Sœur Marie-Estelle Perrin, petite sœur de Jésus établie à Lausanne, au cœur du monde. (Photo: Grégory Roth)
Dossier

Charles de Foucauld: une personnalité qui inspire aujourd'hui encore

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par Grégory Roth

Marie-Estelle Perrin est une petite sœur de Jésus, établie en ville de Lausanne. Elle offre un regard contemporain sur l’héritage laissé par Charles de Foucauld.

Qu’est-ce qui vous a particulièrement marqué dans la personnalité de Frère Charles?
Son amour de Jésus. Un amour absolu qui représente le tout de sa vie. Il a écrit: «J’ai perdu mon cœur pour ce Jésus de Nazareth, crucifié il y a 1900 ans et je passe ma vie à chercher à l’imiter autant que le peut ma faiblesse». Après avoir vécu la vie religieuse dans plusieurs traditions, il a cherché un mode de vie beaucoup plus proche de la simplicité de l’Evangile.

C’est-à-dire?
Il a choisi d’être au milieu des gens et de partager la dureté de leur vie. Profondément transformé par cette parole d’Evangile: «Tout ce que vous faites à un de ces petits, c’est à moi que vous le faites». Il s’est fait suffisamment proche des petits pour qu’ils se sentent aimés et qu’ils découvrent peut-être, à travers lui, quelque chose de Jésus. C’est cet amour absolu de Dieu et cet amour des humains qui m’ont le plus parlé.

Quels aspects de sa vie peuvent encore nous inspirer aujourd’hui?
Son choix d’une vie dans le désert. Nous avons tous une idée très claire de ce qu’est le désert. Pour moi, il a toujours représenté un lieu mythique. Comme dit le Petit Prince: «Ce qui embellit le désert, c’est qu’il cache un puits quelque part».

«Nous pouvons aussi vivre le désert à Lausanne».

A partir du lieu physique qu’est le désert, Charles de Foucauld nous amène à un lieu spirituel. Il dit d’ailleurs qu’il faut passer par le désert pour se dépouiller et s’ouvrir à la présence de Dieu. Une expérience que fait Moïse, dans la Bible, lorsqu’il découvre la présence de Dieu dans un buisson ardent.

Comment décrivez-vous cette expérience?
Nous avons tous besoin de solitude et de silence pour être présents au «Présent». Nous sommes tous appelés à faire de l’espace et du vide dans nos vies. Quand, du matin au soir, nous sommes pleins d’images et de sons, il n’y a pas de place pour percevoir cette présence de Dieu. Lui, Il est là, mais nous pas, car nous sommes ailleurs. Pour vivre le désert, il n’y pas besoin d’être au Sahara. Nous pouvons aussi le vivre à Lausanne, ou n’importe où ailleurs. Tout simplement en croisant les visages dans la rue ou regardant autour de soi, c’est prendre conscience que l’on fait partie de la Création. Et cela dit déjà quelque chose de la présence de Dieu.

Quel conseil demanderiez-vous à Charles de Foucauld pour aujourd’hui?
Comme lui, qui a beaucoup lu et relu les évangiles, je dirais de savoir prendre le temps de relire les évangiles et de les accueillir afin de vivre selon ce qu’ils nous proposent. Mais surtout de pouvoir s’arrêter et se donner le temps. Car l’Evangile est le livre de chevet nécessaire pour nous remettre en piste et rectifier la trajectoire de nos vies si besoin.

La foi absolue et presque excessive de Charles de Foucauld n’est-elle pas un obstacle pour s’identifier à lui?
C’est vrai qu’il a écrit certaines choses radicales. Il fait partie de ces gens prophétiques, qui sont là pour nous bousculer et nous secouer. Ils ne sont pas là pour être imités, mais pour nous montrer une direction, que chacun va suivre ou non, selon sa personnalité et ses dons. Les prophètes ont été de tout temps un peu excessifs. Et Jésus le premier, à sa façon, l’a été. (cath.ch/gr)

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