Homélie du 29 septembre 2024 (Mc 9, 38-48)

Chanoine Simone Previte – Basilique de l’Abbaye de Saint-Maurice, VS

Le prophète Moïse se réjouit de l’hypothèse de voir le Seigneur faire de son peuple un peuple de prophètes.

Ce qui en son temps s’avérait peut-être limité à l’état d’une hypothèse, dans le mystère de Pentecôte nous le contemplons comme un fait constitutif de notre nature ecclésiale reflétée localement au niveau de notre rassemblement dans cette Basilique ou à travers les ondes alors que des motifs légitimes nous dispensent de ce déplacement vers la maison de Dieu en ce dimanche, jour consacré au Seigneur : oui, nous sommes un peuple de prophètes !

Annoncer cet Evangile qui nous comble

Pourtant, nous ne le savons que trop bien, cette vérité de foi nous la profanons par nos vies qui manquent de correspondre à notre vocation de prophètes issue du commandement de notre Seigneur Jésus Christ : « Allez dans le monde entier. Proclamez l’Évangile à toute la création. »

Nos bouches sont bien souvent trop timides et ne s’empressent pas d’annoncer cet Évangile qui pourtant nous comble au point d’être source de notre joie, au point de nous motiver à faire ce saint déplacement dominical pour nous nourrir de la Parole et de l’Eucharistie qui transforment vraiment nos vies.

Nos mains, nos pieds, nos yeux : occasions de chutes

On s’étonnera de ce que Jésus, dans l’Évangile que nous avons proclamé, ne s’en prend pas à nos bouches qui n’annoncent pas sa Bonne Nouvelle, pour citer plutôt nos mains, nos pieds et nos yeux comme des occasions de chutes, de sorte qu’il vaut mieux s’en séparer plutôt que d’être exclus du Royaume de Dieu.

Le langage est rude, il fait froid dans le dos. Il nous a plu pourtant de le proclamer comme Parole de Dieu. On ne va donc pas s’amuser à décolorer cette sévérité pour nous persuader que l’intention du rhéteur est moins sévère qu’il n’en paraît, mais cherchons à en déduire un enseignement qui tourne davantage vers Dieu nos cœurs assoiffés de conversion.

En quoi nos mains, nos pieds et nos yeux peuvent-ils, à l’instar de nos bouches, se constituer en obstacles sur notre chemin de prophètes ?

Les mains : la main est le signe de l’aumône.
« Mais toi, quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite ».
En aimant notre prochain, en lui donnant un verre d’eau au nom de notre appartenance au Christ, nous témoignons de l’amour dont Dieu seul nous rend capables. Prophètes nous le sommes par nos mains qui s’ouvrent largement, comme le Christ a ouvert largement les siennes pour guérir, bénir, nourrir, accueillir.

Les pieds : le pied est le signe de notre suite du Christ.
« Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. »
En acceptant de suivre le Christ, nous témoignons qu’il est le seul Chemin capable de nous guider sur des routes sûres qui nous conduisent vers un bonheur qui comble durablement nos âmes. Prophètes nous le sommes par nos pieds qui ne craignent pas de s’engager sur des sentiers peut-être criblés d’épines, mais qui nous donnent accès à un banquet où il fait bon être conviés autour du Ressuscité.

Les yeux : l’œil est le signe de la contemplation
« Amen, amen, je te le dis : à moins de naître d’en haut, on ne peut voir le royaume de Dieu. »
En accueillant, avec docilité, le don de l’Esprit Saint dans nos cœurs, nous témoignons de notre participation à l’intimité de Dieu au point de Le contempler vivant, aimant, par la foi, dans l’étude des vérités divines et dans la prière.
Prophètes nous le sommes par nos yeux qui voient d’abord ce qu’ensuite nous avons à cœur d’annoncer et d’appliquer dans le concret de nos vies qui traduisent en actes ce que nous croyons.

Que le Seigneur convertisse nos bouches, nos mains, nos pieds, nos yeux

Que le Seigneur convertisse nos bouches, nos mains, nos pieds, nos yeux. Qu’Il les conforme à ceux de son Fils Jésus-Christ pour éloigner de nous le fléau de la géhenne et pour nous accueillir dans son Royaume.

En nous tournant vers Marie, Mère de l’évangélisation, osons reprendre la prière que notre pape François nous proposait dans son exhortation apostolique Evangelli Gaudium :

Vierge et Mère Marie,
toi qui, mue par l’Esprit,
as accueilli le Verbe de la vie
dans la profondeur de ta foi humble,
totalement abandonnée à l’Éternel,
aide-nous à dire notre “oui”
dans l’urgence, plus que jamais pressante,
de faire retentir la Bonne Nouvelle de Jésus.

Toi, Vierge de l’écoute et de la contemplation,
mère du bel amour, épouse des noces éternelles,
intercède pour l’Église, dont tu es l’icône très pure,
afin qu’elle ne s’enferme jamais et jamais se s’arrête
dans sa passion pour instaurer le Royaume.

Étoile de la nouvelle évangélisation,
aide-nous à rayonner par le témoignage de la communion,
du service, de la foi ardente et généreuse,
de la justice et de l’amour pour les pauvres,
pour que la joie de l’Évangile
parvienne jusqu’aux confins de la terre.

26e dimanche du temps ordinaire
Lectures bibliques : Nombres 11, 25-29; Psaume 18; Jacques 5, 1-6; Marc 9, 38-48

Homélie du 22 septembre 2024 (Mc 9, 30-37)

Mgr Rémy Berchier – Eglise Saint-Joseph, Rossens, FR

Chers amis appelés par le Père et pèlerins d’espérance,

Une vieille dame qui s’élève au milieu du village et de nos vies. Une vieille dame pour qui des croyants ont cédé une terre, une part de leurs biens afin qu’elle s’élance fièrement depuis 150 ans. Une vieille dame, cette église de pierres, les pieds ancrés dans notre pâte humaine et coiffée d’un coq, rappel de notre humanité merveilleuse mais douloureuse aussi, à l’exemple de Pierre qui renie. Flanquée d’une croix qui nous rappelle à chaque instant que le « Fils de l’homme est livré aux mains des hommes ; ils le tueront et, trois jours après sa mort, il ressuscitera » comme nous dit l’Evangile.

Ils ont commencé par creuser des fondations. Et nos fondations à chacune et chacun de nous, qu’elles sont-elles ? La foi reçue au jour de notre baptême, notre relation au Christ, l’accueillir, le connaitre toujours davantage, de l’intérieur, par le cœur, se tenir en sa compagnie, à la place qu’il s’est choisie pour lui, la dernière, celle du serviteur : « Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous et le serviteur de tous. » et encore : « Celui qui m’accueille… accueille Celui qui m’a envoyé. » Nous dit saint Marc. Voilà nos fondations, ce à quoi le Père et Jésus nous appellent, la barque qui est accostée sur le rivage, à l’entrée du chemin et qui répercute le « Viens et suis-moi » de Jésus, nous le suggère. C’est la condition pour être pèlerin d’espérance !

Sur les fondations sont érigés de hauts murs porteurs, faits de pierres solides. Ils nous rappellent les pierres vivantes que nous sommes. Chacun, avec ses charismes, apporte sa contribution indispensable à tout l’édifice qu’est l’Eglise, Corps du Christ et à l’humanité. Elles s’imbriquent les unes sur les autres, soudées par le ciment de l’Esprit-Saint. Elles s’ajustent parfaitement, comme nous sommes appelés à nous ajuster au Christ et à sa dernière place. Le livre de la Sagesse nous dit : « Si le juste est fils de Dieu, Dieu l’assistera. »

Notre vie entière est pèlerinage d’espérance, comme ce chemin, qui trace notre route quotidienne, en passant par l’ambon, table de la Parole et arrivant à l’autel, table de l’Eucharistie, repas des noces de l’Agneau, mystère d’Eternité, comme l’immense toit de cet ouvrage, pointé vers le haut, prémices de la voûte céleste,

Au cœur de cette vieille dame, le Christ est réellement présent ; sa Parole est proclamée depuis un siècle et demi ; la vie des croyants est célébrée, chantée, priée, avec ses joies, ses peines et son quotidien. Tout a été aménagé pour qu’elle soit belle, chaleureuse, lumineuse et accueillante. Y venir, nous ressource, nous nourrît, nous ajuste, nous relie, nous inonde de sagesse. Saint Jacques nous le dit : « La sagesse qui vient d’en haut est d’abord pure, puis pacifique, bienveillante, conciliante, pleine de miséricorde et féconde en bons fruits, sans parti pris, sans hypocrisie. »

Ce matin notre vieille dame est plus jeune que jamais, scintillante de lumière, débordante de joie parce qu’elle rassemble les croyants de la communauté de Rossens, célébrants les 150 ans de la consécration de leur église dédiée à saint Joseph. Elle réunit les baptisés de toute l’Unité Pastorale St-Protais, en lancement d’année et elle rejoint tous les chercheurs de Dieu, par la voie des ondes. Alors, réjouissons-nous car le Père et Jésus nous appellent : « Viens et suis-moi ». Descendons de nos barques, mettons-nous en chemin, avec notre bâton, en pèlerin d’espérance jusque dans l’Eternité !

Bonne route à chacune et chacun. Amen.

25e dimanche du temps ordinaire
Lectures bibliques : Sagesse 2, 12-20; Psaume 53; Jacques 3, 16 – 4, 3; Marc 9, 30-37