Homélie du 27 juin 2021 (Mc 5, 21-43)

Abbé Aimé Munyawa – Église Saint-Joseph, Lausanne

Chers frères et sœurs et vous bien-aimés de Dieu qui nous suivez à travers les ondes de la RTS,

La parole de Dieu en ce dimanche nous met en face des réalités les plus dures, les plus touchantes et parfois même les plus révoltantes de l’existence humaine. Il s’agit de la souffrance, de la mort et surtout de l’angoisse qui, souvent, accompagne les deux lorsqu’elles touchent à notre vie.

Une femme accablée par la souffrance pendant 12 ans vient toucher le Seigneur Jésus. 12 ans d’humiliation et de souffrance de la maladie sans guérison, mais aussi 12 ans d’angoisse parce qu’elle était exclue de la communauté à cause d’une maladie considérée comme expression d’impureté dans la loi juive.

Dans le même instant, le Christ était déjà en route pour aller répondre à un cri de détresse, à un cri d’angoisse d’un papa qui a peur de perdre sa fille qui n’était âgée que de 12 ans. Il est clair que souffrir pendant 12 ans c’est trop long, c’est trop angoissant, trop révoltant parfois ; Mais il est aussi clair que mourir à 12 ans c’est trop tôt, c’est trop dur et c’est même trop révoltant encore. Dans ce contexte, parfois on finit par se demander pourquoi moi ? Dieu n’est-il pas injuste de laisser cette souffrance s’abattre sur moi ? Ou encore laisser la mort m’arracher cette personne que j’aime tant ? La femme, tout comme Jaïre, pouvait se poser ces questions.

La Parole de Dieu : un chant à la vie

Face à l’angoisse ou à la révolte qui découle de nos questionnements sans réponses, la parole de Dieu nous répond aujourd’hui par le livre de la Sagesse que nous avons entendue : « Dieu n’a pas fait la mort, il ne se réjouit pas de voir mourir les êtres vivants… c’est par la jalousie du diable que la mort est entrée dans le monde ». En ce sens, la Parole de Dieu retentit aujourd’hui comme un chant, une hymne à la vie, laquelle vie jaillit de l’amour de Dieu, lui qui est plus fort que toutes les forces du mal qui pourraient menacer l’épanouissement et le bonheur humain.

La femme souffrante et la fille de Jaïre constituent, chacune en ce qui la concerne, le symbole de l’humanité qui croupit sous l’angoisse de la maladie, de la mort ou de toute autre forme de misère. Et le Seigneur Jésus qui est venu dans le monde pour que l’humanité aie la vie et qu’elle l’aie en abondance (Jean 10, 10) décide de sortir l’humanité de cette angoisse afin de montrer que la gloire de Dieu se trouve dans l’homme debout, dans l’homme et dans la femme remplis de vie. À celle ou à celui qui est terrassé par la maladie, il dit : « lève-toi » ou encore : « Ma fille / mon fils, ta foi t’a sauvé (e). Va en paix et sois guéri (e) de ton mal ». À celle ou à celui dont la vie est bouleversée ou détruite par la mort d’un être cher le Seigneur dit : « Ne crains pas, crois seulement ».

Cher frères et sœurs et vous bien-aimés de Dieu qui nous suivez de tous les coins du pays par la voie des ondes,

Le chiffre 12 et la foi

L’histoire de la femme malade ainsi que celle de la fille de Jaïre ont deux choses en commun : le chiffre 12 et la foi.

  • Le chiffre 12 dans la bible signifie l’élection. Les 12 tribus d’Israël, les 12 apôtres, les 12 portes de la Jérusalem céleste, etc. 12 ans de maladie comme 12 ans d’âge au moment de la mort, nous révèle que quel que soit le degré de souffrance ou quelle que soit l’angoisse de la mort, nous sommes et nous demeurons des élus de la vie nouvelle en Jésus Christ. Rien ne peut nous séparer de son amour. Ni la souffrance, ni l’angoisse, ni la mort, rien ne peut nous séparer de l’amour de Dieu qui vient nous transformer.
  • La foi : le Seigneur Jésus est touché par la foi de la femme et l’espérance sans faille d’un père désespéré. Cependant, Jésus invite leur foi à grandir, à tendre vers la maturité. Jaïre était un homme de foi. Il adresse sa prière à Jésus. Pendant que ce dernier s’apprête à répondre à sa demande, une autre personne intervient avec une demande aussi pressante. Le Seigneur s’occupe d’abord de la dernière demande comme s’il oubliait celle de Jaïre qui était pourtant le premier à prier Jésus. La foi de Jaïre est appelée à la patience. La foi implique la patience parce que le temps de Dieu n’est pas le nôtre et que le Seigneur a son temps pour nous répondre. Jaïre ne doit être ni jaloux ni fâché de la femme dont le Seigneur prend soin au point de retarder sa réponse. La foi nous amène à nous réjouir avec les autres. Nous avons l’impression d’être mis entre parenthèses ou en jachère, mais sachons que le Seigneur ne nous oublie pas.. Les proches viennent lui dire : « Laisse tomber, l’enfant vient de mourir. Pourquoi continuer à déranger Jésus ». Sa situation s’est entretemps empirée. Parfois nos proches peuvent nous décourager. Ici la foi de Jaïre, pour ne pas dire notre foi, est appelée à la persévérance. Si le Seigneur nous dit : « Ne crains pas, crois seulement » et que les amis nous disent : « Laisse tomber ça ne vaut plus la peine ». Qui devrions-nous écouter ? encourageons-nous mutuellement dans la foi sans semer le doute dans les cœurs de nos proches. La foi de Jaïre, vécue dans la patience et la persévérance a produit la vie nouvelle en Jésus pour sa fille, pour ses proches et pour lui-même.

Oser montrer que nous sommes chrétiens

Quant à la femme, c’était une femme de foi. Mais elle voulait obtenir sa guérison en cachette, en toute discrétion, sans le vis-à-vis avec le Christ. Le Seigneur l’invite à sortir de sa cachette pour faire une véritable profession de foi publique. Soyons courageux pour affirmer publiquement notre foi sans pour autant mépriser celle des autres, bien entendu. N’ayons pas honte de montrer que nous sommes chrétiens

Enfin, le Seigneur demande à l’assistance de donner à manger à la fille ressuscitée. La vie nouvelle se conserve et s’entretient par une nourriture divine. Et cette nourriture divine nous la retrouvons dans la parole de Dieu, la prière et les sacrements. Le sacrement de l’Eucharistie comme nourriture de celles et ceux qui sont nés de l’eau et de l’Esprit Saint pour la vie nouvelle. Et de manière particulière nous sommes invités à redécouvrir la grâce, la force et la joie du sacrement de réconciliation lorsque nous sommes malades de péchés et celui de l’onction des malades lorsque notre corps est affaibli par la maladie physique.
Loué soit Jésus Christ !

13e DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE
Lectures bibliques : Sagesse 1, 13-15 ; 2, 23-24; Psaume 29 (30) 2.4, 5-6ab, 6cd.12, 13; 2 Corinthiens 8, 7.9.13-15; Marc 5, 21-43

Homélie du 20 juin 2021 ( Mc 4, 35-41)

Dimanche des réfugiés

Jésus nous dit de passer sur l’autre rive. Aller de l’autre côté du lac… c’est une invitation au changement.
Il est facile aujourd’hui de penser avec cet Évangile à tous les migrants qui traversent la Méditerranée en quête d’une vie meilleure, mais ne pensons pas tout de suite à eux.
Tout d’abord il est important de se poser la question : changer pourquoi ?
Le risque est de ne pas bouger alors que notre monde s’en va ailleurs.
Parfois nous avons l’impression que l’Église reste immobile quand toute la société va d’un autre côté.


Comme première réponse on pourrait dire que changer, passer sur l’autre rive, peut être une tentative de suivre notre monde, notre humanité. Comme nous le dit assez souvent le pape une tentative pour rester avec nos brebis. Même si ce changement nous demande un effort et même d’affronter des difficultés.
Pour les Apôtres aussi ce n’était pas un voyage facile. Il s’agissait d’aller vers la région dite de la Décapole, c’est-à-dire vers des terres païennes que les Romains occupaient et qui dérangeaient aussi les bons Juifs parce qu’elles étaient des terres sans dieu, sans foi.

Invités à regarder plus loin

Passer sur l’autre rive, avec confiance, est une proposition pour nous tous !
Dans tous les changements de la vie nous sommes invités à regarder plus loin.

En italien : Aujourd’hui peut-être que nous sommes dans cette situation où nous n’avons pas envie de changer, parce que nous croyons qu’il y a déjà assez à faire, qu’il y a assez de difficultés. Peut-être que nous sommes d’excellents météorologues et nous avons déjà vu la tempête arriver… faisons confiance et regardons de quel côté de la barque se trouve Jésus. Appelons-le et prions-le ! qu’il nous donne confiance, courage et force pour vivre ces changements.

Prendre Jésus dans notre bateau

Pourquoi alors un tel voyage ?
Et en plus voilà qu’arrive aussi une tempête. Il y en a toujours dans nos vies. Exactement quand nous entreprenons un voyage difficile, quand nous nous dirigeons vers l’inconnu, on dirait presque qu’on a cherché les problèmes : voici la tempête ! Le passage, le changement, n’est jamais facile. Et il peut même être plus compliqué que prévu.
La condition pour faire ce voyage est de prendre Jésus dans notre bateau. Et de le prendre tel qu’il est : fatigué, endormi, mais il est là, il est présent ! il est avec nous.
Il peut nous arriver de vouloir choisir le Jésus dont nous avons besoin. De le manipuler pour qu’il fasse ce qu’il faut ! qu’il résolve les problèmes avant qu’ils arrivent.

Aujourd’hui j’aimerais remercier Dieu pour la tempête. Parce que s’il y a une tempête ça veut dire que nous avons osé, que nous sommes sortis de nos sécurités ; s’il y a une tempête ça veut dire qu’il y a de la vie, que nous sommes en vie et que nous ne nous laissons pas vivre! Ça veut dire que nous sommes en train de changer !

Dommage qu’il arrive souvent que nous accusions Jésus pour cette tempête. Les apôtres aussi le font : « cela ne te fait rien qu’on soit perdus ? ».
En réalité, Jésus est l’Emmanuel, il est « le Dieu avec nous » ! et voilà que sa Parole menace le vent et la mer ils se fit un grand calme.

Les migrants

Mais revenons au thème de cette journée : les migrants.
Ils ont traversé la mer, ils ont essayé de traverser la Méditerranée.
Beaucoup sont morts, torturés, étouffés, dans les vagues, ou par le froid ou par la fatigue.
Pensons que ces gens ne sont pas le problème : ces gens sont notre tempête !
Ces gens sont ceux qui nous poussent à entamer la quête d’un autre monde. Ces gens nous demandent de réfléchir à ce qu’est vraiment la justice, à faire basculer la logique que l’argent va vers l’argent et les riches seront toujours plus riches. Disons-le ouvertement : les riches c’est nous !

Ce qui est triste c’est que nous ne nous faisions aucun souci. Les disciples crient, ont peur, appellent Jésus. Aujourd’hui nous sommes déjà dans cette tempête, mais cela ne nous touche pas.
Prenons Jésus dans notre barque, acceptons de vivre des temps difficiles (désormais ils sont bien là), et commençons ce voyage… nous avons un grand chemin à parcourir, et n’oublions pas de prendre Jésus avec nous.

12e DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE – DIMANCHE DES MIGRANTS
Lectures bibliques : Job 38, 1.8-11; Psaume 106 (107) 21a.22a.24, 25-26a.27b, 28-29, 30-31; 2 Corinthiens 5, 14-17; Marc 4, 35-41