Homélie du 11 septembre 2016 (Lc 15,1-32)

Père Patrice Gasser – Monastère des Bernardines, Collombey-Muraz, VS

 

Chers frères et sœurs,

Ce qui est sûr c’est que Jésus a surpris ses contemporains. Il a fâché les pharisiens par les libertés qu’il prenait avec les habitudes juives, et il a réjoui les publicains en leur parlant et en mangeant avec eux. Il est venu non pas pour les justes – mais est-ce qu’il existe un seul être humain parfaitement juste ?- non, il est venu pour les pécheurs, et il a voulu se faire proche d’eux.

Les trois paraboles du chapitre 15 de Luc expriment ce cœur de Dieu qui veut retrouver les pécheurs et met tout en œuvre pour les retrouver. A travers ces histoires, Jésus parle d’un Dieu prêt à mettre sans-dessus-dessous sa maison pour trouver quelque chose d’important, un Dieu désireux de marcher des kilomètres pour retrouver la brebis perdue, la prendre tendrement sur ses épaules et la ramener au bercail, un Dieu Père qui court à la rencontre de son fils et invite son ainé à entrer dans la fête puisque celui qui était perdu a été retrouvé. Et alors la joie éclate parce que Dieu est heureux de retrouver la personne perdue et de la nourrir prêt de son cœur.

Fourvoyés dans leurs petits calculs

La brebis par ignorance s’est perdue, le Fils cadet a cru qu’il trouverait le bonheur en dépensant son argent loin de sa famille, le fils aîné n’a pas reconnu l’amour de son Père. Tous se sont fourvoyés dans leurs petits calculs, mais Dieu est prêt à tout pour leur révéler son amour, son cœur veut aller plus loin que notre justice et à la fin, Il est allé à l’extrême : son Fils s’est donné totalement par amour, il nous a fait miséricorde en acceptant de mourir sur une croix.

La terre crie parce que le péché dégrade

Le pape François a senti l’importance de cette miséricorde qui se déverse sur les croyants aujourd’hui et il a proclamé une année jubilaire pour se rapprocher ainsi de Dieu tel qu’il est. Aux chefs de la mafia et à nous tous il rappelle que Dieu veut notre conversion et qu’il est prêt à nous pardonner tout péchés. Il parle de la miséricorde entre humains ( quand il y a une mésentente, un conflit, une blessure entre familles ou entre pays )  Et dernièrement il a parlé de la miséricorde que nous avons à exercer envers la création, notre maison commune. La terre crie parce que le péché dégrade, défigure et détruit la création ; nous avons transformé ce jardin luxuriant en des étendues surexploitées, polluées, désertes et arides, et cela même en Valais avec le mercure et d’autres produits. A cause de notre désir désordonné de consommer, et notre orgueil moderne, nous consommons plus que nécessaire et nous encombrons nos maisons de gadgets superflus.

« Le chemin est simple »

Nous avons à nous réconcilier avec la création déséquilibrée qui nous blesse, et avec nos frères et sœurs qui manquent du nécessaire ; le chemin en est simple : regardons nos vies, prenons conscience de notre péché  et agissons ; l’Esprit nous aidera à changer : ne pas gaspiller le papier, l’eau et le plastique, respecter la terre nourricière, trier les déchets, utiliser les transports publiques ou partager un véhicule à plusieurs, et ouvrir nos cœurs aux pauvres.

Convertissons-nous

Paul nous rappelle qu’il a été l’un des premiers à se convertir ; il ne comprenait pas ce qu’il faisait quand il torturait les chrétiens, il agissait par ignorance, mais Dieu lui a pardonné et lui a fait confiance ; il lui a confié l’évangélisation des païens et il l’a très bien réussi en parcourant tout le territoire connu en son temps. Convertissons-nous, chérissons nos liens à la création et à nos frères et sœurs, changeons de vie et il y aura beaucoup de joie dans le ciel.


24e dimanche du temps ordinaire

Lectures bibliques : Exode 32, 7-11.13-14; Psaume 50; 1 Timothée 1, 12-17; Luc 15, 1-32

 


 

Homélie du 4 septembre 2016 (Lc 14, 25-33)

Chanoine Thomas Rödder – Basilique de Saint-Maurice

Des grandes foules faisaient route avec Jésus. Mais les paroles de Jésus que nous avons entendues maintenant sont déroutantes. Faire route avec Jésus, venir à lui pour le suivre, ce n’est pas n’importe quoi. Il a ses exigences, et il nécessite des choix ; il oblige à prendre des risques. Les gens raisonnables qui suivaient Jésus pensaient d’abord à eux (à leur intérêt, aux profits qu’ils retireraient de l’opération), et non à suivre inconditionnellement celui qui marchait vers la mort. Ils s’aimaient eux-mêmes, mais ils n’aimaient pas suffisamment le Maître. C’est pourquoi Jésus leur conseille de s’asseoir, de réfléchir avant d’entreprendre quoi que ce soit. Sinon, ils iront au-devant de graves désillusions.

Des ruptures douloureuses

Luc, en rapportant ces paroles de Jésus, pensait aux chrétiens de sa génération. Beaucoup d’entre eux avaient fait un choix radical en devenant chrétiens. Le jeune juif devenu chrétien avait sans doute été rejeté par sa propre famille comme un hérétique. Le jeune païen avait dû rompre, non seulement avec sa famille, mais avec tout son environnement social et culturel. Et ces ruptures étaient sans doute très douloureuses. Elles pouvaient entraîner, non seulement un rejet de la part de l’entourage, mais peut-être la ruine, et parfois la mort. Certains, sans doute, avaient reculé et parfois même renié leur foi. Il n’était donc pas inutile de rappeler fortement la mise en garde du Christ : « Attention, marcher avec moi, cela exige des choix difficiles. Il vaut donc mieux commencer par s’asseoir et réfléchir, avant de se lancer dans l’aventure ».

Une foi vive en Jésus mort et ressuscité

Un exemple : c’est le cas de Philémon, le destinataire de la lettre de Paul que nous lisons aujourd’hui. Paul lui renvoie, avec un petit billet, l’un de ses esclaves, Onésime, qui s’était enfui. Dans la bonne société à laquelle appartient Philémon, l’esclave c’est, comme disait Aristote, « un instrument ambulant ». Un objet dont on peut disposer à sa guise. Or, Paul demande au maître d’accueillir l’esclave fugitif comme un frère bien-aimé ! Vous pouvez imaginer ce qu’il a dû en coûter à Philémon pour se faire à l’idée que ses esclaves étaient des frères ! A la racine de ces nouveaux comportements, il ne peut y avoir qu’une foi très vive en ce Jésus mort et ressuscité en qui les nouveaux chrétiens ont placé toute leur confiance.

« Passer de la religion à la foi »

Et nous, gens des vieilles chrétientés ? Nous qui avons été élevés dans une religion qui s’est transmise de générations et générations. Nous qui pratiquons cette religion du mieux que nous le pouvons ? C’est à nous que, ce matin, le Christ s’adresse. Et qu’est-ce qu’il nous demande ? De passer de la religion à la foi. C’est-à-dire, d’une religion de tradition à une démarche personnelle : l’adhésion à Jésus-Christ. Et pour cela, de nous asseoir, de réfléchir, de voir si nous sommes prêts à payer le prix, à opérer les ruptures nécessaires. Reconnaissons que ce choix, nous ne le faisons jamais franchement. Renoncer à tout pour le Christ ? Le préférer à tout ? Nous avons peur de perdre, de nous perdre. Et cela parce que nous ne faisons pas assez confiance à Dieu, à sa parole.

Faire d’abord confiance à Dieu

Au fond, nous confondons croire et réciter le Credo. Mais croire, c’est engager sa vie. C’est déplacer la confiance : au lieu de faire confiance, en priorité, à ce que nous avons, à ce que nous sommes, à nos relations, faire d’abord confiance à Dieu. Au fond, le Christ nous invite à la rencontre, et la première question qu’il faut nous poser est celle-ci : « Est-ce que, pour moi, le Christ est une personne qui compte dans ma vie ? »

Nous avons de la chance : nous vivons à une époque où le christianisme de tradition n’est plus guère possible. Et même si, souvent encore, on naît chrétien, la vie et l’environnement social se chargent bien de nous amener à choisir d’être chrétien ou de ne pas l’être, de vivre en chrétiens ou de vivre comme tout le monde. Nous ne sommes plus portés par un environnement chrétien.

Les choix redeviennent nécessaires. Et c’est tant mieux. Ce choix de foi, c’est de vraiment marcher à la suite du Christ et de nous laisser transformer par lui. C’est avec lui que nous entrerons dans la vraie vie. Amen.


23ème dimanche du temps ordinaire

Lectures bibliques: Sagesse 9, 13-19; Psaume 89; Philémon 9b-10.12-17; Luc 14, 25-33