Pierre Emonet

Evangile de dimanche: Sur le qui-vive, une joyeuse impatience

Veillez! L’avertissement revient quatre fois au cours de ces quelques versets. Tel un maître qui part en voyage et confie ses affaires à ses serviteurs, Jésus, à la vieille de partir vers sa Passion et de s’absenter pour un temps, adresse ses dernières recommandations à ses disciples. L’absence risque bien d’être longue et la date du retour est incertaine. Le maître reviendra, certes, mais sans s’annoncer. Personne n’en connaît ni le jour ni l’heure, en déplaise aux prophètes autoproclamés qui, à chaque catastrophe, prétendent connaître l’agenda du Seigneur.

Libre de toute manipulation, jamais contraint, Dieu reste insaisissable. Toujours plus grand, c’est sa nature, le propre de son être. Personne ne le maîtrise ni ne le tient à disposition même pas dans des dogmes, des sacrements ou un tabernacle. Il se manifeste quand il veut, comme il veut, en toute liberté et indépendance. Qui ne veut pas manquer le rendez-vous ne peut que se tenir disponible, faire confiance, rester en alerte. 

En attendant, chacun est renvoyé à ses affaires sans se laisser distraire par ce qui, d’ordinaire, permet d’oublier l’absence: la course à l’argent, la consommation et la débauche. Énumérant les quatre veilles de la nuit, le soir, minuit, l’aube et le matin, Jésus précise qu’il s’agit bien d’une vigilance de tous les instants, d’un style de vie habituel. Quelques années plus tard, saint Paul le rappellera aux Thessaloniciens: «Vous êtes tous des fils de la lumière, des fils du jour; nous n’appartenons pas à la nuit et aux ténèbres. Alors ne restons pas endormis comme les autres, mais soyons vigilants et restons sobres.» (1 Th 5,4-6).

«Libre de toute manipulation, jamais contraint, Dieu reste insaisissable.»

Le maître parti en voyage, ses employés sont restés seuls face à leurs tâches. Les disciples du Christ, au contraire, ne sont pas abandonnés sans ressources. En s’absentant, Jésus leur a laissé de quoi ne pas s’endormir, des moyens pour lutter contre le sommeil: sa parole (les Évangiles), l’assistance de son Esprit, les sacrements, une communauté (l’Église). À eux d’en faire bon usage.

Qui vit perpétuellement sur le qui-vive balance entre anxiété et impatience, entre la peur et la joie. Celui qui redoute le retour du maître comme l’heure des comptes est angoissé. C’est avec une joyeuse impatience que les premières communautés chrétiennes aspiraient à revoir le Seigneur. Elles vivaient tendues vers ces retrouvailles en adressant au Christ une ardente prière pour qu’il accélère sa venue: «Viens, Seigneur Jésus – Marana tha!» (Apoc22,20).

Pierre Emonet SJ | Vendredi 1er décembre 2023


Mc 13, 33-37

En ce temps-là,
Jésus disait à ses disciples :
« Prenez garde, restez éveillés :
car vous ne savez pas
quand ce sera le moment.
C’est comme un homme parti en voyage :
en quittant sa maison,
il a donné tout pouvoir à ses serviteurs,
fixé à chacun son travail,
et demandé au portier de veiller.
Veillez donc,
car vous ne savez pas
quand vient le maître de la maison,
le soir ou à minuit,
au chant du coq ou le matin ;
s’il arrive à l’improviste,
il ne faudrait pas qu’il vous trouve endormis.
Ce que je vous dis là, je le dis à tous :
Veillez ! »

«Veillez donc, car vous ne savez pas quand vient le maître de la maison (...)» | Détail © B. Lopez/Evangile & Peinture
1 décembre 2023 | 16:30
par Pierre Emonet
Temps de lecture: env. 2 min.
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