Jeanne-Marie Ambly

Une parole scandaleuse...

Jean 6, 41-51

Jeanne Marie d’Ambly l Les Juifs récriminaient contre Jésus. Le verbe a une couleur nettement négative. Leurs murmures pourraient pourtant réveiller notre foi. Est-ce que nous n’accueillons pas d’un cœur habitué les affirmations surprenantes, voire scandaleuses, de Jésus ? Au pas à pas du texte tâchons d’y prêter une oreille neuve.

Personne ne peut venir à moi, si le Père qui m’a envoyé ne l’attire. En écho, se fait entendre la parole par laquelle, dans l’évangile de Matthieu, Jésus confirme la réponse de Pierre qui vient de le reconnaître comme Christ, Fils du Dieu vivant : ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est aux cieux (Mt 16, 17). Venir à Jésus ne relève pas de la chair et du sang, mais d’un attrait suscité par le Père.

Le texte avance par vagues successives, dont chacune en se déployant va un peu plus loin que la précédente. Dimanche dernier, nous avons entendu : qui voit le Fils et croit en lui a la vie éternelle, et moi, je le ressusciterai au dernier jour (v. 40). Ces paroles reprises presqu’à l’identique (v. 44 et 47) creusent un sillon dans le cœur du lecteur. Venir à Jésus et, en cet homme dont nous connaissons le père et la mère, voir le Fils suppose d’être attiré par le Père. Le croire en lui du verset 40 devient un croire sans complément (v. 47). Un croire absolu qui, parce qu’il s’appuie sur le Père, est ouvert à tous les possibles. Un croire auquel Jésus promet, au futur, la résurrection, mais qui, dès aujourd’hui, ouvre à la vie éternelle. L’expression évoque spontanément une vie qui ne finira pas. Chez Jean, elle a une connotation infiniment plus riche. C’est la vie dont vivent le Père et le Fils dans la communion de l’Esprit.

Pour que les hommes vivent de cette vie-là en abondance (Jn 10, 10), Jésus est venu et donne sa chair en nourriture. Affirmation inacceptable ! Cette parole est rude, qui peut continuer à l’écouter ? (v. 60) On ne comprend que trop la réaction des disciples. La réponse de Jésus est surprenante : c’est l’Esprit qui fait vivre, la chair n’est capable de rien (v. 63). Cette chair capable de rien, ne vient-il pas d’affirmer qu’elle est donnée pour la vie du monde ? Il faut prêter grande attention à ce dernier verset : Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie du monde. Le pain qui fait vivre de la vie du Père et du Fils, c’est la chair donnée. La chair habitée par Celui qui est le Don par excellence, la chair transfigurée par l’Esprit. Cela n’enlève rien au réalisme stupéfiant de ce don, mais au contraire en fait la vraie nourriture (v. 55).


Evangile de Jésus-Christ selon Saint Jean

Comme Jésus avait dit: «Moi, je suis le pain qui est descendu du ciel», les Juifs récriminaient contre lui : «Cet homme-là n’est-il pas Jésus, fils de Joseph ? Nous connaissons bien son père et sa mère. Alors comment peut-il dire: ‘Je suis descendu du ciel’ ?» Jésus reprit la parole: «Ne récriminez pas entre vous. Personne ne peut venir à moi, si le Père qui m’a envoyé ne l’attire vers moi, et moi, je le ressusciterai au dernier jour. Il est écrit dans les prophètes: Ils seront tous instruits par Dieu lui-même. Tout homme qui écoute les enseignements du Père vient à moi. Certes, personne n’a jamais vu le Père, sinon celui qui vient de Dieu: celui-là seul a vu le Père. Amen, amen, je vous le dis: celui qui croit en moi a la vie éternelle. Moi, je suis le pain de la vie. Au désert, vos pères ont mangé la manne, et ils sont morts; mais ce pain-là, qui descend du ciel, celui qui en mange ne mourra pas. Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel: si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour que le monde ait la vie.»

Pour que les hommes vivent de cette vie-là en abondance (Jn 10, 10), Jésus est venu et donne sa chair en nourriture.
8 août 2015 | 11:46
par Jeanne-Marie Ambly
Temps de lecture: env. 3 min.
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