Homélie du 13 octobre 2024 (Mc 10, 17-30)

Père Jean-Claude Pariat – Chapelle de l’Ecole des Missions, Le Bouveret, VS

Jésus est le Frère universel. C’est ainsi qu’il se révéla à Charles de Foucauld. Jésus est libérateur et sauveur nos seulement des chrétiens mais de toute l’humanité. Il est le ‘Frère universel’. Par Lui, saint Charles de Foucauld est devenu un « prophète de communion ». Le Pape François, au cours de son dernier voyage en Indonésie et Océanie l’a rappelé aux chrétiens : « Soyez des prophètes de communion »

Prophètes de communion ! Jésus appelle tous les baptisés à devenir des acteurs de ce qui unit et donne vie, et non pas des constructeurs de divisions, de mépris et de haine. N’était-ce pas son projet, l’accomplissement de sa mission? Et Jésus nous invite à le suivre!

Il n’aime pas les privilèges, les premières places. Le don de sa vie s’achève au Golgotha. Il prend la place de l’ultime situation inhumaine imposée par les dictateurs d’hier et d’aujourd’hui.

Marchant sur les routes de la Palestine de son temps, Jésus rencontre des foules, des gens, des juifs et des païens.  Une humanité en désir d’humanisation de la vie. Ses choix ne sont pas des « Camping-Paradis » mais des « Camping-enfers ». Enfers animés par tant de rebelles et de terroristes.

Une campagne de « Missio Suisse » en lien avec le diocèse de Goma

En ce mois de la Mission Universelle de l’Église, « Missio Suisse » anime une campagne en lien avec le diocèse de Goma et son évêque Mgr Willy Ngumbi Ngengele. Il nous parle de sa région terrorisée par des rebelles, sans respect envers les femmes, les enfants, les vieillards et les adultes. La haine de ces terroristes crée la terreur; ils pillent les villageois, incendient leur case et même leur village, tuent les personnes qui ne se soumettent pas à leurs violences ou qui sont témoins de leurs violences.

Dans son diocèse, à la frontière du Rwanda, Nord Kivu, il y a un camp de réfugiés, camp de 150’000 personnes vivant sous des tentes de 4m sur 2 m. Ils ont dû fuir leurs villages face au pillage, aux incendies de leur maison et de leur village. Ils manquent de tout : eau potable, nourriture, latrines, prolifération de multiples maladies, sans soins médicaux, sans éducation scolaire pour les enfants… Un ‘Camping-Enfer’.

Pourquoi tant de malheureux? Dieu laisse-t-il le mal se propager? Comment agit-il? Oui ces questions nous habitent. Pouvons-nous répondre concrètement aux cris de détresse d’enfants et d’adultes manquant des besoins les plus élémentaires pour survivre?

De multiples solidarités locales donnent quelques adoucissements à tant de déshérités, à tant de malheureux. Des mains bénévoles ont ouvert un orphelinat pour des enfants abandonnés. Leur mission est d’offrir un toit, un lieu de vie, de la nourriture, de l’éducation pour ces enfants vivant l’angoisse de l’abandon.

Ces attentions – si petites soient-elles – sont comme un souffle d’espérance. Chaque jour, la fatalité du désespoir est atténuée avant d’être totalement vaincue.

Sommes-nous concernés par les détresses de tant de personnes cabossées par la haine ?

Et nous, éloignés de Goma, sommes-nous concernés par ces détresses imméritées de tant de personnes, jeunes et anciens, cabossées par tant de haine et d’intempéries inhumaines ?

Comme vous, sœurs et frères, à l’écoute de Dieu qui nous donne sa Vie en abondance, je me sens désemparé, ayant vécu moi-même dans un pays voisin. Que pouvons-nous faire ? Quel geste de solidarité pouvons-nous vivre ?

Passer d’un regard indifférent à un regard bienveillant

D’abord, soyons plus reconnaissant de vivre dans un pays, plus proche d’un ‘Camping-Paradis’ que d’un ‘Camping-enfer’. Nos quelques jérémiades locales ne sont-elles pas une insolence et, souvent, une insouciance face aux sans-abris, sans argent, sans nourriture, imposés par les multiples corruptions des pouvoirs. Commençons par prier le Notre Père, prier le Frère universel, Jésus-Christ et l’Esprit-Saint. Prière du pardon qui guérit notre regard, souvent indifférent, en un regard bienveillant.

Oui, la vraie prière convertit notre regard sur les détresses de ce monde. Elle inspire nos actions solidaires, si modestes soient-elles. Ce que nous chercherions à vivre auprès des réfugiés et orphelins de Goma, vivons-le là où nous vivons.

Élargissons notre solidarité. Ne pensons pas seulement au Camping-Enfer de Goma ; mais apportons à ses résidents ce que nous pouvons leur donner. Nous contribuerons ainsi à témoigner de ‘Jésus’, Frère universel, présent dans ces bas-fonds de notre monde. Nous accompagnerons spirituellement et matériellement ces sœurs et frères missionnaires vivant et servant tous ces exclus d’une vie plus sereine et saine.

Missio Suisse nous encourage à être des « prophètes de communion », de solidarités actives dans cet immense chantier de foules sans vrai berger, sans avenir. Oui, notre contribution, si modeste soit-elle, rejoindra la solidarité de nos sœurs et frères vivant en République démocratique du Congo. Amen !

28e dimanche du temps ordinaire
Lectures bibliques : Sagesse 7, 7-11; Psaume 89; Hébreux 4, 12-13; Marc 10, 17-30

Homélie du 6 octobre 2024 (Mc 10, 2-16)

Père André Carron – Chapelle de l’Ecole des Missions, Le Bouveret, VS

Ce mois d’octobre 2024, comme c’est la belle tradition chaque année, s’est ouvert en très bonne et grande compagnie : sainte Thérèse de l’Enfant -Jésus et de la Ste Face, le 1, les Anges gardiens le 2 et saint François d’Assise le 4…

Thérèse, par son nom complet de Carmélite : de l’Enfant-Jésus et de de la Sainte Face, nous rappelle que sa « petite voie » n’a rien d’enfantin ni de facile, qu’elle demande beaucoup d’énergie et de force pour incarner dans l’ordinaire de nos journées l’extraordinaire amour de Dieu…
Elle a connu la maladie et l’épreuve du doute…
Elle est entrée au Carmel de Lisieux à 15 ans et est morte à 24 ans !
Elle a tout fait pour se cacher, alors comment et pourquoi est-elle aujourd’hui mondialement connue au point d’être choisie pour « Patronne des Missions » ?

Les Anges gardiens, eux nous rappellent que la tendresse de Dieu et sa miséricorde sont proches et actives dans nos vies…

François d’Assise nous redit son attachement à Jésus ; il l’a manifesté par ses choix de vie, en particulier par son chemin de pauvreté ; des choix de vie tous motivés par la recherche de ce Jésus et de sa « joie parfaite » !

Vraiment, un mois d’octobre ouvert en bonne compagnie !

Jésus nous oblige à « Avancer au large »

Les lectures de ce dimanche orientent notre regard (du cœur !) vers l’homme et la femme et le mariage qui peut les unir…
Une fois de plus, Jésus nous oblige à « Avancer au large ! », leitmotiv des 30 Spiritains en Suisse pour cette année…
Il ne se contente pas des réponses de la Loi, bien trop faible pour dire la beauté, la force et la joie de l’engagement et de l’attachement des personnes mariées, invitées à vivre une communauté de vie, de partage et d’amour.

Jésus nous rappelle que la Loi existe en « raison de la dureté des cœurs !

La présence de Dieu auprès des plus faibles

Tout l’Ancien Testament parle de la découverte progressive des croyants d’Israël de la fidélité de Dieu et de sa constante présence pleine de tendresse et de miséricorde surtout auprès des plus faibles…

Nous venons de lire : « De retour à la maison, les disciples l’interrogeaient de nouveau sur cette question ».

Débat dont nous ne savons rien…
Preuve du sérieux et de la profondeur de la question !
L’évangile se termine par une « Parole de Jésus » qui a dû étonner les disciples invités à voir autrement, à « convertir » même leur regard…

27e dimanche du Temps ordinaire
Lectures bibliques : Genèse 2, 18-24; Psaume 127; Hébreux 2, 9-11; Marc 10, 2-16

Homélie du 29 septembre 2024 (Mc 9, 38-48)

Chanoine Simone Previte – Basilique de l’Abbaye de Saint-Maurice, VS

Le prophète Moïse se réjouit de l’hypothèse de voir le Seigneur faire de son peuple un peuple de prophètes.

Ce qui en son temps s’avérait peut-être limité à l’état d’une hypothèse, dans le mystère de Pentecôte nous le contemplons comme un fait constitutif de notre nature ecclésiale reflétée localement au niveau de notre rassemblement dans cette Basilique ou à travers les ondes alors que des motifs légitimes nous dispensent de ce déplacement vers la maison de Dieu en ce dimanche, jour consacré au Seigneur : oui, nous sommes un peuple de prophètes !

Annoncer cet Evangile qui nous comble

Pourtant, nous ne le savons que trop bien, cette vérité de foi nous la profanons par nos vies qui manquent de correspondre à notre vocation de prophètes issue du commandement de notre Seigneur Jésus Christ : « Allez dans le monde entier. Proclamez l’Évangile à toute la création. »

Nos bouches sont bien souvent trop timides et ne s’empressent pas d’annoncer cet Évangile qui pourtant nous comble au point d’être source de notre joie, au point de nous motiver à faire ce saint déplacement dominical pour nous nourrir de la Parole et de l’Eucharistie qui transforment vraiment nos vies.

Nos mains, nos pieds, nos yeux : occasions de chutes

On s’étonnera de ce que Jésus, dans l’Évangile que nous avons proclamé, ne s’en prend pas à nos bouches qui n’annoncent pas sa Bonne Nouvelle, pour citer plutôt nos mains, nos pieds et nos yeux comme des occasions de chutes, de sorte qu’il vaut mieux s’en séparer plutôt que d’être exclus du Royaume de Dieu.

Le langage est rude, il fait froid dans le dos. Il nous a plu pourtant de le proclamer comme Parole de Dieu. On ne va donc pas s’amuser à décolorer cette sévérité pour nous persuader que l’intention du rhéteur est moins sévère qu’il n’en paraît, mais cherchons à en déduire un enseignement qui tourne davantage vers Dieu nos cœurs assoiffés de conversion.

En quoi nos mains, nos pieds et nos yeux peuvent-ils, à l’instar de nos bouches, se constituer en obstacles sur notre chemin de prophètes ?

Les mains : la main est le signe de l’aumône.
« Mais toi, quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite ».
En aimant notre prochain, en lui donnant un verre d’eau au nom de notre appartenance au Christ, nous témoignons de l’amour dont Dieu seul nous rend capables. Prophètes nous le sommes par nos mains qui s’ouvrent largement, comme le Christ a ouvert largement les siennes pour guérir, bénir, nourrir, accueillir.

Les pieds : le pied est le signe de notre suite du Christ.
« Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. »
En acceptant de suivre le Christ, nous témoignons qu’il est le seul Chemin capable de nous guider sur des routes sûres qui nous conduisent vers un bonheur qui comble durablement nos âmes. Prophètes nous le sommes par nos pieds qui ne craignent pas de s’engager sur des sentiers peut-être criblés d’épines, mais qui nous donnent accès à un banquet où il fait bon être conviés autour du Ressuscité.

Les yeux : l’œil est le signe de la contemplation
« Amen, amen, je te le dis : à moins de naître d’en haut, on ne peut voir le royaume de Dieu. »
En accueillant, avec docilité, le don de l’Esprit Saint dans nos cœurs, nous témoignons de notre participation à l’intimité de Dieu au point de Le contempler vivant, aimant, par la foi, dans l’étude des vérités divines et dans la prière.
Prophètes nous le sommes par nos yeux qui voient d’abord ce qu’ensuite nous avons à cœur d’annoncer et d’appliquer dans le concret de nos vies qui traduisent en actes ce que nous croyons.

Que le Seigneur convertisse nos bouches, nos mains, nos pieds, nos yeux

Que le Seigneur convertisse nos bouches, nos mains, nos pieds, nos yeux. Qu’Il les conforme à ceux de son Fils Jésus-Christ pour éloigner de nous le fléau de la géhenne et pour nous accueillir dans son Royaume.

En nous tournant vers Marie, Mère de l’évangélisation, osons reprendre la prière que notre pape François nous proposait dans son exhortation apostolique Evangelli Gaudium :

Vierge et Mère Marie,
toi qui, mue par l’Esprit,
as accueilli le Verbe de la vie
dans la profondeur de ta foi humble,
totalement abandonnée à l’Éternel,
aide-nous à dire notre “oui”
dans l’urgence, plus que jamais pressante,
de faire retentir la Bonne Nouvelle de Jésus.

Toi, Vierge de l’écoute et de la contemplation,
mère du bel amour, épouse des noces éternelles,
intercède pour l’Église, dont tu es l’icône très pure,
afin qu’elle ne s’enferme jamais et jamais se s’arrête
dans sa passion pour instaurer le Royaume.

Étoile de la nouvelle évangélisation,
aide-nous à rayonner par le témoignage de la communion,
du service, de la foi ardente et généreuse,
de la justice et de l’amour pour les pauvres,
pour que la joie de l’Évangile
parvienne jusqu’aux confins de la terre.

26e dimanche du temps ordinaire
Lectures bibliques : Nombres 11, 25-29; Psaume 18; Jacques 5, 1-6; Marc 9, 38-48