Homélie du 27 septembre 2015

Donc… « si ta main ou ton pied t’entraîne au péché, coupe-les; si c’est ton œil, arrache-le ! » Ces paroles du Christ, pour percutantes qu’elles soient, ne sont évidemment pas à prendre au pied de la lettre… (on serait bien tous estropiés…). Cependant, vivre en amitié avec le Christ – ou en état de grâce, c’est selon(…) – implique dans une société telle que la nôtre, de poser des choix ; des choix clairs sous peine d’affadir le message évangélique et de dénaturer le « sel » même de la terre.

La main, représente l’agir de l’homme. Ce qu’il convient de « trancher », ce n’est pas la main en tant que telle – pas dans le christianisme en tous cas – mais éventuellement le penchant égoïste à agir dans l’injustice, nous enfermant en notre bonheur personnel; fermant les yeux sur la pauvreté désespérée de tant d’hommes et de femmes dont le cri de détresse traverse les cieux…

Le pied lui, il permet le déplacement. Eh bien là ce qu’il convient de trancher pourrait être l’éventuel penchant à fréquenter les lieux malsains pour le corps, l’âme et l’esprit car si – dans la liberté qui est mienne en qualité de chrétien – tout m’est permis, tout n’édifie pas ; loin s’en faut.

Quant à l’œil, c’est le regard, la lampe du corps… Ce qu’il convient d’arracher, ce n’est pas l’œil – on serait tous borgnes(…) – mais au besoin, en nous, le penchant malsain à laisser traîner son regard – quand nous ne cherchons pas intentionnellement ces choses – sur n’importe quelle émission, site, revue, journal, image de nature à troubler le corps, l’âme et l’esprit.

Pour parler en mode positif, le Christ est à même de nous aider à passer du vieil homme – l’homme qui cède aux pièges du mal – à l’homme nouveau ; l’homme nouveau créé saint et juste à l’image de Dieu son Père.

Dans cette dynamique, dans ce passage de l’homme ancien à l’homme nouveau, ce qui très particulièrement change tout dans une vie d’homme et de femme, c’est d’éprouver la présence du Christ comme une Présence d’Amour. Car éprouver ainsi la Présence du Christ, c’est dans l’amour, s’offrir tout entier à lui, Jésus, à sa vie et il en résulte un grand soulagement ; soulagement qui lui-même procure la paix, qui elle-même se résout en joie. La « paix qui surpasse toute intelligence » dit Paul aux Philippiens et « la joie que nul ne peut ravir » promet Jésus. (Jean 16,22).

 

L’homme nouveau, l’homme mû désormais par l’amour du Christ en son centre vital, chemine, à l’image, à la suite et en Christ son divin maître et Ami, dans le don ; le don de soi et trouve en ce don une plénitude.

 

Jésus le premier a tout donné : santé aux malades, pardon aux pécheurs et jusqu’à Sa propre Vie sur la croix. Il peut dès lors appeler ses disciples à donner à leur tour. Et que donneront-ils ces disciples ou… que donnerons-nous, nous autres, si tant est que nous nous considérions disciples du Christ?

Eh bien nous donnerons un peu – beaucoup… – de tout ; de tout ce que nous avons et d’abord de notre amour, de notre pensée, de notre temps, de nos loisirs, de nos aises, de notre repos, de notre réputation – que sais-je encore ? – de notre puissance de guérison si tel est notre charisme (car ça existe aussi dans l’Eglise catholique romaine…), de nos forces, de notre sympathie… – oui, nous donnerons de tout cela et de bien d’autres choses encore et, le faisant, nous serons puissamment utilisés en faveur des autres.

Ce que le Christ désire avant tout – pour dire le fond de ma pensée – c’est notre amour, un amour vrai, un amour chaud, un amour spontané, comme celui de l’enfant ; un amour absolument confiant et qui soit ouvert à Sa vérité.

Et ensuite, ce que Jésus apprécie le plus, c’est le don non seulement de notre vie, de nos journées et de nos heures, mais aussi, mais encore le don de chacun de nos instants. Et ça, c’est en soi une longue et difficile leçon à apprendre.

A-t-on entendu le cri de détresse du monde en quête d’un Sauveur et l’appel pressant que ce Sauveur adresse à ceux dont il veut faire ses continuateurs, Il s’agit dès lors pour nous, de renoncer pour Lui, Jésus, quand Il nous y invite, aux petites choses innocentes auxquelles nous pensions, et de rendre joyeusement toutes sortes de menus services. C’est une gymnastique ardue du corps et de l’esprit mais il vaut la peine de l’entreprendre car c’est cette gymnastique-là, précisément, qui porte et de loin plus avant le Royaume de Dieu en nous et entre nous.

Associons Jésus à tout cela, associons sa présence d’Amour à cette gymnastique du corps et de l’esprit et nous y arriverons facilement et le petit monde dans lequel nous gravitons s’en portera immédiatement mieux et dans cet échange de dons réciproques – l’amour appelant l’amour ; la communion des dons – jaillira la joie ; une joie que nul ne pourra nous ravir.

L’homme qui s’imagine réaliser le don par excellence en se contentant de donner de l’argent pour telle ou telle œuvre, comprend bien mal encore, les choses de l’âme.

En christianisme, c’est l’amour qui donne valeur à tout. Revêtons l’amour ; tout le reste viendra de surcroît. Tout ! A l’instinct égoïste qui pousse à tout s’accaparer, l’amour oppose la générosité ; à l’habitude maladive de centrer le monde sur soi-même, l’amour oppose l’attention à l’autre ; à la culture de la possession, l’amour oppose celle du don et ainsi de suite….

A tous, bon chemin d’Evangile ! Amen.

 

26e dimanche du temps ordinaire

Textes bibliques :

Nombres 11, 25-29; psaume 18; Jacques 5, 1-6; Marc 9, 38-43.45.47-48

L’abbaye de Saint-Maurice fête ses 1500 ans

La cité de Saint-Maurice a clôturé le jubilé de son abbaye en fêtant son 1500e anniversaire, en présence du cardinal Kurt Koch, envoyé extraordinaire du pape François, et du conseiller fédéral Didier Burkhalter. Le cardinal a présidé la messe pontificale dans une basilique comble. La procession des reliques de Saint-Maurice a précédé les allocutions officielles, l’envol des colombes et le partage du pain du 1500e.

25e dimanche du temps ordinaire

Chers amis,

Connaissez-vous les fenêtres à jalousies ? Je vois que certains d’entre nous hochent la tête.
Vous savez, ce sont ces stores à lamelles réglables. On peut les écarter plus ou moins pour faire entrer le soleil à dose variable. Je vois que la chose vous est connue, même si son nom ne l’était pas forcément : cela s’appelle des jalousies, mais oui.
On peut dire aussi « lamelles réglables », bien sûr mais « jalousies » dit tellement mieux ce dont il s’agit.
Car si l’on peut voir l’utilité de ces lamelles depuis l’extérieur – faire entrer plus ou moins le soleil – on peut aussi leur trouver une autre utilité vue depuis l’intérieur de la pièce. Observer sans être vu. D’où leur nom de « jalousies ».
Or la jalousie est bien souvent empreinte de lâcheté, et cette image nous le montre clairement. On veut épier, oui, envier, oui, mais surtout pas assumer. Il ne faut pas être vu soi-même.
La jalousie est une des plus remarquables armes du démon. Elle se nourrit d’envie (l’herbe est toujours plus verte chez le voisin), d’insatisfaction (on n’envie l’autre que parce que l’on ne voit pas notre propre bonheur), elle se nourrit aussi de ces esprits chagrins qui voient toujours le verre à moitié vide ou qui refusent de s’émerveiller sur les bonheurs, les réussites, les qualités des autres.
« La jalousie voit tout, excepté ce qui est. » disait Xavier Forneret, auteur du 19e siècle. C’est très joliment dit : « La jalousie voit tout, excepté ce qui est. »
Par une fenêtre à jalousies, on voit tout. Mais on voit tout de façon déformée, masquée, zébrée par les lamelles et le jeu du clair-obscur. Au fond, on voit peut-être tout, mais en réalité on ne voit rien, on ne voit pas du tout les choses telles qu’elles sont réellement.

Les textes d’aujourd’hui nous mettent en garde contre ce défaut très humain qu’est la jalousie. Jacques, notamment, dans la deuxième lecture.

Il va très loin, en disant même que c’est ce type de sentiments qui provoquent les guerres. Et on ne le sait que trop bien. Si l’on est heureux de ce que l’on a, pas besoin d’aller regarder chez l’autre en se demandant si c’est mieux, puis de vouloir prendre ce que l’autre possède, en envahissant son territoire si nécessaire.
C’est le mécanisme-même des publicités, vous avez remarqué ? On vous montre ce que vous n’avez pas, on vous fait croire que vous en avez besoin, que vous vivrez plus heureux avec cet objet, et on vous pousse à le posséder.
Y compris si vous devez prendre ce que vous n’avez pas pour l’obtenir – eh oui, c’est le principe de l’achat à crédit, on achète avec l’argent qu’on n’a pas. C’est le drame de certains de nos jeunes qui s’endettent à n’en plus finir.
C’est aussi le principe de la presse people. On vous met une star en couverture. Et vous l’enviez. Vous enviez sa vie, son argent, sa beauté, son pouvoir, sa célébrité, tout ce que vous n’avez pas.
Jalousie…

Alors que franchement, chers amis… vous savez bien que les gens qui font les gros titres de nos magazines ne sont pas les plus heureux sur cette terre loin de là. Que les gens connus vivent des vies très compliquées.
Sincèrement, vous enviez Brad Pitt et Angelina Jolie, vous ? Ils ont la beauté, l’argent, la célébrité, mais des soucis à n’en plus finir, des gardes du corps tout le tour du ventre, des paparazzis jusque dans leur salle de bain…
Sincèrement, vous enviez Barack Obama ou le pape François ? Ils ont le pouvoir et la célébrité. Mais des nuits courtes et un emploi du temps qui ne leur laisse plus une seconde à eux, sans parler des responsabilités qui pèsent sur leurs épaules.
Sincèrement, vous enviez Michel Platini ou Sepp Blatter ? Ils ont le pouvoir et la célébrité, la joie de vivre dans le monde du sport, ils font le tour de la terre au travers de ces merveilleux moments que sont les compétitions mondiales ou européennes, mais croyez-vous qu’ils ont une vie plus heureuse que la vôtre ? Vraiment ?
D’ailleurs ces gens sont aussi sujets à de grands dangers. La première lecture, le livre de la Sagesse, nous le disait très bien : ceux qui méditent le mal – les jaloux – veulent attirer toutes ces personnes dans un piège. Le jaloux veut toujours le mal de celui qu’il jalouse, au final.
Jésus, dans l’Evangile, nous invite à laisser de côté tout cela. Il fustige la jalousie entre ses disciples qui se disputaient pour savoir lequel d’entre eux était le plus grand. Et Jésus renverse tout. Le plus grand, avec lui, n’est pas le plus grand. Le plus grand c’est celui qui se fait humble, serviteur, le plus grand, avec Jésus, c’est le plus petit. Et Jésus nous propose donc de retrouver notre âme d’enfant.
Présentez Barack Obama, Brad Pitt ou Sepp Blatter à un enfant, quelle sera sa réaction ? Aucune, il ne les connait pas.
Mais montrez-lui un bonheur simple : rire aux éclats, se jeter dans l’eau d’une flaque, courir dans le vent, manger à sa faim, faire un câlin tout tendrement, il voudra tout de suite faire comme vous.
Le vrai bonheur est simple, il ne s’embarrasse pas des standards du soi-disant bonheur de notre monde.
Alors chers amis, ne jalousons pas trop les gens qui font la couverture de nos journaux. Regardons la vie simple et belle que nous avons, ouvrons toutes grandes les lamelles de nos fenêtres à jalousies pour laisser entrer dans nos cœurs le grand soleil de Dieu.

 


Lectures bibliques : Sagesse 2, 12.17-20; Psaume : 53; Jacques 3, 16–4, 3;  Marc 9, 30-37