Jérusalem : Le nonce apostolique en Israël commente le voyage du pape François en Terre Sainte

La rencontre entre le pape François et le patriarche de Constantinople Bartholomée Ier est le cœur de la visite

Jérusalem, 27 mars 2014 (Apic) Pour le nonce apostolique en Israël et délégué pour la Palestine, les attentes autour de la venue du pape François en Terre Sainte sont très grandes et ne pourront pas toutes être satisfaites. Recevant un groupe de visiteurs ›d’Aide à l’Eglise en détresse’ (AED) à Jérusalem à mi-mars, Mgr Giuseppe Lazzarotto a souligné que le cœur de la visite sera bien la rencontre entre le pape François et le patriarche œcuménique de Constantinople Bartholomée Ier.

La visite du pape François du 24 au 26 mai est très courte et les attentes sont très nombreuses, a expliqué le nonce en poste à Jérusalem depuis 2012. « Chacun voudrait le voir pendant au moins une demi-heure. Pour cela, il faudrait qu’il reste un mois ». Le pape ne fait pas en Terre Sainte un ›pèlerinage traditionnel’ comme ses prédécesseurs Jean Paul II et Benoît XVI. Il vient dans une perspective œcuménique, pour y rencontrer le patriarche de Constantinople Bartholomée Ier. Il tenait à marquer, à Jérusalem, les 50 ans de l’accolade historique entre le pape Paul VI et le patriarche Athénagoras qui a été le point de départ du rapprochement entre catholiques et orthodoxes. Plusieurs institutions de dialogue œcuménique et interreligieux en Palestine et dans le monde ont été créées à cette occasion.

Le pape François et le patriarche Bartholomée se sont déjà rencontrés à plusieurs reprises à Rome, mais venir ensemble prier au Saint-Sépulcre est un geste œcuménique beaucoup plus fort

Pour le nonce, « c’est un point assez difficile à faire comprendre » aux personnes qui souhaitaient voir le pape. C’est ce qui explique aussi l’absence de visite à Nazareth, et le fait qu’il n’y aura, lors de ce séjour, que deux événements publics, les messes à Amman et à Bethléem. Ce à quoi s’ajoute tout de même le déplacement du pape en cortège et en voiture ouverte sur quelques kilomètres à Bethléem, pour se rendre à la place de la Mangeoire. « Ce qui aurait été impensable à Jérusalem », commente Mgr Lazzarotto.

Outre l’aspect œcuménique, le pape François apportera aussi un message de paix pour la Terre Sainte. Son initiative de prière pour la paix en Syrie le 7 septembre a eu un grand écho, y compris chez les musulmans. « Je crois que la visite du pape peut redonner une nouvelle énergie aux gens qui vivent dans une situation difficile et leur redonner espoir ».

Le Saint-Sépulcre « le symbole le plus éloquent des divisions entre chrétiens »

Pour le Custode des franciscains de Terre Sainte, le Père Pierbattista Pizzaballa, la prière commune du pape François et du patriarche Bartholomée Ier au Saint-Sépulcre « le symbole le plus éloquent des divisions entre chrétiens », revêt une importance très particulière. Les sociétés changent y compris en Terre Sainte, les attentes des fidèles ne sont plus les mêmes, mais pour les institutions le rythme est malheureusement beaucoup plus lent. « Le ›statu quo’ qui régit l’utilisation du Saint Sépulcre par les diverses confessions chrétiennes risque bien de ne pas changer avant le retour du Christ sur terre à la parousie ! » plaisante le Père Pizzaballa.

« Nazareth a été sacrifiée », déplore Mgr Marcuzzo

Les chrétiens de Nazareth regrettent beaucoup que le pape François ne leur rende pas visite. « Malheureusement, l’étape de Nazareth a été sacrifiée pour des raisons de temps et de priorités », a déploré Mgr Giacinto Boulos Marcuzzo, vicaire du patriarcat latin pour Israël. « Nous aurions aimé que les chrétiens de Nazareth puissent rencontrer le pape François, ici chez eux. Les chrétiens de Galilée pourront se rendre à Bethléem pour la messe du pape, mais l’aspect symbolique n’est pas le même ».

Pour Mgr Marcuzzo, il n’y a rien de plus légitime que le pape visite le mémorial de la Shoah à Yad Vashem, par contre son passage ‘obligé’ au Mont Herzl, qui doit son nom à Theodor Herzl, le fondateur du sionisme, est symboliquement un affront pour les Arabes. « Le pape ne pouvait même pas refuser. Cette visite est devenue obligatoire pour toutes les hôtes officiels d’Israël. »

Le but principal de la visite du pape François, outre la rencontre avec le patriarche oecuménique de Constantinople Bartholomée Ier, est d’oeuvrer pour la paix. La paix est en effet la première condition pour l’avenir des chrétiens au Proche Orient et pas seulement en Israël et en Palestine. « Dans ce sens, la paix est aussi un enjeu pastoral », relève Mgr Marcuzzo.

Pour atteindre la paix il faut d’abord obtenir la justice cela passe par l’égalité et par le respect des droits humains. En Israël, les arabes, et en particuliers les chrétiens, sont toujours des citoyens de seconde classe. Certes il n’y a pas de persécutions, mais des chrétiens ne veulent pas être considérés comme des hôtes qui seraient seulement tolérés. Ils veulent être des citoyens de plein droit ne souffrant d’aucune discrimination pour leur établissement, leurs déplacements, l’accès aux études ou au marché du travail « Cette justice est particulièrement nécessaire pour l’Etat d’Israël, à cause de la très grande diversité d’origine de ses citoyens. »

En plus de la justice, le pape François devrait parler pardon et réconciliation. Ces deux valeurs plus spécifiquement chrétiennes sont indispensables pour envisager l’avenir de la région. Pour Mgr Marcuzzo, le pape François, comme l’avait fait Benoît XVI, devrait évoquer explicitement la question palestinienne qui est la ‘mère’ de toutes les crises du Proche-Orient.

Enfin le pape devrait porter une attention particulière au problème de la pauvreté très présente en Palestine comme en Israël. Une pauvreté qui a sa source dans l’absence de paix. Sans paix il n’ y a en effet pas d’échanges, ni de collaboration, ni de solidarité, conclut l’évêque de Nazareth. (apic/mp)

Les hélicoptères du pape

Mgr Giuseppe Lazzarotto a détaillé la complexité des déplacements du pape en Palestine et en Israël. Le fait de se trouver entre deux entités séparées par un mur et une frontière plus ou moins imperméable a beaucoup compliqué l’organisation du programme. La première difficulté a été que le pape ne pouvait pas arriver en Israël le samedi, jour du sabbath où beaucoup d’activités sont paralysées. La première étape du voyage sera donc la Jordanie où l’avion du pape en provenance de Rome se posera en début de matinée.

Le dimanche matin, même si le sabbath est terminé, il n’était toujours pas possible d’organiser la réception du pape à Jérusalem. C’est donc à Bethléem, en territoire palestinien, que le pape François se rendra pour la 2e étape de son voyage. Bethléem ne possédant pas d’aéroport, le déplacement se fera avec un hélicoptère jordanien dans lequel le pape voyagera avec une suite réduite. Les autres accompagnants et les journalistes feront vraisemblablement le trajet en véhicules automobiles au départ d’Amman en devant passer les diverses frontières et check-points.

A Bethléem, le pape François a exigé personnellement de pouvoir se déplacer dans une voiture découverte, et non pas une papamobile blindée. Ce qui inquiète évidemment les services de sécurité.

Le troisième pays visité sera Israël. Mais pour des raisons politiques, il n’était pas possible pour le pape de se rendre directement de Bethléem à Jérusalem pourtant distante d’une dizaine de kilomètres seulement. C’est donc à nouveau au moyen d’un hélicoptère jordanien que le pape rejoindra l’aéroport de Tel Aviv où il sera reçu officiellement par le président israélien. Avant de reprendre un hélicoptère israélien cette fois ci pour rejoindre le mémorial de Yad Vashem et le Mont Herzl, à Jérusalem. Ce même hélicoptère le ramènera le lendemain en fin de journée à Tel Aviv, où il reprendra l’avion pour Rome. (apic/mp)

27 mars 2014 | 11:24
par webmaster@kath.ch
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