La mystique française Marthe Robin, qui a fondé les Foyers de Charité avec le Père Georges Finet | © wikipedia/Foyers de Charité
Dossier

Marthe Robin: la plus grande mystique du XXe siècle? 2/5

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Par Hugues Lefèvre/I.Media

La parution d’un livre remettant en cause la vie mystique de Marthe Robin a suscité une vague d’indignation. Nous poursuivons l’enquête sur cette affaire avec ce deuxième volet consacré à la vie de Marthe Robin et sur l’influence qu’elle aurait eue sur la création de nombreuses communautés et mouvements spirituels. Une filiation revendiquée par certains que contestent les membres de la famille de Marthe.

Marthe Robin ne sort pas de sa chambre mais reçoit beaucoup de monde, notamment les retraitants qui passent par Châteauneuf-de-Galaure. Les Foyers de Charité estiment que plus de 100’000 personnes se seraient pressées au pied de son lit jusqu’en 1981. Lors de ses rencontres, ni prophéties, ni commandements. Le Père Peyrous rapporte que «Marthe ne donnait pas de conseils affirmatifs, encore moins catégoriques. Elle posait des questions, faisait des suggestions, dégageait les fausses pistes et laissait la personne conclure d’elle-même».

«Un livre entier pour traiter de l’influence de Marthe» 

On compte, parmi les visiteurs de Marthe Robin, des laïcs, des prêtres, des évêques, des intellectuels mais aussi des fondateurs et fondatrices de communautés nouvelles désireux de rencontrer celle qui avait  »prophétisé» peu avant le Concile Vatican II une nouvelle « Pentecôte d’Amour ».

Marthe Robin rencontre ainsi ceux qui sont ou seront responsables de nombreux mouvements comme la communauté de l’Emmanuel, les Béatitudes, la communauté de Saint-Jean, l’Arche de Jean Vanier, Notre-Dame de la Sagesse, la Fraternité monastique de Jérusalem, les Petits Frères de Marie Mère du Rédempteur, les Petites Sœurs de Nazareth, les Missionnaires de Notre-Dame, l’Office culturel de Cluny, les Chanoines réguliers de Champagne-sur-Rhône, la Fraternité Bethléem-Saint-Benoît, le Foyer Marie-Jean, la communauté Nouvelle Alliance, les Petites Sœurs mariales d’Israël et de Saint-Jean ou bien encore l’œuvre d’éducation de l’Eau Vive. Son ancien postulateur écrit: «il faudrait sans doute un livre entier pour traiter de l’influence de Marthe».

Une «filiation» contestée

Or, cette «filiation» proclamée par certains fondateurs de communautés nouvelles pose aujourd’hui problème, notamment aux membres de la famille Robin. Refusant que leur grande tante soit considérée comme la «prophétesse qui aurait annoncé le Renouveau charismatique des années 1970», ils contestent cette filiation.

Contactée par I.MEDIA, Marie-Hélène Gaillard, petite-nièce de Marthe Robin, estime d’une part que certains ont cherché à «détourner à leur profit la notoriété de Marthe». D’autre part, elle se désole que, «parmi ces fondateurs, certains se sont révélés par la suite être des pervers manipulateurs, salissant par ricochet la figure Marthe Robin». On peut citer par exemple les noms des Pères Marie-Dominique et Thomas Philippe ou du laïc Jean Vanier, tous trois auteurs – selon des révélations déplorées par leur communauté et la hiérarchie de l’Église catholique en France – d’abus spirituels et sexuels.

De son côté, la postulatrice Sophie Guex reconnaît que Marthe n’a cessé d’encourager les personnes qu’elles recevaient à annoncer l’Evangile. «Comment les gens se sont-ils servis de ces encouragements?», se demande-t-elle, reconnaissant que, «certains ont pu se prévaloir publiquement d’un encouragement de Marthe et présenter une vision partielle. Il n’y avait pas d’enregistreur dans la chambre de Marthe donc on a forcément qu’une vision partielle au final». Sophie Guex souligne par ailleurs que «Marthe Robin, qui aimait l’Eglise, renvoyait toujours au supérieur hiérarchique».

Mort de Marthe et début d’un procès hors norme

Quand Marthe Robin meurt en 1981 à l’âge de 78 ans, 52 Foyers de Charité ont été créés et se sont déployés partout dans le monde. On compte alors près de 750 membres, des laïcs consacrés et des prêtres. Quatre évêques, deux cents prêtres et plus de cinq mille personnes assistent à son enterrement dans le petit village de Châteauneuf-de-Galaure. Si certains restent dubitatifs – en témoigne un article du journal Le Monde publié à la mort de la mystique -, elle est considérée par un grand nombre de catholiques comme l’une des plus grandes mystiques du 20e siècle.

Cinq ans après sa mort, le Conseil pontifical pour les laïcs reconnaît l’œuvre des Foyers de Charité comme association internationale de fidèles de droit pontifical. C’est aussi l’année où s’ouvre son procès de béatification, conformément à la règle qui prévoit un délai de cinq ans après la mort d’une personne pour entamer une procédure. Celle-ci, toujours en cours, est aujourd’hui directement contestée par la sortie du livre du Père Conrad de Meester, expert qui a rendu son rapport aux débuts des années 1990. (cath.ch/imedia/hl/bh)

Retrouvez le 3e épisode de notre série le 14 octobre. Un retour sur le procès hors norme de la cause de béatification de Marthe Robin. Un procès dans lequel l’un des experts a donc décrit la paralysée de la Drôme comme une «princesse du mensonge».

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La mystique française Marthe Robin, qui a fondé les Foyers de Charité avec le Père Georges Finet | © wikipedia/Foyers de Charité
13 octobre 2020 | 08:00
par I.MEDIA

Dans un livre paru début octobre 2020 dont l'auteur, le Père Conrad de Meester, accuse Marthe Robin de "fraude mystique". La thèse du carme, décédé en 2019, a soulevé un tollé, notamment du côté des Foyers de charité et de la famille de Marthe Robin. I.Media a mené l’enquête et propose une série de cinq articles pour la comprendre.

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