Homélie TV du 11 octobre 2015

L’évangile que nous venons tout juste d’entendre,

touche un point sensible:

celui de notre relation avec les biens matériels.

Certes, il ne s’agit pas d’accuser la possession de quelques biens, mais de nous laisser convier à une sagesse

qui nous libère parce qu’elle agrandit notre horizon.

Marc nous présente la rencontre

d’un homme avec Jésus sur la route.

A genoux, l’homme formule cette demande:

«Bon Maître, que dois-je faire

pour avoir en héritage la vie éternelle?»

Autrement dit, quels sont les actes bons,

toi l’enseignant, que je dois poser

pour entrer dans la vie éternelle?

Il demande à Jésus de lui enseigner les pensées,

les paroles et les gestes de bonté

qui lui permettront d’avoir accès à la vie éternelle.

 

Et Jésus va lui montrer le chemin

en l’orientant d’abord vers Celui qui est la source

et la finalité de toute bonté: Dieu, son Père.

Et pour cela, l’homme devra consentir

à quelque renoncement.

«Tu connais les commandements» lui dit Jésus.

 

Il est nécessaire que cet homme se décentre de lui-même

pour grandir dans l’amour du prochain.

«Tu aimeras ton prochain comme toi-même» (Lv 19, 18),

c’est-à-dire: tu veilleras sur la vie de ton prochain

comme tu veilles sur la tienne;

tu respecteras le corps de la femme ou du mari de ton prochain;

tu ne prendras pas le bien qui ne t’appartient pas;

sois juste et vrai;

mène une vie d’obéissance envers tes parents…

 

La réponse de l’homme est sincère:

«Maître, j’ai observé tous ces commandements

depuis ma jeunesse». Ayant posé son regard avec amour,

Jésus lui dit: « Une seule chose te manque :

va, vends tout ce que tu as,

donne-le aux pauvres et tu auras un trésor au ciel ;

puis viens et suis-moi.»

 

Jésus l’appelle au renoncement: ne plus se préoccuper

des biens à protéger et à faire croître,

mais accueillir dans la confiance

la sagesse qui vient de Dieu.

Autrement dit, laisser entrer la Parole de Dieu

au plus profond de l’âme et du corps.

Mais l’invitation de Jésus au dévouement

du prochain à la lumière de son enseignement

pour l’amour de Dieu, rend le cœur de cet homme triste.

Il possède beaucoup de richesses matérielles,

mais ne reconnaît pas la bonté de Dieu

à travers les biens qu’il a reçus.

 

Il pense que la valeur de ses actions

provient de sa seule générosité.

Ses paroles et ses actes (courir et se mettre à genoux)

ne sont pas en communion avec ses pensées.

Son cœur désire la vie éternelle qu’il ne connaît pas

et il refuse de se donner les moyens pour y parvenir.

La valeur de nos actions ne devra pas provenir

de notre seule bonté, mais elle doit toujours

et d’abord trouver sa source et sa finalité en Dieu.

Et c’est au bout d’une prière confiante et profonde

qu’elle nous est donnée;

comme nous le rappelle la première lecture:

«J’ai prié, et l’intelligence m’a été donnée.

J’ai supplié, et l’esprit de la Sagesse est venu en moi».

 

La Sagesse est don de Dieu, à demander humblement

et à recevoir avec reconnaissance, au plus profond du cœur.

Elle est la vie active de Celui

qui «nous rassasie de son amour»(le psaume).

Elle est le discernement du cœur

que nous recevons au bout d’une prière fidèle,

une existence à accueillir jour après jour.

 

En fait, mes pensées, mes paroles et mes actes

envers mon prochain doivent manifester

la foi en Jésus-Christ et mon amour pour Dieu.

Jésus, par son regard et sa parole,

nous invite au «lâcher prise» de notre orgueil,

notre amour-propre, de notre insensibilité,

de notre penchant à vouloir tout dominer

pour plonger dans l’humilité,

voie de la véritable connaissance de soi

et de la reconnaissance du prochain.

 

Cette connaissance de soi nous conduit

à la découverte «de la grandeur et de l’excellence de notre âme,

mais aussi, à notre indignité, imperfection et misère».

Et notre misère est l’instrument de la générosité de Dieu

par laquelle il exerce sa miséricorde».

Il est toujours là, à nous aimer,

prêt à nous prendre la main

que bien souvent nous lui refusons.

«Viens et suis-moi…».

Débarrassés du superficiel, accueillons son appel.

Il nous conduit, à sa suite, jusqu’à la vie éternelle.

Amen.

 

28e dimanche du temps ordinaire

Lectures bibliques :

Sagesse 7, 7-11; Psaume 89; Hébreux 4, 12-13; Marc 10, 17-30

Homélie du 11 octobre 2015

‘ Que dois-je faire pour avoir la vie éternelle? ‘

La réponse de Jésus est claire : ‘ Ne tue pas, ne vole pas, ne mens pas … Ces commandements se trouvent pratiquement dans toutes les religions, dans toutes les cultures : c’est le chemin habituel, tracé par Dieu dans la conscience des hommes, pour vivre dans ce monde en ‘hommes justes et religieux’.

‘ Eh bien, ces commandements, je les observe déjà depuis ma jeunesse … ‘ : L’homme parait vraiment sincère.

Et c’est pourquoi Jésus l’appelle à faire plus :  ‘ Une seule chose te manque : Va, vends tout ce que tu as puis viens et Suis-moi !’

Mais nous avons compris le blocage : l’homme a de grands biens et il s’en va tout triste, il n’est pas disposé à tout laisser pour suivre Jésus, il n’est pas disposé à laisser ses biens pour s’attacher seulement à Jésus.

AUJOURD’HUI, cette vie éternelle, la plupart des hommes ne s’en préoccupe plus trop. Et nous-mêmes, suivant la mentalité ambiante, nous sommes davantage intéressés à bien vivre, à bien nous soigner et à nous garantir toujours plus de confort et de bien-être, pour être heureux et pour rendre heureux ceux et celles que nous aimons.

Sans trop nous soucier des autres, sans trop nous soucier, en particulier, de nos frères et sœurs d’Afrique ou d’Orient qui fuient la guerre ou les misères de leurs pays.

Mais le pape François nous interpelle, comme le Christ a interpelé l’homme riche de l’Évangile : Acceptez d’être moins riches pour qu’il y en ait assez pour tous. Et ouvrez vos portes aux migrants qui sont sur les routes.

De fait, c’est une attitude toute nouvelle que nous sommes invités à adopter, aussi bien vis-à-vis de la Création qui nous est confiée et que nous devons mieux respecter, que vis-à-vis des ‘abandonnés et de oubliés de cette terre’, suivant l’expression du Pape François.

Cette attitude nouvelle, demandons-là au Seigneur, dans la prière, comme le jeune Salomon au début de sa royauté :

‘ Donne-nous ton intelligence, Seigneur… donne-nous ta Sagesse.

Elle vaut plus que toutes les richesses et tous les pouvoirs, plus que la santé, plus que la beauté … ‘

Prier, c’est bien, mais agir ensemble c’est mieux encore.

Cependant, comment faire pour bien faire ?

Les premiers chrétiens ont bien essayé de tout mettre en commun, mais ça a été plutôt un échec, comme nous pouvons le lire dans les ‘Actes des Apôtres’.

Et, tout au long des siècles, des saints ont relancé dans l’Eglise ce mouvement de partage, de justice et de solidarité.

Par exemple, saint François d’Assise, dont s’inspire notre Pape François qui vient d’écrire toute une Encyclique sur le respect de la Création et de l’environnement.

Face à tous ces appels, appel du Christ relayé par Saint François d’Assise, relayé par le Pape François, face à tous ces appels, sommes-nous vraiment assez ‘passionnés du Christ’, assez attachés à Lui pour mettre nos biens matériels en second ou plutôt pour nous engager à les partager avec les ‘abandonnés et les oubliés de cette terre’ ?

Mais quelques-uns d’entre vous diront peut-être : Ça, c’est bon pour les autres, par exemple les religieux et les religieuses : tout quitter, mettre leurs biens en commun. Ou bien, c’est bon pour les riches qui en ont trop. Ce n’est pas la vocation de tous les chrétiens.

Et pourtant, que nous soyons prêtres, religieux et religieuses, laïcs engagés ou simplement chrétiens, nous le savons par expérience : si nous voulons vraiment suivre Jésus Christ et vivre, en église, dans la fidélité à sa Parole et aux appels de nos frères, il nous faut, tous, opérer dans notre vie, bien des changements de mentalité et bien des conversions, même si nous avons beaucoup de peine à les réaliser, même si nous trouvons toutes les excuses possibles pour les remettre à plus tard.

Nous le savons aussi : ceux qui ont moins sont souvent plus généreux et plus accueillants que ceux qui en ont davantage.

Pour terminer, je dirai : portons-nous les uns les autres dans la prière, dans l’amitié, dans les conseils mais aussi dans la correction fraternelle, afin de nous aider à mieux suivre le Christ, et à discerner ensemble comment mieux répondre aux appels de nos Evêques et du Pape François. Et, de cette manière, nous rejoindrons tous les hommes et femmes de bonne volonté pour construire un monde plus respectueux de la Création et plus solidaire des ‘abandonnés et les oubliés de cette terre’.

Seigneur Jésus Christ, aujourd’hui encore, tu nous regardes

comme tu as regardé l’homme riche de l’Evangile. Merci.

Nous voulons mieux te suivre,

Nous voulons mieux répondre à tes appels et aux appels de nos frères.

Aide-nous à ne pas nous refermer sur notre confort

mais à oser la rencontre et le partage,

malgré tous nos questionnements, dans la puissance de ton Esprit-Saint.  Amen

 

28e dimanche du temps ordinaire

Lectures bibliques :

Sagesse  7, 7-11; Psaume 89; Hébreux 4, 12-13; Marc 10, 17-30

 

Homélie du 4 octobre 2015

Mes sœurs, mes frères,

 

Lors d’un cours de catéchisme, l’enseignant, essayant de parler de l’amour de Dieu aux enfants de son groupe, leur posa cette question : « Est-ce qu’on peut voir l’amour ? ». Un adulte aurait peut-être pu répondre : comment peut-on voir un mystère, ce n’est pas possible, déjà que ce n’est pas conceptualisable ? Mais un enfant ne se pose pas ce genre de question, car l’enfant est fils du royaume de Dieu, il sait donc ressentir les choses de Dieu ; pour preuve, voici la réponse d’un enfant de ce groupe de catéchisme : « Je vois l’amour quand maman et papa s’embrassent ». Il avait tout compris ! Mieux, il a compris qu’un mystère, ça ne s’explique pas, mais ça se vit. Et, si Dieu est amour, vivre l’amour, c’est vivre Dieu. Autrement dit : laisser place à l’amour dans nos vies, et par excellence dans le couple humain, c’est laisser Dieu exister sur cette terre qu’il a créée.

 

La Parole de Dieu de notre liturgie d’aujourd’hui, frères et sœurs, nous oriente tout naturellement vers une méditation du mystère de la vie, lequel s’incarne avec force dans celui de l’amour. L’amour est une réalité incréée, puisqu’il est Dieu et que Dieu est avant que quoi que ce soit ne fut. Donc, pour donner corps à l’amour, il a fallu que Dieu crée « le monde et tous ses habitants ». Ainsi nous l’a rappelé le Livre de la Genèse, Dieu modela tous les êtres vivants, et l’homme leur donna à chacun un nom ; le nom qui fait être, comme une preuve de l’existence de celui qui le porte. Mais parmi tous ces êtres l’homme n’en trouva aucun qui lui corresponde, c’est-à-dire aucun avec qui il puisse entrer en relation, aucun qui puisse, en quelque sorte, l’assurer de sa propre existence. N’était-ce pas là, à ce moment, le temps pour Dieu de faire l’expérience de la solitude à travers celle de l’homme ?

Alors, pour n’être plus seul, ni lui ni sa créature, Dieu façonna un être qui correspondait à l’homme, et celui-ci lui donna un nom : « Ishsha », femme. « Homme et femme il les créa ». Et Dieu ne fut plus seul, parce que l’homme n’était plus seul. Et c’est alors que le texte de la Genèse nous livre une phrase d’une extrême beauté, une sentence sublimant la loi naturelle et transcendant la pensée : « l’homme s’attachera à sa femme, et tous deux ne feront plus qu’un ».

 

Frères et sœurs, l’enfant du catéchisme de tout à l’heure ne connaissait assurément pas le livre biblique de la Genèse, il ne put donc donner la définition que l’enseignant attendait ; cependant il en donna l’image dans sa réalisation, en relatant cette forme extérieure visible que prend l’amour par le baiser échangé. « Tous deux ne feront plus qu’un » est en quelque sorte la définition de l’amour et, l’image que l’enfant en avait retenu, sa manifestation.

 

Dans son Évangile, saint Marc se réfère à ce passage de l’Ancien Testament pour répondre à la difficile question de la répudiation que lui posaient les pharisiens. Et ainsi Marc part d’un acte négatif, disant le contraire de la réalité – donc du mal face au bien –, pour aboutir à cette définition déjà entendue : « L’homme s’attachera à sa femme, et tous deux deviendront une seule chair ». Le Livre de la Genèse dit que : « tous deux ne feront plus qu’un », que l’on peut comprendre, si l’on se met sur un plan relationnel ; l’évangéliste Marc, lui, va plus loin quand il nous dit : « et tous deux deviendront une seule chair ». Nous sommes là, frères et sœurs, dans un régime d’incarnation. Et qu’est-ce qui prend corps dans l’union de l’homme et de la femme ? – l’amour, bien sûr.

Nous pouvons repenser à l’image de l’enfant du catéchisme. Cette union, qui demande de quitter père et mère, c’est-à-dire un attachement naturel et fondateur, pour s’attacher à quelqu’un qui corresponde, c’est-à-dire pour un attachement créateur, cette union permet l’incarnation de l’amour. C’est comme l’incarnation continuée du Fils de l’Amour, et Amour lui-même, une nuit du Temps, à Bethléem. L’amour rapproche deux personnes, une femme et un homme, ce qui manifeste dès lors entre eux deux une seule existence. Cela fait dire à notre cher pape François : « L’image de Dieu est le couple conjugal : l’homme et la femme ; pas seulement l’homme, pas seulement la femme, mais tous les deux ». Cette alliance ainsi expliquée n’est autre que l’alliance de Dieu avec les humains, avec son Église. Cette alliance est donc image de Dieu.

 

N’est-ce pas beau, frères et sœurs ! Nous sommes créées pour aimer, tous, pour vivre en relation avec des êtres qui nous correspondent et, par la même, donner, à travers l’amour partagé, une image de Dieu. Nous devenons dans cet amour reflets de Dieu et de son propre amour ; tous, qui que nous soyons, si nous savons aimer en vérité.

S’agissant de l’amour conjugal scellé par le lien sacré du sacrement de mariage, le pape François dit – comme j’aimais à le dire aux fiancés en préparation de mariage, mais il le dit tellement mieux que je préfère le citer ici – : « Dans l’union conjugale, l’homme et la femme réalisent cette vocation (celle d’être créés pour aimer) sous le signe de la réciprocité et de la communion de vie pleine et définitive. Lorsqu’un homme et une femme célèbrent le sacrement du mariage, Dieu, pour ainsi dire, se « reflète » en eux, il imprime en eux ses traits et le caractère indélébile de son amour. Le mariage est l’icône de l’amour de Dieu pour nous ».

 

Alors n’oublions pas que, si Dieu nous a créés par amour, tous, c’est pour que, tous, nous en vivions. L’amour est unique, certes, mais il peut se manifester de tant de manières dans la vie des hommes, des femmes et des enfants. L’homme est un être de relation, disions-nous, et c’est l’amour qui authentifie cette relation, qui donne à l’homme sa raison d’être, qui en fait une nécessité. Donc vivre cet amour d’amitié, c’est donner Dieu, présent, à la vie du monde.

 

Ainsi soit-il

 

Lectures bibliques : Genèse 2, 18-24; Psaume 127;  Hébreux 2, 9-11; Marc 10, 2-16