Dituria, l’Association culturelle des musulmans albanophones de Genève a ouvert ses portes aux jeunes | © Myriam Bettens
Suisse

'One Stage' à Genève: un laboratoire de fraternité entre religions

Plus d’une soixantaine de jeunes se sont réunis à l’initiative de la Plateforme interreligieuse de Genève pour participer à des ateliers créatifs et vivre ensemble des rencontres interconfessionnelles. Quatre jours du 25 au 28 octobre 2018 pour apprendre à dépasser la peur de l’autre.

«Vous êtes une vraie journaliste?», lance Mariella, 12 ans, les yeux pétillants. Alicia, 14 ans, ne laisse pas le temps de la réponse et ajoute, «ce matin, c’était nous les journalistes. On a préparé des questions et on a fait des interviews avec la caméra». Maisiaa, 14 ans, essaie de se faire entendre dans le joyeux brouhaha de la salle paroissiale de l’église catholique de Plan-les-Ouates, à Genève. «Moi, je veux bien répondre à vos questions», annonce-t-elle avec un sourire timide. «Nous aussi!», répondent en cœur les deux autres jeunes filles. Vendredi 26 octobre, toutes trois ont répondu à l’appel de la Plateforme interreligieuse pour prendre part à des ateliers créatifs, ainsi qu’une rencontre interconfessionnelle. Les trois adolescentes se sont inscrites à l’atelier photo et vidéo. Curieuses de savoir s’il était important de rencontrer des personnes d’autres religions, elles ont préparé des questions dans ce sens à l’intention des autres participants, puis ont filmé leurs réponses afin de créer un film souvenir des quatre jours passés ensemble.

«L’amitié ne se fonde pas sur la religion, la personnalité compte beaucoup plus»

La confession religieuse importe peu 

Et dans la position des interviewées, que répondent-elles ? «Quand j’étais petite, je pensais que les chrétiens étaient différents de nous. Je me faisais des idées sur eux», explique Maisiaa, syrienne de confession musulmane. Sidra, 15 ans, la sœur de Maisiaa s’est jointe au groupe entre-temps et complète, «la religion des gens importe peu finalement. L’amitié ne se fonde pas sur ce genre de choses, la personnalité compte beaucoup plus». A peine le temps d’entendre la réponse de Sidra que les autres jeunes filles avaient déjà filé pour rejoindre les ateliers. Pratiquement situées l’une en face de l’autre de la route, les paroisses catholique et protestante de Plan-les-Ouates, ont mis leurs locaux à disposition de la Plateforme interreligieuse pour accueillir les différents ateliers.

De l’art pour vivre la rencontre

«Nous avons des jeunes de 11 à 30 ans, il faut donc pouvoir contenter tout le monde», annonce Michel, l’animateur responsable de l’atelier photo et vidéo situé dans les locaux de l’église protestante. Plus d’une soixantaine de jeunes ont participé aux quatre jours et une variété d’activités artistiques telles que le chant, le hip-hop, les percussions ou l’expression corporelle leur était proposée. Justement, Jean-Baptiste et Benoît s’apprêtent à traverser la route pour rejoindre l’atelier de percussions. Pour les deux garçons, issus d’une famille catholique pratiquante, prendre part à ces quelques jours de rencontre s’inscrit dans une démarche de recherche et de compréhension de l’autre. «J’ai l’impression que l’Eglise catholique pourrait faire plus en matière de dialogue», avance Benoît. Ce que confirme Jean-Baptiste, «une des missions de l’Eglise est justement de favoriser le dialogue. Sans, cela peut vite devenir assez tendu et favoriser les préjugés».

Trois confessions sur une même route 

Le choix de Plan-les-Ouates n’a d’ailleurs pas été fait au hasard. Les trois lieux de culte de cette commune se trouvent sur la même route, à moins de cent mètres de distance. Malgré les réticences auxquelles elle a dû faire face lors de son installation dans la commune, l’Association culturelle des musulmans albanophones de Genève (Dituria) a activement participé à l’événement en ouvrant ses portes le temps d’une soirée.

«Ce projet nous permet de partager ce que nous vivons»

«Ce genre de projet est très important. Cela nous permet de nous faire connaître et de partager ce que nous vivons dans notre lieu de culte», explique Abdyl-Kadri Bekteshi, président de Dituria. Le partage commence autour d’un repas suivi de la possibilité d’assister à la prière du soir. Les chaussures déposées dans un meuble prévu à cet effet, une nuée de chaussettes colorées a gravi les marches menant à la salle de prière. Il est 20h02, lorsque dans un silence recueilli, la voix du jeune homme désigné pour l’appel à la prière retentit. Rijad Aliu, l’imam de la communauté, reprend ensuite la direction de la prière.

L’attention rivée vers l’avant de la salle, les jeunes ne perdent pas une miette de ce qui se passe. Beaucoup d’entre eux n’ont jamais mis les pieds dans une mosquée et un des participant ne cache d’ailleurs pas son émotion. Malgré le succès de la journée, Abdyl-Kadri Bekteshi admet qu’il reste encore du travail à effectuer en faveur de la collaboration interconfessionnelle. «On peut dire que le dialogue interreligieux est presque acquis, mais nous allons continuer à favoriser des événements comme aujourd’hui», conclut-il. (cath.ch/myb/mp)

Dituria, l’Association culturelle des musulmans albanophones de Genève a ouvert ses portes aux jeunes | © Myriam Bettens
29 octobre 2018 | 00:14
par Maurice Page
Temps de lecture: env. 3 min.
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