictions qui, de fait, empêchent certains chrétiens d’accéder à tel ou tel bien du Royaume, ces biens étant évidemment des grâces absolument gratuites, pour les hommes comme pour les femmes d’ailleurs.

De bonnes raisons? Récemment les autorités supérieures de notre Eglise ont rappelé ces décisions en même temps que les raisons qui les justifient à leurs yeux. Dont acte.

Mais qu’en pense l’Eglise? Celle dont on sait mieux maintenant qu’elle déborde largement les sphères des hiérarchies constituées, celle à laquelle faisait allusion l’auteur de l’Apocalypse en écrivant: «Celui qui a des oreilles, qu’il entende ce que l’Esprit dit aux Eglises» (Ap 3,22). Celle aussi que le pape François a mobilisée dans la triste affaire de la pédophilie parmi les clercs, lorsqu’il a écrit au peuple de Dieu: «Il est nécessaire que chaque baptisé se sente engagé dans la transformation ecclésiale et sociale dont nous avons tant besoin… Il est impossible d’imaginer une conversion de l’agir ecclésial sans la participation active de toutes les composantes du peuple de Dieu.»

Mais précisément, ce peuple de Dieu, dans la symphonie multicolore de toutes ses vocations issues du baptême, est-ce qu’on l’écoute, est-ce qu’on l’entend? Est-ce qu’on ose lui poser certaines questions en prenant ensuite au sérieux ses réponses ? Ce qui va bien plus loin qu’une assemblée mondiale d’évêques, si opportune soit-elle. Je pense en particulier à ce que vivent, pensent et font les femmes, trop longtemps servantes muettes dans notre Eglise, alors qu’elles montrent tant de dévouement au Christ et à son Evangile, dans et pour l’Eglise.

Tiens! Et si on se posait d’abord la question: le Seigneur de l’Eglise, que pense-t-il de tout cela?

Evangile en main, encore un beau mystère qui reste à explorer et à implorer.

Claude Ducarroz

20 février 2019

Pour Benoît XVI, l'ordination sacerdotale exige l'exclusivité à l'égard de Dieu | © Gregory Roth
19 février 2019 | 13:17
par Claude Ducarroz
Temps de lecture: env. 2 min.
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