Homélie TV de la fête de l’Assomption, 15 août 2021 (Lc 1, 39-56)

Père Richard Gibbon, curé et recteur du sanctuaire de Knock, Irlande


Combien de fois, au cours de cette année et demie écoulée, n’avons-nous pas souhaité nous débarrasser de certains mots ou expressions qui nous ont retenus prisonniers ? Pensons à des expressions telles que ‘confinement’ (la pire de toutes, je pense !), ‘distanciation sociale’, ‘désinfection’ ou ‘port du masque’… La pandémie nous a tous forcés à faire un chemin de guérison, parsemé de bonnes, de mauvaises et de tristes expériences : de l’aide fraternelle à la solidarité, à la mort d’êtres chers en l’absence de la famille, en passant par les combats contre les aspects les plus sombres de notre nature, tels que les dépendances, les violences domestiques et la désinformation sur les vaccins… Dans tout cela, nous avons dû garder l’espoir et, en tant que chrétiens, espérer en des jours meilleurs en gardant confiance en Dieu, même lorsque nos églises étaient fermées.

Ne pas perdre courage

Un exemple de maintien de cet espoir ici en Irlande est l’histoire d’une dame de 107 ans appelée Nancy Stewart. Elle a écrit une lettre à la population, lors du dernier confinement. Cette lettre est devenue virale dans les médias de notre pays. Nancy est née en 1913 et a vécu ce que le 20e siècle pouvait offrir de pire aux personnes de son âge : la première guerre mondiale, la grippe espagnole, la guerre d’indépendance irlandaise et la guerre civile, la dépression économique mondiale des années 30, la deuxième guerre mondiale, la guerre froide, etc. En dépit de ce catalogue d’horreurs, Nancy fait référence à la pandémie et nous dit de ne pas perdre courage. Elle dit que même si elle a 107 ans, elle se sent aussi jeune que si elle en avait 50 ! Son optimisme sain, nous dit-elle, est dû au contact avec la famille et les amis, à la prière du rosaire, à la messe télévisée… et au thé ….. ! Rien de tel qu’une tasse de thé, une discussion et un fou rire. Si Nancy vivait sur le continent, je ne doute pas que son thé serait plutôt du café ! Elle a écrit cette lettre pour rappeler aux gens que cette pandémie passera et que nous vivrons à nouveau des temps plus heureux.

Quelles que soient les difficultés, Dieu ne nous oublie jamais

L’espérance chrétienne garde toujours à l’esprit une vision à long terme, une vision d’éternité. Ici, à Knock, au sanctuaire eucharistique et marial international d’Irlande, la Vierge est apparue avec saint Joseph, saint Jean l’Évangéliste et l’Agneau de Dieu pour donner de l’espoir à un peuple vivant des moments désespérés. Pour leur dire que, quelles que soient les difficultés de la vie, Dieu ne nous oublie jamais. Et cet espoir trouve un écho dans cette fête de l’Assomption. En effet, nous croyons que Marie – parce qu’elle a joué un rôle crucial en tant que Mère de Dieu dans l’histoire du Salut – a été emmenée corps et âme dans l’intimité de Dieu. Bien plus, l’importance de Marie ne se limite pas à nous donner l’espoir dans la vie éternelle. Elle nous donne aussi l’espoir face aux luttes quotidiennes et celles que nous traversons en ce temps de pandémie. Dans le Magnificat, elle est la femme qui incarne le Seigneur qui fait des merveilles pour nous. Elle se réjouit du choix du Seigneur pour qu’elle devienne la mère de son Fils et son esprit exulte car Dieu ne l’a pas oubliée. Ainsi, Dieu ne nous oublie pas. Dieu n’a pas provoqué cette pandémie, mais au contraire, par nos prières et grâce à la science que Dieu nous donne – et grâce notamment au développement des vaccins – nous pouvons espérer en des jours meilleurs. Il a fait de grandes choses pour nous.

L’espoir ne consiste pas à fermer les yeux sur les tensions, les difficultés et les échecs de la vie. Il s’agit plutôt, comme Marie, de faire confiance à Dieu au point que si nous échouons maintenant, nous n’échouerons pas pour toujours. Si j’ai mal maintenant, je serai guéri. Si je trouve la vie difficile aujourd’hui, je serai toujours accueilli par Dieu. Que nos âmes proclament sa grandeur et que nos esprits exultent en lui, notre sauveur. Je ne doute pas que Nancy Stewart serait d’accord !


L’ASSOMPTION DE LA VIERGE MARIE

Lectures bibliques : Apocalypse 11, 19a ; 12, 1-6a.10ab; Psaume 44,10bc.11.12ab.16; 1 Corinthiens15, 20-27a; Luc 1, 39-56

Homélie du 8 août 2021 (Jn 6, 41-51)

Chanoine Jean-Michel Lonfat – Hospice du Grand-Saint-Bernard, VS

Comment ne pas méditer, après avoir entendu les textes liturgiques en ce dimanche matin, sur le besoin vital, fondamental de se nourrir pour vivre ?
Frères et sœurs chers auditeurs à l’heure où nous sommes, qui d’entre nous n’a pas encore pris sa collation du matin ? Nourriture importante, consistante pour débuter notre journée.

Les textes de ce jour sont clairs ils nous disent deux choses : premièrement que nous sommes quasiment obligés de manger pour vivre  afin de poursuivre notre route et deuxièmement que la nourriture des hommes ne comble pas notre faim alors que celle de Dieu, non seulement nous rassasie, mais nous donne la vie éternelle.

Quand nous méditons l’Ancien Testament nous le remarquons bien,  ce besoin de nourriture pour un peuple en déplacement en migration est indispensable. Que de fois la communauté réclame la nourriture,  sa nourriture. Que de fois l’homme va jusqu’à désobéir pour avoir sa part de pain. Que de fois il va même jusqu’à en vouloir à Dieu et à ses frères parce que la nourriture manque. On pouvait l’entendre dimanche passé justement. Plus la communauté avançait dans le désert, plus elle reculait et cherchait dans ses souvenirs et sa mémoire le rappel des années jadis où il y avait à manger. On pense aux bonnes années du passé comme on dit communément.

L’homme crie sa souffrance

La première lecture nous rappelle que l’homme crie sa souffrance, il désespère, il maudit il en veut terriblement à celui qui l’a mis dans une telle situation, il en est dégoûté, il n’en peut plus il veut tout simplement mourir.

Le passage du Premier livre des Rois nous montre justement le prophète Elie épuisé par la marche il doit se réfugier au désert le lieu de l’épreuve. Le lieu de la tentation : tentation de se laisser aller jusqu’à la mort.

C’est précisément là que Dieu vient le rejoindre. Dieu ne peut et ne veux pas la mort de l’homme il l’a créé pour qu’il vive.

Dieu manifeste sa générosité

« Goutez et voyez comme est bon le Seigneur » nous a dit le psalmiste !

En effet Yahvé, Dieu, va intervenir au cœur de cette fatigue et de cette lassitude de l’homme. Dans le sommeil ou la ténèbre de la mort d’Elie, Dieu vient lui dire :

 « Lève-toi et mange » à trois reprises… et le petit déjeuner, la collation est là ! Dieu parle et agit. Surprise !

On le voit plusieurs fois dans l’histoire biblique : Dieu manifeste sa tendresse et sa générosité pour que l’homme puisse poursuivre sa route.

Elie sera témoin de cette présence de Dieu à ses côtés pour atteindre l’Horeb la montagne de la Révélation.

« Goûtez et voyez comme est bon le Seigneur »

Nous pensons que Dieu ne nous regarde pas, qu’il ne nous voit pas qu’il ne fait rien pour nous dans nos situations de détresse de découragement de fatigue, le voilà bien présent tout proche de nous et même avec cette astuce géniale si on ose le dire ainsi, de se donner à nous en nourriture.

On retrouve dans cet épisode d’Elie en marche vers l’Horeb toute la vie de l’homme, errant quelquefois dans des déserts de toutes sortes.

Tenté d’abandonner son Dieu, son compagnon fidèle, l’homme sans trop le vouloir risque sa vie, il risque même sa mort.

« Goûtez et voyez comme est bon le Seigneur »

Interpellé dans nos différents sommeils, Dieu désire profondément que nous en sortions épanouis. Il veut notre bien, et le réconfort qu’il nous propose, qu’il nous donne gratuitement et abondamment c’est sa vie, son corps et son sang en nourriture.

C’est bien là la difficulté pour les hommes de son temps d’accepter cela. On le voit dans cet Évangile. Les paroles de Jésus ne sont pas comprises.

Après trente ans de vie en Palestine, après trente ans de vie sociale très intense avec les gens de son village, après trente ans de présence et de connaissance ou la famille, le clan, la tribu sont si importants, comment accepter d’entendre dire de sa propre bouche :

« Moi je suis le pain qui est descendu du ciel ! »

Frères et sœurs chers auditeurs si nous avions été à la place des contemporains de Jésus quelle aurait été notre réaction ?
Certainement pas meilleure que celle qui nous est rapportée par les évangiles.
Comment croire que Jésus peut devenir pain de vie pour nous ?
Comment oser manifester autour de moi que Jésus est pour moi une nourriture importante voire même capitale pour la traversée de mes déserts ?
Comment me nourrir de sa Présence pour être un vivant, un joyeux vivant  plein d’espérance?

Avec le psalmiste redisons

« Goutez et voyez comme est bon le Seigneur ! »

Je viens de terminer quelques jours de camp avec un groupe que l’on nomme «Notre-Dame de la Lumière.» Ce sont des personnes aveugles de la Suisse romande qui se retrouvent pour un camp sur les bords du lac d’Ägeri au Ländli dans le canton de Zug. J’ai été frappé par les nombreux témoignages me disant combien la nourriture de la parole, l’Eucharistie vécue en communauté étaient si bienfaisantes pour eux. GOÛTEZ ET VOYEZ COMME EST BON LE SEIGNEUR. Le fait par exemple de pouvoir toucher les oblats, le calice et la patène à l’offertoire. À travers nos mains, me disaient-ils, eux qui ne voient pas, nous voyons  la générosité et la bonté du Seigneur. La proximité avec le guide nous rassure nous donne une orientation sur notre chemin. Nos mains peuvent toucher, nos oreilles peuvent entendre les merveilles de la création. Aveugles certes mais combien clairvoyants et reconnaissants pour le don qui leur est fait d’une découverte, d’une personne, d’un sacrement. Ils sont un exemple à quelque part.

Oui goûtez et voyez… osons, nous aussi,  nous approcher de lui, osons lui ouvrir nos vies. Comment ? Saint Paul nous fait une petite proposition dans sa lettre aux Éphésiens, une exhortation pleine de  charité :

Ne contristez pas Dieu, nous dit-il. Faites disparaître de votre vie tout ce qui est amertume, emportement, colère, éclats de voix ou insultes. Soyez entre vous plein de générosité et de tendresse. Pardonnez-vous les uns les autres comme Dieu le fait par le Christ.

Voyez comme est bon le Seigneur, voyez comme nous sommes invités à faire de même dans nos différentes situations de vie.

En relisant l’Évangile de ce jour on peut comprendre,  permettez-moi l’expression, l’incompréhension des auditeurs du Seigneur. Nous le connaissons ce Jésus, disent-ils ! Nous connaissons sa famille ! N’est-il pas trop proche de nous pour venir d’ailleurs ? N’est-il pas trop enraciné dans notre terre pour venir de Dieu ?

La Bonne Nouvelle de ce jour m’interpelle, que je sois en pleine santé, malvoyant ou handicapé, que je sois en marche en montagne ou découragé dans ma vie, sur le chemin de l’Horeb,  frères et sœurs chers auditeurs,  lorsque je m’ouvre à Dieu, lorsque je lui dis ma faim, Il me répond par sa présence nourrissante.

Alors que je suis fatigué, triste, découragé,  à l’exemple d’Elie, me voilà revitalisé, restauré et tout joyeux de poursuivre ma route par la rencontre fraternelle et communautaire.

Lève-toi et mange, me dit-il,  aujourd’hui encore.
« Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour que le monde ait la vie »
Tel est le sens de toute Eucharistie elle est célébrée et vécue pour que ayons la vie et que nous puissions à notre tour la transmettre cette  vie qui vient de Dieu.
Alors vivons … et vivons pleinement !
Bon dimanche  chers auditeurs et à vous autres ici sur la montagne dans cette église du col du Grand-Saint-Bernard, que Dieu lui-même soit votre nourriture, votre guide et votre joie. AMEN.

19e DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE
Lectures bibliques : 1 Rois 19, 4-8; Psaume 33,2-3, 4-5, 6-7, 8-9; Éphésiens 4, 30–5, 2; Jean 6, 41-51