France: Le diocèse d'Annecy justifie la mise à l'écart du prêtre franc-maçon
Prêtre ou franc-maçon, il faut choisir
Mégève, 31 mai 2013 (Apic) Il y a une incompatibilité à appartenir à la fois à l’Eglise catholique et à la franc-maçonnerie. C’est en ces termes que le diocèse d’Annecy a justifié, au cours d’une conférence de presse, le 27 mai 2013, la mise à l’écart du curé de Megève. Démettre un prêtre de ses fonctions en raison de son appartenance à la franc-maçonnerie reste une sanction exceptionnelle en France, rapporte la presse hexagonale le 28 mai 2013.
Le Père Pascal Vesin, 43 ans, curé de la station de ski huppée de Megève, restera prêtre «mais sans droit d’exercer», a annoncé le diocèse d’Annecy le 24 mai 2013. Objet d’une «excommunication temporaire», il devrait néanmoins continuer à être rémunéré pendant 6 à 12 mois. C’est le Vatican lui-même qui a demandé la mise à l’écart du prêtre en raison de sa persistance à faire partie de la franc-maçonnerie.
Dans une lettre expliquant la décision de Rome, le diocèse d’Annecy affirme que «le fait d’adhérer à la franc-maçonnerie met en cause les fondements de l’existence chrétienne. Le relativisme est au fondement même de la franc-maçonnerie. On demande à un franc-maçon d’être un homme libre, qui ne connaît aucune soumission à un dogme».
L’interdiction faite aux catholiques d’entrer en maçonnerie remonte à 1738, rappelle le journal «Le Monde». Elle a été confirmée au fil des siècles et des papes, qui ont jugé la franc-maçonnerie «contraire à la justice, à la morale naturelle», fustigeant son athéisme et le goût du secret des loges. Pour un croyant, l’appartenance à une obédience relève donc d’un «péché grave» et obère toute possibilité de recevoir des sacrements. Dans le cas de Pascal Vesin, elle lui interdit en plus d’en délivrer.
Epée de Damoclès
«Cela faisait quelque temps que j’avais cette épée de Damoclès, mais je ne pensais pas qu’ils iraient jusque-là», a réagi l’intéressé dans le quotidien français «Ouest France». Dans une longue lettre argumentée adressée aux médias, le père Vesin, se dit «blessé et triste». «Je ne veux pas salir l’Eglise. Je veux qu’elle entende les vraies questions qui lui sont posées aujourd’hui», écrit-il. «Au moment où une montée de l’obscurantisme, des intégrismes et des fanatismes est indéniable, je pense que l’Eglise devrait être plus ouverte au dialogue.»
Le Père Pascal Vesin officiait depuis 17 ans dans différentes paroisses de Haute-Savoie (Thonon-les-Bains, Annemasse et à Megève). Il avait rejoint en 2001 une loge du Grand Orient de France, première obédience franc-maçonne en France, souvent considérée comme anticléricale.
Une vision qui n’a plus lieu d’être, selon le prêtre. «Le combat entre l’Eglise et la franc-maçonnerie date de la IIIe République, ce n’est plus de mise», juge-t-il. «Je trouve une complémentarité dans la double appartenance», a affirmé Pascal Vesin, en disant apprécier le «travail sur les questions de société» du Grand Orient.
En 2010, un courrier anonyme adressé à l’évêque d’Annecy, Mgr Yves Boivineau, a révélé la double appartenance de l’ecclésiastique qui l’a d’abord niée.Après un deuxième courrier anonyme en 2011, le Père Vesin a finalement avoué être franc-maçon. «Il lui a été demandé de quitter la franc-maçonnerie pour se consacrer à son ministère de prêtre», ce que l’intéressé a refusé, a indiqué le diocèse dans un communiqué.
«Le retour de l’obscurantisme»
Réagissant à la mise à l’écart du curé de Mégève, le grand maître du Grand Orient de France, José Gulino, a évoqué un «retour de l’obscurantisme».«Je souhaite que l’Eglise évolue. On peut être prêtre et franc-maçon. Ne pas comprendre cela relève du Moyen-Age», a-t-il déclaré.
A Mégève, c’est également la stupéfaction, même si le curé avait habitué ses paroissiens à des prises de position assez iconoclastes. Il s’était par exemple prononcé en faveur de l’ordination des prêtres mariés et du mariage homosexuel.(apic/ag/cw)
