Homélie TV de Noël, 25 décembre 2019 (Jn 1, 1-18)

Don Italo Molinaro – Basilique du Sacré-Cœur, Lugano (TI)

Il y a un don, une grâce, une lumière, qui sont à jamais cachés dans le cœur du monde : Jésus. Dieu l’a envoyé et l’a mis au monde parmi nous, comme la lumière toujours plus forte de nos ténèbres. Et aujourd’hui nous avons chanté que toute la terre a vu cette lumière, qui est le salut de notre Dieu. C’est notre bonne nouvelle en ce jour de Noël, la fête de la naissance de Jésus à Bethléem.

Nous, chrétiens, cependant, en disant cela, nous ne sommes pas des triomphalistes. Et nous ne sommes pas naïfs non plus. En fait, nous croyons certainement en la Lumière qui illumine chaque homme, mais nous voyons aussi, dans le monde et dans nos cœurs, les effets des ténèbres. Au contraire, il nous semble parfois que les ténèbres éteignent l’une après l’autre les lumières dont nous avons besoin pour vivre.

Comment croire encore en la lumière ?

Par exemple, nous sommes alarmés par les conflits et les problèmes sociaux qui en sont la cause. Nous sommes en colère parce que dans le monde, la distance entre les pauvres et les riches s’accroît. La crise écologique nous inquiète et nous estimons que sur ces questions, la vérité est l’otage d’immenses intérêts économiques. La révolution numérique ouvre d’énormes possibilités mais risque de nous transformer en consommateurs manipulables à volonté. Et parfois, ceux qui ressentent le fardeau de l’échec se sentent désespérés.

Pourtant, malgré l’obscurité, nous sommes ici pour célébrer à nouveau la naissance de la Lumière et nous voulons être une « ville de Noël » ! Comment est-il possible de croire encore en la Lumière ?

Pour voir la lumière, il faut peut-être d’abord reconnaître les ténèbres ! Le chemin de la lumière part en effet de la capacité à comprendre que nous souffrons dans les profondeurs : quelles sont les blessures à la base de tout ce qui nous fait souffrir aujourd’hui ? Quelle est notre vraie obscurité qui éteint la lumière ?

Un manque d’humanité

Peut-être que les humains souffrent tellement aujourd’hui parce que nos vies manquent d’humanité. Les peurs et les désirs frustrés qui marquent notre époque nous enlèvent les plus belles qualités humaines et nous sommes comme une crèche où l’on vole, une à la fois, toutes les figurines. Et à la fin, la crèche de cette crèche qui est notre vie, reste vide : l’enfant a disparu au centre de notre crèche ! L’humain a disparu !

Il est important de voir et de comprendre en quoi consiste ce manque d’humain, ce manque de lumière. Il est important de comprendre ces ténèbres et d’avoir le courage de les porter devant le Christ, la lumière qui vient dans le monde ! Parce que si nous ne reconnaissons pas nos ténèbres, nous ne pouvons jamais imaginer de quelle lumière nous avons besoin ! C’est peut-être aussi pour cela que nous voulons encore construire les crèches, comme le Pape François nous l’a enseigné cette année : vivre l’expérience d’être devant un signe de Jésus, un « admirable signum », auquel nous pouvons aussi présenter notre obscurité.

Prions donc aujourd’hui pour recevoir la lumière ! Nous voulons nourrir notre désir de lumière et nous demandons à Jésus d’éclairer notre humanité en nous donnant l’occasion de redécouvrir une plus belle manière d’être humain.

Deux ailes pour voler : aimer et nous laisser aimer

Mais concrètement, qu’est-ce que l’humain ? Nous découvrons que la lumière de Jésus nous attire à l’empathie et à l’amour, et nous montre la beauté d’une vie qui reconnaît la dignité de tout être vivant, dans la justice et la liberté. La lumière de Jésus nous montre le potentiel de la miséricorde pour rendre nos relations plus sereines. La lumière de Jésus allume les espoirs et les perspectives, et nous motive à être un don pour les autres. La lumière de Jésus nous enseigne à être ensemble et à nous accueillir dans la diversité des cultures, des religions, des couleurs, des sexes, des âges et des conditions sanitaires. La lumière de Jésus nous donne deux ailes pour voler : aimer et nous laisser aimer.

L’évangéliste Jean dans l’Évangile d’aujourd’hui résume cette humanité pleine de lumière par une parole : les enfants ! Jean nous rappelle que ceux qui acceptent la Lumière reçoivent le pouvoir de devenir enfants de Dieu. Nous sommes tellement habitués à ces expressions que nous ne comprenons plus leur force. S’il y a des enfants, cela signifie que la vie continue et peut s’épanouir. S’il y a des enfants, cela signifie que la réalité humaine est encore ouverte à un avenir et à une croissance. S’il y a des enfants, il y a aussi des relations et des liens de famille et d’amour. Et puis, si nous sommes enfants de Dieu, cela signifie que notre cœur humain a en lui une véritable ressemblance divine, un gène divin pour ainsi dire, une lumière divine ! Si nous sommes enfants, enfants de la Lumière, la crèche de notre vie se transforme et nous la découvrons avec émerveillement, habitée par de nombreuses personnes, et peut peut-être aussi accueillir le Fils de Dieu !

Si nous sommes dans les ténèbres, même une petite lumière divine dans le fond de notre cœur peut faire une différence. Et comme l’a écrit le poète américain Augustine OG Mandino: « J’aimerai la lumière parce qu’elle illumine mon chemin, et je supporterai les ténèbres parce qu’elles me montrent les étoiles ». Parfois, nous avons aussi besoin d’obscurité ! Que les ténèbres nous montrent les étoiles, et que l’étoile du Christ rallume les lumières de l’être humain dans notre ville. Pour que ce soit vraiment la ville de Noël.
Amen.

NATIVITÉ DU SEIGNEUR, messe du jour
Lectures bibliques : Isaïe 52, 7-10; Psaume 97, 1.2-3ab, 3cd-4, 5-6; Hébreux 1, 1-6; Jean 1, 1-18

Homélie de Noël 25 décembre 2019 (Jn 1, 1-18)

Abbé Jean-Marie Oberson – Eglise Notre-Dame de la Paix, La Chaux-de-Fonds, NE

La voici arrivée, la merveilleuse fête de Noël, tant attendue des enfants, tant préparée dans nos familles. Mais Noël, c’est aussi un moment difficile pour celles et ceux qui se sentent seuls, car un conjoint, un être cher n’est plus là ; car l’argent manque, la situation est précaire. Il y a quelques jours, une maman avec ses deux enfants me disait : « je suis triste ; je ne peux rien acheter pour mes enfants, même pas un sapin de Noël ». Elle m’a avoué avoir pensé mettre fin à ses jours. Les pleurs de son plus jeune enfant qui sans doute a perçu que quelque chose n’allait pas, l’ont sauvée. Je l’ai aidée comme j’ai pu avec des bons « caritas », une petite aide qui doit rester notre secret, car je ne veux pas me donner en exemple. Chacun fait comme il peut, comme il pense bien faire.

Oui, il y a des mamans seules pour qui Noël signifie des jours encore plus difficiles. Je pense aussi à vous qui passez ce Noël à l’hôpital, en EMS, en prison ou dans tout autre lieu où vous n’auriez pas aimé être pour vivre cette fête. Dans les institutions, finalement, c’est encore pas si mal, car il y a le plus souvent quelque présence, un signe d’attention du personnel, une visite toute de bienveillance. Merci à nos consœurs et confrères de l’Armée du Salut qui chantent Noël dans les EMS dans nos Montagnes neuchâteloises en tout cas, et sûrement ailleurs. Merci à toutes celles et ceux qui donnent simplement un peu d’amour et d’attention à qui en a besoin. Là est le vrai Noël.

Noël, c’est la naissance, la vie. Tout ce qui célèbre la vie, c’est Noël !

Pourtant, la pauvreté évoquée par la naissance du Fils de Dieu dans une crèche reste une réalité de notre monde. Pour certains, il faut se contenter du strict nécessaire. Alors, les ouvertures prolongées des magasins, les vitrines garnies et scintillantes, les pubs à la TV et qui remplissent nos boîtes-à-lettres, peuvent donner l’impression d’avoir été oublié des hommes, de Dieu ?

J’imagine que certaines et certains parmi les auditeurs, écoutent cette messe seuls ou à la maison, et que vous vous sentez un peu les oubliés de cette fête de Noël.

Mais justement, cette fête, la vraie, la fête chrétienne est faite pour vous, les premiers. Je remercie les services de la radio de me permettre de vous rejoindre cette année. Avec vous tous, ce Noël, pour moi, gagne en authenticité. Je dis au Seigneur : « plus que jamais, donne-moi la grâce de ne pas décevoir celle ou celui qui m’écoute parce qu’il a allumé la radio par hasard ou parce qu’il en sent le besoin et attendait ce rendez-vous. Sers-toi de mes paroles, de mes pauvres paroles humaines pour le rejoindre et lui faire sentir que tu l’aimes. »

« Mais si le Seigneur m’aime, ne devrait-il pas me tirer de ma solitude, de ma situation ? » penses-tu peut-être. Il le fait à sa façon. J’en suis sûr. Mais en même temps, il vient d’abord partager notre pauvreté. C’est le mystère de Noël.

Il vient partager notre pauvreté

Permets-moi (le lien des ondes me permet de m’adresser à toi avec ce ton familier) permets-moi de te lire un beau passage de l’abbé Maurice Zundel. Ce prêtre, né à Neuchâtel en 1897 a reçu le don de bien parler de Dieu, au point que le pape Paul VI lui avait demandé de prêcher une retraite spirituelle au Vatican en 1972, 3 ans avant que le Seigneur rappelle à lui cet abbé.

Donc, l’abbé Zundel écrit : « il y a deux manières d’aborder le mystère de Noël : Selon la première, Dieu, en se faisant homme, abandonne une part de ce qu’il est, sa grandeur, sa majesté, sa toute-puissance. Selon la deuxième, l’enfant nouveau-né dans une crèche, fragile, dépendant de Marie, tout petit, ne trahit pas le visage de Dieu, mais nous dévoile précisément quelque chose de ce visage, et quelque chose de fondamental : la fragilité, la pauvreté de Dieu. »

Pour l’abbé Zundel, on peut donc penser Noël de deux façons :
Selon la première façon : Dieu se fait pauvre pour nous rejoindre dans la pauvreté. Il se fait solidaire. C’est gentil, mais ça ne me fait pas sortir de ma pauvreté, pensera justement le pauvre.

La fragilité de Dieu

Selon la deuxième façon : Dieu ne se fait pas pauvre, mais révèle sa vraie pauvreté devant l’humanité qu’il vient sauver. Ecoutons encore l’abbé Zundel : « Je crois à la fragilité de Dieu parce que, s’il n’y a rien de plus fort que l’amour, il n’y a rien de plus fragile. Dieu fragile, c’est la donnée la plus émouvante, la plus bouleversante, la plus neuve et la plus essentielle de l’Évangile : un Dieu fragile est remis entre nos mains. » « La grandeur de Dieu, c’est qu’il est tout Amour et la grandeur de Dieu, c’est qu’il n’a rien. La grandeur de Dieu, c’est qu’il donne tout.  (…) Et c’est justement à cette grandeur que Dieu nous appelle. »

Dieu nous appelle à cette grandeur : tout donner comme lui. Pour donner, il faut qu’il y ait une raison de donner, il faut qu’il y ait un vide, une pauvreté à combler. Alors, toi qui es pauvre, toi qui te sens seul, Dieu te donne à nous « les riches », pour que nous apprenions à donner. Si tu restes dans ta solitude, ta misère, c’est à cause de nos cœurs qui ne veulent pas entrer dans la seule vraie richesse : tout donner par amour.

« Oui, mais Dieu, tu aurais pu choisir quelqu’un d’autre pour vivre ce que je vis ! » diras-tu. « Et tu aurais dû me donner les richesses, car moi, je donnerais tout. » Ça c’est souvent notre lecture des choses : on croit savoir. On croit qu’on est du bon côté. En fait, on a tous à apprendre de Dieu. Saint Jean dit : Le Verbe était la vraie lumière qui éclaire tout homme en venant dans le monde. Il était dans le monde, et le monde était venu par lui à l’existence, mais le monde ne l’a pas reconnu. Il est venu chez lui et les siens ne l’ont pas reçu ».

Voilà la pauvreté de Dieu. L’amour ne s’impose pas. L’amour se fait pauvre, l’amour est pauvre par nature. Toi qui es pauvre, en fait, tu ressens la pauvreté du Dieu d’amour. Toi qui es en colère particulièrement en ces jours, car tu vois que l’humanité, loin de comprendre le vrai message de Noël, se jette encore plus dans la consommation effrénée de tant de choses superflues alors que la planète crie sa souffrance, en fait, tu éprouves la pauvreté du Dieu d’amour qui s’arrête devant l’espace sacré de la liberté de nos cœurs.

Nous avons vu sa gloire

Mais saint Jean voit aussi l’autre côté des choses, les choses que le Fils de Dieu fait déjà renaître par sa présence d’amour accueillie : « à tous ceux qui l’ont reçu, il a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu… Et nous avons vu sa gloire. »

Nous avons vu sa gloire ! Pourtant, Celui qui vient manifester sa gloire ne naît pas dans un palais embaumé de subtils parfums, mais dans une étable emplie de l’odeur du fumier. Le pape Benoît XVI soulignait que « Dieu montre ainsi qu’il vient pour redonner à chaque homme, mais aussi à la création, au cosmos, sa beauté et sa dignité : c’est ce qui est engagé à Noël et qui fait jubiler les anges » dit-il encore.

Oui, Noël, c’est déjà la fête de la création restaurée, car, depuis la naissance de l’enfant dans une étable, des hommes sont sortis de leur froideur, de leur dureté pour devenir des enfants de Dieu et ils savent qu’ils sont sur le vrai chemin de la vie, de la joie.

En regardant l’enfant de la crèche, demandons au Seigneur de savoir reconnaître les enfants de Dieu qui travaillent parmi nous pour plus que la sauvegarde de la création : pour son renouvellement dans la grâce de l’amour de Dieu capable de tout habiller de sa gloire.

LA NATIVITE DU SEIGNEUR, messe du jour
Lectures bibliques :
Isaïe 52, 7-10; Psaume 97, 1.2-3ab, 3cd-4, 5-6; Hébreux 1, 1-6; Jean 1, 1-18

Homélie de la messe de minuit, 25 décembre 2019 (Lc 2, 1-14 )

Abbé Paul Frochaux – Cathédrale de Fribourg


Vous l’avez appris, un satellite suisse tourne en orbite et va bientôt nous livrer des informations sur des planètes hors de notre système solaire qu’on appelle exoplanètes. Notre pays est fier de contribuer à un haut niveau à la recherche scientifique en astronomie et ainsi, la science va encore progresser et l’univers nous apparaîtra toujours plus connu et toujours plus immense. Ce satellite nous représente et c’est un peu comme si nous étions, nous aussi, sortis de la terre pour observer l’immensité du ciel. Mais qu’allons-nous découvrir ? II y a déjà, certes, des thèses, des certitudes, des espoirs et notamment l’espoir de faire de nouvelles découvertes. On espère de la nouveauté.

Un Dieu fragile entre nos mains


Je fais un lien avec Noël, mais dans le sens inverse. En effet, Celui qui, selon notre foi, a créé cet univers infini, Celui par qui tout a été fait, (nous allons le dire tout à l’heure dans notre Credo), Celui-ci quitte en quelque sorte le Ciel pour venir sur la terre, il ne vient pas dans le grandiose ni dans ce qui est puissant, il vient au contraire dans ce qui est tout petit, simple, fragile et faible. Car, quoi de plus fragile qu’un petit bébé qui vient de naître ? C’est là que vient se cacher Celui par qui tout a été fait, dans la pauvreté d’une étable et la simplicité d’une mangeoire pour animaux. L’abbé Maurice Zundel disait cette belle parole : Dieu fragile, c’est la donnée la plus bouleversante, la plus neuve et la plus essentielle de l’Évangile : un Dieu fragile est remis entre nos mains.

En effet, quand un enfant vient au monde, il a besoin de tout. Et ce Dieu tout puissant que nous évoquons souvent pour qu’il nous vienne en aide, a maintenant, lui, besoin d’aide, il a besoin du lait de sa mère pour se nourrir, il a besoin de la protection de Joseph, son père adoptif. Il a besoin d’un foyer alors qu’il est le foyer d’amour pour tous ceux qui se réfugieront en lui. En grandissant, il aura besoin de ses parents pour apprendre à marcher alors qu’il est le Chemin, il aura besoin de ses parents pour apprendre à parler alors qu’il est le Verbe de toute éternité. Il aura besoin de Joseph pour son apprentissage de charpentier. Etant homme parmi les hommes, il a besoin d’un soutien matériel et d’un statut social. Il a surtout besoin de chaleur humaine, de tendresse. Un Dieu qui est Tout et qui veut avoir besoin de tout.

Que sera cet enfant ?


Quand un enfant vient au monde, nous savons automatiquement un certain nombre de choses sur ce qu’il lui arrivera : il grandira deviendra adolescent, jeune puis adulte, cela nous le savons. Mais il subsiste une grande part de mystère : que sera cet enfant, que va-t-il nous apporter, quels seront ses points forts, ses talents, ses faiblesses, ses fragilités ? Quelle nouveauté apportera-t-il ?
Marie et Joseph devaient se poser ces questions. Joseph étant très probablement mort avant que Jésus ne commence son ministère public n’aura pas pu savoir ici-bas ce qui arrivera à son fils. Jean Baptiste étant informé des premiers enseignements de Jésus s’étonne et se demande si Jésus est bien le Messie annoncé : Es-tu Celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ? Demande-t-il au Christ depuis sa prison.


Nous, chrétiens du XXIème s., nous avons la chance de connaître en grande partie, le mystère de cet enfant. La Parole de Dieu et plus particulièrement les évangiles nous relatent de sa vie, nous délivrent son message, nous parlent de ses miracles, de sa mort et de sa résurrection. Nous connaissons la nouveauté inaugurée par sa naissance. Nouveauté bouleversante en même temps que définitive et qui ne passera pas. Cette nouveauté est contenue dans les noms qui lui sont attribués. Il est selon le prophète Isaïe l’Emmanuel, ce qui veut dire Dieu avec nous. Mais, le mystère révélé nous dit qu’il est non seulement avec nous, mais qu’il devient l’un de nous. Qui pouvait imaginer une telle nouveauté ?

Interrogations sur Dieu et sur nous

Un Dieu qui veut partager tout ce qui fait Ia condition humaine à l’exception du péché et qui épouse cette condition en se faisant homme parmi les hommes. Un Dieu qui veut avoir besoin de tout pour nous advenir. Un Dieu qui annonce une bonne nouvelle, celle du salut. En effet, l’autre nom de cet enfant est Jésus, ce qui veut dire Dieu sauve. Ce salut nous sera donné par sa mort et sa résurrection. Nous ne cesserons jamais de nous interroger sur ce Dieu-avec-nous, sur ce Dieu qui sauve, sur ce Dieu qui aime infiniment. Et nos interrogations sur Dieu nous ramèneront à des interrogations sur nous. Qui sommes-nous, pauvres humains fragiles pour être autant aimés de notre Créateur ? Comme le dit le psaume 8 : Qu’est-ce que l’homme pour que tu penses à Iui, le fils d’un homme que tu en prennes souci ? Tu l’as voulu un peu moindre qu’un dieu, le couronnant de gloire et d’honneur.


La nouveauté qu’apporte cet enfant, nous n’aurons donc jamais assez de temps pour l’explorer, elle plus grande et plus infinie que l’exploration des exoplanètes et de tout le cosmos.
La science, avec raison, cherche à percer les secrets de la nature, de nos origines et elle ne cesse d’accumuler des informations et des connaissances. La naissance de Jésus nous fait entrer dans une nouveauté plus grande encore, elle nous fait entrer dans le secret de Dieu, du Créateur de toute chose. Sachons-nous nous en émerveiller, sachons explorer ce que vient nous dire Celui par qui tout a été créé. AMEN

LA NATIVITÉ DU SEIGNEUR, MESSE DE MINUIT
Lectures bibliques :
Isaïe 9, 1-6; Psaume 95, 1-2a, 2b-3, 11-12a, 12b-13a, 13bc;Tite 2, 11-14; Luc 2, 1-14

Homélie de la messe de Minuit TV, 25 décembre 2019 (Lc 2, 1-14 )

Mgr Brendan Kelly, évêque de Galway et KilmacduaghCathédrale Notre-Dame de l’Assomption et Saint-Nicolas, Galway (Irlande)

«Il parut un édit de l’empereur Auguste, ordonnant de recenser toute la terre».

Dans cet évangile de Noël racontant la naissance pauvre de Jésus à Bethléem, saint Luc oppose délibérément l’histoire de Jésus au vaste panorama mondial de l’empire romain et à la puissance absolue de son souverain César Auguste.

Ce minuscule petit enfant, impuissant et apparemment sans importance, qui vient de naître dans une étable, dans un coin reculé du vaste empire de César, a une signification universelle.

C’est une histoire pour tous les peuples, pour ceux qui détiennent le pouvoir, autant que pour les plus démunis, et pour la façon dont nous vivons les uns avec les autres et prenons soin de la création, notre maison commune.

Une bonne nouvelle pour les pauvres

La joie de Noël naît de la prise de conscience, face à la scène de la crèche et à tout ce qu’elle représente, que les choses peuvent être différentes, qu’elles sont différentes dans la manière avec laquelle le Créateur voit les choses.

Noël est une bonne nouvelle pour les pauvres… et pour ceux qui connaissent leur pauvreté. «Bienheureux les pauvres», dira Jésus plus tard. Nous regardons le berceau et nous trouvons la vérité. La vérité de Dieu. Cette nuit nous venons pour célébrer cette vérité, pour reconnaître notre propre part et pour goûter sa joie.

Et pour être toujours plus des gens de lumière, afin que nos frères et sœurs qui « marchent dans les ténèbres » ou « vivent dans une terre d’ombre profonde » puissent venir à la lumière.

La seule façon pour nous de voir Noël, c’est de se tenir sur la tête, a dit un jour l’auteur britannique Chesterton! Oui, cette naissance de l’Enfant-Christ bouleverse le monde. Et tous les standards mondains. Année après année, en cette nuit sainte, l’Enfant-Christ nous invite à entrer dans sa lumière, à nous éclairer, à nous changer, à nous convertir – personnellement, communautairement et culturellement – en le regardant dans sa fragilité et sa petitesse: le Fils même de Dieu !

Les merveilleux paradoxes de Noël

Chaque petit bébé, sans défense, partage ce pouvoir de nous changer, et mérite nos soins et notre amour. C’est ce à quoi Noël nous engage. Nous rendons grâce à Dieu – et nous nous souvenons de la parole de Jésus pour nous, les adultes: « Si vous ne changez pas, et si vous ne devenez comme de petits enfants, vous n’entrerez jamais dans le Royaume de Dieu ».

Les merveilleux paradoxes de Noël ! Cela fait de nous tous de petits enfants. Et fait de nous les défenseurs des petits enfants. Et des personnes pauvres, faibles et dans le besoin, dépendantes ou souffrant de quelque manière que ce soit.

Il nous fait accueillir l’étranger, donner refuge et asile aux sans-abri et à ceux qui sont exclus. Il fait de nous des guerriers du Royaume de Dieu, de la paix et de la justice, des hommes et des femmes qui non seulement apportent, mais qui sont la Bonne Nouvelle dans notre monde. Aujourd’hui. Loué soit Dieu.

«Ô Saint Enfant de Bethléem,
Descends sur nous, nous te prions;
Chasse notre péché et entre,
Viens naître en nous aujourd’hui»
Amen.

LA NATIVITE DU SEIGNEUR, MESSE DE MINUIT
LECTURES BIBLIQUES : Isaïe 9, 1-6; Psaume 95, 1-2a, 2b-3, 11-12a, 12b-13a, 13bc;Tite 2, 11-14;Luc 2, 1-14

Homélie du 22 décembre 2019 (Mt 1, 18-24)

Abbé Jean-Marie Oberson – Eglise Notre Dame de la Paix, La Chaux-deFonds

Chers auditeurs, c’est une joie pour moi de m’adresser à vous de cette église de Notre-Dame-de-la-Paix, à La Chaux-de-Fonds. La Chaux-de-Fonds fait frontière avec les rives du Doubs. Dimanche dernier, si vous avez déjà suivi la messe radiodiffusée, vous avez entendu parler d’une grande figure qui a marqué la vie des contrées du Doubs : saint Ursanne.

Saint Joseph : pas un saint si ordinaire !


Ce dimanche, une autre figure de sainteté nous est présentée, non en raison d’un anniversaire, mais simplement parce que l’évangile nous parle de lui : saint Joseph. Il est encore plus éloigné de nous dans le temps que saint Ursanne. Pour saint Joseph, on ne sait pas vraiment quand il est né, quand il est mort… ou plutôt entré au ciel. Je n’ai jamais entendu parler d’un anniversaire de l’entrée au ciel de saint Joseph. Il y a juste une date pour sa fête, le 19 mars, ou la fête de saint Joseph travailleur, le 1er mai. Deux fêtes pour un saint, c’est déjà pas mal !

C’est vrai que saint Joseph n’est pas un saint si ordinaire. Il est le papa de Jésus, le Christ, notre Seigneur. Oui, Jésus est bien son enfant, car c’est lui, Joseph qui lui donne son nom de « Jésus » comme l’ange le lui a dit.

Donner le nom, c’est la prérogative du papa dans le judaïsme ancien et dans beaucoup de civilisations encore aujourd’hui. Rappelez-vous : quand il s’est agi de donner son nom à Jean, le cousin de Jésus, on voulait l’appeler Zacharie, comme son père. Elisabeth proteste : « non ! Il s’appellera : Jean ! ». Face à l’insistance d’Elisabeth, la famille consulte Zacharie. Il est devenu muet. Il se fait donner une tablette et écrit : « son nom est Jean ! » provoquant la stupeur générale. Zacharie n’avait sans doute pas pu expliquer que c’est un ange qui lui avait révélé le nom de l’enfant.

Donc j’imagine que quand Marie et Joseph sont allés au temple pour la circoncision, on a dû aussi s’étonner du nom donné à l’enfant par Joseph : Jésus. Joseph aurait dû l’appeler du même nom que lui. C’est son fils aîné, du moins au regard des hommes.


Joseph : un homme juste qui aime Marie


Il y a des tas de surprises dans les événements que nous commençons à célébrer ces jours-ci. Et d’abord, il y a eu la douloureuse surprise de Joseph. Quand sa femme, avec qui il n’habite pas encore, rentre du séjour auprès de Zacharie et Elisabeth, Joseph remarque que Marie est enceinte. On ne sait pas s’il y a eu échange de paroles à ce sujet entre eux. Marie a-t-elle essayé d’expliquer l’incroyable ? En tout cas, Joseph ne croit pas à une naissance extraordinaire. Pour lui, elle a un enfant d’un inconnu. Donc il faut la renvoyer. Cela est inévitable.

Mais Joseph aime Marie. Et il est un homme juste. Alors, il décide de ne pas la répudier publiquement. Drôle de conception de la justice dans la tête de Joseph. Quand on agit en homme juste, on agit en pleine lumière. Et voilà qu’il se met à planifier de répudier Marie en secret.

C’est que la loi est claire. On le rappellera un jour à Jésus : Moïse a ordonné de lapider ces femmes-là. Voilà la justice de Moïse, la justice de Dieu ! C’est tout du même pour un juif pieux comme Joseph ! Et voilà que curieusement, Joseph, l’homme juste, sent qu’il doit permettre à Marie d’échapper à cette justice !

Là se révèle toute la grandeur de la personne de Joseph. Il n’est pas un homme juste par l’observance rigoureuse des règles et des lois qu’on lui a apprises. Il est un homme juste, car il a un cœur qui sait écouter ce que Dieu lui dit au fond de lui-même. Il allait déjà dans la bonne direction, Joseph. Mais quand même ! Epouser une femme portant l’enfant d’un autre, ça, il ne le pouvait pas. Alors, il avait trouvé l’échappatoire à cette loi qu’il n’arrivait pas à concevoir comme juste : renvoyer Marie en secret.

Avant Joseph, Osée, le prophète, avait épousé une prostituée notoire. Il l’avait fait à la demande explicite de Dieu, pour manifester son amour pour son peuple qui se conduit comme une prostituée à son égard. Osée avait agit ainsi pour révéler la folie de l’amour de Dieu pour l’humanité.

Pour lui, Joseph, aussi, il fallait une confirmation de Dieu qu’il pouvait épouser Marie et que cet enfant devait devenir le sien, car il n’avait qu’une certitude pour le moment : il n’y était pour rien dans son enfantement.


Vous me direz : l’histoire d’Osée, une très belle histoire ! Et cette histoire, on peut y croire. Mais l’histoire de Joseph, trop belle histoire pour être vraie.

Une naissance inattendue

Mais voilà qu’un texte ancien du prophète Isaïe avait déjà annoncé que Dieu deviendrait « Dieu avec nous » par une naissance inattendue, non d’une prostituée, mais d’une jeune fille, et une jeune fille, à l’époque, normalement, elle est vierge. Quand on a traduit Isaïe en grec, le traducteur biblique a utilisé « parténos », vierge.

Alors certainement, personne n’aurait imaginé tel scénario, mais les chrétiens, quand ils ont entendu cette histoire, ont pu la croire. Joseph, le premier a pu la croire, car un ange la lui a confirmée.

Saint Paul nous dit que Jésus, « selon la chair, est né de la descendance de David. Mais, selon l’Esprit de sainteté, il a été établi dans sa puissance de Fils de Dieu par sa résurrection d’entre les morts. Il est Jésus, Christ, notre Seigneur ». Il est notre Seigneur par sa résurrection, ça, c’est le noyau de notre foi. En dehors de cette foi, nous ne serions plus chrétiens. Mais si Dieu a révélé que Jésus est le Fils de Dieu, le Seigneur, par sa résurrection, n’est-ce pas qu’il l’avait fait son Fils dès sa conception ?

Voilà l’incroyable que Joseph a été amené à croire… l’incroyable que Dieu nous révèle par la belle histoire de cet homme, Joseph, un homme juste, qui a donné sa chance à Marie, qui est devenu le plus comblé des pères : il a pu donner le nom le plus étonnant à un enfant, à un fils d’homme : « Dieu sauve ! ». Lui, Joseph, le premier, a compris que cet enfant était vraiment le Fils de Dieu qui nous sauve.

Nous aussi, accueillons-le dans la foi et avec joie, l’Emmanuel. Nous vivrons avec cette certitude : quoi qu’il arrive sur la route de notre vie, nous sommes déjà sauvés en lui.

4e Dimanche de l’Avent
Lectures bibliques : Isaïe 7, 10-16; Psaume 23; Romains 1, 1-7; Matthieu 1, 18-24