Conférence organisée à Rome par l’ambassade d’Allemagne près le Saint-Siège le 15 mars 2024 | © Camille Dalmas / I.MEDIA
Vatican

Les alliés du 'synode allemand' militent pour le diaconat féminin

A Rome, des catholiques proches du Chemin synodal allemand considèrent le diaconat féminin comme prioritaire pour le Synode sur l’avenir de l’Église. En présence de Mgr Félix Gmür, ils ont exposé leurs points de vue lors d’une conférence de présentation d’un magazine, organisée à Rome par l’ambassade d’Allemagne près le Saint-Siège le 15 mars 2024.

La publication est intitulée Gottes Starke Töchter – littéralement, ‘fortes filles de Dieu’ – et dirigée par Julia Knop, une théologienne et membre active du Chemin synodal allemand. Il s’agit d’un «Hors Série» du mensuel suisse Herder Korrespondenz – un premier numéro sous ce format avait été présenté en 2022 pour promouvoir une vision synodale ›à l’allemande’.

Fruit d’une conférence internationale sur la femme dans l’Église organisée à Leipzig (Allemagne) en septembre 2023, cette nouvelle édition annonce clairement son ambition dans un éditorial qui plaide pour «l’ouverture de tous les ministères sacramentaux aux femmes». Cela implique la possibilité pour une femme de devenir diacre, prêtre, voire évêque.

Financée par la Fondation Herbert Haag, une entité suisse qui défend une «foi catholique ouverte et œcuménique», la revue est disponible en anglais (en version numérique seulement) et en allemand. Elle comprend les interventions de 39 personnes, dont 36 femmes, provenant de 22 pays, mais avec une nette représentation germanophone.

Le diaconat féminin, un «test» avant l’ordination sacerdotale

Intervenant lors de la conférence de présentation, la théologienne chilienne Catalina Cerda-Planas (qui enseigne dans un institut catholique à Francfort) a affirmé qu’il y avait aujourd’hui une opposition plus forte à la «culture patriarcale» dans l’Église, mais a reconnu qu’il n’existait pas de «position unifiée» sur la question de la place des femmes. L’important, selon elle, est de savoir «gérer la diversité dans une Église synodale».

Pour la théologienne italienne Serena Nocetti, de la Faculté théologique d’Italie centrale, le Synode d’octobre 2024 doit penser à une réforme capable de «s’adapter au contexte culturel». Elle estime que pour s’opposer aux résistances «tridentines» et «néoconservatrices» il faut se concentrer sur le diaconat féminin, affirmant qu’il s’agira d’un «test» en attendant de futures évolutions.

Mgr Gmür: changer les mentalités

Mgr Felix Gmür, évêque de Bâle, a estimé lui aussi que la culture est «la plus puissante réalité» quand il s’agit d’évoquer la question de la place des femmes dans l’Église. Avant de changer les règles et d’envisager l’ordination d’une femme, a-t-il affirmé, il faut «d’abord changer les mentalités». Une auditrice lui a cependant rétorqué que les «mentalités changent quand les pratiques changent».

« Certaines femmes sont déjà appelées «madame le curé» dans certaines paroisses suisses »

Le président de la Conférence des évêques suisses et participant au Synode a noté une évolution chez les jeunes Suisses qui «ne comprennent pas» pourquoi les femmes ne peuvent pas devenir prêtres. Il s’est prononcé pour une ouverture au diaconat féminin, mais aussi à l’ordination sacerdotale des femmes, estimant que «deux tiers» des Suisses sont favorables à ce changement. Certaines femmes qui travaillent comme «agent pastoral» sont déjà appelées «madame le curé» dans certaines paroisses suisses, a-t-il souligné.

Sœur Faye: le diaconat féminin n’est pas un thème en Afrique

Présente à la réunion à l’ambassade d’Allemagne, la religieuse sénégalaise Anne Béatrice Faye, qui participe elle aussi au Synode, a expliqué qu’elle affronte au quotidien en tant que femme «l’abus de pouvoir clérical» et une «culture misogyne». Son clergé, a-t-elle insisté, se place trop souvent dans une «posture de supériorité» et ne «voit pas de raison» d’entamer un dialogue avec des femmes.

«La question du diaconat féminin ne se pose pas en Afrique», a noté néanmoins la religieuse, se demandant s’il s’agit vraiment de la «bonne question» pour l’Église de demain. Insistant sur le fait que le diaconat permanent, même masculin, n’est pas perçu comme une solution par les évêques africains, elle a avancé que le plus important est surtout de «donner aux femmes les moyens d’agir» dans l’Église.

Le diaconat féminin, étape ou impasse?

Dans l’article conclusif de la revue, la Suissesse Helena Jeppesen-Spuhler, qui participe au Synode comme ‘mère synodale’, insiste sur l’importance qu’a prise la question de la place des femmes lors de l’assemblée du Synode d’octobre 2023. Néanmoins, elle considère que «le document de synthèse fait pâle figure» sur ce thème et regrette qu’il n’exprime pas la demande d’un «accès des femmes à tous les ministères sacramentels», mais pose seulement la question du diaconat féminin.

Elle craint que le diaconat féminin ne soit pas une «première étape», mais «mette fin au débat» sur l’ordination sacerdotale des femmes en reléguant la femme à un «rôle de servante». Elle remarque avec «préoccupation» que le cardinal secrétaire d’État Pietro Parolin, dans sa lettre de novembre 2023 aux évêques allemands, considère que l’ordination féminine n’est «pas négociable».

De plus, dans la perspective d’octobre 2024, la Suissesse redoute que le synode aboutisse à une «impasse». Elle insiste donc sur l’importance de développer des «réseaux horizontaux entre les continents et les cultures à tous les niveaux de l’Église». (cath.ch/imedia/cd/gr)

Conférence organisée à Rome par l’ambassade d’Allemagne près le Saint-Siège le 15 mars 2024 | © Camille Dalmas / I.MEDIA
15 mars 2024 | 17:21
par I.MEDIA
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