Assemblée générale 2023 de Cath-Info


Voici les documents en lien avec
l’assemblée générale de Cath-Info
du 3 mai 2023 à Lausanne:

Homélie du 19 février 2023 ( Mt 5, 38-48)

Abbé Pascal Lukadi – Chapelle de Glace, Leysin, VD

« Tous appelés à la sainteté »

Après un message de la radicalité du message évangélique le dimanche passé où Jésus nous invitait à faire des choix fermes, qui puissent nous apporter le vrai bonheur, comme autrefois avec ses disciples sur la montagne, c’est de la montagne de Leysin que Jésus s’adresse à chacune et chacun de nous, où que nous soyons, à la maison en train de finir notre petit déjeuner, en voiture, à l’hôpital ou en clinique malades ou soignants, il s’adresse à nous dire en quel esprit devons-nous parfaire les lois et les pratiques du judaïsme.

En fait, Jésus nous invite à l’impossible : il nous offre à aimer comme il nous aime. Ce qui n’est pas possible à l’homme que nous sommes. Cependant, à Dieu rien n’est impossible. Et sa sagesse, folie aux yeux du monde. Et l’Apôtre Paul ne cesse de nous rassurer : je peux tout en Celui qui me fortifie, dans l’absolue conscience de sa faiblesse. L’hymne à l’amour, ce texte le plus célèbre de Paul, lu à la fois au mariage et aux funérailles, nous dit que des trois vertus théologales (avec la foi et l’espérance), la charité est la seule qui subsiste au ciel. On peut bien le comprendre : Dieu est amour et Dieu est plus grand et demeure. Et Paul de dire : Sil me manque l’amour, je ne suis rien. Si Dieu me manque, je ne suis rien. Mais si Dieu est en moi, par son Esprit, alors je peux.

Aimer tous les êtres : un don de l’Esprit

En effet, être capable d’aimer tous les êtres ne peut être qu’une grâce accueillie, un don de l’Esprit. Tout vous appartient, (2ème lecture), tout est à vous, il confirme, mais vous, vous êtes au Christ, et le Christ est à Dieu. Le plus important est notre appartenance au Christ, et non à tel pasteur, tel curé, Apollos, Paul ou Pierre.   Et c’est dans cet ordre que se conjugue l’amour : aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. Alors peut-être pouvons-nous demander la confiance des petits : « Jésus, le Christ, mon Sauveur et mon Dieu, donne-moi la grâce de Te laisser m’aimer tout au long de ce jour »

Et c’est avec cette assurance de l’amour du Christ que nous pourrons aimer, non seulement ceux qui aiment, qui nous veulent du bien, mais aussi celles et ceux-là qui ne nous portent pas dans leurs cœurs. Tout comme nous, à leur égard. Le livre de Lévitique nous demande de refuser la haine, de préférer l’amour à haine, de ne pas garder rancune. Nous sommes appelés à aimer. Qui est-ce ? tout le monde, sans discrimination, sans distinction.

La foi qui change la vie et nous transforme

Jésus termine son discours aujourd’hui en nous invitant à être parfaits, comme notre Père céleste est parfait. Voir la 1ère lecture. Notons que si la sainteté a quelque chose à voir avec la conduite que nous adoptons, elle se comprend d’abord et essentiellement en rapport avec Jésus Christ, le Saint de Dieu. Nous sommes tous appelés à la sainteté, nous rappelle le Concile Vatican II. Mais les textes nous aident à comprendre qu’il s’agit moins d’une injonction morale (être parfait) que d’un appel à la Foi (être au Christ), une foi qui change la vie et nous transforme intérieurement au point de nous convertir à la justice, au pardon et à l’amour. Dit autrement, la confession de foi de la sainteté de Dieu nous engage vis-à-vis de Dieu, du prochain et de nous-mêmes. Les mots de la foi ne sont pas de simples mots, ils sont toujours déjà des pratiques, des mises en œuvres de ce qu’ils contiennent. Car le contenu de la foi en Dieu n’est pas autre chose que sa traduction concrète dans la justice, le pardon et l’amour. Ce qui nous rassure, c’est ce que nous dit l’Evangile, que nous sommes au Christ (et que le Christ a réalisé tout cela), et le Christ est à Dieu, le Saint. Et l’extraordinaire repose en Dieu dont nous tenons le sens, alors le vrai, de la justice, du pardon et de l’amour parce qu’il les amène à leur plénitude en son Fils et que nous en vivons déjà aujourd’hui, au milieu de nos limites.

Écoutons Maximilien Kolbe dans le camp de concentration d’Auschwitz. Alors que son bourreau le torturait dans ce camp, il demanda à Maximilien d’arrêter de le regarder avec miséricorde. Maximilien, ce prêtre franciscain, de lui répondre qu’il pouvait le tuer mais qu’il ne pourrait cependant pas l’empêcher de l’aimer. Et ayant pris la place d’un père de famille, il mourut avec d’autres, mais en dernier dans le bunker de la faim.

La suite de ce discours nous conduit sûrement sur l’entrée en Carême avec ses trois piliers : l’aumône, la pénitence et la prière. Nous y reviendrons le mercredi 22 février, mercredi des cendres pour commencer notre combat spirituel, qui nous permette de rentrer en nous-mêmes. Le retour à la vie intérieure est lié à la découverte du sacré au plus intime de nous, disait Maurice Zundel. Et un autre commentait : il n’y a que la découverte du sacré qui nous ramène à l’intimité avec soi-même et avec les autres. Donc au vrai amour !

7e Dimanche du Temps ordinaire
Lectures bibliques : Lévitique 19, 1-2, 17-18 ; Psaume 102 ; 1 Corinthiens 3, 16-23 ; Matthieu 5, 38-48

Homélie du 12 février 2023 (Mt 5, 17-37)

Abbé Vincent Lafargue – Chapelle de Glace, Leysin, VD

Chers amis,

Dans une autre vie, j’étais animateur de radio. Et avec un très cher ami qui vient de rejoindre les étoiles, parmi les nombreux programmes que nous avons produits et animés à l’époque, il y avait un « ni OUI ni NON ».

Vous vous souvenez sûrement de ce jeu, qu’on trouvait aussi jadis à la télévision, consistant à poser des questions à un candidat qui ne devait répondre ni par « oui » ni par « non ». C’était parfois savoureux !

Avec Jésus, au contraire, on a le jeu du « soit OUI soit NON ». Il vient de nous le redire dans l’Evangile : « Que votre OUI soit OUI, que votre NON soit NON ! » Et il a même ajouté : tout le reste vient du Mauvais ! Le Mauvais avec un « M » majuscule, le démon.

Tout le reste, c’est-à-dire les « peut-être », « faut voir », « je te redis plus tard », « on va y réfléchir », « éventuellement », le très helvétique « ni pour ni contre, bien au contraire »…
Sans parler de cette locution très en vogue et totalement absurde : « oui mais non ».

Avec Jésus, c’est oui ou c’est non

Avec Jésus, c’est oui ou c’est non. Et si c’est oui, c’est oui. Et si c’est non, c’est non.

A deux reprises cette semaine j’ai eu l’occasion d’être extrêmement ferme dans deux réunions pas faciles du tout. Et je remarque à quel point il est important de poser des « oui » et des « non ». J’ai été clair, ferme, précis : telle situation c’est non. Pas avec moi. Et il n’y a pas d’alternative ou de négociation possible.

Bien des gens n’apprécient pas du tout cela. Et ils sont nombreux, ceux qui se sont frottés à mon caractère pour cette raison-là. Je ne tergiverse jamais.

Pourquoi les gens n’aiment-ils pas les caractères comme le mien ? Sans doute qu’il n’est pas simple – suppose-t-on – de tomber sur quelqu’un qui est exigeant, pour qui un oui est un oui et un non est un non.

Permettez-moi de trouver qu’au contraire c’est beaucoup plus simple !

On sait à quoi s’en tenir avec ces personnes-là !

Alors que si vous tombez sur quelqu’un qui vous dit « oui » un jour et « non » le lendemain, sur quelqu’un qui vous dit « faut voir, on en reparlera, je te redis plus tard »… eh bien c’est beaucoup plus déstabilisant.

Pour ma part j’ai toujours préféré les gens entiers. Celles et ceux avec lesquels un oui est un oui, et un non est un non. Et je suis ainsi, on ne se refait pas.

Alors évidemment ce n’est pas la façon de faire de ceux qui dirigent le monde, et qui sont sans arrêt en négociations, en pourparlers, en compromis. Pour ma part, voilà la raison pour laquelle je n’aurais jamais pu être politicien.

Paul en parlait dans la deuxième lecture : « la sagesse de ceux qui dirigent le monde et vont à leur destruction », disait-il.

La sagesse de Dieu est non-négociable

La sagesse de Dieu, elle, est incorruptible, non-négociable.

Le psaume le disait lui aussi à sa manière : « Heureux les hommes intègres dans leurs voies qui marchent suivant la loi du Seigneur !
Heureux ceux qui gardent ses exigences ! »

Je crois que le monde a besoin, a soif même, de ces êtres pour lesquels un oui est un oui et un non un non. Nous avons bien assez vu ce que les êtres à double visage, à double serment peuvent amener comme catastrophes.

Alors bien sûr, cela dépend de chacune et chacun de nous. Le sage Ben Sira le disait parfaitement dans notre première lecture : « Si tu le veux, tu peux observer les commandements, il dépend de ton choix de rester fidèle. Le Seigneur a mis devant toi l’eau et le feu : étends la main vers ce que tu préfères. »

Autrement dit : si tu préfères l’instabilité, la mouvance de l’eau, ce qui coule et ne peut être vraiment saisi, alors continue à fréquenter les gens qui te disent oui un jour et non le lendemain. Mais ce n’est pas ainsi que tu suivras Jésus.

Par contre, si tu veux suivre Jésus, alors entoure-toi des personnes dont la parole est sûre, dont le oui est oui et dont le non est non. Je ne te promets pas un long fleuve tranquille, au contraire : c’est du feu que Ben Sira t’annonce.

La parole de feu te rendra heureux

Mais la parole de feu, celle qui ne tergiverse pas, celle qui n’est pas compromise, vague ou approximative, celle-là te rendra heureux.

Plus loin dans nos Bibles, au tout dernier livre, Jésus vomit les tièdes. On ferait bien de s’en souvenir. Notre parole ne doit jamais être dans le tiède, dans l’à-peu près, dans le « oui mais ».

Nous ne devons jamais faire partie de celles et ceux qui ne disent jamais oui et jamais non. Sauf s’il s’agit d’un jeu radiophonique, bien évidemment.

6e dimanche du Temps ordinaire
Lectures bibliques : Siracide 15, 15-20; Psaume 118; 1 Corinthiens 2, 6-10: Matthieu 5, 17-37


Homélie du 5 février 2023 (Mt 5, 13-16)

Chanoine Olivier Roduit – Basilique de l’Abbaye de Saint-Maurice, VS

Chers frères et sœurs,

Il y a quelques jours, à la table de la communauté de l’abbaye, la discussion est arrivée sur le terme boisseau. Savez-vous vraiment ce que c’est ? J’imaginais d’abord un objet qui serve à protéger quelque chose. Eh bien non, le boisseau est un ustensile servant de mesure pour le grain. La mesure est différente selon les régions, mais il semble que le boisseau romain, dont il est question dans cet évangile, était une mesure sèche d’une capacité de 8,6 litres. Le boisseau est donc une sorte de grand vase, ouvert vers le haut. Mais il devait être probablement souvent déposé à l’envers pour éviter que des détritus viennent le salir. Ainsi mettre quelque chose sous le boisseau, cela signifie vouloir vraiment le cacher.

Tout ceci pour dire la portée de l’expression évangélique : mettre la lampe sous le boisseau, ce qui signifie proprement vouloir intentionnellement la cacher, l’utiliser pour le sens contraire de sa fonction première. La lumière est faite pour éclairer et non pour disparaître.

Lumière du monde, sel de la terre

La lumière est faite pour éclairer… et Jésus nous dit que nous sommes la lumière du monde. Pas n’importe quelle lumière, mais la lumière du monde, celle qui éclaire le monde entier !

De plus, nous sommes le sel de la terre. Quelle responsabilité… et quelle chance !

Lorsque dernièrement on évoquait cet évangile dans un groupe de spiritualité, une dame nous disait avec émotion comment cette page d’évangile l’avait aidée au moment où elle s’était trouvée seule avec 4 jeunes enfants. Elle avait entendu cette lecture au cours d’une messe et ces mots avaient retenti très fortement dans son cœur. Elle avait alors saisi sa responsabilité de devoir apporter à ses enfants, non pas le désespoir, mais le sel qui donne goût à la vie et la lumière qui illumine l’existence. Elle y avait trouvé la force pour continuer sa mission malgré toute la cruauté de sa situation.

Une responsabilité

Le sel de la terre, la lumière du monde : une parole de vie, que ces mots, mais aussi une responsabilité. Moi, nous, vous… apportons saveur et clarté au monde… alors que nous pouvons nous sentir si souvent médiocres, de pauvres pécheurs bien loin de la sainteté.

Je crois n’être pas le seul à penser que ma vie de tous les jours n’a rien d’exemplaire.

Et pourtant, avec vous, j’entends : « Vous êtes le sel de la terre et la lumière du monde ».

Comment cela peut-il se faire ?

Une présence extraordinaire en nous : celle de Dieu

Tout simplement parce qu’il y a en nous une présence extraordinaire : celle de Dieu. Et si nous la laissons rayonner, tout se transforme.

Et si la sainteté n’était pas dans l’accomplissement consciencieux de nos petites tâches quotidiennes ? N’en avons-nous pas tant de témoignages ?

C’est bien pour cela que cette page d’évangile est emblématique pour tous les mouvements d’apostolat des laïcs. L’Église c’est vous, nous, tous ensemble ; des baptisés réunis dans la foi et l’espérance.

Bien avant Jésus le prophète Isaïe avait exprimé cette même idée. Si tu accueilles le pauvre, si tu aides celui qui est dans la difficulté et si tu ne te dérobes pas à ton semblable — combien de fois essayons-nous de ne pas rencontrer celui qui est dans la difficulté —, alors ta lumière jaillira comme l’aurore, et tes forces reviendront vite.

Et il y a cette si belle image, une image de lumière : Devant toi marchera ta justice, et la gloire du Seigneur fermera la marche.

Lorsque j’avance dans la vie, il y a la justice devant moi, et dans mes traces, la gloire du Seigneur. Comment passer inaperçu ? Cela me fait penser à ces spectacles où sur une scène dans l’obscurité, on voit avancer une personne uniquement éclairée dans un faisceau lumineux.

Que donc retenir au terme de cette méditation ?
Si tu vis selon la justice… sans nécessairement faire des choses extraordinaires aux yeux des hommes,
Si tu te laisses transformer intérieurement par le sel et la lumière divins,
Alors tu vas donner du goût à cette vie et tu apporteras un peu de lumière à ce monde.

5e dimanche du Temps ordinaire
Lectures bibliques : Isaïe 58, 7-10 ; Psaume 111 ; 1 Corinthiens 2, 1-5 ; Matthieu 5, 13-16