Homélie TV du 21 avril 2019 (Jn 20, 1-9)

Abbé François-Xavier Gindrat et Markus Stalder, diacre – Eglise du Christ-Roi, Bienne

François-Xavier Gindrat :

«Vous êtes ressuscités avec le Christ!»:
saint Paul nous rappelle que nous sommes relevés de la mort par Celui qui est crucifié
et qui laisse son tombeau vide !
Grand mystère de la vie chrétienne !

Oui, Frères et Sœurs, le Christ est vraiment ressuscité!
Il est toujours présent et nous permet d’oser appréhender paisiblement notre avenir,
y compris en Église,
qui continue malgré tout d’annoncer sa Bonne Nouvelle,
synonyme de liberté et de paix.
Saint Paul est un converti, qui nous fait part avant tout de son expérience personnelle,
lorsqu’il rencontre le Christ Ressuscité.
Il nous encourage, aujourd’hui encore, à oser croire, espérer et aimer. Il invite également notre Église
à faire face en vérité aux défis de ce temps…
Ressusciter ne signifie-t-il pas, littéralement, se relever?

Cette annonce joyeuse, événement le plus important de notre foi, nous interroge encore et toujours,
particulièrement lorsque nous faisons face à un décès, une crise, une remise en question.
Elle nous bouleverse puisqu’elle nous met face à nos propres fragilités. Aussi bien dans notre vie personnelle, notre milieu professionnel, que dans notre communauté religieuse.

Comment oser fêter aujourd’hui Pâques alors que l’Église, éclaboussée, semble vaciller,
et que nous éprouvons certainement tant de honte et d’incompréhension?
Rappelons-nous les paroles de saint Paul aux Colossiens:
«Pensez aux réalités d’en haut!»

Fêter Pâques, n’est-ce pas croire que l’Église est capable elle aussi d’affronter ses démons
sous toutes leurs formes?
Fêter la Lumière de la Résurrection du Christ, n’est-ce pas croire en une Église capable
de transparence, de justice et de vérité?
La rédemption offerte par le Fils de Dieu n’incite-t-elle pas notre communauté à la pénitence,
à la conversion permanente et au renouveau structurel et spirituel, avant tout, capable enfin de remédier à ce qui produit malheureusement la culture de l’abus et du secret?
La vie plus forte que la mort n’est-elle pas un appel à une véritable compassion envers celles et ceux qui souffrent dans le silence, la culpabilité et l’indifférence?

Cette route de Pâques passe assurément par une humilité plus grande,
un retour aux sources évangéliques et une soif de justice plus intense,
au nom de notre appartenance en Celui qui nous sauve, et nous précise: « La vérité vous rendra libres! »

Et pour nous personnellement, frères et sœurs, est-ce que Pâques changera quelque chose dans notre cœur?
La résurrection nous donnera-t-elle une nouvelle densité de foi et un courage déconcertant
pour annoncer la Bonne Nouvelle?

Je ne doute pas un instant que, qui que nous soyons, ici dans cette église à Bienne ou devant notre télévision,
nous sommes habilité à écouter l’Esprit Saint et à faire preuve de l’audace et de la joie, qui a fini
par convaincre les apôtres les plus sceptiques au matin de Pâques…

Que notre Eucharistie ce matin soit fervente, que notre prière, unie à celle des téléspectateurs, portent nos soucis, nos inquiétudes et notre confiance auprès de Celui qui nous rassemble et nous sanctifie.

Amen, Alléluia !


Diacre Markus Stalder (traduction) :
Chers frères et sœurs en Christ,

Il fait encore nuit noire et pourtant, c’est déjà l’aube du jour nouveau quand Marie se met en route. A cause des événements des jours précédents, le deuil pèse lourd.

La pierre de la tombe a été roulée, mais la pierre sur le cœur de Marie Madeleine pas encore.
« On a enlevé le Seigneur de son tombeau, et nous ne savons pas où on l’a déposé ».
Voilà la première réaction, dans laquelle l’espoir en la résurrection n’est pas encore très perceptible.
Mais la nuit devient jour, l’obscurité cède la place à la lumière et la pierre roulée devient de plus en plus un signe d’espoir, pour Marie Madeleine et aussi pour les autres disciples.

Dans la Bible, le symbole de la pierre nous est toujours présenté comme un élément d’espoir:

a) A l’appel de Dieu, pendant la migration dans le désert, quand Moïse fait jaillir
l’eau d’un rocher au mont Horeb (cf. Ex 17, 6).
b) Pour Jésus, c’est Pierre le rocher, sur lequel il veut construire la communauté de l’Église
(cf. Mt 16, 18).
c) Jésus se décrit lui-même comme la pierre rejetée par les bâtisseurs. qui devient la pierre d’angle (cf. Lc 20,17).

La pierre dont nous parle aujourd’hui l’Evangile, est d’abord une pierre étanche. Elle scelle le tombeau de pierre.
C’est le dernier arrêt ! Jésus est mort. Mais au matin de Pâques, l’intangibilité, l’immuabilité de la mort, est ébranlée, brisée.
Le Christ est ressuscité, Jésus est vivant. Aucune pierre ne peut enfermer le pouvoir de la vie. La mort n’a pas le dernier mot.
Il y a de l’espoir pour une vie au-delà de la mort. Le Christ a roulé la pierre de la mort irrévocable et nous a ouvert le chemin de la vie éternelle.

Cet espoir qui va au-delà de la mort ne veut pas simplement nous consoler dans le sens d’une vie après la mort,
parce que ce serait juste un réconfort.
La vie éternelle, une vie en abondance vraiment digne de ce nom, ne commence pas après la mort sur terre.
Dans les Evangiles, Jésus le dit clairement encore et encore : la vie en plénitude commence maintenant.
Ce matin, alors que nous célébrons Pâques ensemble et après-demain dans les rencontres qui nous attendent.

Cette expérience de Pâques renforça, il y a plus de 2000 ans, les hommes et les femmes qui ont vécu avec Jésus et qui ont suivi ses enseignements.
Ils ont appris à faire face à la vie et de défendre la vie, en faisant confiance, qu’il y a un plus dans la vie.
L’expérience de Pâques veut aussi nous renforcer dans la confiance que tant de pierres qui vont presser dans notre vie se laissent déplacer.

Le Christ est ressuscité, la pierre est ébranlée. Ce message ne veut pas consoler. Il offre une espérance justifiée de guérison et de salut. Pas n’importe quand, mais déjà aussi dans cette vie.

Amen.


DIMANCHE DE PÂQUES – LA RÉSURRECTION DU SEIGNEUR

Lectures bibliques : Actes 10, 34a.37-43; Psaume 117, 1-2, 16-17, 22-23; Colossiens 3, 1-4; Jean 20, 1-9


 

Homélie du 21 avril 2019 (Jn 20, 1-9)

Abbé Lionel Girard – Chapelle de Platta, Sion

Vous savez ce qui s’est passé…

C’est par ces paroles de saint Pierre que saint Luc, dans le livre des Actes des Apôtres, nous interpelle dans la 1ère lecture. Mais que c’est-il passé au juste ?
Bien plus que l’histoire d’un homme… Avec Jésus, c’est l’histoire de L’Homme au sens du genre humain à laquelle nous sommes conviés ce matin. Car Pâques rejoint notre histoire.

Et tout change

Et l’Evangile de commencer en évoquant les ténèbres, semblables à celles du premier jour.
Mais ce matin de Pâques n’est pas comme tous les autres matins du monde…
Quand dès l’aube, Marie Madeleine se rend au tombeau, elle constate d’abord que la pierre qui en scellait l’entrée a été enlevée.

Et à partir de ce signe extérieur presque anecdotique, tout change !

Avant hier encore, face à la foule hargneuse, elle se tenait au pied de la croix de Jésus, entourée de Marie sa mère, de l’autre Marie, femme de Clopas et du disciple que Jésus aimait. Là, avant d’expirer, le cri de Jésus retentissait pour ses disciples comme la fin tragique d’une espérance, la perte inexorable de celui qui avait cheminé sur leur routes, bénissant, guérissant, libérant ceux qui ployaient sous le poids du péché… mangeant avec eux, interprétant et accomplissant la Loi d’une façon nouvelle. Malgré ses innombrables miracles, malgré toute sa bonté exercée par tous ses actes, il fut pourtant livré, arrêté, condamné à mourir sur une croix, avant d’être déposé à la hâte en marge de la ville, dans un tombeau encore neuf mis à disposition presque fortuitement.

La pierre déplacée

Quant à Marie Madeleine, malgré la peine immense de son chagrin, non seulement elle ne va pas sombrer, mais va revivre une  véritable conversion : voyant la pierre enlevée, elle court partager sa stupeur à Pierre et Jean qui, à leur tour, se mettent à courir jusqu’au tombeau. Au cœur de sa détresse, la pierre déplacée ravive sa foi.

Que s’est-il véritablement passé ?

Tandis que l’Evangile nous fait passer de l’extérieur à l’intérieur, la description n’a rien de sensationnel : les linges sont posés à plat et le suaire roulé.

Il vit et il crut : par ces mots d’une fulgurance inspirée, l’Évangéliste traduit toute la révélation du mystère pascal.

Si les Pères de l’Église ont reconnu dans la personne de Marie Madeleine, l’image de l’Église, qui est par excellence témoin de la résurrection, missionnaire de la Bonne Nouvelle et instrument du Salut, pour nous, ses enfants, la liturgie nous donne rendez-vous ce matin au saint sépulcre.  En célébrant ce mémorial comme l’acte fondateur de notre foi, toute notre existence est transformée radicalement, renouvelée en profondeur au point de devenir en Christ ressuscité, les témoins de celui qui a vaincu la mort.

Oui par sa résurrection, l’Alliance nouvelle et éternelle est inaugurée.
Par sa résurrection, il nous est proposé de devenir les bénéficiaires sans restriction de l’amour de Dieu qui se donne librement à qui le lui demande en vérité.

Un jour nouveau

Ainsi, l’espérance renaît par la foi en ce jour nouveau.

Ne cherchons pas à vouloir comprendre le comment des choses ; mais comme les disciples, entrons dans le mystère pascal qui seul éclaire nos infinis pourquoi et contemplons la vie donnée par amour pour aimer.

Devenir des veilleurs

Aujourd’hui, chercher Jésus parmi les morts n’a plus de sens et fonder nos vies sur l’ouvrage éphémère de nos mains est illusoire ;
aujourd’hui nous sommes recréés pour penser aux réalités d’en haut !

Cela ne signifie pas qu’il faille mépriser les réalités crées… mais il nous est donné de devenir des veilleurs, attentifs aux détails qui jalonnent notre quotidien de façon quasi imperceptible : souvent, ils constituent le rappel que notre histoire est sacrée, et sont pour nous cette pierre roulée ou ces linges pliés qui évoquent combien l’amour de Dieu est délicat, discret, merveilleux.

Pâques en définitive, c’est à la fois apprendre à regarder nos frères et le monde en général avec la même délicatesse qu’investit le Seigneur dans ses relations largement déployées.

Et enfin, osons entrouvrir les tombeaux de nos cœurs et de nos esprits pour que Sa gloire s’établisse et y demeure !

Amen, alleluia


DIMANCHE DE PÂQUES – LA RÉSURRECTION DU SEIGNEUR

Lectures bibliques : Actes 10, 34a.37-43; Psaume 117, 1-2, 16-17, 22-23; Colossiens 3, 1-4; Jean 20, 1-9


 

 

Homélie du 19 avril 2019 (Jn 18, 1 – 19, 42)

Chanoine Jean-Robert Allaz – Basilique Notre-Dame, Lausanne

PASSION SELON ST-JEAN

Il est incontournable ce rendez-vous avec la Croix, sur le chemin de la Passion du Christ.

Il y a plusieurs années un ami pasteur me disait « Je ne supporte pas de voir cet instrument de supplice ». Qui d’entre-nous oserait dire s’en être habitué ? Et pourtant, devant la Croix, c’est chaque Vendredi-Saint que nous sommes attendus. La musique de Bach peut être sublime, mais la trame de l’œuvre, c’est le Chemin de la Croix, depuis son jugement jusqu’à la mise au tombeau. Beauté de la musique, tragédie de l’histoire ! Non, il est impossible de sauter du dimanche des Rameaux à celui de Pâques. Pierre qui mettait en doute la passion et la mort sur la croix, Jésus le réprimandera « Arrière Satan, tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes ».

Une réponse d’amour

Alors nous voici tout penauds, au pied de la croix ! Car des misères et des souffrances, des fautes et des péchés, nous les avouons et les déposons. Qui d’entre nous oserait encore nier les maladies et la mort, les séparations de toutes sortes, les injustices et les guerres, les désespoirs et abandons, les enfants et les religieuses abusées au sein même de l’Église et tant d’autres épreuves et misères ?

« Venez à moi, vous tous qui êtes peinez sous le poids du fardeau, je vous donnerai le repos ». Ce Jésus plein de miséricorde n’a pas nié la souffrance, mais a voulu apporter une réponse d’amour, à travers ses souffrances et sa mort. Le chemin de sa croix avec tous les nôtres.

Le chemin cahoteux de nos vies

J’ai beaucoup aimé cette chapelle dans un village au-dessus du Lac Majeur où je célébrais le mariage de jeunes amis. Elle était dédiée à la « Madona delle crochette » : « la Vierge Marie des petites croix ». Attention délicate, car si nos épreuves sont difficiles à accepter et à porter, petites ou grandes, ce sont des croix sur le chemin parfois bien cahoteux de nos vies. Avec ses questions et ses interrogations.

Au pied de la Croix du Christ, ayant déposé nos fardeaux, nous pouvons alors redire notre foi en Lui : n’est-il pas le Messie – envoyé de Dieu – le Sauveur ? Mais comme il serait triste d’en rester à notre condition de pêcheurs.

Alors, confions Lui ce qui habite le fond de nos cœurs, nos Eglises, nos frères croyants et le monde que nous habitons.

Au pied de la Croix, la rencontre avec Jésus appelle au silence et à la prière. Nous déposons aussi les grandes intentions proposées par l’Eglise dans le cadre de cette Liturgie.

  • Pour l’Eglise catholique, qu’elle reste inébranlable dans la foi, fidèle à l’annonce de l’Evangile et témoin d’amour, malgré tant de critiques à son égard.
  • Pour le Pape François, notre berger, et toutes celles et ceux qui font avancer le peuple chrétien, prêtres et laïcs. Du courage, il en faut !
  • Pour tous ceux qui cherchent le chemin du baptême, les catéchumènes, dans ce temps pascal. Des enfants, des jeunes, des adultes venus de tous horizons !
  • Pour que l’Unité reste au cœur de ceux et celles qui se déclarent chrétiens. Plusieurs d’entre vous s’y engagent. Tout particulièrement avec l’Eglise protestante de ce canton.
  • Pour le dialogue avec les Juifs – nous sommes de la descendance d’Abraham et de Moïse – et pour les autres croyants, peuples de l’Islam et d’ailleurs.
  • Pour tous ceux et celles qui cheminent à la découverte de Dieu.
  • Pour ceux et celles qui organisent et dirigent les peuples, les autorités civiles, en commençant par les nôtres, dans notre Suisse artisanale de justice et de paix.

La lumière du matin de Pâques

Ensuite, dépassons la Croix et la mort du Christ, regardons vers le tombeau vide et la lumière du matin de Pâques.

Ce Dieu fidèle ne nous a pas trompés, parce que Son Fils Jésus a été fidèle à travers la souffrance et la mort, pour nous conduire au-delà de la Croix.

Des questions, nous nous en poserons encore et toujours, « Si le Christ n’était pas mort et ressuscité, notre foi serait vaine » dit Saint Paul. Pour l’instant, dans l’esprit de la liturgie pascale, suivons le Ressuscité ! La Croix ? un mauvais souvenir, incontournable dans l’Histoire du Salut et du Vendredi-Saint.

AMEN


Lecture : Jean 18, 1 – 19, 42