Une messe pas comme les autres
Homélie du 12 novembre 2017 (Mt 25, 1-139
Chanoine Jean-Marie Nusbaume – Carmel de Develier, JU
Au soir de leur vie, deux personnes discutent. L’une d’elles fait tout à coup cette confidence : « Toute ma vie, j’ai attendu quelque chose de beau, de grand qui transformera mon existence. Quelque chose ou quelqu’un. Aujourd’hui je n’attends plus rien. Mais je me demande si je ne suis pas passée à côté de l’essentiel à un moment ou à un autre. »
Attendons-nous la venue du Seigneur ?
Et nous, frères et sœurs ?
Attendons-nous quelque chose ou quelqu’un ou sommes-nous lassés, avec le sentiment d’être passés à côté de l’essentiel ?
Au cœur de chaque eucharistie après la consécration, l’Eglise nous invite à nous tourner vers le Christ et à proclamer : « Nous attendons ta venue dans la gloire. »
Mais, est-ce bien vrai ?
Est-ce bien vrai que nous attendons la venue du Seigneur dans la gloire ?
Ce moment a souvent été décrit comme un jour de colère et de châtiment qui a suscité
la peur de le voir advenir.
Garder le cœur en éveil
Or, « le Royaume de Dieu sera comparable à 10 jeunes filles invitées à des noces » nous dit Jésus dans l’Evangile.
Cela signifie que la venue du Seigneur comme un époux est un événement joyeux, heureux, dont il n’y a rien à craindre. Au contraire, il faut s’en réjouir.
Et pour cela, s’y préparer, garder le cœur en éveil, même si l’on est parfois endormi, comme les 10 jeunes filles de la parabole.
« Veillez donc, car vous ne savez ni le jour ni l’heure ». Tel est l’appel de Jésus hier comme aujourd’hui à ses disciples.
Pour toujours avec le Seigneur
La première communauté chrétienne attendait avec impatience le retour du Seigneur, persuadée qu’il était imminent.
Nous en avons un écho dans la 1ère lettre de saint Paul aux Thessaloniciens, dont nous avons entendu un extrait tout à l’heure.
La question était de savoir qui ressusciteraient en premier lors de la venue du Seigneur :
les défunts ou ceux et celles qui seraient encore vivants sur cette terre.
La réponse de l’apôtre est clair. Quand le Seigneur reviendra, ceux qui sont morts dans le Christ ressusciteront d’abord, puis les vivants qui seront encore là. « Tous seront pour toujours avec le Seigneur. »
Comme cette venue tardait, l’Eglise a appris à vivre, à s’organiser pour durer, au risque pour les chrétiens de se lasser d’ attendre le retour du Seigneur.
Le « oui » de l’humanité
On peut d’ailleurs se demander pourquoi le Seigneur tarde-t-il à revenir ?
Le théologien suisse, l’abbé Maurice Zundel a dit quelque chose que j’aime beaucoup
et que je cite de mémoire :
« Le Seigneur reviendra quand le dernier être humain aura fermé l’anneau des noces
de Dieu et de l’humanité. »
Ainsi le retour du Seigneur serait-il subordonné au « oui » de l’humanité, de chacune
et de chacun, à la proposition d’alliance que Dieu a scellée en son Fils Jésus.
Cela fait écho au psaume 90 repris par l’apôtre Pierre dans sa 2e lettre :
« Pour le Seigneur un jour est comme mille ans et mille ans comme un jour.
C’est pour vous permettre de vous convertir que le Seigneur prend patience. »
(2 Pierre 3,8 et Psaume 90)
Oui, Dieu patiente. Il nous laisse le temps de nous préparer. Car il n’a qu’un désir : que tous soient sauvés, que tous entrent dans la joie de son Royaume, que tous vivent de sa vie et partagent son bonheur.
D’une certaine manière, le retour du Seigneur dépend donc de nous, de notre foi, de notre désir d’entrer dans la joie de l’alliance avec Dieu.
La parabole des 10 jeunes filles racontée par Jésus retentit comme une question : sommes-nous prêts pour la rencontre ?
Quand l’époux arrive après avoir tardé, 5 jeunes filles sont prêtes à faire partie du cortège des noces. Elles ont été prévoyantes. Elles ont une réserve d’huile suffisante pour alimenter leur lampe.
Les 5 autres, insouciantes, ne sont pas prêtes. Elles n’ont plus l’huile nécessaire pour participer au cortège et à la fête. Elles trouveront portes closes quand elles arriveront
à la salle des noces.
Rester vigilants
Devant l’attente du retour du Seigneur qui se prolonge, est-ce que, mêmes parfois endormis, nous restons vigilants, disponibles pour aller vers le Seigneur quand la voix retentira : « Voici l’époux. Sortez à sa rencontre » ?
Aurons-nous encore de l’huile en suffisance dans nos lampes ? L’huile de la foi, l’huile de la confiance, l’huile du désir…
Autrement dit :
Croyons-nous vraiment que le Christ viendra dans la gloire ?
Gardons-nous le cœur et l’esprit en alerte pour guetter les signes de sa venue ?
Et pour cela, croyons-nous que le Seigneur vient déjà à notre rencontre ici et maintenant ?
Dans sa Parole, dans l’eucharistie, dans les sacrements de la foi, dans la rencontre fraternelle, dans la communauté rassemblée.
L’huile du désir de la rencontre
Avons-nous dans la lampe de notre vie l’huile du désir de rencontrer le Seigneur et de faire partie du cortège des noces de Dieu et de l’humanité ? Avons-nous le désir d’entrer dans le Royaume de Dieu pour participer au banquet nuptial ?
Si l’Eglise nous appelle à proclamer ainsi la grandeur du mystère de la foi au cœur de l’eucharistie, c’est pour creuser en nous un désir aussi vaste que les promesses de Dieu. C’est pour nous tourner vers l’avenir. Or, l’avenir de l’humanité, notre avenir, c’est le Royaume de Dieu, là où nous serons pour toujours avec le Seigneur.
« Seigneur, nous attendons ta venue dans la gloire. »
C’est ce que nous pouvons attendre de plus beau, de plus grand, d’essentiel et qui transformera notre existence.
Alors, frères et sœurs, veillons, pour ne pas risquer de manquer la rencontre !
32e dimanche du Temps ordinaire – Année A
Lecture bibliques : Sagesse 6, 12-16; Psaume 62, 2, 3-4, 5-6, 7-8; 1 Thessaloniciens 4, 13-18; Matthieu 25, 1-13
Les papes et la franc-maçonnerie
Légal? Moral?
Semper reformanda
Ma soeur la mort
Denis Müller
Denis Müller est professeur honoraire d’éthique de l’Université de Genève, où il a pris sa retraite en 2013. Il a enseigné également à l ‘Université de Lausanne depuis 1988. Né à Neuchâtel en 1947, il est pasteur de l’Eglise réformée depuis 1971. Il a exercé le ministère pastoral à Neuchâtel, à l’Eglise suisse de Londres et à Serrières. Marié, il est père de trois grands enfants et grand-père six fois. Son œuvre scientifique se compose d’une vingtaine de livres, d’une vingtaine de collectifs et d’un total de près de 400 publications.
Ses deux ouvrages les plus récents s’intitulent Dieu. Le désir de toute une vie, Genève, Labor et Fides, 2016; et La marche en avant de l’écrevisse. Mémoires d’un théologien à livre ouvert, Vevey L’Aire, 2019. Il est l’auteur de nombreux articles et interventions dans les médias et sur son site personnel.
Il dirige la collection Etudes de théologie et d’éthique chez Lit Verlag à Münster (Allemagne). Il a notamment enseigné et donné des conférences en Afrique du Sud, au Cameroun, au Canada, en Chine, en France et au Mexique.
Homélie du 5 novembre 2017 (Mt 23, 1-12)
Chanoine Thomas Rödder – Basilique de Saint-Maurice
Si nous avions à résumer les textes d’aujourd’hui en quelques courtes phrases, nous pourrions dire par exemple : «Ne soyez pas hypocrites. Conformez donc vos conduites à ce que vous dites. Soyez vrais. » Ce rappel à l’ordre s’adresse à nous tous. Dans l’Évangile, Jésus nous montre les pièges de l’autorité. S’adressant à la foule, il dénonce les comportements des scribes et des pharisiens. Mais ce qu’il dit pour eux vaut aussi pour chacun de nous. Qu’il s’agisse des autorités religieuses, politiques ou parentales, ces pièges sont les mêmes.
Les tentations sont devant nous
Plus qu’une leçon de morale élémentaire, Jésus veut ici creuser profondément les fondations solides d’une vraie personnalité. Nous vivons trop souvent à la surface de nous-mêmes, nous contentant de bonnes paroles ou de stériles critiques, parlant et ne faisant pas, masquant notre vide intérieur sous d’inutiles bavardages. Car les trois tentations pharisiennes sont avant tout les nôtres.
– Dire et ne pas faire. Qui d’entre nous peut prétendre à un parfait accord entre son idéal et sa conduite réelle, entre sa pensée et ses actes ?
– Vouloir dominer. Il n’y a pas que les scribes du premier siècle à faire preuve d’autoritarisme. Que de fois ne sommes-nous pas absolument sûrs de détenir la vérité, d’avoir raison, d’imposer nos points de vue, de devoir redresser les torts… des autres ?
– Se faire remarquer. La recherche des premières places, la vanité vestimentaire ne sont pas les défauts des seuls notables de l’ancienne Jérusalem. Qui de nous ne se laisse pas aller à de ridicules glorioles, à la course aux honneurs ou aux privilèges ? S’il n’est plus question « de phylactères et de franges très longues », la marque de voiture, les vacances de standing, le « look » les remplacent bien. Chacun de nous peut trouver ainsi sa manière à lui, très subtile, de tomber dans ces travers pharisiens.
Des attitudes positives
Mais, positivement, Jésus nous invite à adopter d’autres attitudes :
– La fraternité vraie : vous êtes tous frères. Au lieu de nous draper dans nos différences et dans nos titres (ecclésiastiques ou autres) bien ronflants, nous sommes invités à regarder chacun comme notre égal, et l’aimer vraiment comme un frère.
– La simplicité. N’appelez personne votre Père sur la terre : car vous n’en avez qu’un, le Père céleste. Dieu seul est Dieu, lui seul a droit à nos hommages. Est-ce à dire qu’il ne faut jamais appeler quelqu’un « père, ou pasteur » ? Ce serait là une lecture intégriste de l’évangile. Mais revendiquer ces titres comme un honneur sans les vivre comme un service, là est la faute.
– Le service. Le plus grand parmi vous sera votre serviteur. Le sens du service pour Jésus n’est pas du tout humiliant. C’est être grand que d’être serviteur. C’est devenir comme Dieu, qui par l’incarnation et l’abaissement du Fils, s’est fait notre serviteur.
Personne n’est plus heureux que celui qui sait aimer activement ses frères. Oui, vraiment, lorsque nous prenons en nos mains le corps livré, la coupe du sang versé du Christ Jésus, il n’y a plus chez nous de maître ou de seigneur, mais la grande joie de nous aimer sans se préoccuper de qui pourrait être le plus grand. Car Seul est grand Celui qui, par pure grâce, fait de nous ses filles, ses fils.
31e DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE – Année A
Lectures bibliques : Malachie 1, 14b – 2, 2b.8-10; Psaume 130, 1, 2, 3; 1 Thessaloniciens 2, 7b-9.13; Matthieu 23, 1-12
