Homélie du 18 juin 2023 (Mt 9, 36 – 10, 8)

Chanoine Olivier Roduit, Basilique de l’Abbaye de Saint-Maurice, VS

Mon Dieu protège mon pays…

Je l’aime pour ses frais vallons

Et j’aime d’un amour intime

La cime blanche de ses monts

Où plane l’aigle au vol sublime.

Notre prière patriotique invite à contempler les paysages magnifiques qui nous entourent, à scruter nos petites vallées, mais aussi à lever les yeux vers les sommets. Et ce n’est pas tout de contempler les cimes, il faut élever ses yeux pour admirer le vol sublime de l’aigle.

Cet oiseau a toujours impressionné les êtres humains. Les hommes de la bible avaient déjà remarqué cet impressionnant et grand animal aux larges ailes, capable de planer des heures dans le ciel du désert. Et si nous sommes devenus familiers des drones qui fournissent de si belles images, le rêve de nos anciens était certainement de pouvoir contempler le monde d’en haut, comme l’aigle au vol royal.

Dieu porte son peuple comme sur les ailes d’un aigle

Et Dieu dit à Moïse qu’il a porté son peuple quasi miraculeusement, depuis la servitude de l’Égypte jusqu’à sa montagne sainte ; c’est dans la première lecture du jour. Nous sommes dans l’Exode, trois mois après la sortie de la captivité et le passage par la Mer Rouge.

C’est déjà un miracle qu’ils soient arrivés jusque-là, et un prodige bien plus grand va encore se produire. Le Seigneur lui-même va parler à son peuple au travers de la personne de Moïse, lui promettant une alliance merveilleuse.

L’expérience de la traversée du désert a montré au peuple sa fragilité et ses limites. Mais la parole divine révèle la puissance de ce Dieu qui porte son peuple comme sur les ailes d’un aigle… au vol sublime, pour l’amener jusqu’à lui.

Au cœur des difficultés et des peines de notre existence, sachons nous aussi prendre un peu de recul pour réaliser tout ce qui nous est donné.

Oui, nous travaillons, nous gagnons notre vie à la sueur de notre front. Nous accumulons peut-être des richesses, mais tout cela nous est fondamentalement donné par notre créateur.

La force de la foi pour transformer notre vie

C’est la grâce de notre baptême que de nous révéler que ce don merveilleux vient de Dieu. Alors notre existence prend une signification nouvelle ; nous savons où nous allons, même si nous ne connaissons pas le chemin qui souvent s’écrit en lignes courbes.

Saint Paul nous rappelle que cette grâce provient du don sublime que le Christ a fait de sa vie… pour nous qui « n’étions encore capables de rien ». Et nous pouvons mettre « notre fierté en Dieu ».

Le don de Dieu est incroyable, immensément grand, mais encore faut-il en vivre. Pas plus les contemporains de Jésus que les nôtres, ni nous-mêmes, n’avons pleinement intégré la force que la foi apporte pour transformer la vie.

Jésus est saisi de compassion envers les foules désemparées et abattues comme des brebis sans berger. Il l’est aussi envers nous qui aujourd’hui sommes désemparées face à la cruauté du monde et face aux malheurs qui frappent l’Église. Il y a bien du travail à convertir le monde et à nous convertir. La moisson est grande pour peu d’ouvriers. Mais ce n’est pas une raison pour désespérer, car il y a en fait des ouvriers, même s’ils sont peu nombreux. Et ces ouvriers, c’est nous ! Nous à la suite des douze apôtres ; nous avec des engagements divers et variés ; mais tous avec la volonté de faire grandir le Royaume.

La moisson est abondante, la mission est grande, mais le Seigneur est toujours présent, nous portant comme sur les ailes d’un aigle, nous donnant à nous aussi des ailes pour porter, à notre mesure, nos frères et sœurs dans la peine. Nous sommes faits pour le bonheur, pour la sainteté et pour la vie éternelle. Non pas de petites poules grattant le sol pour y trouver quelque misérable ver de terre, mais des aigles capables de voler dans les grands espaces. Et si l’aigle est, dit-on, le seul être capable de regarder en face le soleil sans se brûler la rétine, nous sommes faits pour voir Dieu face à face dans les hauteurs.

Ne nous contentons pas de vivoter dans les étroites et sombres vallées de nos égoïsmes. La cime blanche des monts nous attend pour un vol sublime, bien plus beau que celui de l’aigle.

11e dimanche ordinaire
Lectures bibliques : Exode 19, 2-6; Psaume 99; Romains 5, 6-11; Matthieu 9, 36 – 10, 8

Homélie du 11 juin 2023 (Jn 6, 51-58)

Abbé Christophe Godel – Eglise du Sacré-Cœur, La Chaux-de-Fonds, NE

« Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui. »

L’Eucharistie est un mystère d’intimité. Le Seigneur a inventé, a ‘institué’ ce Sacrement au Cénacle, entouré de sa nouvelle famille, des douze apôtres, ce qui allait devenir l’Église de tous les temps, et donc nous qui faisons partie de cette famille.

C’est pour ça que c’est important que nous comprenions toujours plus ce qu’il a voulu faire. Avez-vous conscience de ce qui se passe dans l’Eucharistie ? dans ce petit bout de pain qu’on appelle une hostie ?

C’est quelque chose d’incroyable, et je vais m’appuyer sur un des plus grands théologiens de notre époque, le pape Benoît XVI, pour essayer de vous faire entrer un peu plus dans ce formidable mystère.

Dans l’Eucharistie, Dieu me transforme en amoureux

« Prenez, mangez… Buvez-en tous. » (Mt 26, 26 s) On ne peut pas « manger » le corps du Christ comme un simple morceau de pain. Manger ce pain signifie « communier », entrer en communion avec la personne du Seigneur vivant.

Cette communion, cet acte de « manger », est réellement une rencontre entre deux personnes, une façon de se laisser pénétrer par la vie de Celui qui est le Seigneur, de Celui qui est mon Créateur et mon Sauveur. Le but de cette communion, de cet acte de manger, est que ma vie soit transformée par la vie que je reçois de Celui qui est Amour. Dans l’Eucharistie, Dieu me transforme en amoureux, en personne plus aimante.

Nous avons besoin d’un Dieu proche, d’un Dieu qui se remet entre nos mains et qui nous aime. Dans l’Eucharistie, le Christ est réellement ce Dieu présent parmi nous.

Le Christ nous unit à lui et les uns avec les autres

Sa présence n’est pas une présence statique. C’est une présence dynamique, qui nous saisit et nous entraîne. Le Christ nous attire à lui, il nous fait sortir de nous-mêmes pour être avec lui, et pour être avec les autres. La communion avec le Seigneur est toujours aussi une communion avec nos sœurs et avec nos frères.

En effet, lorsque je communie, le Christ s’unit personnellement à moi ; mais il s’unit également avec l’homme et la femme à mes côtés. Et le pain est pour moi, mais également pour l’autre. Ainsi, le Christ nous unit tous à lui, et nous unit tous les uns avec les autres.

Nous recevons le Christ dans la communion. Mais le Christ s’unit également avec mon prochain : le Christ et le prochain sont inséparables dans l’Eucharistie. Et ainsi, nous formons tous un seul corps. Si nous ne voyons pas en l’autre notre frère et notre sœur, nous ne vivons pas encore assez bien cette communion.

Participer à la messe ne nous éloigne donc pas des autres, de nos contemporains qui peut-être ne comprennent pas pourquoi nous allons à l’église. Au contraire, parce que l’Eucharistie nous met en communion avec l’amour de Dieu, elle nous appelle à nous engager avec tous nos frères et sœur,s pour faire face aux défis actuels et pour faire de la planète un lieu où il fait bon vivre.

Car dans l’Eucharistie, le testament du Seigneur se réalise : il se donne à nous, et nous lui répondons en nous donnant aux autres par amour pour lui. C’est comme une grande chaîne : « Comme je vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres ».

Une des manières d’avoir soin des autres, c’est ce que plusieurs personnes font dans nos paroisses : aller amener la communion chez ceux qui ne peuvent pas se déplacer. L’Eucharistie apportée aux malades représente la sève vitale qui les réconforte et qui diffuse dans leur âme une lumière intérieure pour vivre avec foi et espérance leurs maladies et leurs souffrances.

Demeurer en adoration silencieuse devant le Christ présent dans l’Eucharistie

La fête d’aujourd’hui du Corps et du Sang du Christ nous ouvre encore à une autre dimension de l’Eucharistie : la prière devant le Saint-Sacrement. Le pape saint Jean-Paul II disait : « Si, à notre époque, le christianisme doit se distinguer surtout par “l’art de la prière”, comment ne pas ressentir le besoin renouvelé de demeurer longuement en conversation spirituelle, en adoration silencieuse, en attitude d’amour, devant le Christ présent dans le Saint Sacrement ? » (Jean-Paul II, Ecclesia de Eucharistia, n. 25). De cette expérience, on ne peut que recevoir force, consolation et soutien.

Dès lors, c’est précieux de pouvoir venir un moment s’assoir dans une église devant le tabernacle où Jésus est réellement présent dans ce pain consacré, ou de pouvoir participer à un moment d’adoration eucharistique qui souvent précède ou prolonge la messe dans les paroisses.

Mais qu’est-ce que l’adoration ? Le pape Benoît XVI répond : « Je dirais que l’adoration signifie reconnaître que Jésus est mon Seigneur, que Jésus me montre le chemin à prendre, me fait comprendre que je ne vis bien que si je connais la route qu’il m’indique. Adorer, c’est donc dire : « Jésus, je suis tout à toi et je te suis dans ma vie, je ne voudrais jamais perdre cette amitié, cette communion avec toi ».

A la fin de ce parcours d’approfondissement sur l’Eucharistie, nous comprenons mieux pourquoi il y a le dimanche, le Jour du Seigneur, et en son cœur la messe, l’Eucharistie. Aller à la messe n’est pas un devoir imposé de l’extérieur, un fardeau qui pèse sur nos épaules. Au contraire, participer à la célébration du dimanche, se nourrir du Pain eucharistique et faire l’expérience de la communion des frères et des sœurs dans le Christ, est un besoin pour le chrétien, une joie ! Ainsi, nous pouvons trouver l’énergie nécessaire pour le chemin que nous avons à parcourir chaque semaine.

« Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui. »

Solennité du Saint Sacrement
Lectures bibliques : Deutéronome 8, 2-16 ; Psaume 147 ; 1 Corinthiens 10, 16-17 ; Jean 6, 51-58

Homélie du 4 juin 2023 ( Jn 3, 16-18)

Didier Berret, diacre – Chapelle du Vorbourg, Delémont

Célébration de la Sainte Trinité

« J’ai toujours aimé le désert. On s’assoit sur une dune de sable. On ne voit rien, on n’entend rien. Cependant quelque chose rayonne en silence. » Saint-Exupéry, le Petit prince.

C’est du Saint Exupéry. Dans le Petit prince. C’est tellement simple ! Tellement simple et tellement immense. « Quelque chose rayonne en silence. » La phrase commence par une appréciation subjective : « J’ai toujours aimé le désert » mais elle se poursuit de manière plus générale, presqu’anonyme : « on s’assied, on ne voit rien, on n’entend rien » On n’est pas là pour faire de la grammaire, mais si au lieu de cela l’auteur avait dit « je m’assied sur une dune, ou « lorsque je me suis assis sur une dune… » Ça n’aurait eu aucun autre poids que celui d’une expérience lambda d’un gars un jour assis au milieu du désert. En passant du « je » au « on », il exprime que ce qu’il éprouve le dépasse complètement et le projette ailleurs.

L’expérience est réellement intime mais elle le décentre entièrement dans ce quelque chose d’infime qui rayonne en silence. Un quelque chose d’insaisissable qui ressemble au silence ténu qu’Elie perçoit sur la montagne de l’Horeb ou à l’expérience lumineuse que Moïse fait dans la nuée du Sinaï !  C’est tellement saisissant qu’il en tombe par terre et se prosterne.

Des instants hors du temps

Dans le récit du Petit prince quelqu’un est pleinement là sur une dune et ce quelqu’un devient tout entier désert, Elie est là à l’Horeb dans la plénitude du rendez-vous et il se remplit tout entier de silence, Moïse est là, seul sur le Sinaï et il est tout entier présence ! L’abbé Maurice Zundel qui reprend un vers d’Arthur Rimbaud dit qu’à ce moment-là « Je est un autre ». Une manière étrange de dire que ces instants hors du temps racontent, avec des mots qui échappent à nos sens, ce que les mystiques appellent l’extase – la sortie de soi – autrement dit : la pure présence dans la communion profonde à autre chose que soi-même.

Ce que « tant aimer » veut dire

Aujourd’hui, en Eglise, nous fêtons la fête de la Sainte Trinité. La théorie sur la Trinité est épouvantablement complexe, mais la réalité est toute simple. Un peu comme pour la musique. La théorie de la physique des ondes va pour les grands esprits, mais savourer une œuvre transcende tout ce que l’on peut en dire et cela s’offre à tous. Trinité, c’est un mot unique, créé exprès pour Dieu on ne l’emploie pour rien d’autre ; on parle de trilogie pour des œuvres cinématographiques, de trios en musique ou dans le monde du spectacle, de triplettes à la pétanque. On parle de triplés, mais pour Dieu on dit Trinité. Pour nous, chrétiens, c’est l’un de ses noms. En fait, ce sont deux mots fondus en un seul : Trinité dit à la fois trois et unité.
Ce mystère pourrait être énoncé ainsi « on s’assoit, on ne voit rien, on n’entend rien et quelqu’un rayonne en silence. » Ce rayonnement, cette projection totale et amoureuse de Dieu sur le monde, Saint Jean l’énonce à sa manière : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son fils ; Dieu a tant aimé le monde qu’il nous donne son Esprit, Dieu a tant aimé le monde qu’il se donne complètement au monde. » Il vaudrait la peine dans nos méditations de nous arrêter et d’éprouver un peu la valeur de ce que « tant aimer» veut dire.

Et l’éprouver d’autant mieux que les temps de présence sur une dune au désert à contempler l’infini, sont dans nos vies, plutôt rares ! Le désert d’0rdinaire nous soumet à d’autres réalités plus rugueuses : la soif, la survie, les serpents, la canicule de midi et les frissons de la nuit. Ce n’est pas par hasard si le ministère de Jésus commence dans ce lieu hostile, éprouvant, dangereux. Et il va manifester à travers sa vie, dans cette réalité-là, dans nos traversées de désert comment l’amour de Dieu se donne, en laissant se rejoindre la contemplation et la vie de tous les jours. Moïse déjà perçoit dans son extase que Dieu se lie à l’humanité avec tendresse, miséricorde, patience, dans la vérité.
Ce sont des mots auxquels l’Incarnation de Jésus vient donner un visage. Des mots que Dieu adresse à l’humanité pour que chaque humain puisse les adresser aux autres humains et qu’on puisse vivre un tout petit bout de cette phrase monumentale : vous imaginez qu’au terme d’une vie on arrive à dire : cet homme, cette femme, rempli.e de l’Esprit Saint a tant aimé le monde, qu’il a, qu’elle a donné sa vie pour lui. On se sent petits, n’est-ce pas ? En attendant on pourrait commencer par reprendre le texte de Saint-Exupéry en le transformant un peu :

J’ai toujours aimé les gens. On s’assied quelque part, on s’arrête, on échange, on s’écoute, on se tait ensemble. Ils nous échappent. Cependant dans ces rencontres, quelque chose de Dieu rayonne en silence.

Fête de la Sainte Trinité
Lectures bibliques :  Exode 34, 4-9 ; Cantique Daniel 3, 52, 53, 54, 55, 56 ; 2 Corinthiens 13, 11-13 ; Jean 3, 16-18

Homélie TV du 28 mai 2023 (Jn 20, 19-23)

Mgr Lode Van Hecke OCSO – Cathédrale de Gand, Belgique

Chers frères et sœurs, chers amis de toute l’Europe,

Les Actes des Apôtres nous parlent du jour de la Pentecôte, une fête importante dans la religion juive. Les apôtres sont réunis ce jour-là. Ce n’est pas une coïncidence. Être communauté est essentiel pour l’Église si elle veut rester fidèle à l’Évangile et à l’Esprit Saint. L’Église doit aussi promouvoir l’unité dans le monde.

Souvent, les images sont plus parlantes que les mots. ‘Soudain’, quelque chose survient ‘du ciel’. Quelque chose d’inattendu se produit. ‘un bruit’, comme ‘un violent coup de vent’. Puis, une autre image apparait tout aussi vite : le feu. Le feu est ambigu car il peut être destructeur. Mais ici, le feu est ‘partagé en langues’, et il s’en pose une sur chacun. Le feu est lumière et chaleur. Une énergie positive.

La richesse réside dans la diversité

Ce qui frappe à la Pentecôte, c’est l’unité dans la diversité. Pour être un, il ne faut pas nécessairement parler la même langue ou avoir les mêmes habitudes. La richesse réside précisément dans la diversité. Nous apprenons chaque jour à gérer cette diversité, dans l’Église et dans le monde. Nous pouvons être unis malgré de profondes divergences, peut-être irréconciliables et même malgré d’importantes blessures du passé. Grâce à la télévision, des personnes de toute l’Europe participent à notre célébration eucharistique. N’est-ce pas magnifique ? N’est-ce pas un message fort en cette fête de la Pentecôte ?

Il y a soixante ans (en 1963), le Pape Jean XXIII publiait un texte qui renouvelait la doctrine sociale de l’Église. Il s’intitulait Pacem in Terris. Paix sur terre. À l’époque, le mur de Berlin divisait le monde entier et nous étions proches d’une guerre nucléaire. Le Pape Jean XXIII s’adressait à tous les hommes de bonne volonté. Aujourd’hui, nous construisons de nouveaux murs et nous faisons des stock importants d’armes. Comment l’Esprit de paix peut-il agir aujourd’hui ?

Pardonner pour parvenir à la paix

Les premières paroles de Jésus dans l’Évangile étaient : ‘La paix soit avec vous’. Jésus le répète deux fois. La peur quitte alors le cœur de ses disciples. En offrant cette paix, Jésus donne aussi une mission. La paix, vous la recevez pour la répandre. Mais pour parvenir à la paix, il faut aussi être capable de pardonner. Parfois cela semble impossible car nous nous heurtons sans cesse à la frustration et à l’impuissance. Mais l’Esprit de Dieu peut engendrer des miracles de compassion et de réconciliation. La création de l’Union européenne, peu après la Seconde Guerre mondiale, fut l’un de ces miracles. Grâce à leurs convictions chrétiennes et à leur ouverture d’esprit et de cœur, Robert Schuman et Konrad Adenauer ont pu mettre un terme à la spirale de la violence.

En rassemblant les images et tout ce qui a été dit sur l’Esprit, nous obtenons une image dynamique et inspirante. Tant pour chacun de nous personnellement que pour l’Église. Mais aussi pour notre continent et le monde. Partout où règnent la justice, la vérité, l’amour, la liberté et la beauté, l’Esprit de Dieu est mystérieusement à l’œuvre.

Puisse-t-il emplir le cœur de chaque homme et établir la communion entre tous.

Fête de la Pentecôte
Lectures bibliques : Actes 2, 1-11 ; Psaume 103 ; 1 Corinthiens 3-13 ; Jean 20, 19-23

Homélie du 28 mai 2023 (Jn 20, 19-23)

Emmanuel Rudacogora-Mugenga, prêtre in solidum de Renens – Eglise Saint-Joseph, Lausanne

                       De la confusion de Babel à la communion de la Pentecôte

Ils avaient une même langue et un même projet de bâtir une tour qui relierait la terre et le ciel par leurs propres moyens et ils sont tombés dans la confusion (Genèse 11) ; les apôtres n’avaient aucune folie de grandeur, ils étaient terrorisés et confinés sans aucun projet, et ils ont appris un langage nouveau. O Seigneur, envoie ton Esprit qui renouvelle la face de la terre.

L’Église de la Pentecôte sait surprendre : des hommes ivres de Dieu, d’hier et d’aujourd’hui, des nuls qui deviennent des témoins, des traîtres qui se laissent transformés en prêcheurs, et surtout un ramassis d’hommes incompétents aux parcours variés (pêcheurs, publicains, zélotes, etc.) qui forment désormais une équipe, plutôt fondent l’Église. Ô Seigneur, envoie ton Esprit qui renouvelle la face de la terre.

L’Église de la Pentecôte qui se fait comprendre, ne peut se contenter de maintenir ses positions statiques en proclamant que tout est sous contrôle ou  communiquer avec l’extérieur par des déclarations solennelles et des promesses évasives, mais en proclamant une parole qui libère et qui apprend  à cheminer dans la synodalité, pour mettre en route tous ceux qui ont accueilli la parole et ceux qui ont soif de la même espérance.

Sauver le feu pour qu’il ne s’éteigne jamais

L’Esprit saint n’avait pas pour mission de remplir les cerveaux de ces « fils du vent » par des idées et des stratégies ; son unique objectif était d’incendier leurs cœurs. Des vrais pompiers qui ne protègent pas du feu mais qui s’engagent à sauver le feu pour qu’il ne s’éteigne jamais.

La fidélité à l’Esprit de pentecôte n’est pas de se complaire à fonctionner, à « administrer les cendres » mais à ne jamais avoir peur de se brûler les doigts et les cœurs en remuant et en entretenant les charbons ardents.

Le feu de l’amour, le feu du courage

Les hommes de la Pentecôte sont obligés de sortir, car il y a un feu dans la maison et si les pompiers devaient venir, ce n’est pas pour l’éteindre mais pour l’alimenter. Le feu de l’amour, le feu du courage.

L’Église de la Pentecôte n’a pas reçu un remède contre la peur (ils étaient confinés) ; elle a reçu le courage et la force qui ont fait oublier la peur. Le vent de la pentecôte n’a pas obligé les apôtres à se barricader en renforçant portes et fenêtres pour se protéger ; au contraire, il les a poussés à les ouvrir grandement pour sortir à la rencontre de ceux qui attendaient une « parole ».

Avec le don du Saint Esprit, le Christ vient déverrouiller les portes de nos peurs.

Il est possible de connaître et de parler la langue de l’autre mais est-ce une garantie qu’on parle à l’autre. Réveiller un désir, susciter une envie pour que chacun se pose la vraie question est la mission de l’Église de Pentecôte. Après le discours de Pierre, il n’y avait ni compliments ni applaudissements du style, tu as bien parlé mais une seule question : « Que devons-nous faire ». Être sous l’emprise du Saint Esprit qu’il faut consommer sans modération, c’est accepter un dopage qui nous propulse en avant sans risque d’être contrôlé. C’est à nous les disciples d’aujourd’hui comme à ceux d’hier de trouver les mots justes pour mieux communiquer et communier. Mais comment parler de Lui si nous n’avons pas auparavant parlé avec Lui ? Ô Seigneur, envoie ton Esprit qui renouvelle la face de la terre.

Fête de la Pentecôte
Lectures bibliques : Actes 2, 1-11 ; Psaume 103 ; 1 Corinthiens 3-13 ; Jean 20, 19-23