Guy Musy

Evangile de dimanche: Dans la nuit de Pâques, Lazare se réveille!

Une femme va puiser au puits; un aveugle mendie au marché ; deux sœurs en larmes dans un cimetière. Trois situations extraites du quotidien. Trois manques à combler: de l’eau pour calmer la soif de midi; un rai de lumière pour allumer des yeux éteints et une voix pour défier la mort. Trois étapes aussi sur notre chemin de Carême, ponctué par trois récits johanniques construits sur le même modèle: un «fait divers» où Jésus s’attarde avant d’en faire un «signe» pour étayer notre foi. L’eau stagnante devient source de vie jaillissante, les yeux du cœur s’ouvrent et la mort est jugulée.

Aujourd’hui, c’est l’histoire de Lazare qui nous est offerte. Le récit est très concret, les sentiments à fleur de peau, sans pudeur ni réserve. Le commentateur est pris au piège. Il pourrait en rester là, décrire ce débordement d’affections, d’émotions et de larmes qui coulent même sur le visage de Jésus. Il risque de s’attendrir face à ce cadavre qui sent la mort, en présence de ces femmes en désarroi. La tentation le guette de prendre en pitié ces malheureux disciples, qui auraient préféré rester chez eux plutôt qu’accompagner leur maître à Béthanie, si proche de Jérusalem, la ville de tous les dangers. Que de détails porteurs de sens profond qu’il faut savoir décrypter. Allons donc à l’essentiel, sans trop fixer le doigt qui le montre.

L’essentiel? C’est Lazare qui reprend vie. Mais sa résurrection est un sursis ou un répit de quelques mois ou de quelques années avant la venue inéluctable d’une seconde mort sans rémission. Ce provisoire retour à la vie terrestre n’est qu’un signe. Il symbolise l’accès à l’éternelle vie donnée par Jésus à ceux qui croient en lui. Que tu sois ici-bas en pleine forme physique ou proche de ton trépas, ta foi t’ouvre un horizon nouveau qui transforme ta vie présente jusqu’à ses plus profondes racines. «Crois-tu cela?” demande Jésus à Marthe. Et toi, cher internaute, le crois-tu ?, te demande aussi Jésus.

La liturgie du Carême nous dit que cette question est d’abord posée au catéchumène, ce mort vivant qui dans la nuit pascale recouvrira la vraie vie. Comme Lazare, il sortira de son tombeau, titubant, les pieds et les mains liés par des bandelettes, le visage enfoui sous un suaire. Il faudra donc le délier, puis le laisser courir en toute liberté. Il deviendra agent de renouveau dans une Eglise essoufflée et esseulée. Il dynamisera nos vieux os, comme Augustin d’Hippone a su le faire en son temps au sortir de son baptême.

Encore un rêve fou? Non. Je me vois déjà face à ces neuf jeunes de ma ville qui seront enfantés à la vie qui ne finit pas, à la lueur de la prochaine Pâque. Parmi eux, trouverons-nous un nouveau Charles de Foucauld ? Une nouvelle Mère Teresa ? De grâce, laissons-les courir, sans suaires ni bandelettes. Ils sont porteurs de vie.

Guy Musy | 31.03.2017


Jn 11, 1-45

 

01 Il y avait quelqu’un de malade, Lazare, de Béthanie, le village de Marie et de Marthe, sa sœur.

02 Or Marie était celle qui répandit du parfum sur le Seigneur et lui essuya les pieds avec ses cheveux. C’était son frère Lazare qui était malade.

03 Donc, les deux sœurs envoyèrent dire à Jésus : « Seigneur, celui que tu aimes est malade. »

04 En apprenant cela, Jésus dit : « Cette maladie ne conduit pas à la mort, elle est pour la gloire de Dieu, afin que par elle le Fils de Dieu soit glorifié. »

05 Jésus aimait Marthe et sa sœur, ainsi que Lazare.

06 Quand il apprit que celui-ci était malade, il demeura deux jours encore à l’endroit où il se trouvait.

07 Puis, après cela, il dit aux disciples : « Revenons en Judée. »

08 Les disciples lui dirent : « Rabbi, tout récemment, les Juifs, là-bas, cherchaient à te lapider, et tu y retournes ? »

09 Jésus répondit : « N’y a-t-il pas douze heures dans une journée ? Celui qui marche pendant le jour ne trébuche pas, parce qu’il voit la lumière de ce monde ;

10 mais celui qui marche pendant la nuit trébuche, parce que la lumière n’est pas en lui. »

11 Après ces paroles, il ajouta : « Lazare, notre ami, s’est endormi ; mais je vais aller le tirer de ce sommeil. »

12 Les disciples lui dirent alors : « Seigneur, s’il s’est endormi, il sera sauvé. »

13 Jésus avait parlé de la mort ; eux pensaient qu’il parlait du repos du sommeil.

14 Alors il leur dit ouvertement : « Lazare est mort,

15 et je me réjouis de n’avoir pas été là, à cause de vous, pour que vous croyiez. Mais allons auprès de lui ! »

16 Thomas, appelé Didyme (c’est-à-dire Jumeau), dit aux autres disciples : « Allons-y, nous aussi, pour mourir avec lui ! »

17 À son arrivée, Jésus trouva Lazare au tombeau depuis quatre jours déjà.

18 Comme Béthanie était tout près de Jérusalem – à une distance de quinze stades (c’est-à-dire une demi-heure de marche environ) –,

19 beaucoup de Juifs étaient venus réconforter Marthe et Marie au sujet de leur frère.

20 Lorsque Marthe apprit l’arrivée de Jésus, elle partit à sa rencontre, tandis que Marie restait assise à la maison.

21 Marthe dit à Jésus : « Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort.

22 Mais maintenant encore, je le sais, tout ce que tu demanderas à Dieu, Dieu te l’accordera. »

23 Jésus lui dit : « Ton frère ressuscitera. »

24 Marthe reprit : « Je sais qu’il ressuscitera à la résurrection, au dernier jour. »

25 Jésus lui dit : « Moi, je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra ;

26 quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais. Crois-tu cela ? »

27 Elle répondit : « Oui, Seigneur, je le crois : tu es le Christ, le Fils de Dieu, tu es celui qui vient dans le monde. »

28 Ayant dit cela, elle partit appeler sa sœur Marie, et lui dit tout bas : « Le Maître est là, il t’appelle. »

29 Marie, dès qu’elle l’entendit, se leva rapidement et alla rejoindre Jésus.

30 Il n’était pas encore entré dans le village, mais il se trouvait toujours à l’endroit où Marthe l’avait rencontré.

31 Les Juifs qui étaient à la maison avec Marie et la réconfortaient, la voyant se lever et sortir si vite, la suivirent ; ils pensaient qu’elle allait au tombeau pour y pleurer.

32 Marie arriva à l’endroit où se trouvait Jésus. Dès qu’elle le vit, elle se jeta à ses pieds et lui dit : « Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort. »

33 Quand il vit qu’elle pleurait, et que les Juifs venus avec elle pleuraient aussi, Jésus, en son esprit, fut saisi d’émotion, il fut bouleversé,

34 et il demanda : « Où l’avez-vous déposé ? » Ils lui répondirent : « Seigneur, viens, et vois. »

35 Alors Jésus se mit à pleurer.

36 Les Juifs disaient : « Voyez comme il l’aimait ! »

37 Mais certains d’entre eux dirent : « Lui qui a ouvert les yeux de l’aveugle, ne pouvait-il pas empêcher Lazare de mourir ? »

38 Jésus, repris par l’émotion, arriva au tombeau. C’était une grotte fermée par une pierre.

39 Jésus dit : « Enlevez la pierre. » Marthe, la sœur du défunt, lui dit : « Seigneur, il sent déjà ; c’est le quatrième jour qu’il est là. »

40 Alors Jésus dit à Marthe : « Ne te l’ai-je pas dit ? Si tu crois, tu verras la gloire de Dieu. »

41 On enleva donc la pierre. Alors Jésus leva les yeux au ciel et dit : « Père, je te rends grâce parce que tu m’as exaucé.

42 Je le savais bien, moi, que tu m’exauces toujours ; mais je le dis à cause de la foule qui m’entoure, afin qu’ils croient que c’est toi qui m’as envoyé. »

43 Après cela, il cria d’une voix forte : « Lazare, viens dehors ! »

44 Et le mort sortit, les pieds et les mains liés par des bandelettes, le visage enveloppé d’un suaire. Jésus leur dit : « Déliez-le, et laissez-le aller. »

45 Beaucoup de Juifs, qui étaient venus auprès de Marie et avaient donc vu ce que Jésus avait fait, crurent en lui.

«Après cela, il cria d’une voix forte: 'Lazare, viens dehors!'» | © Flickr/Ted/CC BY-SA 2.0)
31 mars 2017 | 16:30
par Guy Musy
Temps de lecture: env. 5 min.
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