Homélie du 14 avril 2024 (Lc, 24, 35-48)

Abbé Alexandre Maymona – Eglise Notre-Dame de Grâce, Orbe, VD

Chers amis, nous vivons encore la joie de la résurrection. Jésus est vraiment ressuscité. L’évangile d’aujourd’hui nous parles des disciples d’Emmaüs qui ont de la peine à identifier le ressuscité. Saint Luc, en racontant une apparition de Jésus ressuscité à ses disciples, nous offre une catéchèse sur la manière de vivre la rencontre avec Jésus, qui est toujours vivant et présent sur notre chemin et dans notre histoire. Pour Luc, la communauté chrétienne est le lieu privilégié pour vivre cette expérience.

La rencontre avec le Christ peut se manifester de différentes manières dans nos vies. Pour les disciples d’Emmaüs, elle s’est produite lorsqu’ils ont rencontré Jésus sur le chemin et qu’ils l’ont reconnu à travers ses paroles et ses actions. De même, nous pouvons rencontrer le Christ dans notre propre vie en étant attentifs à sa présence à travers les personnes que nous rencontrons, les événements que nous vivons, et la voix de notre conscience.

Ouvrir notre coeur à la parole et à la présence du Christ

Pour rencontrer le Christ, il nous suffit d’ouvrir notre cœur à sa parole et à sa présence. Nous devons également être disposés à écouter et à suivre ses enseignements, même si parfois ils peuvent être difficiles à accepter.                    

Enfin, nous devons être prêts à partager notre expérience de rencontre avec le Christ avec les autres, comme les disciples d’Emmaüs l’ont fait en retournant à Jérusalem pour annoncer la bonne nouvelle.

En expérimentant une rencontre personnelle avec le Christ, nous pourrons éprouver une paix intérieure et une joie profonde qui nous rempliront de reconnaissance et de gratitude pour sa présence dans nos vies.

Oui, chers amis après la mort de Jésus, les disciples ne savaient pas quoi penser ni quoi faire. Certains d’entre eux se sont cachés de peur d’être persécutés, tandis que d’autres se sont rassemblés pour se soutenir mutuellement. Ils se demandaient ce qui allait se passer maintenant, sans leur maître et guide. Ils se sentaient perdus et incertains de leur avenir. Certains ont même remis en question leur foi en Jésus et en sa mission.
Pourtant, malgré leur peur et leur confusion, les disciples ont finalement été réconfortés par des apparitions du Christ ressuscité. Leur foi a été renouvelée et renforcée lorsqu’ils ont vu Jésus vivant après sa mort.
Ils ont réalisé que la mort n’était pas la fin, mais le début d’une nouvelle vie en Christ. Leurs doutes et leurs craintes ont été dissipés, et ils sont devenus des messagers courageux de l’Evangile, proclamant la Bonne Nouvelle de la résurrection du Christ à tous ceux qui voulaient écouter.

Nous sommes invités à croire que le Christ est toujours vivant et présent parmi nous, que son esprit guide nos vies et nous inspire à agir selon ses enseignements d’amour et de compassion. En gardant cette foi en lui, nous pouvons trouver force et réconfort dans les moments difficiles et être remplis d’espoir pour l’avenir. Il est notre lumière et notre guide, et en lui nous trouvons la paix et la vérité.

Chers amis, hier c’était le rôle des disciples de témoigner la parole du Christ au monde entier. Aujourd’hui c’est notre mission. C’est à nous de témoigner qu’il est ressuscité, qu’il est vivant, et qu’il est présent au milieu de nous. Le témoignage que le Christ nous demande implique notre style de vie, nos valeurs, notre façon d’aimer et de servir, notre façon de voir le monde. Ma vie, mes actions et mes valeurs témoignent-elles du fait que Jésus est vivant et qu’il donne la Vie au monde ? Ma vie est-elle, comme celle de Jésus, une lutte contre l’égoïsme, le mal, la violence et le péché ? Ma vie est-elle, comme celle de Jésus, un combat pour la justice, pour la vérité, pour la dignité de mes frères et sœurs/, en particulier les plus fragiles et les plus méprisés ? Aujourd’hui, nous formons une communauté de ceux qui marchent avec le Seigneur ressuscité. Le Christ doit être au centre de notre attention. C’est autour de lui que la communauté chrétienne s’articule et se construit. Le regard de tous les disciples sera toujours fixé sur lui ; c’est toujours sur lui que la communauté se nourrit et vit. À travers le temps, Jésus vivant et ressuscité sera toujours la référence de la communauté chrétienne.

Témoigner du Christ ressuscité

Chers amis, si hier Jésus a confié sa mission aux disciples, aujourd’hui c’est à chacun de nous que Jésus confie sa mission. Il nous confie la mission d’être ses témoins auprès de « toutes les nations, à commencer par Jérusalem ». L’annonce des disciples sera centrée sur la mort et la résurrection de Jésus, le libérateur annoncé par Dieu dès le début. Le but de la mission de l’Eglise est celui de prêcher la conversion et le pardon des péchés à tous les hommes, en leur proposant l’option de la vie nouvelle de Dieu, du salut, de la vie éternelle ce sera toujours la mission de l’Eglise de Jésus. Telle sera toujours la mission de la communauté de Jésus à travers le temps. Puisqu’il s’agit de reconnaitre celui qui marche avec nous, la carte d’identité que Jésus présente à ses disciples pour l’identifier c’est ses mains et ses pieds marqués par les signes de sa crucifixion.

Ces blessures sont le signe de son abandon et de sa vie donnée en faveur de ses frères et sœurs. Dans ces marques se trouve le moi profond de Jésus, ce qui l’identifie. Oui chers amis, qu’est-ce qui nous identifie en tant que disciples du Christ aujourd’hui ?

Que notre rencontre avec le Christ nous aide à grandir dans notre foi et à témoigner de son amour et de sa miséricorde envers tous ceux que nous rencontrons au cours de notre pèlerinage sur terre. Amen !

3e Dimanche de Pâques
Lectures bibliques : Actes 3, 13-19 ; Psaume 4 ; 1 Jean 2, 1-5 ; Luc 24, 35-48

Homélie du 7 avril 2024 (Jn 20, 19-31)

Chanoine Jean-Michel Girard – Basilique de l’Abbaye de Saint-Maurice, VS

Nous lisons cet épisode concernant particulièrement l’apôtre Thomas en ce dimanche après Pâques, dimanche de la miséricorde.

Il nous est donné en quelque sorte d’observer la miséricorde en exercice très concrètement et très personnellement. Jésus donne son attention à cet apôtre qui n’arrive pas à s’unir aux autres déjà dans la joie de la Résurrection. Thomas a besoin de vérification. Jésus va au-devant de son attente et le conduit à la foi, sans reproches, sans accusation.

La miséricorde n’est-elle pas voir le manque dont souffre une personne et aller au-devant de son besoin ?

Jésus est attentif aux besoins de chacun

Je suis touché par l’attention du Christ ressuscité aux besoins de chacun. Il marche avec les deux disciples d’Emmaüs qui quittent la communauté ; il les écoute, les éclaire, accepte leur invitation et se révèle à eux. Aux apôtres qui doutent de la réalité de son être ressuscité, il se donne à toucher et mange devant eux. Au bord du lac, il a préparé un déjeuner pour ceux qui avaient passé une nuit de pêche harassante. Avec tact, il signifie à Pierre sa pleine réconciliation en le provoquant à exprimer son amour.

Et c’est bien sous ce visage que le Christ s’était révélé durant sa vie. Rappelons-nous les Noces de Cana, la multiplication des pains, la rencontre avec la Samaritaine, avec Zachée et tant d’autres.

La miséricorde de Dieu est de toujours à toujours

Il me semble lumineux de contempler la miséricorde de Dieu dans sa miséricorde qui est de toujours à toujours.

D’abord, dans sa création, en particulier celle de nos personnes : acte purement gratuit ; amour qui nous choisit d’avance. « Ce n’est pas nous qui l’avons choisi, c’est lui qui nous a choisis. »

Dans la rédemption ensuite. « Peut-être, pour un homme de bien, accepterait-on de nourrir. Mais en ceci Dieu prouve son amour envers nous : Christ est mort pour nous alors que nous étions encore pécheurs », dit saint Paul. De cette misère fondamentale qu’est notre connivence intérieure avec le mal, dont nous n’arrivons pas à nous libérer nous-mêmes, Dieu a miséricorde : sa présence en nous opère notre guérison.

Enfin, la miséricorde de Dieu s’exerce en répondant aux besoins de chacun. Je pense à cette magnifique réflexion de saint Ephrem : « Le Seigneur a coloré sa parole de multiples beautés, pour que chacun de ceux qui la scrutent puisse contempler ce qu’il aime ». Nous croyons et nous constatons souvent que le Seigneur éclaire chacun en particulier et il écoute la voix de notre cœur.

La miséricorde de Dieu nous pousse à l’imiter

Contemplant la miséricorde de Dieu, nous nous sentons poussés à l’imiter.

D’abord, en partageant le désir de Dieu que tous soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité. Contribuons à la venue du Règne de Dieu dans le cœur et l’esprit de tous les enfants de Dieu, par notre prière, par notre témoignage et par l’annonce de l’Evangile.
Imitons le Christ ressuscité, en nous laissant guider au jour le jour par les besoins des autres. Comme le décrivent si bien les Actes des Apôtres à propos de la première communauté chrétienne : on mettait tout en commun et on distribuait à chacun selon ses besoins
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Dimanche de la Divine Miséricorde
Lectures bibliques : Actes 4, 32-35 ; Psaume 117 ; 1 Jean 5, 1-6 ; Jean 20, 19-31

Homélie TV de Pâques, 31 mars 2024 (Jn 20, 1-9)

Fr. Didier Croonenberghs OP – Église St-Rémy, Profondeville, Belgique 

Il y a peut-être quelques fans de James Bond parmi vous.
Des personnes qui, comme moi, n’ont aucun souci à regarder un film de la série pour la troisième ou quatrième fois… Dans Skyfall, un des méchants demande à James Bond quel est son passe-temps.
Et ce dernier répond de manière surprenante : la résurrection.
« What’s your hobby, James ? » « Resurrection ».

Ce que nous fêtons aujourd’hui dépasse tout ce que nous pouvons imaginer. Les mots sont toujours trop étroits pour exprimer l’indicible de Pâques. Pour tenter de mettre des mots sur leur foi en la résurrection, les premiers chrétiens ont d’ailleurs emprunté une multitude d’expressions variées : gloire, relèvement, exaltation, réveil… En effet, n’avons-nous pas déjà vu des personnes se relever, se réveiller à la vie, alors que tout semblait perdu ? Elles ne sont plus là où nous les enfermons. Oser parler de la résurrection, n’est-ce pas d’abord croire en la nôtre, et la voir peut-être au quotidien autour de nous ? Comment me direz-vous ?

Vivre la résurrection, c’est faire un deuil fécond

Comprenons le bien : il ne s’agit pas retrouver ce qui était perdu. La joie de Pâques est plus qu’un passé heureux qui referait surface dans notre vie, ou un retour à la vie de choses anciennes comme dans cette culture vintage qui donne une seconde vie à des choses passées… Pour parler de la résurrection de Jésus, jamais les évangiles n’utilisent le terme de seconde vie. Au contraire, la résurrection est la traversée de la mort, c’est-à-dire l’arrivée de quelque chose de radicalement neuf et inespéré ! Vivre la résurrection, c’est faire un deuil fécond.

Pour vivre cela, nous sommes appelés à regarder d’abord ce qui nous enferme, nos tombeaux et nos peurs. En grec, il s’agit du même mot ! Et voir paradoxalement dans ceux-ci des lieux d’annonce et de promesse… Il s’agit ensuite d’accepter certaines ruptures afin de ne plus s’accrocher à sa propre vie… Pâques, le grand passage, nous invite ainsi à ne pas voir le temps qui passe comme une menace, mais comme le chemin que prend l’éternité de Dieu pour nous rejoindre.

Le tombeau vide ouvre un avenir

Car la résurrection n’est pas l’immortalité. C’est au contraire l’échec traversé, la vie transfigurée dans notre existence mortelle. Pour vivre une telle transformation, il faut oser se rendre dans ses propres lieux de fragilité. Faire l’expérience du manque et se rendre au tombeau pour voir qu’il est vide. Et en même temps, comme le disciple bien aimé, croire que ce tombeau ouvre un avenir. Qu’il peut devenir la crèche d’un monde nouveau. « Il vit et il crut » !

N’est-ce pas davantage qu’un clin d’œil, que de voir que ce sont les femmes qui, dans les évangiles, sont les premières à porter, même imparfaitement, l’annonce de Pâques ? N’est-ce pas précisément parce qu’elles portent la vie et la mette au monde ? Vivre la grande traversée pascale, n’est-ce pas accueillir en nous, comme elles, une douce transformation intérieure, qui conduit à un enfantement ? Alors, nos deuils seront féconds. Et la résurrection se vivra au quotidien, dans nos gestes maternants, et maternels. Voilà pourquoi la résurrection n’est pas tant un fait historique qu’une question posée à notre histoire, à la vôtre : quels sont ces tombeaux qui vous enferment, mais qui peuvent finalement être lieux d’une promesse, d’un paradoxal enfantement ? Est-ce un échec à surmonter ? Un deuil qui reste à faire ? Une culpabilité mal placée ? Une dépression à traverser ? Une limite qu’il nous faut encore accepter ?

Ton avenir est plus réel que ton passé

A celles et ceux qui voient dans leurs vies des impasses, mais qui croient aussi en un relèvement possible, la folle espérance de Pâques leur dit : « Circule, il n’y a plus rien à voir dans ta vie à cet endroit-là ». Ta vie te précède en Galilée. Meurs à ce que tu n’es plus, afin de renaître à ce que tu es vraiment. Quitte ce projet qui ne te fait pas grandir. Quitte ce lieu-là qui te retient. Ne te définis pas par ce que tu as été, mais accueille ce que tu deviens. Quel que soit ton âge, ton avenir est plus réel que ton passé.

Frères et sœurs,
Dans la vie, il y a ceux qui croient savoir, et qui pensent détenir des preuves et la vérité. Mais il y a aussi ceux qui savent croire, comme le disciple bien aimé… Ceux pour qui, en face du tombeau, l’absence de preuve n’est pas la preuve de l’absence… Ceux qui voient le tombeau vide non comme la fin, mais comme un lieu d’annonce.

Pour le vrai croyant, ce n’est donc pas parce qu’il voit qu’il croit. Mais c’est parce qu’il croit, qu’il peut tout voir tout autrement. Qu’est-ce à dire, concrètement ? N’y a-t-il pas des moments dans nos vies où nous sommes comme morts, à bout de souffle ? Où nous vivotons par devoir, peur ou par survie ? Ce que nous voyons ne nous donne pas la joie de croire et nous sommes comme enfermés dans les tombeaux de nos rêves ou de nos espoirs déçus… Mais la joie inouïe de Pâques nous invite, comme le disciple bien aimé, à voir et à croire : voir lucidement notre vie telle qu’elle est, sans l’idéaliser. Et croire qu’elle peut être vraiment transformée, et rester féconde…
Que cette joie, cette extraordinaire promesse de Pâques nous accompagne, et mette davantage de vie dans nos existences mortelles. Qu’elle nous relève, nous réveille, nous recrée, nous enfante ! Amen.

Résurrection du Seigneur
Lectures bibliques : Actes 10, 34-43; Psaume 117; Colossiens 3, 1-4; Jean 20, 1-9