Homélie du 16 octobre 2016 ( Lc 18, 1-8)

Père Jean-Claude Pariat, spiritain – Chapelle St-Joseph, Ecole des Missions, St-Gingolph

Pas de missions sans prière : pas de prière du cœur sans actions de nos mains.

Une veuve, un juge !
Une bouche désolée qui implore que ‘justice’ lui soit faite.  Une oreille mondaine ne voulant pas entendre.  Tel est le premier message que nous recevons en ce dimanche. La prière de cette veuve ne paraît pas émouvoir ce juge. Déçue de ne pas être écoutée, cette veuve ne se résigne pas. Elle poursuit sa supplique auprès du juge jusqu’à son exaucement.

Ne nous est-il pas arrivé de prier avec insistance sans être exaucé ?  Nous éprouvons de la frustration. Nous nous disputons parfois avec Dieu. A quoi cela sert que je te prie ?  Tu n’entends pas mes demandes puisque tu ne me réponds pas.
La tentation d’abandonner la prière est grande.

Prier sans se lasser

Tes disciples, Jésus, ont éprouvé ce que nous-mêmes nous éprouvons.  Ils t’ont demandé de leur apprendre à prier comme Jean le Baptiste le faisait pour ses disciples.
Jésus, apprend-nous à vivre nos prières. Alors Jésus les invite à prier avec Lui : « Notre Père qui es aux cieux … »
On demandait à Sainte Thérèse de Calcutta comment prier. Sa réponse est en deux mots:    en priant… sans se lasser …
C’est bien l’attitude de la veuve.  Elle a continué à demander au juge de lui rendre justice.

Cette parabole se vit au cours de nos journées.  « Tu écoutes quand je te parle ? »  Souvent, le conjoint, l’enfant se comporte comme le juge.
La veuve et le juge ne sont pas sur la même longueur d’onde.  Merci à nos auditeurs de la Radio Suisse Romande de nous écouter …  sur la même onde.

Le juge exerce une autorité qu’il a reçue pour régler les conflits sociaux. Peu à peu, il choisit ses relations, celles qui le mettent en valeur. Il vit dans les mondanités de son temps.  Son service de juge l’a situé parmi les gens influents, les gens de pouvoir : ceux qui se croient supérieur aux autres gens. Le juge s’est éloigné du petit peuple. Il ne respecte pas Dieu ; il se moque des hommes…  Son cœur de chair est devenu un cœur de pierre, indifférent aux souffrances des personnes qui recourent à son service judiciaire.

Ce qui ne peut nous être enlevé: la prière

Pour affronter ce juge injuste, Jésus lui envoie une veuve venant lui demander justice.  Une veuve ?  Pourquoi ?  Depuis son veuvage, elle a été exclue d’une large part de la vie sociale qu’elle vivait avec son époux. Elle a perdu un statut social. Elle est démunie de toute autorité.  Face au pouvoir, à la force et à la supériorité d’un juge mondain, la veuve est comme un petit enfant sans pouvoir, sans force, sans supériorité. Cependant, il lui reste ce qui ne peut lui être enlevé et que le petit enfant ne connaît pas encore :  la prière.

Jésus ne dit rien sur les litiges et mésententes qui mettent cette femme en situation de précarité.  Son message qu’il nous donne prend forme dans le témoignage de cette veuve.
Par la prière, cette femme reçoit la force d’aller vers le juge. Ses épreuves se prolongent par l’indifférence de celui-ci.  Cette justice inhumaine ne représente certainement pas la justice de Dieu.

Revenir à la charge avec persévérance

Jésus l’accompagne dans ses épreuves. Il lui donne le courage de persévérer. « Va ! Dis-lui encore ce que ce juge doit entendre pour exercer envers toi la résolution des injustices qui t’affligent. »  Et la veuve revient à la charge avec persévérance une fois, deux fois, plusieurs fois.  Elle prie le juge de ne plus lui refuser de rendre justice.
Le juge concède à la supplication de cette femme qui l’ennuie. Il lui rend justice pour qu’elle ne lui casse plus la tête.

Que nous dit Jésus en ce mois d’octobre dédié à la Mission Universelle ? Priez …  La prière est le carburant de toute œuvre missionnaire, imprégnée de tendresse et de charité
Nous prions. A qui adressons-nous nos prières ?  Et que demandons-nous dans nos prières ?  Sommes-nous las de prier ? Attendons-nous des réponses immédiates de Dieu?  Faisons-nous du marchandage avec lui ? Si tu exauces ma prière, je te donnerai ….  A coup sûr, Dieu reste en silence.  Est-il sourd pour autant ? Ou voulons-nous imposer à Dieu de répondre à nos désirs, de faire notre volonté ?

Volonté de Jésus d’ouvrir les coeurs fermés à l’amour

Jésus continue à nous instruire par sa prière. Il le fait pour la veuve et pour le juge. A la veuve, il lui donne la persévérance dans sa requête priante. Au juge, il lui demande – par l’intermédiaire de la veuve – de quitter son cœur de pierre.
Jésus n’instruit pas en créant des oppositions : le juge contre la veuve, ou inversement. Il agit pour que l’un et l’autre entre dans l’accomplissement de la volonté du Père, cette volonté qu’il a d’ouvrir les cœurs fermés à son amour.
Jésus procède ainsi dans la parabole du pharisien et du publicain priant dans le Temple. Il ne veut pas opposer le pharisien du publicain. Mais à travers le publicain, il montre au pharisien que sa prière est mondaine, orgueilleuse. « Je ne suis pas comme les autres, comme ce publicain… »  Jésus veut montrer au pharisien qu’il n’est pas sur la bonne voie de la prière en lui donnant le témoignage humble du publicain.

Une voie nouvelle

Les vrais priants missionnaires sont ces pauvres de cœur ; ce sont ces petits, ces enfants sans pouvoir, sans force et sans supériorité.
Quelle attention portons-nous sur ces petits qui nous sont proches ?
Comme la veuve et le publicain, ils nous révèlent quelque chose de la présence aimante de Dieu et de son action dans leur vécu quotidien. La prière du publicain ouvre une voie nouvelle au pharisien ; celle de la veuve une voie nouvelle pour le juge. Vont-ils prendre cette voie nouvelle ?
Cette voie nouvelle est offerte à nous tous. A chacun la liberté de s’y engager, de prier et d’agir ou de l’éviter.

 


29ème dimanche du temps ordinaire

Lectures bibliques : Exode 17, 8-13; Psaume 120; 2 Timothée 3, 14 – 4, 2; Luc 18, 1-8


 

Homélie du 9 octobre 2016 (Lc 17, 11-19)

Père Henry Duperthuy – Chapelle St-Joseph, Ecole des Missions,  St-Gingolph, VS

 

Nous allons entrer dans la semaine missionnaire mondiale. La mission fait partie de notre vocation baptismale, ce n’est pas un à-côté que quelques-uns sont appelés à mettre en œuvre. Mais, c’est quoi, au juste, la mission ? Les textes d’aujourd’hui nous livrent quelques pistes pour mieux la comprendre.

Jésus est le salut pour tout homme

Saint Paul s’adresse à Timothée, et par lui à chacun de nous : « Bien-aimé, souviens-toi de Jésus Christ, ressuscité d’entre les morts, le descendant de David. » Ce Jésus de Nazareth, qui est passé en faisant le bien, qui a été mis à mort et que Dieu a ressuscité, ce Jésus reconnu comme Christ, Messie de Dieu, il est le salut pour tout homme. Personne ne peut recevoir la Vie éternelle à laquelle tous sont appelés sans passer par lui. Voilà tout l’Evangile, voilà la Bonne Nouvelle que nous avons mission d’annoncer. C’est déjà la mission que Jésus reçoit de son Père, et nous découvrons dans les évangiles que cette Bonne Nouvelle est divulgué en paroles et en actes. Jésus passe beaucoup de temps à enseigner les foules qui le suivent et il passe aussi beaucoup de temps à agir pour montrer, rendre visible l’action de Dieu.

Dieu s’adresse à la foi en toute simplicité

Dans l’évangile d’aujourd’hui, Jésus purifie des lépreux qui le supplient : Jésus, maître, prends pitié de nous. Il n’y a rien de spectaculaire dans l’action de Jésus : allez vous montrer aux prêtres. Jésus ne s’impose pas, il propose à la confiance de chacun la miséricorde du Père. C’était déjà vrai de l’attitude d’Elisée avec le général araméen Naaman. Lui aussi était lépreux, il cherchait comment guérir de sa maladie. Sur les conseils d’une jeune fille enlevée au cours d’une razzia en Israël, il se rend auprès d’Elisée, prophète à Samarie. Celui-ci fait dire à Naaman par un messager : « Va te baigner sept fois dans le Jourdain, ta chair redeviendra nette, tu seras purifié. » Naaman se met alors en colère : « Je m’étais dit : Sûrement il va sortir, et se tenir debout pour invoquer le nom du Seigneur son Dieu ; puis il agitera sa main au-dessus de l’endroit malade et guérira ma lèpre. Est-ce que les fleuves de Damas ne valent pas mieux que toutes les eaux d’Israël ? Si je m’y baignais, est-ce que je ne serais pas purifié ? » Les humains espèrent toujours des actions grandioses de la part de Dieu, quelque chose qui en impose, mais Dieu, lui, s’adresse à la foi, en toute simplicité.

« Invités à aller aux périphéries existentielles de l’humanité »

Un deuxième aspect de la mission apparaît dans ces textes. Naaman est un étranger, il ne connaît pas le Dieu d’Israël. Le lépreux qui constate sa guérison et qui revient vers Jésus est un samaritain, quelqu’un dont on se méfiait en Israël. La miséricorde de Dieu est pour tous, même pour les étrangers et les gens douteux !

Le Pape François invite les catholiques à aller aux périphéries existentielles de l’humanité. Dans la bulle d’indiction de l’année sainte de la miséricorde, il écrit au chapitre 15 : Au cours de cette Année Sainte, nous pourrons faire l’expérience d’ouvrir le cœur à ceux qui vivent dans les périphéries existentielles les plus différentes, que le monde moderne a souvent créées de façon dramatique. Combien de situations de précarité et de souffrance n’existent-elles pas dans le monde d’aujourd’hui ! Combien de blessures ne sont-elles pas imprimées dans la chair de ceux qui n’ont plus de voix parce que leur cri s’est évanoui et s’est tu à cause de l’indifférence des peuples riches ! Au cours de ce Jubilé, l’Eglise sera encore davantage appelée à soigner ces blessures… Ouvrons nos yeux pour voir les misères du monde, les blessures de tant de frères et sœurs privés de dignité, et sentons-nous appelés à entendre leur cri qui appelle à l’aide. Que nos mains serrent leurs mains et les attirent vers nous afin qu’ils sentent la chaleur de notre présence, de l’amitié et de la fraternité. Que leur cri devienne le nôtre…

Le Fils de Dieu va à la rencontre de tous, sans exclure personne…

Un peu avant, au chapitre 12, François écrivait : L’Eglise a pour mission d’annoncer la miséricorde de Dieu, cœur battant de l’Evangile, qu’elle doit faire parvenir au cœur et à l’esprit de tous. L’Epouse du Christ adopte l’attitude du Fils de Dieu qui va à la rencontre de tous, sans exclure personne… Son langage et ses gestes doivent transmettre la miséricorde pour pénétrer le cœur des personnes et les inciter à retrouver le chemin du retour au Père.

C’est bien dans cet esprit que nous pouvons et devons entrer dans cette semaine missionnaire.

AMEN


28ème Dimanche du temps ordinaire

Lectures bibliques : 2 Rois 5, 14-17; Psaume 97; 2 Timothée 2, 8-13; Luc 17, 11-19