Jean-Blaise Fellay

Pourquoi les chrétiens ne sont pas dignes de pitié

Habituellement, quand quelque part dans le monde une minorité se voit pourchassée, privée de ses droits ou l’objet de massacres, une multitude de groupes de Défense des Droits de l’homme se met en action. Protestations, enquêtes journalistiques, actions politiques de tous ordres prolifèrent, et c’est bien ainsi. En ce qui concerne les chrétiens du Proche-Orient, voués à une oppression multiséculaire et maintenant directement menacés d’extinction, la dénonciation a tardé à se manifester. Elle se déploie avec une certaine langueur, quand elle n’est pas l’objet d’une franche hostilité.

Ainsi l’épisode invraisemblable de la RATP. Cette régie d’État, qui gère la publicité pour le métro parisien, a interdit la parution d’une affiche annonçant un spectacle en faveur des chrétiens d’Orient, au nom de la «laïcité». Le raisonnement avoue implicitement, que si les victimes sont des chrétiens, leur venir en aide est une atteinte à la laïcité officielle de l’État français. Laquelle, évidemment, ne s’est jamais privée d’intervenir bruyamment lorsqu’il s’agissait d’autres communautés religieuses, juives ou musulmanes.

Il ne s’agit pas d’une erreur de jugement mais d’une conviction, très répandue chez les intellectuels dits progressistes, que tous les maux du monde trouvent leur source dans la civilisation occidentale. Elle a donné naissance à deux guerres mondiales, au colonialisme, à l’exploitation du tiers-monde, à la pollution de la planète, au racisme et au capitalisme. Or à la racine de la civilisation occidentale, même si on ne veut pas l’avouer pour lui en attribuer le mérite, on trouve le christianisme. Pourquoi donc secourir une idéologie religieuse dont les conséquences sont aussi funestes? Son éviction, si pénible qu’elle puisse paraître, va dans le sens de l’histoire.

C’est ainsi que nos «progressistes» ne s’émeuvent pas de voir l’islamisme supplanter le christianisme. Malgré ses violences, cette religion est à leurs yeux moins dangereuse que la Bonne Nouvelle du Christ. Et surtout, l’Occident chrétien n’a pas fini de payer tous les crimes de son passé, quelques souffrances de plus devraient soulager sa conscience. Et qu’importe si les chrétiens d’Orient vivaient déjà là avant la naissance de Mahomet, avant l’apparition de l’Europe médiévale, des Croisades, de la découverte de l’Amérique, du colonialisme, de l’industrialisation, du capitalisme et de la mondialisation. On a toujours eu besoin de victimes innocentes pour jouer les boucs émissaires.

«Pourquoi donc secourir une idéologie religieuse dont les conséquences sont aussi funestes? " (photo: flickr/sint-katelijne-waver/CC BY-SA 2.0)
23 juin 2015 | 10:03
par Jean-Blaise Fellay
Temps de lecture: env. 2 min.
Islam (394), Persécutions (26)
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