Homélie du 14 février 2016 (Lc 4, 1-13)

Chanoine Michel-Ambroise Rey – Paroisse de l’Immaculée Conception, Leysin-Les Ormonts

Chers malades, chers frères et sœurs,

Quand vous arrivez à l’entrée de notre chapelle-igloo, ce monument le plus visité de Leysin pendant l’hiver, vous trouvez sur votre gauche un panneau qui est une reproduction d’un détail du toit peint sur bois de l’église réformée de Zillis dans les Grisons.

Il représente celui qui est la cause de tous les malheurs actuels du monde, celui contre lequel nous sommes appelés à lutter durant ce carême en progressant dans la connaissance et l’amour de Jésus Christ en nous ouvrant à sa lumière par une vie de plus en plus fidèle (oraison). En effet, les puissances du mal sont symbolisées par la représentation du diable. Ces puissances du mal causent un grand nombre de difficultés  sur notre terre en provoquant, par exemple,  la fuite incessante et toujours plus impressionnante des migrants ainsi que la misère des affamés.

« Les puissances du mal symbolisées par la représentation du diable »

Notre saint Père le pape François, dont beaucoup de monde apprécie le franc-parler, évoque très fréquemment ce personnage pervers qui transforme nos cœurs et présente la plupart des migrants comme de potentiels ennemis de notre civilisation européenne.

Les trois formes de tentations dont nous parle l’évangile de ce jour s’adressent aujourd’hui encore à chacun et chacune d’entre nous, puisque vous et moi, grands et petits de ce monde, nous sommes tentés de changer les minerais d’or en argent sonnant et trébuchant, sans nous préoccuper des effets collatéraux de leurs extractions (le travail des enfants, les conditions de vie des chercheurs d’or, les rivières polluées par le mercure !). Dans leur campagne traditionnelle de carême, les œuvres d’entraide suisses que sont Pain pour le prochain et Action de Carême nous rendent attentifs à prendre nos responsabilités aussi sur ce sujet, car tout ce qui brille n’est pas or.

Nous sommes aussi tentés de changer le  pétrole, le blé, les terrains agricoles, les paysages alpestres en argent sonnant et trébuchant  pour calmer notre faim ! Satan nous le suggère  tandis que Jésus nous répète : il est écrit que l’homme ne vit pas seulement de pain !

Notre saint Père le pape François souhaite réveiller notre communauté catholique par la proclamation de cette année sainte de la miséricorde.

« Joie d’actualiser dans notre vie les œuvres spirituelles et corporelles de miséricorde »

Les sept livres édités par la commission pontificale pour la nouvelle évangélisation proposent à tous les baptisés de « se rendre compte de la solidité des enseignements que nous avons  entendus (Luc 1,3) », de la beauté du christianisme et de la joie d’actualiser dans notre vie les œuvres spirituelles et corporelles de miséricorde, comme nourrir ceux qui ont faim, visiter les malades, prier pour les vivants et les morts.

Il y a un souffle tout à fait exceptionnel dans ces documents, un souffle qui nous enthousiasme et nous réjouit. Je vous encourage vivement à prendre la peine de les lire, de les travailler en paroisse ou en famille pour proclamer les hauts faits du Seigneur dans nos vies.

Conviés à un renouveau spirituel en prenant à cœur d’être miséricordieux comme notre Père céleste est miséricordieux

Que nous soyons prêtre, simple ouvrier, infirmière, père de famille, directeur d’entreprise, femme au foyer, malade ou bien portant, professeur ou étudiant, nous trouverons notre joie dans cette lecture attentive et affermirons notre foi  en découvrant qu’en Christ nous ressuscitons chaque jour, alors même que le péché nous retient encore sous sa loi, puisque le Seigneur nous donne la délivrance par la prodigieuse et nouvelle naissance en notre chair du Christ Jésus (oraison de l’octave de Noël).
Avec une douceur merveilleuse et maternelle, le Pape François nous convie à un renouveau spirituel en prenant à cœur d’être miséricordieux comme notre Père céleste est miséricordieux à notre égard. François nous invite à prendre le chemin de la miséricorde en développant dans nos activités quotidiennes l’une ou l’autre des œuvres corporelles ou spirituelles de la miséricorde.

Les tentations sont nombreuses et toujours fallacieuses. Elles nous poussent à nous réfugier dans des solutions miraculeuses : changer les pierres en pains, fermer les frontières, se barricader, élever des barrières de fils barbelés, envoyer des bombardiers, soutenir des conflits armés. Les diableries font miroiter les difficultés et problèmes : Il n’y a pas assez de nourriture, pas assez de travail, pas assez de places dans notre patrie : la barque est pleine ! Nous allons chavirer et nous perdrons tout ce que nous avons acquis avec tant d’efforts !

Ayez confiance en votre Père miséricordieux

Jésus, au contraire, depuis l’autre rive, nous redit : convertissez-vous et croyez à la Bonne nouvelle. Ayez confiance en votre Père miséricordieux qui sait très bien ce dont vous avez besoin, car vous valez bien plus que les oiseaux des champs qui ne sèment ni ne récoltent,  vous valez bien plus que les lis des champs.

Allez donc proclamer au monde ce que nous dit le psaume 146 : Ne comptez pas sur les puissants, des fils d’homme qui ne peuvent sauver. Leur souffle s’en va : ils retournent à la terre et leurs projets périssent.

Pas de plus grand bonheur que de donner sans calculer, d’aimer sans mesurer

L’humanité et chacun d’entre nous trouverons le salut en multipliant les œuvres de miséricorde qui nous ouvriront le ciel sur la terre dès aujourd’hui, car il n’y a pas de plus grand bonheur que de donner sans calculer, d’aimer sans mesurer,  d’être miséricordieux comme notre Père céleste est miséricordieux avec nous.

Réjouissons-nous donc de partager tout ce que nous avons en sachant que nous recevrons tout au centuple et le ciel par-dessus le marché dès ici-bas.
Amen.


1er dimanche de Carême

Lectures bibliques : Deutéronome 26, 4-10; Psaume 90; Romains 10, 8-13; Luc 4, 1-13

Homélie du 7 février 2016 (Lc 5, 1-11)

Chanoine Thomas Rödder – Basilique de Saint-Maurice


Les textes bibliques de ce dimanche des laïcs nous montrent comment Dieu appelle des hommes pour être ses messagers.

Il s’est adressé à Isaïe qui n’avait que 20 ans pour lui confier la mission d’être prophète auprès de son peuple. Isaïe est saisi d’effroi ; devant la sainteté de Dieu, il prend conscience de son péché. Mais le feu divin purifie les lèvres d’Isaïe. Il pourra ainsi transmettre la parole brulante du Seigneur.

La 2ème lecture nous parle de saint Paul qui est devenu apôtre du Christ. Au départ, il persécutait les chrétiens. Ce qui a fait de lui un apôtre du Christ ce n’est pas d’abord ses qualités d’orateur ni ses voyages missionnaires, ni son souci des pauvres et des opprimés. Le vrai point de départ a été sa rencontre avec le Christ ressuscité sur le chemin de Damas. Il l’a vu vivant au milieu des siens. Le Christ l’a appelé à le suivre ; lui-même nous dit : « c’est par la grâce de Dieu je suis ce que je suis ».

L’Évangile nous parle de l’appel des premiers disciples. Pressé par la foule, Jésus a besoin d’être aidé. C’est important car il faut que le filet de la Parole atteigne tous les hommes. Cette aide, il va la demander aux pêcheurs qui ont mis leurs barques à sa disposition. Il va d’abord les inviter à avancer au large et de jeter leurs filets pour prendre du poisson.

Simon joue gros sur la Parole de Jésus

Simon qui avait peiné toute la nuit sans rien prendre répond à l’invitation du Maître : « Sur ta parole, je vais jeter les filets. » Simon joue gros sur la Parole de Jésus. Il joue son avenir mais il ne le sait pas encore. Un seul geste exécuté à la demande du Seigneur et le résultat est inespéré. Il doit même demander à ses compagnons de l’autre barque de venir l’aider sinon cette pêche extraordinaire aurait été perdue.

« Quitter la rive de nos habitudes, le sol ferme de nos certitudes »

Aujourd’hui comme autrefois, le Christ nous invite à avancer au large. Comme Pierre, nous n’avons peut-être pas envie de quitter la rive de nos habitudes, le sol ferme de nos certitudes. Comme Pierre, nous avons peiné des mois et des années sans grand résultat. Nous nous sommes engagés dans nos paroisses, nos quartiers, nos lieux de travail et de loisirs. Mais nous constatons que nos églises se vident ; la plupart des jeunes n’y mettent plus les pieds. Alors, on se dit qu’il faut s’organiser pour sauver ce qui peut l’être. On ne pense qu’à se protéger d’un monde qui nous ignore, nous ridiculise ou nous persécute.

La pêche miraculeuse, ça ne se fait pas tout seul : c’est une mission de toute l’Église

Mais ce n’est pas cela que le Seigneur attend de nous : Ce qu’il nous demande, c’est d’avancer au large. Simon refait exactement ce qu’il a fait toute la nuit sans rien prendre. Mais cette fois, tout est changé car Jésus est à bord. Le bateau coule tellement il est chargé. La pêche miraculeuse, ça ne se fait pas tout seul : c’est une mission de toute l’Église. Mais il faut que Jésus soit à bord. Il doit être là pour commander la manœuvre, donner des ordres et se faire obéir. Il ne suffit pas d’avoir des plans bien élaborés ni d’utiliser les techniques les plus modernes. Le plus important c’est de jeter les filets et de la faire avec foi « sur sa parole ». La pêche miraculeuse, c’est lui qui s’en charge. Le principal travail, c’est lui qui le fait dans le cœur de ceux et celles à qui nous annonçons la Parole.

« L’important c’est d’être AVEC le Seigneur »

Comme Isaïe et les apôtres Pierre et Paul, nous sommes tous appelés par le Seigneur. Il compte sur nous pour une mission bien précise. Il nous envoie pour être son messager et porte-paroles pour faire connaître et communiquer au monde ses secrets de bonheur. Son appel est toujours le même : « Avance au large et jetez vos filets. » Avec ce qui est petit et faible, le Seigneur peut faire des grandes choses. L’important c’est d’être AVEC le Seigneur.

En ce jour, nous rendons grâces au Seigneur, car nous avons bénéficié de la pêche miraculeuse : le baptême nous a arrachés aux flots de la mort et nous a hissés sur la barque ; nous sommes sortis de l’eau comme le Christ est sorti du tombeau. Et nous sommes envoyés à notre tour comme Isaïe et Simon-Pierre. Que le Seigneur nous inspire les paroles et les gestes qui nous permettront d’arracher nos frères et sœurs aux flots de la misère et de nous mettre à son service. Amen.


5ème dimanche du temps ordinaire
Lectures bibliques : Isaïe 6, 1-2a.3-8; Psaume 137; 1 Corinthiens 15, 1-11;Luc 5, 1-11