Afghanistan: Les présentatrices TV obligées de se couvrir le visage

Homélie du 22 mai 2022 (Jn 14, 23-29)
Abbé Marc Donzé – Monastère du Carmel, Le Pâquier, FR
Le mot qui est à l’avant-scène dans l’Église ces temps-ci, c’est : synode. J’allais dire : le mot qui est à la mode ; mais ce n’est pas une mode. Le synode, c’est une composante essentielle de la vie de l’Église. C’est ou plutôt ça devrait être, car nous sommes souvent loin d’une attitude synodale.
Dans le fond – et selon l’étymologie – synode, ça veut dire : faire la route ensemble ; marcher ensemble. Ce n’est pas spontané, ni facile. Deux obstacles principaux sont sur la route : une attitude cléricale et hiérarchique, où tout est décidé d’en haut sans débat ni concertation ; et puis l’individualisme actuel dans le monde occidental.
Marcher ensemble, cela ne veut pas dire faire abstraction des chemins personnels. Cela veut dire mettre ensemble les richesses humaines et spirituelles de chaque personne, pour qu’ensemble nous nous enrichissions de cette diversité et de ce partage et que nous marchions comme un peuple vers la Jérusalem céleste, vers la ville-peuple avec ses 12 portes et ses 12 fondations portant le nom des Apôtres, vers la plénitude de la lumière, de l’amour et de l’unité. Longue marche, certes, pour conjuguer les personnes et la communion fraternelle.
Un chemin qui permette la communion de tous
Mais si je parle de synode ce matin, c’est parce que nous avons lu, dans les Actes des apôtres, le récit et surtout la conclusion du premier synode important de l’Église naissante, que l’on appelle souvent « le concile de Jérusalem ». Et c’est plein d’enseignements. D’abord, cette assemblée se réunit, parce qu’il y a un grave problème. Certains chrétiens issus du judaïsme voudraient imposer la circoncision et les lois juives aux chrétiens issus du paganisme ; attitude insupportable aux yeux de saint Paul, car en Christ s’est inauguré un chemin nouveau et il n’y a pas à revenir dans l’archéologie des prescriptions rituelles et légales. Alors, on se réunit pour trouver une solution, ou plutôt un chemin qui permette la communion de tous. Quand on se réunit, on discute, on débat : les différents avis s’expriment : Paul pour les chemins nouveaux ; Jacques pour les judéo-chrétiens.
Et puis on prie, on se met ensemble à l’écoute de l’Esprit-saint. Ce moment est très important, car il permet de trouver le chemin d’unité et de lumière, non pas dans une espèce de dentelle diplomatique, mais dans la remise ensemble de la question auprès de Celui qui est la Lumière et l’Amour.
L’Esprit-saint et nous-mêmes.
C’est ce qui permet à ce premier synode d’écrire cette superbe introduction: l’Esprit saint et nous-mêmes avons décidé… Pas nous tout seuls. L’Esprit-saint et nous-mêmes.
Et la décision est magnifique à la fois d’audace et de compromis : on renonce à imposer aux chrétiens issus du paganisme la circoncision ; on renonce aussi à leur imposer les 600 et quelques préceptes de la loi juive, on n’en garde que quatre, qui à l’époque paraissaient nécessaires. Quelle sagesse : le conflit aurait fait éclater l’Église naissante ; le chemin trouvé permet de garder l’unité, même si ce n’est pas sans difficultés. Et puis, je me plais à noter l’extraordinaire modération dans la liste des préceptes ; n’y a-t-il pas là une leçon pour aujourd’hui où fleurissent les règles, les papiers, les dispositions canoniques, les prescriptions morales à l’envi ?
Enfin, le synode ne s’est pas contenté d’écrire une lettre et de l’envoyer par la poste. Cette lettre est portée par des frères jusqu’à ses destinataires, des frères qui peuvent raconter la démarche et attester de son authenticité. Et ainsi, on s’encourage les uns les autres sur le chemin de la foi et de la vie.
En résumé : il y a un problème important ; on se réunit ; on débat ; on prie et on se met à l’écoute de l’Esprit-saint ; on trouve un chemin qui permet la communion ; on le communique en s’encourageant les uns les autres. Est-ce que cela ne devrait pas être la manière de faire des assemblées d’aujourd’hui ? Nous l’avons assez bien vécu, d’ailleurs, lors du Synode 72, dans tous les diocèses de Suisse ; et lors d’AD 2000 dans notre diocèse.
Permettez-moi un petit rêve, pour illustrer ce qui serait possible. Imaginez une assemblée paroissiale, où l’on traite des comptes et du budget. Une proposition est émise : finalement, nous sommes assez riches ; il faudrait donner la dîme à un projet dans une Église plus pauvre (ce que d’ailleurs recommandait saint Paul aux Corinthiens pour l’Église de Jérusalem). C’est un problème important, non seulement pour les finances, mais aussi pour la fraternité et la communion universelle de l’Église.
On prend alors le temps de débattre, ce qui n’est pas souvent le cas dans ce genre d’assemblée.
Puis on prie, en se mettant à l’écoute de l’Esprit. Ce qui n’est jamais le cas… hélas. Une solution se fait jour.
Alors on écrit, en toute vérité, à l’Église de NN : l’Esprit-saint et nous-mêmes avons décidé d’un geste de partage fraternel…
Si mon rêve se réalisait, ce serait un magnifique exemple de chemin synodal.
Le même rêve pourrait se vivre dans de nombreuses questions, évidemment. Par exemple, comment mettre ensemble la paroisse suisse et la mission portugaise ou italienne ou hispanophone, pour qu’il y ait non pas un catalogue de règlements et de délimitations de territoires, mais un enrichissement mutuel. Alors : débattre entre tous les acteurs, prier ensemble à l’écoute de l’Esprit, trouver un chemin à la fois fraternel et réaliste… C’est une grande conversion qui pourrait s’opérer, car on ne se contenterait plus de défendre son intérêt propre, mais on chercherait ensemble les chemins possibles de communion.
Mais revenons au point de départ. Synode, cela veut dire faire ensemble le chemin, dans la communion fraternelle. Chacun de nous devrait pouvoir se poser la question : avec qui est-ce que je fais le chemin de l’Évangile ? et avec quelle communauté ?
Et est-ce que je peux promouvoir la culture du partage et du débat ? et la prière commune à l’écoute de l’Esprit ?
Faire synode, au fond, c’est un chemin d’amour fraternel, et universel, et cela permet de recevoir le cadeau de la paix et de la joie, qui chantent au fond du cœur, comme nous dit l’Évangile de ce matin.
Amen.
6e DIMANCHE DE PÂQUES
Lectures bibliques : Actes 15, 1-2.22-29; Psaume 66, 2-3, 5, 7-8; Apocalypse 21, 10-14.22-23; Jean 14, 23-29
Le film égyptien « Boy from Heaven » de Tarik Saleh
Les conflits interreligieux au Nigéria
Les mille vies de Charles de Foucauld

Homélie du 15 mai 2022 (Jn 13, 31-35)
Chanoine Joseph Voutaz – Eglise Saint-Etienne, Sembrancher, VS
L’évangile d’aujourd’hui nous offre ce que Jésus appelle-lui même un « commandement nouveau ». Dans ce passage bien connu, Jésus est très solennel et ce qu’il dit semble lui tenir absolument à coeur !
Mais je l’avoue : lorsque j’écoute cet évangile, la première idée qui me vient à l’esprit c’est de dire à Jésus : « Regarde, ça ne marche pas ! Ce que tu nous dis, c’est irréaliste, impossible ! Tu as vu l’état de notre monde ? Tu as vu qu’en ce moment même, à quelques milliers de kilomètres, des frères chrétiens se battent entre eux sauvagement ? Cette guerre nous fait si mal… »
Et puis, plus profondément, si je veux être honnête, J’avoue que moi le premier je n’arrive pas à aimer… je ne fais pas mieux. Certes, je suis prêtre, je veux donner ma vie pour Dieu… mais j’ai tellement de peine à aimer vraiment ! C’est facile d’en parler en théorie, quand je suis en chaire, mais dans le concret du quotidien… aïe !
Jésus donne le commandement de l’amour juste avant sa mort
Alors comment faire, comment aimer ? Reprenant l’évangile, j’ai été frappé par le moment où Jésus nous donne le commandement de l’amour. Quand Jésus le prononce, il n’est pas sur une chaise longue, il ne parle pas du haut d’une chaire. C’est juste avant sa mort. Il sent que l’étau se resserre. Judas (nous dit le texte) est déjà sorti pour le trahir… Jésus va être vendu pour une somme dérisoire.
Je réalise ainsi que Jésus ne nous fait pas une théorie, un cours de morale. Il vit une situation concrète et difficile, désespérée même. Il nous livre alors une parole qui nous dépasse totalement et qu’il va signer par le don de sa vie. Le commandement nouveau est ainsi totalement lié à la croix, au fait que Jésus soit allé jusqu’à l’extrême de l’amour. Sur la croix, Jésus donne librement sa vie et nous dévoile l’amour incommensurable du Père.
Jésus ouvre un chemin nouveau, inédit
A ce moment-là, il y a quelque chose qui a totalement changé dans l’histoire de l’humanité. Pour la première fois, quelqu’un de trahi, abandonné, mis à mort de manière totalement injuste a pu aimer jusqu’au bout, sans aucune retenue. Et le don de Jésus a conduit au dimanche de Pâques et à la résurrection. Jésus a ouvert un chemin tout à fait nouveau, inédit. Lui seul pouvait le faire. Comme nous le disons dans la liturgie, « la mort a été vaincue par la vie. Quel changement ! Quel miracle !
Alors, qu’est-ce qui est « nouveau » dans ce commandement que Jésus nous donne ? » J’y vois trois choses, trois niveaux de compréhension
La première chose nouvelle, c’est la personne de Jésus même, son don d’amour, sa présence. Le texte le manifeste par un petit mot : « comme » : « … comme je vous ai aimés ». Souvent on se dit que ce comme nous invite à prendre l’exemple sur Jésus. C’est vrai, mais si on en reste là, on risque d’être assez vite découragés ! Et moi le premier ! Nous sommes si pauvres !
L’assurance que Jésus sera toujours là
En fait, derrière ce comme se cache la présence de Jésus. Quand Jésus nous dit : « … comme je vous ai aimés », il veut nous dire : Je suis là, je te donne mon coeur, ma force. Aie confiance, tu peux t’appuyer sur mon amour. Ce « comme… » est donc bien plus qu’une invitation à suivre l’exemple : c’est l’assurance que Jésus sera toujours là. Nous ne sommes plus livrés à nos propres forces, mais nous agissons désormais « Par Lui, avec Lui et en Lui »… cette formule doit bien vous rappeler quelque chose, non ?
La deuxième chose qui est nouvelle, c’est l’amour même. Je m’explique : chaque fois que nous décidons d’aimer, chaque fois que nous empruntons cette route que Jésus a ouverte, celle de l’amour jusqu’au bout, alors quelque chose change. L’amour, la décision d’aimer ouvre des routes insoupçonnées, des horizons nouveaux.
Le choix d’aimer, qui est parfois difficile et même héroïque, nous donne des énergies nouvelles et nous remplit d’une force que nous ne soupçonnions même pas ! Et quelque chose change vraiment. Par exemple, chacun(e) d’entre nous a pu être témoin de pardons donnés qui ont complètement débloqués des situations que nous pensions désespérées. Et la haine a fait place à la lumière. Oui si le manque d’amour nous tue, le choix d’aimer apporte partout clarté, joie et paix. Saint Augustin le dit dans une très belle formule : « Le péché m’avait vieilli, mais ta grâce me renouvelle ! »
La résurrection de Jésus c’est l’amour en marche
La troisième chose nouvelle, c’est l’espérance que donne ce commandement. Si, par la grâce de Jésus, de sa mort et de la résurrection, il me devient possible d’aimer, alors le monde va pouvoir changer ! La transformation du monde par l’amour n’est plus une chimère irréalisable ! C’est possible ! La résurrection de Jésus, c’est l’amour en marche !
Nous l’avons entendu dans la deuxième lecture : « J’ai vu un ciel nouveau et une terre nouvelle » « Il essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort ne sera plus. ». Si, les chrétiens, nous acceptons vraiment d’aimer, alors le monde va changer. Non par nos forces, mais avec la force de Jésus ! Non par nos idées, mais par la volonté de Jésus.
On dit parfois : « Un arbre qui tombe fait plus de bruit qu’une forêt qui pousse ». Quand un prêtre ou une figure médiatique connue est empêtrée dans une histoire d’abus, ça nous scandalise et ça nous fait bien mal. Mais cela ne peut pas couvrir le nombre incroyable des petits actes d’amour accomplis dans le silence du quotidien et qui sauvent le monde. Il y a tellement et tellement d’actes d’amour cachés… Ils ne feront jamais la une des journaux. Et pourtant c’est par eux que Jésus réalise un monde nouveau !
J’aimerais résumer et conclure. Ce qui est nouveau dans ce commandement, c’est d’abord Jésus. C’est lui qui nous donne la force, par sa présence de chaque instant dans notre coeur. Ce qui est nouveau ensuite, c’est chaque acte d’amour. Chaque fois que nous décidons d’aimer – plutôt que de faire la guerre – quelque chose change dans le monde, qui devient meilleur. Ce qui est nouveau, enfin, c’est l’espérance que nous recevons en aimant. Quand nous regardons une personne avec regard qui l’espère, en abandonnant nos jugements, alors nous lui permettons de changer !
Nous allons maintenant célébrer l’eucharistie qui est vraiment le sacrement de l’amour. Que le Seigneur nous donne à travers la communion la force de sa présence, pour que nous puissions aimer en actes et en vérité.
Et toi qui nous écoutes à la radio, nous te prenons aussi dans notre prière. Quels que soient tes joies ou tes peines, tes soucis du moment, que le Seigneur renouvelle ton coeur par sa présence et son amour. Sois béni ! Amen
5e DIMANCHE DE PÂQUES
Lectures bibliques : Actes 14, 21b-27; Psaume : 144, 8-9, 10-11, 12-13ab; Apocalypse 21, 1-5a; Jean 13, 31-33a.34-35
