Homélie du 1er novembre 2015 (Mt 5, 1-12)

Chanoine Roland Jaquenoud – Abbaye de Saint-Maurice

Fête de la Toussaint

Lectures bibliques : Apocalypse  7, 2-4.9-14; Psaume 23: 1 Jean 3, 1-3; Matthieu 5, 1-12a


Mes frères, mes sœurs, des journalistes demandaient un jour à Mère Teresa de Calcutta : « On dit que vous êtes une sainte, qu’en pensez-vous ? ». On voit bien le sens de la question. Il fallait la provoquer un peu, que va-t-elle répondre ?

Elle est sans doute humble : « Non, non, je ne suis pas plus sainte qu’une autre » On s’attendait à je ne sais quoi. Mais ce qui est sûr, c’est que la réponse de la sainte fut tout à fait autre. « Mais Monsieur, dit-elle, nous avons tous le devoir de devenir des saints. Et vous avez ce devoir-là vous-même, comme moi » Mes frères mes sœurs, cette réponse de Mère Teresa nous rappelle que l’appel à la sainteté est un appel qui concerne chacun d’entre nous, quelque soit la vocation, le genre de vie qui est le notre. Tous, sans exception, nous sommes appelés à devenir des saints. Et ce jour nous rappelle que seuls les saints entrent dans la présence de Dieu, seuls les saints entrent dans la plénitude de son royaume. Dit de cette manière-là, c’est un peu inquiétant, surtout si l’on regarde notre propre vie. Et pourtant, mes frères mes sœurs, nous n’avons pas d’autre choix.

Devenir un saint ne veut pas dire accomplir de grands exploits.

Devenir un saint ne veut pas dire forcément accomplir de grands exploits. Devenir un saint, cela veut dire devenir l’image parfaite de Dieu, cette image à laquelle nous avons tous été créés. Et qui est Dieu ? Dieu, nous dit saint Jean, est amour. Devenir un saint, cela veut dire apprendre à aimer. Et un jour, lorsque nous saurons aimer parfaitement, sans aucun égoïsme, entièrement donnés, alors mes frères, mes sœurs, ce jour-là, nous entrerons dans la joie de Sa présence, nous le verrons tel qu’Il est, comme nous l’a dit saint Jean aujourd’hui, et c’est pourquoi nous serons comme Lui. Etre à l’image de Dieu, c’est aimer parfaitement. Pas une once d’égoïsme, pas une once d’absence d’amour n’entrera dans le Royaume de Dieu. Cette voie de la sainteté, mes frères mes sœurs, nous ne pouvons la parcourir qu’avec notre Seigneur. C’est lui qui nous donne grâce, par le mystère de Sa mort et de Sa résurrection, par Sa Croix glorieuse, d’apprendre chaque jour, en avançant et en reculant, en tournant à gauche et en tournant à droite, d’apprendre à aimer un peu plus et un peu mieux. C’est cela notre voie, c’est à cela que nous sommes appelés.

Une voie qui passe par le combat spirituel

L’Évangile des Béatitudes, qui est l’évangile de cette fête, nous rappelle deux choses. Cette voie vers la sainteté, c’est une voie qui passe par le combat spirituel : les pauvres de cœur, les doux, ceux qui ont faim et soif de la justice, ceux qui sont miséricordieux, ceux qui ont le cœur pur, ceux qui se battent pour la paix, ceux qui sont persécutés pour la justice, ceux qui donnent leur vie pour le Christ. Tout cela exige de nous un travail sur nous-même, tout cela exige de nous un engagement chrétien, qui n’est pas un engagement du dimanche, qui est un engagement de tout notre être pour apprendre petit à petit à Lui appartenir complètement. Mais l’Evangile des béatitudes nous rappelle aussi que cet engagement –là, que ce travail sur soi-même, que ce combat spirituel, c’est un chemin vers la joie, c’est un chemin de joie. Même dans les larmes et les souffrances du Christ en Croix, il y a au plus profond de lui la joie de faire la volonté du Père, la joie de nous aimer jusqu’au bout, la joie de nous sauver.

Un chemin de joie

Si nous acceptons de nous engager complètement sur la voie de la sainteté, si nous acceptons de prendre le chemin ouvert par les béatitudes, mes frères, mes sœurs, c’est un chemin certes rude, c’est un chemin où l’on peut pleurer, mais c’est un chemin de joie. C’est un chemin d’ouverture à ce qui est le plus important. Et le plus important dans cette vie, le plus important dans ce monde, c’est la charité, c’est l’amour. C’est finalement Dieu, qui est l’amour et la charité.

Mes frères mes sœurs, engageons nous dans ce chemin de béatitude, dans ce chemin de joie. Engageons-nous dans cette voie, pour apprendre à être véritablement heureux, d’un bonheur qui ne passera pas, d’un bonheur qui n’est pas lié à des succès, qui n’est pas lié à un état particulier, mais qui est lié au fait que petit à petit nous nous approchons de notre Dieu, que petit à petit nous devenons semblables à lui, non pas parce que nous sommes meilleurs, mais parce qu’Il nous attire à lui.

Acceptons de prendre le chemin de Ses volontés. Acceptons de dire tous les jours dans notre prière d’une manière profonde « Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel », et alors, mes frères mes sœurs, nous apprendrons vraiment, – Il nous apprendra – à aimer, Il fera de nous des saints.


 

Homélie du 25 octobre 2015

École des Missions, Saint-Gingolph, Abbé Henri Duperthuy | On imagine bien cet homme, recroquevillé sur lui-même, que personne ne regarde. Au fond de lui-même il y a pourtant cette espérance de vivre comme tout le monde, de vivre dignement. Ils sont nombreux les Bartimée, les  mendiants assis au bord du chemin qui espèrent une vie meilleure.

Notre pape François, dans son encyclique « Laudato Si » fait ce constat : « les exclus : ils sont la majeure partie de la planète, des milliers de millions de personnes.» Il suffit de penser à tous les migrants qui ont fuient la guerre, le terrorisme ou la faim et qui attendent aux portes de l’Europe. Ils veulent, comme Bartimée, simplement VIVRE. Et combien d’autres, tout proches de nous, dans nos quartiers, dans nos villages, dans nos familles parfois ! Et comme la foule qui accompagne Jésus à la sortie de Jéricho, nous voudrions faire taire leur cri d’espérance.

Dans la dynamique de la semaine missionnaire mondiale, il nous faut entendre la réponse de Jésus : Appelez-le. Que veux-tu que je fasse pour toi ? Va, ta foi t’a sauvé. Cette réponse de Jésus fait écho à l’attitude de Dieu envers son peuple en exil qui exprime son désir : « Seigneur sauve ton peuple, le reste d’Israël ! » Voici que je les rassemble des confins de la terre ; parmi eux l’aveugle et le boiteux, la femme enceinte et la jeune accouchée. Je les conduis vers les cours d’eau, par un droit chemin où ils ne trébucheront pas. Un Dieu attentif aux plus fragiles, aux plus faibles, car il est un père pour son peuple. C’est la même attitude que déploie Jésus pour redonner vie à Bartimée, et cela le conduit à devenir disciple : il suivait Jésus sur le chemin. Un chemin qui mène à Jérusalem où, par amour pour les hommes, Jésus va donner sa vie.

Pas de mission sans amour

Il n’y a pas de mission sans d’abord ce regard d’amour sur les hommes, les femmes et les enfants de ce temps, un regard de compassion sur celles et ceux qui vivent difficilement. Et ces difficultés ne sont pas que matérielles ! Sentiments d’isolement, d’insécurité, peurs, maladies, soucis pour soi-même ou des personnes proches…
Ensuite, il est nécessaire, comme Jésus le fait, de s’enquérir du besoin de l’autre : que veux-tu que je fasse pour toi ? La réponse peut parfois paraître évidente, il est indispensable que chacun nomme ce qu’il attend, ce qu’il désire au plus profond de lui, et puisse dire alors la foi qui l’habite déjà. N’oublions pas que l’Esprit Saint travaille le cœur des hommes avant nous. Alors, nous pourrons prononcer les mots qui libèrent et faire les gestes qui disent le salut de Dieu.

La mission, aujourd’hui, est bien celle-même du Christ venu témoigner de l’amour, de la tendresse, de la miséricorde de Dieu à l’égard de tous ses enfants. Elle nous invite, jour après jour, à une fraternité plus grande avec celles et ceux que la vie nous fait côtoyer.

Enfin, n’oublions pas que nous sommes, nous-mêmes, des Bartimée qui ne pouvons recevoir que de Dieu seul la vie éternelle à laquelle nous sommes appelés.AMEN»


30e DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE

Lectures bibliques : Jérémie 31, 7-9 ; Psaume 125 ; Hébreux 5, 1-6 ; Marc 10, 46-52