
L’éthique et l’efficacité économique vont-t-elles toujours de pair?
Lancement de la campagne de carême 2019

Homélie du 10 février 2019 (Lc 5, 1-11)
Chanoine Michel-Ambroise Rey – Chapelle de glace, Notre-Dame de l’ARFEC, Leysin
Chers malades, chers amis sportifs, chers auditeurs et auditrices,
Regardez cette neige abondante ici, quelle merveille ! Cette neige qui comme toutes les créatures qui sont sur cette terre désire devenir autre (cf. Maître Eckhart, sermon 23). Elle est constituée de milliards et milliards de flocons, tous différents, qui souhaitent devenir un seul tapis éclatant de blancheur qui recouvre toute notre nature ! Eh oui, la neige désire devenir pistes de ski pour nos sportifs, la neige désire devenir médicaments pour nos malades, et ici à Leysin chaque année elle désire aussi devenir chapelle de glace pour offrir à tous les visiteurs un lieu pour dire merci à notre Créateur pour tous les bienfaits qu’il nous accorde gratuitement, sans cesse et toujours.
La neige nous parle, chers frères et sœurs ! La neige se laisse transformer au gré des jours, des ambiances. Elle se laisse convertir en vapeur, en glace, en eau pour être source de vie pour tous les êtres vivants sur notre globe terrestre.
Voyons comment Jésus, qui s’adapte à chacun d’entre nous devient aussi source de vie pour nous tous et nous transforme au gré des circonstances.
Jésus enthousiasme
La foule, nous dit l’évangile de Luc, se pressait autour de lui sur le bord du lac de Génésareth et écoutait la parole de Dieu. Jésus savait les enthousiasmer en leur disant : cherchez d’abord le Royaume de Dieu et tout vous sera donné par surcroît ! Regardez les lis des champs, ils ne filent pas et ne tissent pas, pourtant le roi Salomon dans toute sa splendeur n’a jamais été aussi bien vêtu qu’eux !
Tout près de cette foule, il y avait deux barques que Jésus avait vues. Les pêcheurs en étaient descendus et lavaient leurs filets afin de préparer leur travail de la nuit prochaine. Ils ne s’intéressaient pas à écouter la Parole du Christ, étant si préoccupés par le souci de gagner les ressources quotidiennes pour l’entretien de leurs familles.
Même si Jésus peut comprendre leurs préoccupations, il n’en souhaite pas moins qu’ils puissent, eux-aussi, l’écouter.
Alors, bien que la foule se pressait de plus en plus nombreuse autour de lui, il décida de s’approcher des deux barques qui se trouvaient au bord du rivage. Il monta dans l’une d’elles qui appartenait à Simon-Pierre et lui demanda de s’écarter un peu du rivage. Puis il s’assit et de la barque il enseignait les foules. A plusieurs reprises il leur répéta : chercher d’abord le Royaume des cieux. Puis il les informa encore que des ouvriers cherchaient du travail.
Ouvriers à la recherche d’un travail
C’est alors que, pour ces ouvriers qui n’avaient plus de travail, cette rencontre entre Jésus et les foules devenait le gage d’un nouveau départ. En effet, l’enseignement de Jésus a touché le cœur d’un maître de vigne. Pris de compassion, celui-ci les embaucha et les paya d’un salaire égal qu’ils aient travaillé une heure ou toute la journée Est-ce bien juste peut-on se demander ? Là n’est pas la question principale, par contre ce que nous devons comprendre c’est que le maître de vigne est devenu lumière dans les ténèbres pour avoir rendu leur dignité à des hommes dont l’avenir se voyait désespérant.
Un père avait deux fils
Jésus raconta encore l’histoire de ce père qui avait deux fils dont l’un était soucieux de ses économies tandis que le plus jeune partit et gaspilla sans remord toute sa fortune. Mais lorsque ce dernier revint et reconnut sa faute, son père le reçut avec beaucoup d’amour. Est-ce juste peut-on encore se demander ? Là encore, il faut comprendre que le père, grâce à son amour inconditionnel pour ses enfants, a redonné l’espérance en la vie à son dernier-né lorsque celui-ci reconnut avoir eu un comportement indigne à l’égard des biens qu’il avait reçus de son père.
Les foules, en écoutant l’enseignement de Jésus, s’enthousiasmaient de plus en plus ; elles exultaient et se demandaient qui lui avait donné une telle sagesse ? La curiosité était telle que même les pêcheurs qui étaient dans les barques se mirent à tendre l’oreille.
Comme la neige de notre chapelle a besoin du froid pour être le liant entre les milliards de flocons, de même la Parole de Dieu et l’enseignement de Jésus deviennent le liant entre les foules et les travailleurs ! Ils partageront les poissons !
Le doute de Simon-Pierre
Quand Jésus eut renvoyé les foules, il dit aux pêcheurs : allez au large et jetez vos filets. Mais Simon-Pierre se mit à douter des paroles de Jésus et n’eut aucune envie de repartir au large jeter ses filets. Perplexe, il répondit : nous avons pêché toute la nuit sans rien prendre, mais sur ta Parole, j’irai quand même jeter les filets. L’ayant fait, les pêcheurs capturèrent une telle quantité de poissons que leurs filets allaient se déchirer. Nous n’avons jamais vu chose pareille ! dirent-ils. D’où lui vient cette force que même les poissons du lac lui obéissent et viennent se prendre en plein jour dans les filets ?
A cette vue, Simon-Pierre tomba aux genoux de Jésus en lui disant : éloigne-toi de moi ; Seigneur, car je suis un homme pécheur. Jésus lui dit : Sois sans crainte, désormais ce sont des hommes que tu prendras.
Simon-Pierre fait partie de ces hommes costauds, sans peur, aguerris aux travaux de nuit et à la pêche difficile. Pourtant voici qu’il doute de la Parole de Jésus. Il en est même incrédule. Cela nous semble compréhensible à première vue. Cependant de cet enseignement, retenons que Simon-Pierre a accepté de se laisser surprendre par Jésus. En tombant à genoux il a fait acte d’humilité parce qu’il a compris que dans les propos de Jésus il y avait une promesse de don. Il a compris qu’il n’appartenait pas à lui-même mais qu’il appartenait à Dieu et à son amour infini. En devenant Apôtre à la suite de Jésus, il prend la responsabilité de conduire des hommes pour les mener de l’ombre à la lumière.
Nous laisser surprendre par le Seigneur
Laissons-nous aussi surprendre lorsque le Seigneur Jésus vient au cœur de nos vies et de nos activités. Le psaume 83 dit que le Seigneur notre Dieu est un Soleil pour nous tous !
Cela veut dire qu’avec lui la lumière et la joie sont nées dans le monde. Nos soucis, nos tracas, nos maladies passeront par sa lumière. Il les change et il nous change à la clarté de l’espérance et de la rencontre. Dieu vient comme un Hôte qui nous demande de le recevoir si nous le voulons bien. Bien sûr, nous pouvons refuser cette descente de l’amour de Dieu en nous. Mais si nous ne disons pas non, il prendra des initiatives lui-même. Ainsi, il attend de nous que nous le suivions comme Simon-Pierre en nous laissant surprendre par son amour, sa grâce et sa bonté infinie.
A la suite de l’enseignement de Jésus et d’une belle pensée de Mère Teresa tirée de son livre intitulé « Fraternité universelle »: Aidez-vous les uns les autres à vivre dans l’amour de Dieu et vous répandrez le parfum de cet amour en tout lieu.
Comme le froid est le liant entre les flocons, l’enthousiasme qui est né de la Parole de Dieu devient un forum de fraternité et de don, qui a provoqué que les pécheurs ont mis à la disposition des écoutants tous les poissons qu’ils avaient péchés.
5e DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE, année B
Lectures bibliques : Isaïe 6, 1-2a.3-8; Psaume 137; 1 Corinthiens 15, 1-11; Luc 5, 1-11
La vidéo du pape: ‘traite des personnes’
Des moines fabriquent du tofu avec du soja suisse

L’éthique de la discussion et la vie politique
JMJ à Panama: une aventure chrétienne

Les deux François

Homélie du 3 février 2019 ( Lc 4, 21-30)
Chanoine Olivier Roduit – Basilique de Saint-Maurice
Il y a un temps pour tout dans la vie, et comme il n’y a rien de nouveau sous le soleil, — il ne faut pas se voiler la face, — et je n’aimerais pas le crier sur les toits, il m’a fallu bien du temps pour préparer cette homélie, sans baisser les bras, ni faire des jérémiades. Je ne dirais pas que j’ai dû boire le calice jusqu’à la lie, ni déplacer des montages, mais je craignais de soulever un tollé, de prêcher dans le désert ou de descendre dans la fosse aux lions. Sans pleurer comme une madeleine, et sachant qu’il faut gagner son pain à la sueur de son front, et qu’à chaque jour suffit sa peine, comme un seul homme, je vous apporte sur un plateau d’argent le fruit de ma méditation qui n’est pas tombée du ciel.
Chers frères et sœurs, en ces trois premières phrases de ma méditation d’aujourd’hui, vous l’aurez remarqué, j’ai utilisé 17 expressions d’origine biblique qui ont passé dans le langage quotidien sans que la majorité des gens ne se rende compte de leur origine.
Jésus lui-même usait de formules marquantes dans sa prédication. L’Évangile d’aujourd’hui en est la preuve puisqu’il cite le dicton : « Médecin, guéris-toi toi-même » et qu’il affirme plus loin que nul n’est prophète en son pays, ou plus précisément qu’« aucun prophète ne trouve un accueil favorable dans son pays ».
Dans quel contexte utilise-t-il ces expressions qui ont passé dans notre langage quotidien ? Nous l’entendions dimanche dernier, nous sommes au début du ministère public de Jésus. Sa renommée se répand. Il va enseigner dans la synagogue de Nazareth où il lit un passage du prophète Isaïe. Ensuite sa prédication commence par cette magnifique affirmation : « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre. »
Jésus provoque
Les habitants de Nazareth peuvent-ils ne pas être « remplis de fureur » à l’écoute de la provocation de Jésus leur rappelant les deux récits de la veuve de Sarepta et du lépreux Naaman ? À deux reprises, Élie et Élisée, sont sortis de la « normalité religieuse » en secourant des païens. Fallait-il raviver ces faits ? N’était-il pas préférable d’oublier que Dieu ne fait acception d’aucun homme ?
Force de la présence de Jésus
L’évocation de l’attitude leurs pères dans la foi blesse les auditeurs de Jésus. Ils attendaient de celui qu’ils connaissaient bien plus de considération. Il aurait fallu qu’il fasse chez eux des prodiges et des signes au moins aussi remarquables que ceux accomplis par lui à Capharnaüm. Ce serait la moindre des choses envers la cité dans laquelle il a grandi. Nazareth en tirerait notoriété. Pour qui se prend-il à prétendre que le récit d’Isaïe, dont il vient de faire lecture à la synagogue, s’accomplit aujourd’hui ? Le moins que l’on puisse dire est que l’audacieux discours de Jésus n’apaise aucunement les fidèles de la synagogue. Leur fureur s’exacerbe. On oublie parfois la virulence de cet épisode marquant le début du ministère du Fils de l’homme. Celui qui sera livré pour la multitude au Golgotha aurait pu être tué par les siens, jeté comme un malfaiteur depuis l’escarpement de Nazareth. Et nous ne pouvons qu’admirer la force de la présence de celui qui, « passant au milieu d’eux, allait son chemin. »
Etre des prophètes chez nous
Si Jésus n’est pas accueilli comme prophète chez lui, par toute sa prédication, il nous invite cependant à l’être chez nous. Nous devons être des prophètes chez nous.
C’est l’invitation du dimanche des laïcs d’aujourd’hui. Chaque baptisé est prêtre, prophète et roi. Nous sommes envoyés pour porter un message d’amour et de salut dans une société en quête de sens, dans nos milieux de vie et jusqu’aux périphéries existentielles. Nous sommes envoyés rejoindre tous ceux qui ont soif de paix, d’amour, de lumière.
Message de joie et de libération
Mais cette mission peut nous faire peur. En aurons-nous la force ? Nous savons au fond de nous-mêmes que nous ne sommes pas seuls puisque le Seigneur marche à nos côtés. Baptisés, nous sommes porteurs d’un message de joie et de libération qui va nous faire avancer dans le monde avec la force de l’amour. L’amour de Dieu pour nous, et celui que nous portons à nos frères et sœurs.
Saint Paul nous le rappelle avec force dans cette belle page de sa lettre aux Corinthiens. Sans l’amour, toute la science et la connaissance, et même la foi la plus forte, ne sont rien, sans l’amour, écrit-il, « je ne suis qu’un cuivre qu résonne, une cymbale retentissante ».
Nous sommes invités à devenir des prophètes de l’amour.
A devenir de ceux qui patientent, encouragent, rendent service, osent la confiance. Soyons des témoins d’espérance qui guettent l’avenir dans les humbles gestes du quotidien.
C’est en effet dans notre humble quotidien que le message dont nous sommes porteurs irrigue notre monde, atteint les cœurs, touche les femmes et les hommes de ce temps.
L’amour de Dieu qui sauve l’humanité, c’est à travers nos gestes de tous les jours qu’il réchauffe et éclaire le monde. Les oppositions surgiront, nous dit Jésus : « Aucun prophète ne trouve un accueil favorable dans son pays ». Car la Parole de Dieu reçue et vécue dérange. Mais Jésus est passé par là. Suivons-le donc avec confiance.
4e dimanche ordinaire Année C
Lectures bibliques : Jéréme 1, 4-5.17-19; Psaume 70; 1 Corinthiens 12, 31–13, 13; Luc 4, 21-30