Bénédiction des couples homosexuels: réaction du cardinal Fernández

Devant l’ampleur de la polémique suscitée par la déclaration du Vatican autorisant la bénédiction des couples homosexuels sous certaines conditions, le préfet du dicastère pour la Doctrine de la foi (DDF) a défendu sa position dans un entretien au média américain The Pillar, le 23 décembre 2023.

Dans la déclaration doctrinale Fiducia supplicans approuvée par le pape François et publiée le 18 décembre, Rome a ouvert la voie à la bénédiction de «couples en situation irrégulière et (de) couples de même sexe», à condition que cette bénédiction ne soit pas ritualisée et qu’elle n’imite pas le mariage chrétien qui reste entre un homme et une femme. Mais la réception de ce texte a rencontré une levée de boucliers dans le monde, notamment sur le continent africain, où certaines conférences épiscopales, à l’instar de la Zambie, du Malawi ou du Cameroun, ont ouvertement prohibé ces bénédictions. 

Au fil de cet entretien accordé au média The Pillar au média américain, le cardinal Víctor Manuel Fernández reconnaît «le discernement local» de l’évêque dans son diocèse «qu’il connaît mieux que les autres». Cependant, ajoute-t-il, ce texte étant signé par le pape, les évêques doivent «d’abord l’étudier en profondeur et sans hâte, et se laisser éclairer». 

Dans les pays d’Afrique ou d’Asie où la législation pénalise l’homosexualité, le préfet argentin concède que «la prudence et l’attention à la culture locale pourraient admettre différentes modalités d’application». Mais il exclut la possibilité d’«un refus total de cette démarche demandée aux prêtres». 

Le cardinal Fernández glisse aussi que les conférences d’évêques nationales ou continentales «ne peuvent pas imposer des choses aux évêques de leurs diocèses». Le 21 décembre, le cardinal Fridolin Ambongo, président du SCEAM – qui regroupe tous les évêques d’Afrique – a souhaité qu’une déclaration «valable pour toute l’Église d’Afrique» soit élaborée en début d’année prochaine. 

Une bénédiction des couples et non des unions 

Sur le contenu de cette déclaration, qui propose une forme de bénédiction non-liturgique, le jeune préfet formule une distinction: «Les couples sont bénis. L’union n’est pas bénie». Il réfute «tout changement dans la doctrine sur le mariage» qui reste «entre un homme et une femme, exclusif, indissoluble, naturellement ouvert à la génération d’une nouvelle vie». 

En donnant cette bénédiction à deux personnes, «on peut légitimement demander à Dieu de leur accorder la santé, la paix, la prospérité», poursuit le préfet, pour qui «la bénédiction ainsi faite ne valide ni ne justifie quoi que ce soit». Il ne s’agit pas «du sacrement de confession», ni d’une «absolution», insiste-t-il. 

Les bénédictions non ritualisées «ne justifient pas toutes (les) actions» de la personne, et elles «ne sont pas une ratification de la vie qu’elle mène, non, non», martèle encore le cardinal Fernández. 

Pour le prélat, la «simple bénédiction» ne nécessite pas les mêmes conditions que la communion à la messe. Arguant que l’on ne peut connaître la vie intime des couples concernés, il exhorte à ne pas se poser en «juges qui condamnent du haut d’un piédestal», selon une attitude pastorale chère à François. 

Un prochain voyage du préfet en Allemagne 

En revanche, souligne le préfet du DDF, proposer des formes «ritualisées de bénédiction des couples irréguliers» est «inadmissible». Les évêques qui sont allés dans cette direction doivent «reformuler leur proposition à cet égard», recommande-t-il. Ces dernières années, des évêques d’Allemagne notamment ont publié des propositions en ce sens. 

D’ailleurs, le cardinal argentin confirme qu’un groupe de préfets de dicastères entamera prochainement «un chemin de conversion et d’approfondissement avec les évêques allemands» et que seront apportées «toutes les précisions nécessaires». En 2024, les évêques allemands devraient en effet participer en janvier, avril et juillet à des journées de dialogue avec des responsables de la Curie romaine. Les deux rencontres précédentes à Rome en novembre 2022 et en juillet 2023 avaient révélé de réelles tensions au sujet de leur ›chemin synodal’ qui porte des propositions de réforme notamment sur le célibat sacerdotal ou la morale sexuelle.

Le préfet annonce qu’il prévoit «un voyage en Allemagne pour mener des conversations qui (lui) semblent importantes». L’un des points les plus brûlants est la constitution d’un Conseil synodal dans lequel des laïcs pourraient participer à la gouvernance des diocèses et peser dans les décisions de la conférence épiscopale. Cette mesure votée par le chemin synodal allemand a été rejetée avec force par le Saint-Siège. (cath.ch/imedia/ak/bh)