Homélie du 2 février 2020 (Lc 2, 22-40)

Chanoine Roland Jaquenoud – Basilique de Saint-Maurice

Présentation de Jésus au TempleJournée de la vie consacréeDimanche de l’Apostolat des Laïcs

        

            « Et soudain viendra dans son Temple le Seigneur que vous cherchez », nous disait tout à l’heure le prophète Malachie dans la première lecture (Mal 3, 1). Soudain : on a l’impression de quelque chose de brusque, de rapide. De rapide, mais pas d’inattendu. Cette venue du « Messager de l’Alliance », comme l’appelle encore Malachie, est attendue, est désirée, et cela depuis longtemps. Le vieillard Siméon de l’Evangile est la figure de toutes ces générations qui l’ont attendu, désiré. C’est lui qui reçoit l’Enfant et se met au nom de tous à bénir Dieu :

« Maintenant, ô Maître souverain, tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix, selon ta parole. Car mes yeux ont vu le salut que tu préparais à la face des peuples » (Lc 2, 29-31)

            ENFIN : on a l’impression d’une grande joie, dans grand soulagement. Enfin Il est là, là, dans son temple. Enfin le Temple, lieu symbolique de la présence de Dieu, lieu ou tous se rassemblent pour la prière et le sacrifice, reçoit dans cet enfant la présence réelle de ce Dieu qui s’est fait homme pour venir à la rencontre de tous.

                        En ce jour, Marie et Joseph viennent accomplir au temple le commandement de la loi, qui exige que tout premier né soit consacré au Seigneur. C’est pourquoi la fête que nous célébrons s’appelle dans notre église « La Présentation de Jésus au Temple ». Elle a en fait dans les différentes traditions ecclésiales plusieurs noms. On l’appelle parfois la chandeleur, en raison de la procession qu’on y fait à la lumière des chandelles et qui se déroulera ce soir dans notre basilique. On l’appelle aussi la Purification de Notre-Dame, parce que selon la loi ancienne, la femme ne pouvait entrer au Temple que quarante jours après ses couches et offrait des présents pour sa purification, ce que vient faire aussi Marie aujourd’hui.

La fête de la Rencontre

            En Orient, la fête porte un autre nom. On l’appelle la fête de la Rencontre. En ce jour, dans cet enfant porté au Temple par ses parents terrestres, Dieu vient à la rencontre des hommes, lui « la lumière qui éclaire les nations » (Lc 2, 32). Il vient à notre rencontre, il vient sur nos chemins. Ce n’est pas nous qui nous approchons de Dieu, c’est lui qui vient vers nous. Il nous rencontre sur nos chemins de vie, il nous rencontre là où nous sommes, là où nous en sommes, il nous rencontre dans nos joies, il nous rencontre dans nos souffrances. « Parce qu’il a souffert jusqu’au bout l’épreuve de sa Passion, il est capable de porter recours à ceux qui subissent une épreuve » (He 2, 18).

Dieu vient à sa rencontre, et Siméon bénit Dieu. Dieu vient à la rencontre de la prophétesse Anne et Anne se réjouit.

Anne : une belle figure de femme prophète

            Ah oui, tiens, justement, Anne. J’aimerais que nous portions un peu notre attention sur cette belle figure de femme prophète, veuve, âgée de 84 ans, qui survient dans le Temple justement au moment où Siméon prend l’enfant dans ses mains.

On nous dit qu’elle ne s’éloignait jamais du Temple, qu’elle servait Dieu jour et nuit dans le jeûne et la prière. Ce n’est pas pour rien que l’Eglise célèbre le 2 février la journée mondiale de la vie consacrée. Quelle belle figure pour les religieux et les religieuses que cette prophétesse Anne ! Elle passe sont temps dans la veille et la prière. Elle attend celui qui vient rencontrer son peuple … et finalement, elle le rencontre.

Un vrai travail de missionnaire

Mais …  elle ne fait pas que ça.

« Survenant à cette heure même, elle proclamait les louanges de Dieu et parlait de l’enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance de Jérusalem » (Lc 2, 38).

            Elle proclame les louanges de Dieu et parle de Jésus à tous ceux qui attendent – qui ont besoin – de délivrance. Elle fait un vrai travail de missionnaire de la Bonne Nouvelle. Cette année, la fête du 2 février est célébrée le dimanche consacré traditionnellement à l’apostolat des laïcs. Quelle belle coïncidence ! Anne servant Dieu jour et nuit dans le jeûne et le prière, c’est une belle figure, un bel exemple pour les religieux ; Anne, qui a été mariée, puis est devenue veuve, c’est un bel exemple pour les laïcs.

Ne pas garder pour nous la Bonne Nouvelle

            Mes frères et sœurs, tous, sans exception, nous somme appelés à servir Dieu, à prier et à témoigner. La prière n’est pas réservée à quelques moines, le témoignage n’est pas réservé à quelques super missionnaires. La prière, comme le témoignage, découlent de notre vocation de baptisés. Nous avons tous besoin de mener avec Dieu le dialogue intime de la prière, nous avons tous besoin de rencontrer celui qui vient nous rencontrer dans sa Parole, dans les sacrements, et en particulier dans l’Eucharistie, nous avons tous besoin de nous réjouir de sa présence ici et maintenant, au milieu de nous. Et nous somme tous envoyé témoigner de Lui. Tant de gens ont besoin d’être consolés, d’être libérés. Nous les premiers. Mais notre foi nous dit que notre Libérateur est présent, qu’il est là, qu’il est à l’œuvre. Nous ne pouvons par garder pour nous cette bonne nouvelle. Vous ne pouvez pas garder pour vous cette bonne nouvelle ! Allez vous aussi proclamer, parler, consoler, redonner espoir. Oui vous, vous tous !

Anne avait 84 ans : cela ne l’a pas empêché. La mission n’est pas un truc de plus dans une vie chrétienne : la mission découle de la vocation reçue le jour de notre baptême. Tu es missionnaire chez toi, dans ta famille, à ton travail, pendant tes vacances, dans ton lit d’hôpital, dans ta maison de retraite. Partout des gens ont besoin de la consolation. Alors va, console. Celui qui t’a rencontré veut aussi les rencontrer. Il vient avec toi, il vient en toi. Amen

4e Dimanche du temps ordinaire – La Présentation du Seigneur au Temple
Lectures bibliques : Malachie 3, 1-4; Psaume 23, 7, 8, 9, 10; Hébreux 2, 14-18; Luc 2, 22-40

Homélie du 26 janvier 2020 (Mt 4, 12-23)

Abbé François Dupraz – Basilique Notre-Dame, Lausanne

C’est donc aujourd’hui en Eglise le « Dimanche de la Parole de Dieu ». La « Parole de Dieu »… L’Église, en ses Conciles, en ses Papes et en ses saints a toujours tenu en très haute estime la Parole de Dieu considérée – pour parler de manière imagée – comme une véritable « source où puiser Dieu ». Une source commune à tous les chrétiens, dirais-je avec joie et reconnaissance aujourd’hui, suite à la grande Semaine de prière pour l’unité des chrétiens qui vient de se conclure.

Le Concile Vatican II en sa Constitution dogmatique sur la Révélation divine « Dei Verbum » s’exprime ainsi au sujet de la Parole de Dieu. Je cite: « Une si grande force, une si grande puissance se trouve dans la Parole de Dieu, qu’elle se présente comme le soutien et la vigueur de l’Eglise, et, pour les fils de l’Eglise, comme la solidité de la foi, la nourriture de l’âme, la source pure et intarissable de la vie spirituelle ».

Quel est mon rapport avec la Parole de Dieu ?

S’il en est ainsi – et la vie de beaucoup démontre qu’il en est ainsi… – une bonne question à se poser est dès lors la suivante : Quel est dans l’aujourd’hui de ma vie mon rapport avec la Parole de Dieu ?

« Accueillez dans la douceur la Parole semée en vous », écrit l’apôtre Jacques en son épître. Il nous revient donc en 1er lieu de l’accueillir cette Parole ; c’est à dire de l’écouter car oui, l’accueil de LA Parole se fait de prime abord écoute de cette Parole. Ecoute dans la liturgie comme aujourd’hui, fut-elle radiodiffusée; dans les écoles bibliques, la lecture personnelle de la Bible…

Ecouter donc LA Parole puis… la méditer ; la contempler. Les Pères utilisaient l’image de « mâcher » ou de « ruminer » la Parole. Ainsi de saint Augustin : « Quand – dit-il – on rappelle à la mémoire ce que l’on a entendu et qu’on y repense doucement en son cœur on devient semblable à celui qui rumine ».

Vivre la Parole

Ecouter la Parole puis la méditer, la contempler, la mâcher la ruminer (…) et enfin et surtout, 3e étape… VIVRE la Parole : « Mettez la Parole en pratique, ne vous contentez pas de l’écouter : ce serait vous faire illusion » insiste l’apôtre Jacques. « Celui – poursuit-il – qui se penche sur la loi parfaite, celle de la liberté, et qui s’y tient, celui qui l’écoute non pour l’oublier, mais pour la mettre en pratique dans ses actes, celui-là sera heureux d’agir ainsi ».

Jésus Lui-même dira alors qu’on lui faisait remarquer que sa Mère et Ses frères – entendez Ses cousins – étaient là dehors voulant le voir : « Ma mère et mes frères, ce sont ceux qui écoutent la Parole de Dieu et la mettent en pratique ». (Lc 8, 21). Sans ce « mettre en pratique », sans ce « faire » c’est à dire sans ce « vivre la Parole », tout reste illusion, construction sur le sable. On ne peut même pas dire avoir compris la Parole que l’on avait pourtant écoutée car, comme l’écrit si bien saint Grégoire le Grand – brillant pape et docteur de l’Eglise du VIe siècle – « on ne comprend vraiment la Parole que lorsqu’on commence à la mettre en pratique ».

Le devoir d’obéissance dans le Nouveau Testament, soit dit en passant, étant presque toujours vu lui-même comme une obéissance à « La Parole de Dieu ». Ainsi de saint Paul par exemple qui parle d’obéissance à l’enseignement ou d’obéissance à l’Evangile. Ainsi du Christ Lui-même dont l’obéissance s’exerce en particulier sur les paroles écrites à son sujet et pour Lui depuis les temps anciens dans la loi, les prophètes et les psaumes : « Comment -dira-t-Il alors qu’on essayait de s’opposer à Son arrestation – comment alors s’accompliraient les Ecritures d’après lesquelles il doit en être ainsi ? ». Oui, la vie de Jésus est comme guidée par un rai de lumière  que les autres ne voient pas. Un rai de lumière formé par les Paroles écrites pour Lui. Il déduit des Ecritures le « il faut » qui régit toute Sa vie.

Un trésor caché

Voilà… quelques mots et bien d’autres encore (…) en ce « Dimanche de La Parole de Dieu » pour vous donner goût je l’espère « d’accueillir dans la douceur la Parole semée en vous », de la méditer, la contempler, la ruminer, la mâcher et… de la vivre. Un trésor y est caché. Ce trésor c’est Jésus Lui-même. JE-SUS ! Saurons-nous le découvrir ? « Qui cherche trouve, qui demande reçoit, à qui frappe l’on ouvre… ».

Aussi mon appel se résume-t-il en quelques mots : Prenez la Parole avec vous ! Faites-en, vous aussi, vous surtout les jeunes la « compagne » de votre vie. Qu’elle devienne lumière de vos pas, lampe de votre route en un monde où beaucoup cheminent comme à tâtons ; cherchant le chemin; mourant de soif par trop souvent sur les rivages d’éternité…  Amen.

3e dimanche du temps ordinaire et dimanche de la Parole de Dieu
Lectures bibliques :
Isaïe 8, 23b–9, 3; Psaume 26, 1, 4abcd, 13-14; 1 Corinthiens 1, 10-13.17; Matthieu 4, 12-23

Homélie du 19 janvier 2020 (Mc 16, 9-18)

Abbé Richard Arnold – Abbatiale de Romainmôtier, VD

Matinée œcuménique

Ceux qui l’avaient contemplé ressuscité c’étaient Marie-Madeleine et les deux disciples d’Emmaüs. Comment croire une femme qui revient du tombeau et deux compagnons en chemin pour aller à la campagne ! Ce n’est pas très crédible.

Pourtant ils sont les premiers témoins et premiers messagers du Christ ressuscité. Les Onze auront droit, eux, à de vifs reproches : leur incrédulité et la dureté de leurs cœurs. Après ces reproches, merveille ! Jésus va leur confier une mission : destination le monde entier, but proclamer l’Evangile à toute la Création … Mission impossible ! Au-delà des forces humaines.

Jésus va les rassurer en leur faisant entrevoir les résultats de leur travail apostolique : expulser des démons, parler en langues nouvelles, prendre des serpents, sans mal boire du poison, guérir des malades.

En mon Nom !

Jésus est un Oriental, il parle en images. En dépassant « la lettre » on va découvrir le mot le plus important : En mon Nom.

Oui, en mon Nom : Expulser les démons de la perversité et de l’asservissement – Exprimer un langage nouveau : vérité, espoir, tendresse, par le dialogue – Surmonter tous dangers – Échapper au poison de la violence, de l’injustice, du malentendu – Guérir les corps et les cœurs blessés, leur apporter paix, vie.

En mon Nom !

Présence invisible mais active de Jésus

Puis Jésus leur fera constater qu’il travaille avec eux et confirme la Parole par des signes. Parti, il est toujours présent, présence invisible mais active. Il l’avait promis au cours du dernier repas et lors de son départ : « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps. » Tous les jours !

C’est pourquoi les signes énumérés ne sont pas réservés aux premiers âges de l’Eglise. Ils sont toujours d’actualité, avec d’autres.

Ayant accompli sa mission Jésus souhaite que son œuvre se poursuive : que toute la Création connaisse l’amour du Père par l’envoi de son Fils.

Un chemin sûr vers Dieu

Croire sera non adhérer à une doctrine, à une idéologie mais à une personne : Jésus-Christ vivant ! Vivre une vraie relation d’amour avec lui qui se prolonge dans l’amour des autres. L’originalité de la foi chrétienne c’est l’unité des deux commandements, des deux amours, des deux services. Dieu et l’homme s’y retrouvent entièrement. Et même, il n’y a qu’un chemin sûr vers Dieu, c’est le service humble du prochain.

La prière de Jésus

Et pour la réussite de la poursuite de son œuvre Jésus a prié : « Que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi. Qu’ils soient un en nous, eux aussi, pour que le monde croie que tu m’as envoyé. Et que tu les as aimés comme tu m’as aimé ».

Plusieurs fois par jour dans cette Abbatiale de Romainmôtier se vit un écho à cette prière : « Seigneur donne aux chrétiens de trouver leur unité en Toi. Qu’ils soient UN pour que le monde croie ».

A nous de répercuter cet écho dans notre quotidien pour ne pas risquer quelques reproches de Jésus tout en sachant qu’il respectera toujours nos choix, notre liberté.

Voilà l’Evangile, la Bonne Nouvelle, c’est toujours bon et c’est toujours neuf !