Homélie du 02 juin 2013

Prédicateur : Frère Luc Devillers, OP
Date : 02 juin 2013
Lieu : Monastère de la Visitation, Fribourg
Type : radio

Frères et sœurs, nous voici chez les Sœurs de la Visitation. Dans les Règles et Constitutions qu’il a rédigées pour elles en 1613, le futur saint François de Sales a écrit : « Cette Congrégation […] a convenablement choysi pour Patronne Nostre Dame de la Visitation, puisque en ce mistere la tres glorieuse Vierge fit cet acte solemnel de sa charité envers le prochain que d’aller visiter et servir sainte Élizabeth au travail de sa grossesse, et composa néanmoins le cantique du Magnificat, le plus doux, le plus relevé, plus spirituel et plus contemplatif qui soit escrit . » Par ces mots, saint François a résumé les deux parties de l’évangile de ce jour : la visite que fit Marie à sa vieille cousine et son chant du Magnificat.

Avec justesse, il y voit un merveilleux raccourci de la vie chrétienne, toute imprégnée de charité active et débordante d’action de grâces. Action et contemplation vont de pair, à condition de ne pas les résumer à la caricature que l’on en fait parfois : l’action devenant alors pur activisme, fuite dans l’agir horizontal, et la contemplation étant synonyme de fuite verticale, par laquelle on croit atteindre Dieu en se coupant du monde et des autres.

À l’image de Marie visitant Élisabeth, nous sommes appelés à aimer en vérité le prochain. C’est la seule manière qui nous soit offerte pour dire notre amour de Dieu. Car, comme le dit la Première lettre de Jean : Celui qui n’aime pas son frère qu’il voit ne saurait aimer Dieu qu’il ne voit pas (1 Jn 4,20). La charité agissante et inventive nous fait aimer l’autre, quel qu’il soit, au nom de Dieu. Cela commence dans le cercle de famille et englobe tous les âges, comme dans la scène de la Visitation : Marie se rend avec hâte chez sa vieille cousine à un moment où celle-ci a particulièrement besoin d’aide, et du sein de sa mère le petit Jean-Baptiste accueille avec joie l’enfant Jésus porté par Marie. Mais l’autre qui attend notre visite, c’est aussi tout être humain, spécialement l’exclu en qui le Christ se reconnaît : J’étais malade ou en prison, et vous êtes venus me visiter… C’est encore celui en qui nous voudrions voir un ennemi, mais que le Christ nous demande de regarder autrement : Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent. Et saint Paul ce matin renchérit : Bénissez ceux qui vous persécutent, souhaitez-leur du bien et non du mal. Les mots « amour » et « charité », trop souvent galvaudés, usés et trahis, expriment le mystère même de Dieu : Dieu est amour, dit encore la Première lettre de Jean (1 Jn 4,8.16). Comme le Christ nous a aimés jusqu’à donner sa vie pour nous, notre amour de l’autre nous engage jusqu’au bout.

Quant à notre contemplation, elle s’enracine dans l’action de grâces. Tel est bien le Magnificat de Marie. Ce chant jaillit de l’Ancien Testament et du judaïsme de son temps. Marie y parle en son nom personnel, mais aussi au nom de son peuple, dont elle reprend les mots pour tisser vers après vers son propre cantique. Elle y dit son expérience de l’amour de Dieu : il vient sauver son peuple, il aime les petits et les pauvres, il comble de biens les affamés mais renvoie les riches les mains vides. Il y a quelque chose de révolutionnaire dans ce cantique, et certains militants ou dirigeants politiques ne s’y sont pas trompés. Le théoricien de l’Action française ne pouvait que le détester. Quant à l’ancien dictateur d’Argentine qui vient de mourir, il n’avait pas pu en interdire l’usage liturgique, mais il en avait censuré le verset qui dit : « Il a renversé les puissants de leurs trônes, il a élevé les humbles. » Le cantique de Marie apparaît comme la mise en œuvre poétique d’une vraie théologie de la libération.

Si Marie exprime sa louange, c’est parce qu’elle a déjà goûté à la visite de Dieu : Le Seigneur s’est penché sur son humble servante, le Seigneur a fait pour moi des merveilles : saint est son Nom ! Elle nous invite à reconnaître les merveilles que Dieu a déjà faites dans notre vie, et à le louer d’avance pour celles qu’il veut encore y faire. Non seulement ce cantique, mais toute la scène de la Visitation déborde de joie, comme les lectures de cette messe l’ont souligné. Chez le prophète Sophonie, les verbes de joie se succèdent et se renforcent l’un l’autre : Pousse des cris de joie, fille de Sion ! Éclate en ovations, Israël ! Réjouis-toi, tressaille d’allégresse, fille de Jérusalem ! Saint Paul aussi nous exhorte à la joie, tout en précisant que cette joie ne doit pas se faire indiscrète face à une personne accablée de tristesse : Soyez joyeux avec ceux qui sont dans la joie, pleurez avec ceux qui pleurent. À l’image de Marie, à l’invitation de Sophonie et de Paul, soyons donc des êtres de joie et de compassion, heureux de nous savoir aimés de Dieu et sauvés, promis par lui à la vie, appelés aussi à annoncer son salut. Car la vraie raison de cette joie, c’est le salut que Dieu offre à tous. Aujourd’hui, il est discrètement présent dans l’enfant Jésus encore caché dans le sein sa mère, mais déjà repéré par Jean-Baptiste.

Bien des gens ne voient dans le message chrétien qu’une menace de jugement, suscitant la peur. Il est temps de leur dire que le salut de Dieu est source de joie, et non de peur. C’est notre devoir, à chacune et chacun de nous aujourd’hui, de tout faire pour que ce monde, qui est sorti des mains de Dieu et aimé de lui, accueille le trésor de la Bonne Nouvelle. Comme Marie, hâtons-nous de lui porter la joie ! Non pas la joie factice, toute de façade, des placards publicitaires ou des magazines de sectes. Mais la joie mûre qui vient de Dieu, et permet même de traverser les plus dures épreuves. Cette joie que Jésus offre à ses disciples : Je vous dis cela pour que ma joie soit en vous, et que votre joie soit complète… je vous verrai de nouveau et votre cœur sera dans la joie, et votre joie, rien ni personne ne pourra vous l’enlever (Jn 15,11 ; 16,22). C’est cette joie que le pape François nous invite à vivre, à goûter pour mieux la donner.

Mais le prophète Sophonie a encore évoqué une autre joie, beaucoup plus étonnante : Le Seigneur ton Dieu… aura en toi sa joie et son allégresse… il dansera pour toi avec des cris de joie, comme aux jours de fête ! Comment aurions-nous pu imaginer que Dieu lui-même sauterait de joie ? Et pourtant, Sophonie nous le déclare : notre Dieu est un Dieu qui danse de joie ! Or, ce qui fait sa joie, c’est son propre peuple, c’est nous ! Ne refusons pas, frères et sœurs, de faire la joie de notre Dieu. Accueillons comme Marie les merveilles qu’il fait dans notre vie. Disons au monde qu’il est aimé et appelé à la vie. Ainsi, tous ensemble, nous pourrons nous préparer à entrer dans la joie du Seigneur. Et, dans son Royaume, nous danserons de joie avec lui, chacun de nous faisant la joie de l’autre. Amen.»

Lectures bibliques : Sophonie 3, 14-18a; Romains 12, 9-16b; Luc 1, 39-56

Homélie du 26 mai 2013

Prédicateur : Abbé François Dupraz
Date : 26 mai 2013
Lieu : Basilique Notre-Dame, Lausanne
Type : radio

La fête de la Sainte Trinité n’existerait évidemment pas si Dieu n’avait pris l’initiative de nous parler de lui et de lever un peu le voile sur le mystère qui l’enveloppe. Un peu car la Trinité restera toujours – nous l’avons dit – un mystère ; pour nous en ce monde du moins…

J’aimerais rappeler que Dieu s’est révélé non pas comme une source anonyme d’énergie mais comme une personne ; une personne qui a un cœur, une intelligence, une personne qui pense, une personne qui aime.

Et plus que cela… Avec le Nouveau Testament on peut dire – car ce nous fut révélé – qu’il y a en Dieu trois personnes : le Père, le Fils et l’Esprit Saint. Et c’est au nom de ces trois personnes que nous fûmes baptisés un jour ; que nous nous rassemblons de dimanche en dimanche en Eglise et que nous commençons de jour en jour bon nombre de nos prières.

Lorsque, me préparant à prier, je fais sur moi un beau signe de croix et me signe au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, qu’est-ce que je fais? Eh bien quand je me signe ainsi, je commence par mettre – implicitement tout au moins – ma foi en Dieu le Père, Père tout puissant créateur du ciel, de la terre, de l’univers que je vois et de celui que je ne vois pas ou pas encore…

Un Dieu tout puissant et en même temps infiniment pauvre et humble… « Dieu est amour », écrira Saint Jean.

Au nom du Père donc… Oui, au nom du Père ! Dieu, mon Père, créateur, source de vie ; un Père pour lequel je compte qui que je sois, quelles que soient mes pauvretés, mes erreurs, mes errances. Il est mon Père ; j’ai du prix à ses yeux car Il m’aime. A mon tour je puis l’aimer, me déchargeant sur Lui 24 heures à la fois – mais pas davantage ; la joie chrétienne est à ce prix ! – me déchargeant sur lui de tous mes soucis car Il prend soin de moi, de nous, de tous.

Il nous est de fait bien doux, mes amis, de cheminer en ce monde en véritables fils et filles du Père éternel. « Abba », en araméen, la langue du Christ, ce qui se traduit : Papa !

Au nom du Père donc… oui, au nom du Père ! Et… du Fils.

Quand je me signe au nom du Fils, que fais-je ? Je mets ma foi dans la personne du Fils unique de Dieu qui m’a aimé et s’est livré pour moi, et pour vous, et pour tous…

Au nom du Fils, ce Fils, Jésus, Christ, Emmanuel ; Dieu avec nous ; Dieu en nous. « Qui m’a vu a vu le Père » dira Jésus. « Mon Seigneur et mon Dieu » s’écrie Thomas l’incrédule au lendemain de Pâques en présence du Ressuscité.

Ce Fils « est Dieu né de Dieu, lumière née de la lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu, engendré non pas créé, de même nature que le Père et, par Lui, tout a été fait. » Telle est la foi de l’Eglise, la foi de nos pères, la foi de toujours en la personne de Jésus de Nazareth.

Méditons et prions de temps à autre sur la foi de l’Eglise indivise. Nous nous en porterons bien.

Et quand je me signe au nom du Saint Esprit, je dis que l’Amour est si fort entre le Père et le Fils que cet Amour est une personne, précisément l’Esprit Saint, le souffle, la vie, l’amour qui procède du Père et du Fils. L’Esprit fait de nous des enfants de Dieu ; Il nous met en communion avec Dieu ; Il nous rend frères et sœurs du Christ.

Oui, comme le rappelait Paul VI au lendemain du Concile, nous autres chrétiens croyons en l’Esprit Saint qui est Seigneur et qui donne la vie, qui est adoré et glorifié avec le Père et le Fils. Il nous a parlé par les prophètes, il nous a été envoyé par le Christ après sa résurrection et son Ascension auprès du Père, il illumine, vivifie, protège et conduit l’Eglise ; il en purifie les membres si tant est qu’ils ne se dérobent pas à la grâce. Son action qui pénètre au plus intime de l’âme, rend l’homme capable de répondre à l’appel de Jésus : « Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait ». (Matthieu 5, 48)

Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, donc… Ô sublime Trinité ; abîme d’amour, mystère des mystères.

Ce mystère, plus qu’une énigme à déchiffrer est un appel ; un appel lancé par Dieu ; une invitation à l’accueillir au plus intime de notre vie ; à communier à sa vie.

Dans la grâce de la foi en ce mystère, à qui affirme l’absurdité du monde et sa tristesse, nous chrétiens répondons que le centre de l’univers est amitié, tendresse, amour et cela, c’est une excellente nouvelle pour un monde qui meure de soif sur les rivages d’éternité.

Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit donc. Vivons tous au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit et que règne l’Amour sur ce monde.

Amen.

Fête de la Sainte Trinité

Lectures bibliques : Proverbes 8, 22-31; Romains 5, 1-5 ; Jean 16, 12-15

Homélie du 19 mai 2013

Prédicateur : Abbé Claude Pauli
Date : 19 mai 2013
Lieu : Foyer Saint-Paul, Cologny
Type : radio

Chers résidents du foyer St Paul,

Très chers malades qui vous unissez à nous et que nous portons dans notre prière d’une manière particulière

Très chers auditeurs qui nous rejoignez, peut être par hasard, sur les ondes d’Espace 2

Mes frères et mes sœurs en humanité,

Nous célébrons aujourd’hui dans la joie la fête de Pentecôte. Elle est la fête par excellence du commencement de l’Eglise. L’Esprit Saint s’est précipité sur la terre pour l’embraser du feu de Dieu. Depuis la première Pentecôte dont vient de nous parler les actes des apôtres, le message de l’évangile est répandu et communiqué, compris par les hommes et les femmes de bonne volonté dans les langues de toute la terre. Depuis la première Pentecôte, l’Esprit agit dans l’Eglise et le cœur de ceux qui se laisse brûler par sa présence comme un défenseur.

Le défenseur, c’ est l’Esprit aux sept dons : les connaissons-nous encore ?

* Esprit d’intelligence qui nous révèle qui est Dieu, Esprit de sagesse qui met chaque jour en nous le désir de répondre à son Amour en écho à l’évangile d’aujourd’hui « Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole ; mon Père l’aimera, nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui » vient de nous rappeler Jésus.

* Esprit de conseil ou de discernement qui nous permet de saisir quelle est la volonté de Dieu tandis que l’Esprit de force nous donne le courage d’agir selon cette volonté. « Si vous m’aimez, vous resterez fidèles à mes commandements ».

* Esprit de connaissance qui nous ouvre à la contemplation de Dieu et qui suscite en notre cœur l’Esprit d’adoration. Je le redis et cela doit être le mot d’ordre de chacun de nos établissements pour personnes agées : quoi qu’on en dise ou qu’on pense, il n’y a pas de jour perdu ; il n’y a que des jours gagnés dans la mesure où nous mettons chacune de nos journées dans les mains de Dieu.

* Et c’est l’ Esprit d’affection filiale qui nous pousse à présenter à Dieu chaque jour l’offrande de notre vie.

Avec un si beau programme de vie qui n’a pas d’âge pour être appliqué, comment pouvons-nous, comme chrétien, envisager qu’une fin de vie, que le temps qui nous reste puisse nous paraître inutile ?

Chers frères et sœurs, chers résidents, chers malades, légitimes sont parfois nos lassitudes et notre envie de baisser les bras. Le Seigneur lui-même le comprend et il ne nous en veut pas. Il connaît mieux que personne la fragilité de notre nature humaine, patiemment il l’accueille avec tendresse parce qu’Il est notre Père et qu’Il nous aime.

Comme le disait si bien Monseigneur Genoud : « Il est des jours où Le Seigneur ne nous demande pas forcément de lui dire oui ; mais Il nous demande de ne jamais lui dire non. » Il nous demande d’avoir suffisemment d’humilité pour lui faire confiance et de ne pas hésiter à recourir aux nombreuses grâces qu’Il nous offre au travers de la beauté des sacrements. Laissons-nous toucher par cette merveilleuse pensée de Saint François de Sales qui disait : 
 » J’aime mieux être infirme que fort devant Dieu, car les forts Il les mène par la main, tandis que les infirmes Il les prend dans ses bras « .

Très chers résidents, aujourd’hui, certains d’entre vous allez accueillir le sacrement des malades, vous qui êtes fatigués et qui ressentez le besoin d’un « coup de pouce » du Seigneur. Par l’onction que vous allez recevoir, remplie de toute la force de l’Esprit de Pentecôte, le Seigneur, dans une démarche d’amour, va se pencher sur chacun d’entre vous, va venir communier à vos souffrances. Il veut vous donner la force et le courage d’accepter votre maladie, votre handicap, votre vieillesse et non de les subir. Ce sacrement n’a rien d’une potion magique mais une grâce du Seigneur, un don gratuit de son amour. C’est le sacrement du réconfort et de la tendresse de Dieu. Il amène un germe d’espérance au cœur de la relation que peut avoir la personne malade ou agée avec le monde et avec Dieu. Pour celui qui le reçoit, il est surtout l’acte de foi et d’espérance le plus radical qu’une créature puisse faire envers le Père qui l’aime et qui vient, au cœur de sa détresse ou de sa maladie « faire sa demeure » comme nous l’a rappelé l’évangéliste saint Jean.

Chers auditeurs, sans recevoir le sacrement des malades, n’avons-nous pas à quelque part tous besoin d’être touchés par l’Esprit Saint, l’Esprit de guérison ?

Pour qu’il nous guérisse de cette grande maladie qu’est la distorsion entre notre volonté et la sienne.

Pour qu’il unifie notre volonté à la sienne afin que notre filiation divine s’en trouve toujours renforcée.

Enfin pour qu’Il donne à nos frères malades comme à nous-mêmes la paix de l’âme, la sérénité du cœur et l’amour de sa volonté.

Il n’y pas d’âge pour se laisser toucher par l’Esprit de Dieu. Si chaque matin tu redis simplement :

« viens Esprit-Saint, remplis le cœur de tes fidèles, allume en eux le feu de ton amour ».

Ta journée en sera illuminée. Elle ne sera pas un jour perdu, mais un jour gagné.

Frères et sœurs bien aimés, jusqu’à notre dernier souffle, laissons l’Esprit de Pentecôte enflammer nos cœur et de son feu brûlant les purifier comme on passe l’or au feu du creuset. Comme les apôtres au jour de Pentecôte, nous témoignerons, par notre parole ou notre silence, nous aussi chaque jour d’avantage, d’un autre langage : celui de l’amour et de la compassion, celui de l’audace et de l’adoration, celui de la confiance et de l’abandon à la volonté de Dieu qui ne veut que notre bonheur et cela pour l’éternité.

AMEN.

Fête de la Pentecôte

Lectures bibliques : Actes 2, 1-11; Romains 8, 8-17; Jean 20, 19-23

Homélie du 12 mai 2013

Prédicateur : Chanoine Jean-Claude Crivelli
Date : 12 mai 2013
Lieu : Abbaye de Saint-Maurice
Type : radio

Au Moyen Age, les artistes – poètes et musiciens – avaient souvent recours à un procédé de composition qui aujourd’hui ferait se courroucer les sociétés de droits d’auteur : le « contrafactum », que l’on pourrait traduire par « contrefaçon », « imitation », voire (mais ce serait un anachronisme) par « pastiche » ou « plagiat ». Ainsi un troubadour pouvait-il mettre sur une mélodie des paroles qu’il avait trouvées chez un poète ou bien un musicien d’Église s’approprier la mélodie d’une chanson qu’il avait entendue dans les rues, composée par un autre. Dans l’un et l’autre cas c’était rendre hommage au poète ou au compositeur que l’on copiait ou imitait.

En quelque sorte il en va de même pour notre vie de disciples du Christ. Comment en effet pourrions-nous inventer de toutes pièces notre existence chrétienne ? Celle-ci ne peut être qu’une imitation de la vie de Jésus, du moins un essai d’imitation. « Qu’aurait fait le Christ à ma place ? » : c’est la question que de nombreux spirituels nous invitent à laisser résonner en nous au fil des situations qui nous posent problème. Dans l’épreuve, l’adversité, l’échec, la maladie, la persécution, l’incompréhension de nos proches ou encore quand une décision importante doit être prise.

Le lectionnaire du Temps pascal nous donne à lire les Actes des Apôtres, lesquels ne sont pas autre chose que les paroles et les actes des premières communautés chrétiennes, tout attentives à imiter leur Seigneur dans les circonstances et les temps qui étaient les leurs, à se conformer à « tout ce que Jésus a fait et enseigné depuis le commencement, jusqu’au jour où il fut enlevé au ciel après avoir, dans l’Esprit Saint, donné ses instructions aux Apôtres qu’il avait choisis » (Ac 1, 2) – pour citer l’incipit du livre des Actes. « Se conformer », disais-je, parce qu’il s’agit bien de laisser l’Évangile donner forme à notre vie, la dynamiser, la ressusciter. Et, quand nous nous y essayons, alors nous mesurons que se produit en nous une « métamorphose », une lente transformation de notre être pour qu’il adopte ce style de vie unique – j’allais dire « inimitable » ! – cette manière de traverser le monde qui appartient au Christ. « lui qui a passé en faisant le bien » (Ac 10, 38).

La geste d’Etienne, racontée en Ac 7, traite d’une telle métamorphose ou comment le disciple ne fait rien d’autre qu’imiter son Maître et se conformer à son Évangile. « Seigneur Jésus, reçois mon esprit … ne leur compte pas ce péché. » (Ac 7 59-60). Le génie du christianisme se résume dans le pardon des péchés qui affligent notre humanité. Acte du Christ qui en Croix s’écrie : « Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font. » (Lc 23, 34). Acte du disciple, qui en est comme le troubadour et qui, dans une situation extrême, ne peut qu’imiter son Seigneur, ne rien dire qui ne vienne de Lui et proférer le seul chant qui convienne en de telle circonstance : s’en remettre totalement à Dieu et remettre ses bourreaux à Celui-là seul qui peut pardonner. Car bien sûr, en dernier recours, le pardon reste toujours l’œuvre de Dieu en nous-mêmes. Pardonner c’est laisser le pardon du Christ, pardon accordé à toute l’humanité, s’accomplir en nous, se concrétiser dans ma propre vie.

Or un tel acte – acte du Christ, acte du Christ en ceux et celles qui se réclament de lui –est éminemment évangélisateur. Il résume le passage de Jésus sur terre : repris et imité par ses disciples, il ouvre le cœur de ceux qui perçoivent le génie d’un tel geste et donne de reconnaître qui est Jésus. La présence de Saul au martyre d’Etienne est ici pleine de sens. Pleine de sens également aujourd’hui l’épreuve que traversent les communautés chrétiennes du Proche et du Moyen Orient. « En ce moment, il y a beaucoup, beaucoup de chrétiens qui souffrent de persécutions dans beaucoup de pays » – commentait le pape François, ajoutant : « Lorsqu’une personne connaît vraiment le Christ et croit en lui, elle ne peut s’empêcher de communiquer cette expérience. Et si elle rencontre des incompréhensions ou des adversités, elle répond comme le Christ, avec l’amour et avec la force de la vérité ».

« Ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, eux aussi soient avec moi » (Jn 17, 24). Le lieu où le Christ nous veut aujourd’hui est celui du pardon. N’oublions pas que le Christ de la Résurrection se laisse reconnaître dans le pardon qu’il accorde aux disciples qui l’on lâché durant sa Passion, et que le pardon demeure pour les chrétiens d’aujourd’hui le lieu privilégié de la reconnaissance : reconnaître le Christ en ceux et celles qui l’imitent dans l’attente de sa venue. « Voici que je viens sans tarder, et j’apporte avec moi le salaire que je vais donner à chacun selon ce qu’il aura fait. » (Ap 22, 12).»

7e dimanche de Pâques

Lectures bibliques : Actes 7, 55-60; Apocalypse 22, 12-14.16-20; Jean 17, 20-26

Homélie du 12 mai 2013

Prédicateur : Père Dominique Fragnière
Date : 12 mai 2013
Lieu : Estavannens
Type : tv

Monseigneur, chers amis,

Depuis quelque temps, beaucoup de monde s’est mis au travail pour préparer cette messe de la septième Poya d’Estavannens. Plus le temps passait, plus nous nous réjouissions de fêter et de passer ce beau moment avec les armaillis.

Ce n’est pas étonnant que nous étions impatients d’y arriver. Cela fait treize ans que nous avons eu la dernière Poya. Et bien, cette fois nous y sommes ! Avec vous qui venez de partout et qui célébrez avec nous, nous avons le plaisir d’être rassemblés en Gruyère, près de Notre-Dame du Dah. Avec notre évêque et les armaillis, nous prions la Vierge Marie de nous garder sous sa protection.

Nous sommes ensemble, comme l’enseigne l’Evangile de ce dimanche : unis dans la foi au Christ qui nous demande d’avoir le même amour pour Lui, pour le Père et entre nous. Que notre unité soit parfaite, comme le commande Notre Seigneur. Aujourd’hui, notre unité se réalise avec vous, les télespectateurs qui êtes avec nous, grâce à la télévision.

Beaucoup d’entre vous ont déjà vécu la Poya d’Estavannens. Et pour vous autres qui venez y assister pour la première fois, vous êtes sûrement enchantés de voir le décor extraordinaire qui se trouve autour de nous. Nous vivons cette cérémonie comme dans un rêve. Nous sommes touchés de savoir qu’autant de gens se sont dévouées pour rendre cet endroit aussi plaisant. Pour terminer ces jours de fêtes, nous arrivons à ce que nous pouvons appeler le couronnement de la Poya d’Estavannens : la messe en patois.

Si la messe de la Poya est encore célébrée et chantée en patois, c’est grâce à des gens qui le parlent encore. Contrairement à ce que nous pourrions penser, le patois est encore pratiqué par beaucoup de gens. Nous sommes fiers de pratiquer cette langue reçue en héritage privilégié de nos parents. A force de l’entendre, nous nous sommes mis à le parler à notre tour. Notre mission est de le maintenir et le transmettre en héritage précieux à ceux qui viennent après nous.

En ce jour, nous fêtons les mamans. C’est l’occasion de leur dire que nous les aimons et que nous les remercions de tout ce qu’elles ont fait pour nous. Et pour celles qui se sont endormies dans leur dernier sommeil, nous savons que désormais leurs corps reposent dans les bras de notre terre et que leurs âmes sont près du bon Dieu.

Maintenant, je m’adresse à vous, beaux armaillis. Comme chaque année, vous allez monter à l’alpage et passer l’été dans les montagnes aux alentours. Depuis tôt le matin et jusqu’au soir, vous aurez beaucoup de travail : rassembler le troupeau, traire, fabriquer le fromage, entretenir le chalet, soigner le bétail, clôturer, aller d’un pâturage à un autre et encore bien d’autres occupations. Que Dieu bénisse votre travail jusqu’à l’automne, quand viendra le moment de redescendre en plaine.

En plus de tout ce que vous avez à faire, n’oubliez pas tous les jours de prendre un moment pour prier notre Seigneur et sa Mère. Ce n’est pas nécessaire de faire de longues prières, mais au moins de prendre quelques minutes le matin pour offrir votre journée à Dieu et le soir pour le remercier de tous ses bienfaits. Et puis Marie n’oublie pas ses enfants : vous pouvez l’appeler si vous avez besoin de son soutien.

« Sacrées montagnes ». Voilà le thème qui a été retenu pour cette Poya. Nous savons que la montagne est un lieu plein de mystères, de légendes et de dangers, un lieu où se croisent le bien et le mal. Et puis, dans la Bible, la montagne est le lieu où Dieu demeure et se manifeste. Vous les armaillis, il faut que vous sachiez que vous pouvez demander le secours de Dieu quand vous êtes dans l’épreuve et quand le danger vous guette. Il vous soutient dans votre travail, souvent dur et pénible. Quand vous arrivez à la fin de la journée, vous êtes certainement fatigués, mais aussi contents d’avoir fait votre beau et noble travail. En toute circonstance, faites confiance à Dieu, sinon ce n’est pas lui que vous allez rencontrer là-haut, mais le diable !

Chers armaillis, grâce à tout ce que vous faites aussi en collaboration avec la nature, vous êtes la fierté de la Gruyère. Que le bon Dieu vous bénisse, qu’il bénisse vos familles et vos amis. Qu’il bénisse tous ceux qui ont travaillé à la réussite de cette Poya et ceux qui assistent à cette messe. Que Dieu vous bénisse, téléspectateurs de Suisse romande, du Tessin, de la Belgique et de l’Irlande. Je vous souhaite une bonne journée.

Amen

Version en patois :

Monchênyeu, mè j’êmi,

Du kôtyè mê, on mache dè dzin chè chon betâ ou tâtso por inkotyi ha mècha dè la chatyima Poya d’Ethavanin. Mé le tin pachâvè, mé no no rèdzoyivan dè fîthâ è dè pachâ chi bi momim avoui lè j’armayi.

L’è pâ èthenan ke no j’èthan inpahyin dè li arouvâ, i fâ trèdz’an ke no j’an j’à la dêrire Poya. E bin, ch’ti kou no li chin ! Avoui vo ke vo vinyidè dè totè lè kotsè, no j’an le pyéji d’îthre in Grevîre, pri dè Nouthra Dona dou Dah. Avoui nouthron èvètyè è lè j’armayi, no prêyin la Viêrdze Màri dè no vouêrdâ dèjo cha protèkchyon.

No chin kemin no l’an intindu pyorintè din l’Evandjilo : uni din la fê ou Krichto ke no dèmandè d’avê le mimo amour por Li, po le Chènya è intrè no. Kemin le Chinyà le kemandè i fô ke nouthra unitâ chè parfète. Vouè, nouthra unitâ chè fâ avoui vo, lè tèlèchpèktateu, ke vo j’îhè avoui no grâthe a la tèlèvijyon.

Prà d’intrè vo l’an dza véku la Poya d’Ethavanin. E pu, vo j’ôtro ke vo li vinyidè po le premi kou, vo j’îthè achurâ intrètsantâ dè vêre le dècouâ èchtraordinéro ke li a inke outoua. L’è vretâbyamin kemin che no j’èthan din on chondzo. No chin ti totchi dè chavê k’atan dè dzin chè chon dèmenâ por rindre chi l’indrê ache akuyin. Po fourni hou dzoua dè fîthè, no j’arouvin a chin k’on pou apalâ le kornèmin dè la Poya d’Ethavanin : la mècha in patê.

Che la mècha dè la Poya pà adi îthre chèlèbrâye é tsantâye in patê, l’è grâthe a di dzin ke le dèvejon adi. A l’inkontra dè chin ke no poran moujâ, le patê l’è pâ mouâ ; on mache dè dzin le dèvejon adi. No j’an j’à la tsanthe d’aprindre le patê a la méjon; nouthrè j’anhyan è nouthrè parin le dèvejâvan intrè là. A fouârthe dè l’intindre, no no chin betâ a le dèvejâ a nouthron toua. In dè pye dè no j’avê bayi le mèyà dè lou mimo, è dè j’îthre chanyi por no, nouthrè proutso, no j’an lègâ le trèjouâ dou patê. Nouthra tâtse l’è dè to fére po l’intrètinyi è le bayi in èretâdzo a hou ke vinyon apri no.

In chi dzoua, no fîthin lè donè. L’è l’okajyon dè lou dre ke no lè j’âmin, ke no lè rèmârhyin po to chin ke l’an fê por no. E pu, hou lé ke chè chon indremête din lou dêri chono, no chan ke lou kouâ chè rèpàjon din lè bré dè nouthra têra, è ke, du j’ora, lou j’ârmè chon pri dou Bon Dyu.

Ora, i m’adrèhe a vo, bi j’armayi. Kemin ti lè j’an, vo j’alâdè poyi è pachâ le tsôtin din lè patheryà di montanyè di j’alintoua. Du le gran matin ou dèvêlené, vo j’arè on mache dè travô : alyôbâ le tropi, aryâ, trintchi, intrètinyi le tsalè è chon trin, chonyi lè bîthè, alâ d’on èthu a lôtro, è adi bin d’ôtrè j’okupachyon. Ke le Bon Dyu bènichè vouthrè travô tanty’a l’outon, kan vindrè le momin dè la rindya.

In dè pye dè to chin ke vo j’ê a fére, oubyâdè pâ dè prindre ti lè dzoua on momin po prèyi Nouthron Chinyà è cha Dona. L’è pâ nèchechéro dè prèyi grantin, ma prinyidè ou mintè kôtyè minutè ti lè matin por ofri vouthra dzornâ a Dyu, è le dèvêlené po le rèmarhyâ dè ti chè binfê. E pu, Màri àbyè pâ chin j’infan, adon vo puédè la tchirâ che vo j’ê fôta dè chon chotin.

« Chakrâye montanye », teché le tême ke l’è j’ou ratinyê po ha Poya. No chan ke la montanye è on yu pyin dè michtéro, dè lèjande è dè pèri, on yu yô chè krijon le bin è le krouyo. E pu, din la Bible, la montanye è le yu yô Dyu chè tin è chè manifèchtè. Vo lè j’armayi, i fô ke vo chatsichâ ke vo puédè dèmandâ le chèkoua dè Dyu kan vo j’îthè èprovâ, kan le dondji vo dyètè. I vo chotin din vouthron travô, la pye pâ dou tin du è pènâbyo. Kan vo j’arouvâdè a la fin dè la dzornâye, prou chur ke vo j’îthè arnâ, ma achebin kontin d’avi fê vouthron bi è noubyo travô. In totè chirkonchtanthe, fédè konfyanthe a Dyu, outramin l’è pâ Li ke vo j’alâdè rinkontrâ lé-hô, ma le dyâbyo.

Galè j’armayi, grâthe a to chin ke vo fédè, vo j’îthè la fiêrtâ dè la Grevîre. Ke le bon Dyu vo bènechè, ke bènechè vouthrè famiye è vouthrè j’êmi. Ke bènechè ti hou ke l’an travayi po la raouchête dè ha Poya è hou k’achichton a ha mècha. Ke bènechè lè tèlèchpèktateu dè la Chuiche romanda, dou Tèchin, dè la Bèljike è dè l’Irlande ke prèyin avoui no chti matin. I vo kouâjo ouna bouna dzornâye.

Amîn.»

Messe de la Poya

Lectures bibliques : Actes 7, 55-60; Apocalypse 22, 12-14.16-20; Jean 17, 20-26

Homélie du 09 mai 2013

Prédicateur : Abbé Claude Pauli
Date : 09 mai 2013
Lieu : Foyer Saint-Paul, Cologny
Type : radio

Chers résidents du Foyer St Paul, chers auditeurs d’Espace 2, en prière avec nous, très chers malades qui vous unissez à nous et que nous portons dans notre cœur,

Comme chaque année, 40 jours après Pâques, nous célébrons dans la joie l’Ascension de Notre Seigneur. Pâques et l’Ascension marquent toutes deux l’aboutissement de la mission de Jésus sur la terre et son retour vers le Père.

Parlant de cela dans un cours de catéchisme, je me souviens avec émotion du dessin d’un enfant montrant Jésus portant un vêtement lumineux, couronné d’une immense auréole, le sourire radieux, s’élevant de terre devant ses disciples. Dans ce dessin pourtant, ce qui m’avait le plus frappé, c’est que l’enfant avait dessiné, dans un ciel d’un bleu pur et limpide, 2 immenses mains ouvertes prêtes à l’accueillir. « Ce sont les mains de Dieu ? » lui ai-je demandé ? Il m’a répondu : « oui, et je serais bien content d’être à sa place. » Je ne lui ai pas posé la question à la place de qui…

Cette merveilleuse illustration de l’Ascension ne fait elle pas écho au jour du baptême de Jésus où les cieux s’ouvrirent également pour que nous puissions entendre la voix du Père retentir et nous dire : « Voici mon Fils, mon bien-aimé, en lui j’ai mis tout mon amour »

Par sa résurrection et son Ascension, Jésus fait une brêche, Il nous ouvre un passage. Il l’avait annoncé : « je pars vous préparer une place et là où je suis, je veux que vous y soyez aussi. » N’est-ce pas là une Parole pleine d’espérance, une promesse qui doit nous réjouir parce qu’elle fixe tout simplement notre destinée.

Comme les disciples, nous ne pouvons pas garder les yeux fixer au ciel. Comme au jour de la Transfiguration, ils doivent redescendre, de la même montagne d’ailleurs…

Jésus disparaît de leurs yeux mais il ne les laisse pas seuls. A ses disciples comme à chacun de nous, il nous assure de sa présence par le don de l’Esprit Saint. Chaque jour depuis Pentecôte, l’Esprit Saint nous aide à réaliser ce que Dieu attend de nous :être témoin de sa préence dans un monde qui le cherche. Le ciel nous étend ouvert, a fête de l’Ascension nous rappelle que l’éternité est déjà à nos côtés.C’est chaque jour, dès lors que la vie éternelle, vient à nous. Dans son très beau livre, « m’approche de toi fait mon bonheur » Benoît XVI écrit ceci :

« la vie éternelle est présente au milieu de notre temps, là où le face à face avec Dieu réussit. A travers notre regard sur le Dieu vivant, elle peut devenir comme le fondement solide notre âme. Comme un grand Amour, elle ne saurait plus nous être ravie par les vicissitudes de la vie, mais constitude un centre de gravité indesstructible d’où nous viennent le courage et la joie de la poursuite du chemin, même si les données extérieures sont parfois douleureuses, difficiles et j’ajouterais usantes. »

Chers résidents, chers malades, chers auditeurs, Dans la vie d’un chrétien placée sous le regard du Ressuscité et donc unifiée, le présent et l’éternité ne se trouvent pas comme le présent et l’avenir l’un à coté de l’autre ou l’un opposé à l’autre MAIS l’un imbriqué dans l’autre. Cette communion intime qui se meut en nous par la force de l’Esprit de Pentecôte nous sort de notre marasme, de notre train train quotidien, de notre soif d’avoir et nous introduit chaque jour d’avantage dans une relation toujours plus profonde au Christ, qui je nous le rappelle, nous a promis d’etre avec nous tous les jours jusqu’à la fin du monde.

Les épreuves de la vie, l’âge avançant ne doivent pas être un frein ou un obstacle à cette dynamique de vie. Au contraire : Réjouissons nous de la beauté de ce qui nous reste à vivre, battons nous pour cela. Rendons grâce à Dieu pour tout ce qu’Il nous a donné de beau à vivre. Osons le regard de la foi sur notre passé, reconnaissant les innombrables lieux où Dieu s’est manifesté à nous, parfois très secrètement et subtilement.

En ce jour de Fête, le Ciel nous est ouvert et l’Esprit Saint donne à chaque instant de notre vie un goût d’éternité. Loin de glisser vers la tombe, nous nous élevons vers le Seigneur.

Que Marie nous donne dans l’audace et l’adoration, de rayonner du Christ ressuscité afin de donner sens à notre humanité promise au Royaume.

Amen.

Ascension

Lectures bibliques : Actes 1, 1-11; Hébreux 9, 24-28; 10, 19-23; Luc 24, 46-53

Homélie du 05 mai 2013

Prédicateur : Abbé Claude Pauli
Date : 05 mai 2013
Lieu : Foyer Saint-Paul, Cologny
Type : radio

Chers résidents du Foyer St Paul, Chers auditeurs d’Espace 2, Très chers malades qui nous faites l’honneur de nous unir à nous dans la prière. Chers frères et sœurs bien-aimés de Dieu,

Nous poursuivons notre méditation des derniers chapitres de St Jean. Nous sommes à quelques heures de la passion de Jésus. L’heure ultime ou, d’une part, Jésus va accomplir sa mission rédemptrice par le don de sa vie et d’autre part, il va rejoindre le Père qui a mis en lui tout son amour. Il a probablement une apréhension humainement légitime de cette heure, en même temps largement vaincue par le désir de son passage de ce monde à son Père. Sans douter de sa finalité bienheureuse, ne nous rejoint-il pas dans la question du comment de cet instant unique de notre vie que sera notre mort ? Dès lors à chacun de nous s’adresse cette invitation de Jésus : « Ne soyez pas bouleversés et effrayés… »

C’est une forme de testament qu’Il laisse à ses disciples. Peut être est-ce là aussi une incitation pour chacun de nous à bien préciser dans nos dernières volontés non seulement ce que fut notre ligne de force durant notre existence laissant à nos proches un trésor de vie, mais aussi ce que nous souhaiterions concrètement au jour de notre encièlement….Jésus lui-même ne prend-t-il pas soin d’annoncer à ses disciples ce qui va se passer ?

Certes les disciples sont tristes de savoir que Jésus va partir. La séparation est toujours une épreuve. Et la parole de ce jour nous invite à faire preuve de compassion pour nos frères et sœurs qui souffrent de la séparation. Elle nous appelle à nous rapprocher d’eux. Elle nous invite à entourer de notre sollicitude ceux et celles qui sont dans le deuil, à écouter la souffrance de ceux et celles qui subissent la rupture d’un lien d’amitié ou d’amour. Parmi vous, chers malades, chers résidents, vous qui nous écoutés quelqu’un se sent peut-être délaissé par sa famille ou est dans l’épreuve et a l’impression que Dieu s’est éloigné de lui et qu’il n’a jamais fait retour. Si tel est le cas, en union de prière, ensemble, osons crier avec le psalmiste : « Dieu que ton visage s’illumine pour nous ».

Dès lors, le message de l’évangile d’aujourd’hui nous concerne tous car il est plein de promesse et d’espérance.

Jésus complète l’essentiel de son message déjà entamé dimanche dernier par le don du commandement nouveau : « aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés.

Précisément, Il nous invite à la confiance et à la fidélité en sa Parole, preuve concrète de notre amour à son égard. Oser lâcher prise, abandonner et tout remetre, comme lui à l’heure ultime, entre les mains du Père.

Il sait que seuls, nous n’y arriverons pas. Il envoie pour nous l’Esprit Saint qui est, selon la parole propre à St Jean, notre défenseur, à commencer par nous aider à nous défendre contre nous même et tout ce qui en nous est peur, repli sur soi, manque de confiance en soi, dans les autres, voire même parfois en Dieu, reconnaissons le humblement.

Chers résidents, chers malades, cher auditeur, c’est à chacun d’entre nous que Jésus vient redire ce matin : Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma Parole ; mon Père l’aimera, nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui.

Oser se recevoir du Père et du Fils dans l’Esprit.

C’est la trinité toute entière qui s’invite dans nos pauvres humanités et c’est l’Esprit Saint qui sans cesse nous rappelle, éveille et fait vivre dans nos cœurs les paroles de Jésus.

Dans un de ses premiers messages, notre pape François l’a rappelé en disant, je cite : « Que les fidèles suivent le Seigneur 
avec courage et fidélité ; qu’ils annoncent 
le Christ Ressuscité avec joie par la parole 
et par le témoignage de leur vie, dans le
 quotidien, qu’ils se dépouillent des
 nombreuses idoles et qu’ils adorent Jésus,
 Lui seul !

Dans cette dynamique de foi, au delà de nos fragilités, de nos lassitudes et de nos dépits, aucun jour n’est de trop, je le redis, chaque jour vécu avec le Seigneur, est un jour gagné. Au temps des actes des apôtres, nous l’avons entendu, « courage » était déjà un mot d’ordre d’attachement au Seigneur.

Nourrie par sa parole, un des premiers fruits de cette vie intime avec lui, que l’Esprit Saint nous accorde est la paix du Seigneur. La paix que Dieu nous offre est don qui baigne notre cœur dans la quiétude de nous savoir habités par Dieu qui veut, nous l’a rappelé St Jean, demeurer en nous mais qui en aucun cas n’entrera par effraction dans notre cœur.

Chers résidents du foyer St Paul, chers malades, chers auditeurs

Nous déclinons, nous vieillissons mais notre cœur lui se revêt petit à petit de l’éternelle jeunesse de Dieu.

Avec l’apôtre Jean, au jour de notre salut, nous nous extasierons devant la cité sainte, irradiée de la gloire de Dieu. De cette grande et haute muraille, nous aurons été, sur cette terrre, des pierres vivantes ayant accueilli, comme ce matin, le cœur purifié, pacifié et rempli d’amour, l’Agneau de Dieu, source de lumière pour notre vie d’ici bas déjà, et Gloire de Dieu pour l’éternité.

AMEN.

6e dimanche de Pâques

Lectures bibliques : Actes 15, 1-2.22-29; Apocalypse 21, 10-14.22-23; Jean 14, 23-29

Homélie du 28 avril 2013

Prédicateur : Abbé Claude Pauli
Date : 28 avril 2013
Lieu : Foyer Saint-Paul, Cologny
Type : radio

Chers résidents du foyer St-Paul,
Très chers malades,
Mon frère au volant, chez toi ou au travail,
vous qui nous suivez sur les ondes d’Espace 2,

Mes frères et mes sœurs bien-aimés,

Combien de fois à l’issue d’un enterrement n’entend-t-on pas les gens dire : il semble que nous sommes tous des saints le jour de notre départ de ce monde tant on s’applique à souligner les innombrables qualités de la personne défunte, omettant volontairement les zones plus sombres de sa vie. Mais au fond, n’est-ce pas là chose légitime que de ne vouloir garder que les graines d’amour, de générosité, de gentillesse qui ont poussé dans son cœur et dont nous avons été les bénéficiaires ? N’est-ce pas là un authentique acte de charité que de ne garder que le positif, laissant à Dieu seul le soin de purifier ce qui doit encore l’être, comme on passe l’or au feu du creuset ?

Plus intime encore la question pour moi que bien souvent ces jours là je me pose : que dira-t-on de toi ?

La réponse, chers frères et sœurs, est dans la mise en pratique quotidienne de la page d’évangile que nous recevons aujourd’hui.

Le Christ invite ses disciples, donc chacun d’entre nous, à nous aimer les uns les autres.

Mais il ne s’agit pas de n’importe quel amour !

Que de « je t’aime » raisonnent parfois que comme un cri d’autosatisfaction de ce que l’autre m’apporte…

Que de « je t’aime » raisonnent parfois comme un dû, bafouant la loi naturelle, au cœur d’une société qui admet tout type de relation comme légitime parce que visant soi-disant un pseudo épanouissement de la personne au détriment non avoué de son équilibre humain.

Le Christ lui nous invite à nous aimer les uns les autres COMME il nous a aimés. Il nous a aimés d’un amour sans retour jusqu’à donner sa vie pour nous. Un amour qu’il a ancré dans l’intimité avec le Père. Un amour qui ne juge pas mais qui relève et fait exister l’autre. Un amour blessé mais non désespéré devant la froideur et l’hypocrisie de ses contemporains. Un amour qui ira jusqu’au pardon dans le don de sa vie pour nous sauver.

Un des premiers témoins vivant de cet amour spécifique, nous l’avons chanté au début de cette eucharistie, c’est Joseph. Rien dans sa vie ne s’est passé comme il l’avait prévu mais il a fait confiance, ne vivant que pour Marie et l’Enfant. Il est pour chacun de nous, lorsque nous sommes face à l’imprévu, à l’inattendu, joyeux ou douloureux, un exemple de foi et d’abandon. Une brave petite dame que je visitais m’a dit : « vous savez Monsieur l’abbé, avant que l’on me prenne ma vie, je me dépêche de l’offrir au Seigneur »

Cher résident, cher malade, mon frère en humanité qui te joint à notre prière, l’amour chrétien est un amour revivifié dans la prière et nourri de la grâce des sacrements. Il met petit à petit au cœur du disciple de Jésus la capacité de voir, d’accueillir et d’aimer l’autre comme Dieu l’aime.

« La seule mesure de l’amour est d’aimer sans mesure » dit Saint Bernard.

En définitive et il n’est pas difficile de s’en rendre compte, nous ne possédons rien. Tout peut être très vite chamboulé. Seul l’amour non seulement ne peut être volé mais il peut grandir alors que nous diminuons. « Je suis une petite chose avec un cœur immense » chantait l’enfant de la rue.

Ainsi chers résidents, chers malades, chers frères et sœurs, chaque nouvelle journée devient une chance de plus de se rapprocher de Dieu en vivant au diapason de son amour. Il n’y a plus de jours perdus… Il n’y a que des jours gagnés. Comme nous l’a rappelé l’apocalypse, c’est chaque jour « que le Seigneur fait toute chose nouvelle. « Si Dieu est à nos cotés : nos nuits remplie parfois d’angoisse sont promise à un matin de Pâques.

Quoi qu’on en dise, nos résidences, nos EMS, nos hôpitaux ne sont pas des mouroirs, sinistres et tristes, où nous serions assis sur le quai du départ, attendant le train de la mort, NON !

Non, nos résidences, nos EMS, nos hôpitaux sont, excusez-moi l’invention du mot, des amouroirs, c’est à dire des lieux de vie où chaque geste, chaque regard, chaque instant passé ensemble est vécu comme un acte d’amour et d’offrande. Le travail de tant de médecins, de soignants, d’accompagnants et de bénévoles est réellement vécu comme une vocation et incarne de manière visible cette merveilleuse phrase de Mère Thérésa : « le fruit de la foi est l’amour, le fruit de l’amour est le service, le fruit du service est la paix. »

Frères et sœurs, je reviens à mon enterrement ou plutôt à mon encielement que j’espère, comme chacun d’entre vous le plus tard possible, mais je me dis que si ce jour là on dit de moi qu’au service de ceux qui m’ont été confiés, j’ai vécu le mieux possible la devise de mon ordination : Jésus, ma joie, c’est de t’aimer ! et bien j’aurai mis en pratique le trésor de l’évangile de ce jour. C’est ce que je nous souhaite à tous. Je vous aime et vous porte dans ma prière.

AMEN.

5e dimanche de Pâques

Lectures bibliques : Actes 14, 21b-27; Apocalypse 21, 1-5a;Jean 13, 31-33a, 34-35

Homélie du 21 avril 2013

Prédicateur : Abbé Nicolas Glasson
Date : 21 avril 2013
Lieu : Eglise Sainte-Thérèse, Fribourg
Type : radio

Chers frères et sœurs,

Les quelques versets du discours du Christ sur le Bon Pasteur que nous venons d’entendre disent que le Bon Pasteur, Jésus Christ, est Dieu. Et si nous lisons le début de la parabole du Bon Pasteur (Jn 10, 1-20), nous apprenons que le Christ-Dieu n’est pas seulement le Bon Pasteur de son troupeau, mais qu’il est aussi la Porte de la bergerie (Jn 10, 7). Et alors le Christ parle d’autres pasteurs, qui, en son nom, doivent, au long de l’histoire, conduire son peuple à Dieu, mais qui pour ce faire doivent passer par la Porte qu’il est lui-même, Jésus-Christ. Et si l’on tient à la fois que le Christ est le Bon Pasteur et la Porte de la bergerie, alors on peut comprendre un peu mieux la nature de la relation entre le prêtre et la communauté chrétienne que l’évêque lui confie (Cette thèse est développée par Dom Mauro-Giuseppe Lepori O. Cist, ancien Père Abbé d’Hauterive et actuel Père général des Cisterciens, dans une conférence au Séminaire de Fribourg en 2010).

Le berger qui n’entre pas par la porte qu’est le Christ, mais qui, pour entrer dans la bergerie, escalade par un autre endroit, celui-ci n’est pas un pasteur, mais un voleur et un bandit ; on pourrait même dire un abuseur. Traduisons pour les pasteurs d’aujourd’hui : le prêtre ou l’évêque qui n’entre pas en relation avec sa communauté par la porte, par le Christ, celui qui n’entretient pas sa relation avec le troupeau par le Christ, n’est pas le pasteur des brebis, mais c’est un bandit. Ce qui définit le bandit, c’est le faux accès qu’il a pour entrer en relation avec son troupeau.

En ces temps de l’Eglise où, chez nous, il est difficile d’être prêtres, il est bon de prendre conscience que la bonté du pasteur dépend de l’accès qu’il a au troupeau par le Christ, de la relation qu’il vit avec le troupeau dans le Christ. Si le pasteur rate la porte, l’unique accès légitime à sa communauté, il rate toute la relation avec elle, il rate tout son ministère, il rate tout ! C’est l’accès à la communauté qui détermine l’identité du responsable du troupeau, bon pasteur ou mercenaire.

Le Christ demande aux évêques et aux prêtres d’avoir la même relation que lui à son troupeau, d’être pour la communauté des bergers comme lui, donc des bergers qui ne convoitent pas le troupeau pour en retirer un quelconque avantage mais qui donnent leur vie pour lui. Il demande aux évêques et aux prêtres de faire-leur le destin de leur communauté, en adhérant à cette communauté jusqu’à donner leur vie, cela veut dire jusqu’à la mort, à l’image du Bon Pasteur qui devient lui-même l’Agneau immolé. Le bon pasteur n’est pas à côté, au-dessus ou au-dessous de son troupeau, mais il est avec et dans sa communauté.

C’est donc dans la juste compréhension d’accès à son troupeau et d’appartenance à la communauté dans le Christ, par une communion inconditionnelle avec le destin de cette communauté, que le prêtre d’aujourd’hui doit comprendre la nature et le sens de son ministère et de sa vocation. Mais cela veut dire que l’existence d’une communauté de foi réelle et bien vivante est nécessaire pour que le pasteur puisse exercer son ministère. En ce dimanche de prière pour les vocations religieuses et presbytérales, il est non seulement bon d’approfondir le sens du ministère presbytéral diocésain, mais il est aussi nécessaire de poser la question de la vitalité de nos communautés chrétiennes : il est bon de se demander si les pasteurs de l’Eglise ont vraiment une communauté qui les aide à devenir de bons pasteurs, une terre dans laquelle ils peuvent vraiment enraciner leur vie, leur ministère et leur vocation, pour porter le fruit d’une Eglise qui vit et fait vivre l’humanité. Il n’y a pas de pasteur sans communauté.

Chers frères et sœurs, nous comprenons que la prière pour les vocations commence par un examen de conscience dans le silence de chacun de nos cœurs de pasteurs et de fidèles. C’est la vitalité de notre foi et la ferveur de notre amour qui exercent une efficacité réelle sur l’éclosion des vocations dans l’Eglise, malgré les raisons trop humaines par lesquelles nous expliquons la raréfaction des vocations. Le pape François avertissait ainsi des évêques : « Devant la pénurie de vocations, nous faisons parfois des diagnostics de riches : riches du savoir des sciences anthropologiques modernes qui, avec leur masque de suffisance absolue, nous éloigne de l’humble prière de supplication et de demande au Maître de la moisson » (Pape François, Amour, service et humilité, Magnificat, Paris 2013, p. 15) .

Nous savons qu’il y a un peu partout en Suisse romande des cœurs priants transformés par la foi, des cœurs suffisamment pauvres pour être exaucés, des cœurs auxquels nous nous unissons aujourd’hui pour demander au Seigneur les vocations dont l’Eglise a besoin. Amen.»

4e dimanche de Pâques et Dimanche du Bon Pasteur

Lectures bibliques : Actes 13, 14.43-52 ; Apocalypse 7, 9.14b-17 ; Jean 10, 27-30

Homélie du 14 avril 2013

Prédicateur : Abbé Pascal Burri
Date : 14 avril 2013
Lieu : Eglise Sainte-Thérèse, Fribourg
Type : radio

Depuis le jour de Pâques et jusqu’à la Pentecôte, l’Eglise est en fête. Elle célèbre la résurrection de son Seigneur. Dimanche après dimanche, la liturgie nous donne à réentendre les différents récits des apparitions, Jésus se manifestant après sa mort tour à tour à Marie-Madeleine, aux disciples d’Emmaüs, aux apôtres en l’absence et en présence de Thomas et aujourd’hui à plusieurs disciples dont Simon-Pierre au bord du lac de Tibériade.

Ces récits ont une double fonction.

  1. nous convaincre d’abord à croire à l’inconcevable, à la plus grande merveille que l’on puisse imaginer : la mort n’est pas la fin de tout, car, Jésus qui était mort est vivant, des gens l’ont vu, il est le Seigneur.
  2. Nous signifier que Jésus n’a pas abandonné les siens après sa résurrection. Il accompagne son Eglise dans sa tâche, il est présent à nos côtés lorsque nous connaissons la nuit du doute, la fatigue et l’échec afin de nous redonner courage et espérance.

Certes, il ne nous est pas possible de prouver la résurrection de Jésus car par définition elle échappe à notre dimension spatio-temporelle, à l’expérience dite scientifique, mais il y a des faits, bien visibles ceux-là, qui ne peuvent que laisser perplexes et dans l’étonnement ceux qui doutent de la Bonne Nouvelle.

Les Actes des apôtres dont nous avons lu un extrait nous parlent d’hommes bien réels qui témoignent de leur foi en Jésus Vivant et Messie au péril de leur vie. Maintes fois jetés en prison, torturés, menacés d’être exécutés en cas de récidive, on les découvre qui continuent malgré tout de parler, sur les places publiques, dans les synagogues et devant les autorités, prenant des risques fous et laissant tout pour porter l’Evangile sur tout le pourtour de la Méditerranée. D’où leur vient cette force, ce besoin de le faire ? Comment expliquer que des milliers après eux iront jusqu’au martyre plutôt que de renier leur baptême,… si ce n’est parce qu’ils ont fait l’expérience de Pâques ?

Ils sont sept, nous dit l’Evangile, un chiffre symbolique pour dire les représentants de toute l’Eglise de l’époque et avec eux le premier pape, assis sur le rivage après avoir passé toute une nuit sans rien prendre, découragés, fatigués. Une façon de dire, que la tâche confiée « pêcher des hommes dans les filets de Dieu », annoncer l’Evangile à tous les hommes est une entreprise surhumaine. Et voilà que le Ressuscité leur apparaît à l’aube sur le rivage leur indiquant l’endroit où jeter les filets. Puis, après une pêche miraculeuse, voici que la table est prête et c’est Jésus lui-même qui leur donne à manger.

Le message est clair : vous cherchez Jésus ? Il est toujours avec vous, il est avec son Eglise. Il ne la laisse pas tomber. Tel le soleil levant, le Ressuscité est là, rayonnant, sur la terre ferme pour nous guider tel un phare, nous ramener à bon port. Il est notre espérance. Nous sommes invités à voir la réalité à sa lumière. Il y a des poissons, lui sait où ils sont. A nous d’écouter sa voix et de faire confiance. Il les fera tous entrer dans nos filets, 153, toutes les espèces que l’on connaissait à l’époque.

S’il est avec nous en semaine, sur nos lieux de travail et d’apostolat, il est aussi celui qui chaque dimanche nous interpelle pour refaire nos forces : « venez déjeuner ! ». Ce sera lui encore qui nous accueillera et nous servira lorsque nous aurons atteint l’autre rive.

Oui, « le Seigneur est vraiment ressuscité », il vaut la peine de lui consacrer sa vie. Depuis ce jour là, Pierre en est sûr : Sa barque était pleine, comme au premier jour, un signe qui ne trompe pas. Ce jour-là, il n’a pas hésité à se jeter à l’eau pour rejoindre le Christ sur le rivage. Puis il y eut cette rencontre intime, ce cœur à cœur, seul à seul : « m’aimes-tu, plus que ceux-ci… Sois le berger de mes brebis ! » Une belle preuve de confiance pour celui qui par trois fois l’avait renié jadis. Oui, désormais il le sait, Jésus lui a pardonné. Se sachant aimé à ce point, fort désormais de cet amour qui l’accompagnera toujours, il ira pour lui au bout du monde, jusqu’à imiter le Maître dans le don total de sa vie sur la colline du Vatican.

Et combien d’autres, frères et sœurs, qui à la suite de Pierre osent se mouiller, font qu’aujourd’hui encore, malgré l’indifférence, l’incompréhension ou l’hostilité, l’effort missionnaire de l’Eglise continue de se déployer à travers tous les continents ? Des millions, des centaines de millions de saints et saintes anonymes ! Prêtres, religieux, religieuses, catéchistes, laïcs engagés dans les mouvements et dans les associations au service de la Parole de Dieu et de la défense de la dignité humaine, prêts à plonger pour en sauver le maximum, baptisés tout simples enfin qui cherchent à être cohérents avec leur foi dans leurs choix de tous les jours. Merci, merci pour votre foi qui nous aide à croire !

Le Ressuscité, vous et moi, nous ne l’avons jamais vu. Mais tous ces hommes, toutes ces femmes, comment expliquer leur enthousiasme, leur effort, leur lutte, leur don, leur fidélité, leur persévérance si ce n’est par le fait que d’une façon ou d’une autre, ils ont fait l’expérience de Pierre, une rencontre avec le Christ qui leur a dit « Je t’aime » ?

Cette expérience n’est pas réservée à quelques privilégiés. Soyons-en persuadés, le Christ est là pour chacun de nous, qui que nous soyons, quelle que soit l’épaisseur de la nuit que nous traversons. Il nous fait signe sur le rivage. Avec lui, tout peut repartir. Donnons-lui prise sur nos vies, le voici qui déjà nous interpelle d’un ton jovial : « Venez déjeuner » !»

3e dimanche de Pâques

Lectures bibliques : Actes 5, 27b-32.40b-41; Apocalypse 5, 11-14; Jean 21, 1-19